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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Le rapport sur la faillite de Lehman Brothers révèle la criminalité de Wall Street

Par Barry Grey
20 mars 2010

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Un rapport publié le 11 mars par un expert judiciaire chargé d’analyser la faillite de la banque a conclu que durant les mois qui ont précédé son effondrement, en septembre 2008, la banque d’investissement Lehman Brothers de Wall Street avait publié des communiqués financiers qui étaient « matériellement trompeurs » et que ses directeurs s’étaient livrés à « la manipulation comptable des bilans. »

Le document de 2.200 pages donne les détails de la fraude comptable massive, comprenant des transactions secrètes permettant à la banque de falsifier le montant de sa dette et de dissimuler l’ampleur de ses pertes découlant de ses actifs toxiques liés aux prêts hypothécaires.

L’effondrement de Lehman, le 15 septembre 2008, a déclenché un crash mondial des marchés du crédit qui fut utilisé par le gouvernement américain et les gouvernements du monde entier pour justifier le déblocage de milliers de milliards de dollars de fonds publics pour renflouer le système bancaire. La crise financière a provoqué la récession la plus profonde depuis les années 1930 en éliminant des millions d’emplois. A présent, les gouvernements sont en train d’imposer des mesures d’austérité brutales pour faire payer à la classe ouvrière la défaillance des trésors publics au profit des banquiers et des spéculateurs.

Le rapport sur Lehman montre que les emplois des travailleurs, leurs maisons, leurs salaires et leurs économies ainsi que l’accès aux soins de santé, à l’éducation et même aux services les plus élémentaires tels l’électricité et le chauffage sont sacrifiés pour payer la criminalité de l’élite financière qui s’est enrichie davantage encore suite à la catastrophe qu’elle a elle-même fabriquée.

Après la publication du rapport, d’importantes sociétés de Wall Street telles Goldman Sachs et JPMorgan Chase ont exprimé leur choc face aux révélations concernant Lehman en déclarant n’avoir jamais recouru aux artifices comptables employés par leur ancien concurrent. Le film Casablanca revient tout de suite en mémoire dans lequel le capitaine Renault se montrait choqué en découvrant que les jeux d’argent étaient pratiqués dans le casino de Rick.

Toutes les principales banques ont recouru à des schémas compliqués tels « des véhicules d’investissement structurés, » pour rayer leurs pertes de leurs bilans et faire des milliards en reficelant ce qu’ils savaient être des prêts hypothécaires douteux (subprime) et les vendre comme des « collateralized debt obligations » (CDO) [obligations gagées sur dettes]. Les pratiques de Lehman n’ont été révélées que parce que la banque était la plus faible des grandes sociétés de Wall Street et fut poussée à la faillite en grande partie parce que ses plus grands rivaux, sentant l’odeur du sang, ont réagi de façon agressive en faisant craquer leur rival en difficulté.

Selon le rapport du chargé d’analyse, Lehman s’était spécialisé dans la surévaluation de ses actifs immobiliers et la manipulation de ses livres de comptes dans le but de fournir des rapports financiers trimestriels qui dissimulaient son niveau d’endettement réel. Comme l’expliquait l’auteur du rapport, Anton R. Valukas du cabinet juridique Jenner & Block : « A l’insu du public investisseur, des agences de notation, des régulateurs du gouvernement et du directoire de Lehman, pour embellir ses comptes Lehman, a faussé le ratio d’endettement (leverage ratio) de la société dans un but destiné uniquement à tromper le public. »   

La principale manipulation comptable de la banque était connue au sein de l’entreprise sous le nom de « Repo 105 ». Les repo, en abrégé des accords de rachat, sont une pratique courante à Wall Street. Pour obtenir des liquidités à court termes pour des opérations de financement, la banque emprunte auprès d’une autre banque, qui perçoit en contrepartie un certain nombre de ses actifs comme garanties avec mention de les lui racheter quelques jours plus tard.

Pour des raisons de comptabilité, de telles transactions étaient enregistrées comme des transactions financières traditionnelles et non des ventes, et les actifs qui sont transférés, souvent d’un jour à l’autre, restaient sur le bilan de la banque qui empruntait. Lehman, évaluait cependant ses actifs repo à 105 pour cent ou plus des liquidités que l’entreprise recevait et enregistrait sur cette base ses « repo 105 » comme ventes – et retirant les dettes pourries de ses bilans juste le temps qu’il faut pour maquiller ses rapports financiers trimestriels.

