wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

La classe ouvrière chinoise émerge

Par John Chan
12 juin 2010

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

L’émergence des luttes des travailleurs en Chine au cours de ces quelques dernières semaines a une signification énorme pour la classe ouvrière internationale. Suite aux événements survenus en Grèce, les premiers accès de colère et de révolte de la classe ouvrière en Chine  émettent des ondes des choc parmi les élites dirigeantes du monde et infligent un démenti cinglant à tous ceux qui avaient fait une croix sur le prolétariat en tant que force sociale révolutionnaire en déclarant que la lutte de classe était dépassée.

La presse internationale a suivi avec une grave préoccupation la grève des travailleurs à l’usine de pièces détachées de Honda en Chine du Sud et qui a paralysé la production de l’entreprise pendant près de deux semaines. Les travailleurs, surtout jeunes, ont défié l’intimidation du gouvernement, les syndicats contrôlés par l’Etat et la direction et n'ont repris le travail cette semaine qu’après avoir obtenu une augmentation de salaire substantielle.

Les groupes importants tels Honda sont à présent fortement tributaires des superprofits extraits de la main-d’œuvre bon marché et enrégimentée en Chine. Le fait que le capital international dépende de la Chine a été amplifié par la crise financière mondiale qui a éclaté en 2007-08. Toute résurgence de la classe ouvrière en Chine, forte de plusieurs centaines de millions, menace directement non seulement les profits des grands groupes, mais émettrait des ondes de choc à travers le système économique et financier mondial.

L’ampleur énorme de la production en Chine a été soulignée par la concentration des médias sur la vague de suicides dans l’usine Foxconn qui fabrique des produits électroniques pour des multinationales telles Dell et Apple. L’usine où travaillent 400.000 personnes constitue une ville en soi – énorme, aliénante et gérée comme un camp militaire. Un commentaire publié par un forum en ligne chinois dit : « Quand je regarde Foxconn, cela me rappelle le film de Charlie Chaplin Les Temps modernes. On y voit un monde dans lequel les êtres humains sont réduits à n'être rien de plus que des engrenages dans une énorme machine. »

L’atelier de misère Foxconn donne une image concrète du développement explosif de la classe ouvrière chinoise qui est passée de 120 à plus de 400 millions au cours de ces trois dernières décennies. Shenzen, où se trouve Foxconn, était au début des années 1980 un village de pêcheurs et est à présent un centre industriel de 12 millions de personnes. Tandis que Foxconn est l’une des plus grandes usines du pays, il y en a d’autres de taille identique et d’innombrable autres plus petites. En Chine orientale, des villes entières ont été reconverties pour ne produire qu’un seul article en créant des villes « chaussettes », des villes « fermetures éclair » et des villes « ventilateurs » en impliquant des millions de travailleurs.

Instinctivement, les travailleurs ressentent la nécessité d’une unité de classe internationale. La main-d’œuvre jeune dans des usines comme Honda a grandi avec internet et le téléphone portable. Ils sont tout à fait conscients que leur faible salaire est la source des profits directs des multinationales. Quand les grévistes ont chanté l’Internationale, c’était la reconnaissance qu’ils étaient dans la même situation que les travailleurs du monde entier, confrontés à des problèmes identiques et à des ennemis communs du patronat.

La détermination et le courage des jeunes travailleurs chez Honda sont indiscutables mais ne résoudront pas spontanément les questions politiques complexes auxquels ils sont confrontés. Même si le régime du Parti communiste chinois (CCP) faisait provisoirement quelques concessions, il est organiquement hostile à la classe ouvrière et repose sur un appareil d’Etat policier qu’il n’a jamais hésité à utiliser. Les premières actions entreprises par le CCP à son arrivée au pouvoir en 1949 à la tête d’une armée de paysans furent de réprimer les travailleurs dans les grands centres.

