Mardi, le président Barack Obama a louangé le premier ministre israélien
Benjamin Netanyahou pour être un homme qui « veut la paix » et qui
est « prêt à prendre des risques pour la paix ».
Obama a fait ces commentaires suite à une rencontre à la Maison-Blanche,
cinq semaines après l'attaque du 31 mai contre le Mavi Marmara, un navire
amenant de l’aide humanitaire à Gaza, lors de laquelle les forces
israéliennes avaient tué huit activistes turcs et une autre personne à la
double citoyenneté turque et américaine. La rencontre à la Maison-Blanche a eu
lieu à la veille de l'établissement d'une nouvelle série de colonies
israéliennes en Cisjordanie.
Le jour de la réunion, un rapport d'un organisme des droits de l'homme
B'Tselem soutenait que les colonies juives contrôlent plus de 42 pour cent de
toutes les terres en Cisjordanie, y compris 21 pour cent des toutes les terres
palestiniennes privées, avec 300.000 colons.
En mars, Obama avait fait savoir qu'il refusait de faire une conférence de
presse avec Netanyahou après l'annonce d'Israël de la construction de 1600
résidences juives supplémentaires pendant que le vice-président Joseph Biden
visitait Jérusalem. Un « arrêt partiel » de la construction arrivera
à terme en septembre et Israël a clairement démontré son intérêt à construire
davantage.
Netanyahou a aussi refusé de présenter ses excuses à la Turquie pour
l'attaque du Mavi Marmara et s'est opposé à toute enquête internationale. Avec
l'appui de Washington, Israël mène sa propre enquête, qui est dirigée par un
juge à la retraite de la Cour suprême israélienne. La commission d'enquête
israélienne n'a même pas l'importance d'une commission d'enquête nationale.
Malgré des tensions qui ont temporairement refroidi les relations
israélo-américaines, Obama a une fois de plus démontré clairement la continuité
avec l'administration républicaine de Bush dans la politique au Moyen-Orient et
a souligné le caractère bipartisan du soutien des Etats-Unis pour Israël. Obama
a décrit la relation entre les Etats-Unis et Israël comme étant
« inaltérable » et permanente. « Elle englobe nos intérêts
stratégiques et de sécurité nationale », a-t-il dit, et elle « devient
de plus en plus étroite avec le temps ».
Obama s'est donné beaucoup de mal à tenter de réhabiliter Netanyahou et
Israël face à la colère populaire internationale devant le blocus de la bande
de Gaza et les souffrances que cela inflige aux Palestiniens. Il n'a fait
aucune mention de la construction de colonies juives à Jérusalem-Est et n'a pas
demandé de prolongation à l'« arrêt partiel » des constructions.
Il a plutôt acclamé la levée partielle du blocus de Gaza, pour permettre
l'arrivée d'une quantité limitée de biens de consommation dans la foulée de
l'attaque du Mavi Marmara, présentant ce geste comme un exemple « de la
retenue démontrée par Israël dans les derniers mois qui, d'après moi, est
propice à la reprise de pourparlers directs entre nous ».
Obama a réfuté les questions de la presse au sujet de la rebuffade que
Netanyahou aurait précédemment essuyée de sa part. « La prémisse de votre
question était fausse, et je suis totalement en désaccord avec elle »,
aurait affirmé Obama, selon Haaretz. « Si vous regardez chaque
déclaration publique que j'ai faite depuis un an et demi, elles étaient toutes
la réaffirmation continuelle de la relation spéciale existant entre les
Etats-Unis et Israël ; que notre engagement envers la sécurité d'Israël
est inébranlable. Il n'y a en fait aucune politique concrète que vous pourriez
mentionner qui viendrait le contredire. »
Il a ajouté, « j’ai eu
confiance au premier ministre Netanyahou dès que je l’ai rencontré, avant
que je sois élu président. Il fait face à une situation très complexe dans un
voisinage très dur. »
La presse israélienne a souligné,
en particulier, qu’Obama défendait la dissuasion nucléaire par Israël.
Obama a rejeté que l’on désigne le programme nucléaire non-déclaré d’Israël
comme une menace à la conférence nucléaire régionale du Moyen-Orient qui aura
lieu en 2012.
Une déclaration de la Maison-Blanche
explique : « Le président a souligné que la conférence n’aura
lieu que si tous les pays se sentent confiants qu’ils peuvent y assister,
et que tout effort pour montrer Israël du doigt rendra la perspective de
convoquer une telle conférence peu probable. »
Ayant fait un extraordinaire
lapsus, Obama a déclaré aux journalistes, « Nous croyons fortement
qu’étant donné sa taille, son histoire, la région dans laquelle il se
trouve, et les menaces que nous confrontons — qu’il confronte, Israël
a des besoins de sécurité uniques particuliers. Il a besoin d’être en
mesure de répondre aux menaces ou n’importe quelle combinaison de menaces
dans la région. Et c’est pour cela que nous restons inébranlables dans
notre engagement envers la sécurité d’Israël. » (Nous soulignons)
YNet a rapporté que « des
responsables israéliens ont dit qu’aucun autre président n’avait
jamais fait une déclaration aussi claire par rapport à l’ambiguïté
nucléaire d’Israël », alors que la correspondante de Haaretz,
Natasha Mozgovaya a appelé cette déclaration « du vrai bonbon » pour
Israël.
Le vibrant hommage d’Obama
à Netanyahou et l’amélioration des rapports avec Israël sont motivés,
dans un premier temps, par son désir d’assurer la collaboration
israélienne contre l’Iran, chacun des dirigeants ayant mentionné
qu’ils ont discuté des efforts pour négocier avec l’Iran quant à
ses intentions nucléaires suite à l’imposition de sanctions additionnelles
par le Conseil de sécurité des Nations unies.
Quelques heures à peine avant la
rencontre entre Obama et Natanyahou, durant une visite en Finlande, le ministre
des Affaires étrangères israélien Avigdor Lieberman a averti que « si les
Iraniens obtiennent l’arme nucléaire, nous verrons une course folle à
l’armement nucléaire dans tout le Moyen-Orient, avec des conséquences
auxquelles je ne veux même penser ». C’est, dit-il, « la plus
grande menace pour les pays du Golfe, c’est la plus grande menace pour le
Moyen-Orient ».
Obama peut soutenir Israël si
ouvertement seulement parce qu’il a l’appui des régimes arabes,
tout comme celui de la Turquie. Les États-Unis ont été inquiets que les actions
provocatrices d’Israël et le traitement des Palestiniens puissent rendre
impossible la collaboration des États arabes avec son plan visant à assurer sa
domination du Moyen-Orient. Mais les gouvernements bourgeois arabes ont
démontré une volonté remarquable à collaborer.
Le président palestinien Mahmoud
Abbas offre des concessions sans précédent à Tel Aviv afin d’assurer la continuité
de l’appui financier de Washington pour son régime fantoche. Le journal
de langue arabe basé à Londres Al Ahram a indiqué qu’Abbas a soumis des
propositions écrites à l’envoyé spécial américain George Mitchell par
rapport aux problèmes de fond, y compris les frontières d’un État
palestinien et Jérusalem. Le rapport indique que le Fatah d’Abbas
examinera un échange de terres qui permettrait à Israël de conserver les
principales colonies juives en retour d’un contrôle palestinien de
Jérusalem Est, à l’exception du quartier juif de la Vieille Ville et du Mur
des Lamentations.
Si cette offre devait
être rejetée, comme elle le sera inévitablement, la seule alternative serait de
demander aux pays de la Ligue arabe d’endosser de nouveau
l’initiative de paix arabe de 2002 et de supplier le Conseil de sécurité
de l’ONU de reconnaître un État palestinien basé sur les frontières
d’avant 1967.