Selon l’expert chargé de l’analyse, Lehman a de cette façon rayé 39 milliards de dollars de son bilan à la fin du dernier trimestre de 2007, 49 milliards de dollars au premier trimestre de 2008 et 50 milliards de dollars au second trimestre.

La fraude comptable était tellement nauséabonde que Lehman n'a pas pu trouver un cabinet d’audit prêt à certifier sa légalité. Finalement, la société a gardé une firme britannique qui a approuvé la manœuvre comme étant légitime en vertu de la loi britannique. Lehman a dû conduire ses opérations « Repo 105 » par le biais de sa filiale londonienne et transférer des fonds des Etats-Unis vers l’Europe afin d’effectuer les transactions.

Valukas affirme que le directeur général de Lehman, Richard S. Fuld Jr. et trois directeurs financiers étaient au courant et approuvaient les transactions louches et le cabinet d’audit de la banque, la société Ernst &Young, avait fourni une couverture aux cadres supérieurs. L’expert conclut que les quatre directeurs ont manqué à leur devoir envers les actionnaires de Lehman et le directoire en ajoutant qu’il y a « suffisamment de preuves » pour intenter une action en justice pour « négligence grave. »

Le rapport de l’expert donne de plus amples détails sur le rôle joué par la Federal Reserve Bank de NewYork (Fed) en permettant à Lehman de troquer des titres sans valeur contre des fonds publics à partir de mars 2008, lorsque la banque Bear Stearns s’est effondrée pour être rachetée par JPMorgan Chase dans une affaire subventionnée par la Fed, jusqu’au mois de septembre de la même année lorsque Lehman fut placé sous la protection de la loi américaine sur les faillites. Le président de l’époque de la Fed de New York était Timothy Geithner. Obama a récompensé Geithner pour ses services en tant que principal intermédiaire de Wall Street en en faisant son secrétaire au Trésor.

Ni Fuld, dont la compensation atteignait 22 millions de dollars en 2007, ni aucun autre directeur de Lehman n’a été poursuivi en justice pour ses crimes. Et aucun cadre dirigeant de Wall Street non plus.

En réaction à la plus grande catastrophe sociale depuis la Grande Dépression, le gouvernement Obama et le Congrès, mené par les démocrates, a rejeté toute réforme sérieuse du système financier. Ils n’ont tenu personne pour responsable d’avoir plongé les Etats-Unis et le monde entier dans un désastre économique. Au lieu de cela, ils ont consacré leurs efforts à couvrir les créances douteuses des oligarques financiers en leur permettant d’étendre leur escroquerie et d’accroître leur fortune.

L’histoire de Lehman n’est pas une anomalie. La corruption, la fraude, la criminalité ne sont pas simplement le résultat de quelques « brebis galeuses » ou simplement l’expression de la dépravation subjectivement définie de certains cadres dirigeants. La complicité de toutes les institutions officielles – la Maison Blanche, le Congrès, les agences de régulation, les médias – témoigne du caractère systémique du gangstérisme financier.

La criminalité de Wall Street est ancrée dans la crise et les contradictions du système capitaliste. Le parasitisme financier à un niveau sans précédent avec tous ses corolaires – accroissement des inégalités sociales, guerre impérialiste et politique réactionnaire – est une expression de la putréfaction du système de profit, avant tout en son centre, les Etats-Unis.

La classe ouvrière doit tirer les conclusions appropriées. Les directeurs financiers dont les pratiques frauduleuses ont joué un rôle en précipitant le désastre économique doivent être poursuivis en justice. Leur richesse mal acquise doit être expropriée pour servir à procurer un soulagement aux chômeurs en garantissant les nécessités sociales de base. Le système bancaire doit être nationalisé et géré comme un service public sous le contrôle démocratique de la population laborieuse.

Il ne s’agit pas de réformer le système mais de construire un mouvement socialiste international afin de le reléguer aux poubelles de l’histoire où il a sa place.

(Article original paru le 15 mars 2010)

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