La journée d’hier a marqué le 21ème anniversaire du massacre de la Place Tiananmen en 1989 lorsque des chars et des soldats furent envoyés pour écraser des travailleurs et des étudiants à Beijing et dans d’autres villes où ils réclamaient des droits démocratiques et un niveau de vie décent. En dépit de toutes leurs larmes de crocodile, les gouvernements et les grands groupes de par le monde avaient parfaitement bien compris que Beijing était prêt à tout pour empêcher une rébellion des travailleurs. Des milliards de dollars en investissements étrangers affluèrent dans le pays.

Le régime du CCP est extrêmement sensible à la bombe à retardement sur laquelle il repose. Après avoir abandonné son verbiage socialiste d’antan, il a promu, tout comme ses homologues des autres pays, un nationalisme à tout crin pour se créer une base parmi les couches de la classe moyenne et pour diviser les travailleurs. En revenant sur le passé de la Chine en tant que pays semi-colonial opprimé, le CCP affirme que la Chine devrait aujourd’hui occuper une place parmi les grandes puissances capitalistes du monde. Il a délibérément nourri et encouragé le racisme anti-japonais notamment.

La classe ouvrière ne peut aller de l’avant qu’en rejetant toutes les formes de nationalisme et de racisme et en unifiant ses luttes internationalement. Les grévistes chez Honda en Chine sont confrontés à des conditions qui ne sont pas différentes de celles de millions de jeunes « freeter » (intérimaires) au Japon et qui composent la majeure partie de cette main-d’œuvre fortement précarisée du pays. Avec le déclenchement de la crise financière mondiale, ils ont été licenciés par milliers des usines automobile et d’électronique du Japon suite à la chute des exportations.

Ce n’est pas seulement au CCP que les travailleurs chinois sont confrontés. Le plus grand danger politique vient de ceux qui prétendent soutenir les travailleurs et s'opposer au régime de Beijing mais qui cherchent à contrecarrer tout mouvement politique de la classe ouvrière, qui soit indépendant. A cet égard, les commentaires de Han Dongfang, le dirigeant en exil de la Fédération autonome des Travailleurs de Beijing, sont significatifs et ont été tout particulièrement relevés dans le Financial Times.

Han avait joué un rôle de premier plan lors des protestations de la place Tiananmen en 1989 et avait eu une grande influence au sein de couches de travailleurs qui avaient rejoint les étudiants pour exiger un niveau de vie décent et des droits démocratiques. La perspective de Han ne fut jamais de renverser le capitalisme et le régime chinois mais de les réformer. Après la dernière grève, il a insisté dans les médias pour dire que les droits sociaux et les droits politiques devaient être séparés. « Je fais de mon mieux pour dépolitiser le mouvement des travailleurs en Chine, » a-t-il dit.

Dépolitiser la classe ouvrière signifie la désarmer politiquement. Dans la presse américaine notamment, des comparaisons ont été faites entre la grève chez Honda en Chine et les grèves sur le tas des travailleurs américains de l’automobile dans années 1930. Ce mouvement de la classe ouvrière américaine avait clairement illustré les conséquences qu’il peut y avoir en séparant la défense des droits sociaux d’une lutte politique. La bureaucratie syndicale de l’AFL-CIO qui dans les années 1950 avait exclu les socialistes et subordonné les travailleurs au Parti démocrate, opère aujourd’hui comme l’agent direct des grands groupes en imposant leurs dictats aux travailleurs.

La tâche à laquelle sont confrontés les travailleurs en Chine ainsi que d’autres pays, est d’assimiler les leçons politiques essentielles des expériences stratégiques clé faites par la classe ouvrière internationale durant le siècle dernier. Ceci signifie notamment l’étude attentive de la lutte continuelle du mouvement trotskyste international pour le marxisme authentique contre ses ennemis de toujours – le stalinisme et le maoïsme. Ceci est le premier pas vers la construction d’une section chinoise du Comité international de la Quatrième Internationale comme la direction révolutionnaire indispensable au mouvement émergent de la classe ouvrière.

(Article original paru le 5 juin 2010)

 

A lire aussi :

 

Soixante ans après la révolution chinoise : les leçons pour la classe ouvrière [7 octobre 2009]

 

Dix ans après le massacre sur la Place Tiananmen
Les leçons politiques pour la classe ouvrière
[4 juin 1999]

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés