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  WSWS : Nouvelles et analyses : Australie

Australie : Les slogans électoraux provoquent une vague de dégoût

Par Nick Beams
24 juillet 2010

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Moins d'une semaine après le début de la campagne électorale fédérale australienne, le caractère creux et atrophié de tout le système de démocratie parlementaire bourgeoise est de plus en plus mis à nu.

Selon la théorie libérale, les élections sont le moyen par lequel « le peuple », ayant entendu et considéré les politiques des divers partis et de leurs chefs, peut décider du prochain gouvernement et de son programme. Cette mythologie de la « souveraineté populaire » a déjà dû encaisser un solide choc avec le coup politique du 23-24 juin qui a renversé le premier ministre élu Kevin Rudd, avant même qu'il ait effectué son premier mandat. Elle a été minée davantage par la campagne électorale elle-même.

L'événement le plus significatif des premiers jours de la campagne n'a pas été l'annonce, par les principaux partis, de leurs politiques et programme, et encore moins l'affrontement d'idées et d'arguments, mais bien la vague d'ennui, de dégoût et même, dans certains cas, de colère qu'a provoquée la série interminable de slogans creux débités par les chefs de partis.

Déclenchant la campagne électorale fédérale samedi dernier, la première ministre Julia Gillard a employé l'expression « aller de l'avant » au moins 39 fois dans une conférence de presse de 31 minutes.

Questionnée sur l'usage répété de cette formule lors d'une entrevue télévisée lundi, Gillard n'a pu répondre qu'en ayant recours à une autre série de clichés, affirmant qu'« aller de l'avant » exprimait son optimisme face à l'avenir et reflétait l'idée que les meilleurs jours de l'Australie étaient devant elle, et non derrière.

Cette hostilité populaire à la campagne est l'expression de processus plus fondamentaux et soulève des inquiétudes dans des sections des médias de la grande entreprise sur la stabilité du système bipartite lui-même. Dans un éditorial publié samedi dernier, avant le commencement officiel de la campagne, le Sydney Morning Herald avait surnommé Gillar la « femme creuse » (hollow woman). Un autre éditorial publié lundi, et intitulé « La femme creuse fait du bruit qui sonne creux » (The hollow woman beats a hollow drum), mettait en garde que les jeunes devenaient aliénés de tout l'establishment parlementaire.

« Des témoignages non confirmés provenant de campus et d’autres lieux fréquentés par les jeunes suggèrent que la jeunesse australienne rejette le Parti travailliste et la coalition pour se tourner du côté des Verts, quand elle ne les a pas rejetés eux aussi. Bien qu’ils constatent que les accords électoraux entre les Verts et les travaillistes signifient que cette opposition a été ramenée dans les cadres du système bipartite, les éditorialistes exprimaient clairement la crainte que les sentiments d’opposition puissent prendre une forme plus manifeste.

Ces thèmes ont également été exprimés dans un éditorial de l'Australian lundi, qui observait que « L’Australie se rend sans doute aux urnes avec plus d'amertume envers sa classe politique que jamais dans l’histoire récente » et qu'« il n'y a guère un centimètre qui sépare les partis sur plusieurs questions ».

Lors d’une entrevue avec le secrétaire au Trésor du gouvernement travailliste, Wayne Swan, le journaliste d'expérience Laurie Oakes a mis en contraste la présente campagne avec celle menée par le Parti travailliste sous Gough Withlam en 1972. Décrivant le slogan travailliste « Il est temps » comme « le meilleur de tous les temps », il a ajouté : « mais Gough Withlam ne s’assoyait pas là à chaque discours en disant « il est temps, il est temps, il est temps », il nous traitait en fait comme des êtres humains intelligents capables de comprendre des phrases et des politiques ».

La campagne électorale actuelle est caractérisée par ce qu’un commentateur à décrit avec justesse comme des techniques « d’entraînement canins ».