Derrière le paravent de leurs déclarations vides de soutien à la cause
palestinienne, les États de la Ligue arabe travaillent encore plus étroitement
avec Washington et Tel-Aviv. Le jour avant la rencontre entre Obama et
Netanyahou, l’administration américaine a approuvé la vente de 500
millions de livres en matériel militaire à trois États de la Ligue arabe :
l’Égypte, Oman et la Tunisie. Cette entente comprenait un rehausement de
systèmes de défense aérien, l’entretien d’avions et de navires
militaires ainsi que des hélicoptères. Washington considère également une
requête de l’Arabie saoudite pour des 75 avions F-15 et la modernisation
d’autres avions qu’elle possède déjà pour une valeur de 10
milliards. Washington aurait déjà prétendument répondu favorablement à cette
requête lors de la visite du roi saoudien Abdullah le mois dernier.
L’an dernier, les Etats-Unis ont approuvé pour près de 13 milliards en
vente d’armement à des États arabes. De tels arrangements militaires et
commerciaux, auxquels il faut ajouter le désir commun de restreindre le pouvoir
de l’Iran dans la région, sont le facteur déterminant l’attitude de
la Ligue arabe envers Israël et les Palestiniens.
Le conseiller adjoint à la sécurité nationale, Ben Rhodes, a insisté que de
telles ententes ne contreviennent pas à l’accroissement de la coopération
militaire et sécuritaire avec Israël et au maintien de « sa supériorité
militaire… au moyen de programmes comme le « dôme de fer » [un
programme de défense anti-missiles] et de contacts très étroits avec nos
équipes de sécurité nationale ».
« Nous croyons qu’il y a plusieurs cas où la menace iranienne
nous oblige à renforcer la capacité des États de la région à se défendre
eux-mêmes », a-t-il ajouté.
Les Etats-Unis ont aussi accepté de vendre près de 10 milliards de dollars
en armement à la Turquie.
Le président de la Syrie, Bashar al-Assad, a lancé un appel à la Turquie
pour qu’elle fasse preuve de retenue sur la question du Mavi Marmara. Il
a donné l’avertissement lors d’une visite officielle en Espagne
lundi le 5 juillet que « Si la relation entre la Turquie et Israël ne se
renouvelle pas, alors il sera très difficile pour la Turquie d’avoir un
rôle à jouer dans les négociations » sur le processus de paix au
Moyen-Orient, qui « affectera la stabilité de la région ».
Ankara a été forcée devant la colère populaire de protester contre son allié
traditionnel, Israël, après que plusieurs citoyens turcs aient été tués lors du
raid sur le Mavi Marmara, y compris le gel d’au moins 16 ententes de
vente d’armes d’une valeur totale de 56 millions de dollars, le
rappel de son ambassadeur et l’interdiction du survol de la Turquie aux
avions militaires israéliens.
Il a été rapporté que le weekend dernier, le ministre des Affaires
étrangères, Ahmet Davutoglu, a déclaré devant un petit groupe de journalistes
voyageant avec lui au Kyrgyzstan que la Turquie couperait ses liens avec Israël
si ce dernier ne s’excusait pas pour l’assaut sur le Mavi Marmara.
Mais le milieu officiel turc a rapidement renier cette déclaration, de hauts
responsables turcs déclarant à Reuters que le ministre avait simplement indiqué
que les relations ne s’amélioreraient pas tant que les demandes
d’Ankara ne seraient pas satisfaites.
Le commerce entre la Turquie et Israël ont atteint un sommet de 3,3
milliards en 2008. En 2002, lors de l’arrivée au pouvoir du Parti pour la
justice et le développement, les échanges commerciaux entre les deux pays
valaient 1,4 milliard. L’an dernier, malgré la récession, les échanges
entre les deux pays avaient atteint 2,5 milliards de dollars.
De hauts responsables israéliens ont déclaré au Jerusalem Post
qu’ils ne croyaient pas très probable qu’Ankara coupe ses liens
avec Israël parce que « Les Etats-Unis ne croient pas que cela est dans
l’intérêt de la stabilité au Moyen-Orient. »
« Si allaient de l’avant dans cette direction, ils connaîtraient
la colère des Etats-Unis », ont dit les hauts responsables. De plus,
l’Union européenne s’opposerait à un tel geste qui
« enterrerait » les chances de la Turquie de rejoindre l’Union
européenne.