La source de la différence se trouve au niveau des conditions objectives. En 1972, à la toute fin du boom économique de l’après-guerre, Withlam et le Parti travailliste ont avancé un programme de réformes sociales. Toutes ces mesures ne remettaient aucunement en question le système de profit (ce n'était d'ailleurs pas leur rôle), mais elles représentaient certaines, quoique limitées, avancées pour les larges masses de la classe ouvrière.

Comme la crise économique mondiale de 1974-75 s’installait et que le boom d’après-guerre prenait fin abruptement, le gouvernement Withlam, après n'avoir pu arrêter la poussée sans précédent de la classe ouvrière qui a suivi l’évincement du gouvernement libéral en 1972, a lui-même été évincé en 1975 dans un coup soutenu par la CIA et mené par le gouverneur général. Le paysage économique et politique a ensuite subi une série de profonds changements.

Loin de poursuivre un programme de réformes, le gouvernement travailliste Hawke-Keating, qui est arrivé au pouvoir en 1983, a commencé un programme de « restructuration économique » et d’attaques sur les conditions sociales de la classe ouvrière en accord avec les politiques initiées internationalement par le président Reagan aux États-Unis et la première ministre conservatrice Thatcher en Grande-Bretagne. Aucun parti n’a défendu un programme réformiste depuis.

En fait, au cours des trente dernières années, le concept même de « réforme » a connu une transformation à la Orwell. Auparavant, par réforme on entendait une mesure qui augmentait le niveau de vie de la population dans son ensemble. Par exemple, un système de santé universel et la gratuité de l’université ont été deux politiques clés mises en place par Whitlam. Aujourd’hui, comme le slogan « la guerre, c’est la paix » du roman 1984 d’Orwell, la réforme économique, c’est la subordination toujours plus grande de la vie sociale aux dictats du marché capitaliste, ce qui résulte en la mise au rancart des avancées sociales, en la privatisation et la mise en place du principe de « l’utilisateur-payeur » pour ce qui était il y a peu des services sociaux garantis.

Les « réformes » de type marché libre continuellement mises en place depuis vingt-cinq ans ont créé une myriade de problèmes sociaux et économiques. La réponse des travaillistes et de la coalition libérale-nationale à ceux-ci a été de deux ordres : tenter de canaliser la colère sociale en une hostilité contre les immigrants et les réfugiés au nom de la « protection de la frontière » et, au même moment, réduire le niveau de la campagne à des platitudes sans contenu.

Il y a un objectif politique à une telle campagne. Dans le contexte de l’approfondissement de la crise mondiale du système capitaliste, les marchés et les institutions financières demandant des mesures d’austérité encore plus brutales, ni l’un ou l’autre des principaux partis ne peut discuter de son véritable programme économique et politique. Quant aux Verts, ils ont promis la « stabilité » du prochain gouvernement, qu’il soit formé par les travaillistes ou les partis de la coalition.

Toutefois, le fait que la campagne ait suscité une telle révulsion dans la population est un indicateur que d’autres processus politiques, tout aussi importants, sont à l’oeuvre. Les slogans creux et la détermination à garder le cap sur « le message » ne sont pas des inventions de Gillard, c’était, après tout, la caractéristique fondamentale de la campagne du Parti travailliste de Kevin Rudd en 2007. Mais à cette époque, tout cela a été masqué par le mouvement pour chasser le gouvernement Howard du pouvoir.

Au cours des trois années depuis cette élection, la conscience populaire a subi une série de chocs. Malgré les efforts pour faire la promotion de la doctrine de l’exceptionnalisme australien, la crise capitaliste mondiale a commencé à révéler à des millions de personnes que leur emploi, leur niveau de vie, leurs droits démocratiques et l’avenir de leurs enfants étaient tous menacés par des forces sur lesquelles elles n’ont aucun contrôle. Elles comprennent qu’on ne trouvera pas de solution à ces problèmes en répétant sans fin des slogans creux.

Les solutions qu’elles cherchent ne se trouvent pas au sein de l’establishment politique officiel en faillite, mais seulement dans l’analyse générale du Comité international de la Quatrième Internationale et le programme de l’internationalisme socialiste avancé par le Parti de l’égalité socialiste dans la campagne électorale australienne.

(article original paru le 21 juillet 2010)

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