Le
sénateur républicain en vue Lindsey Graham a annoncé après les élections de
mi-mandat l’intensification des menaces américaines contre l’Iran
en appelant publiquement à une guerre totale qui « neutraliserait »
Téhéran, laissant le pays dans l’incapacité de résister.
Graham
a fait cette déclaration samedi lors d’une conférence sur la sécurité
internationale à Halifax, Canada. « L'endiguement n’est plus à
l’ordre du jour, » a-t-il déclaré par rapport au programme nucléaire
de l’Iran.
Washington
et ses alliés ont accusé Téhéran de développer son programme nucléaire dans le
but de construire une arme. Le gouvernement iranien a nié de façon constante
cette accusation en insistant pour dire que son programme est uniquement
d’usage pacifique et civil.
En
employant ce genre de rhétorique de guerre totale qui était le discours dans
les années 1930 en Allemagne le sénateur républicain de Caroline du Sud a juré
qu’une attaque serait effectuée « non seulement pour neutraliser son
programme nucléaire mais pour couler sa marine, détruire son armée de
l’air et porter un coup décisif à la garde révolutionnaire. En d’autres termes,
neutraliser ce régime. Détruire sa capacité à riposter. »
Graham
a ajouté que si en dépit de la défaite des Démocrates lors des élections de la
semaine passée, le président Barack Obama « décide d’être dur avec
l’Iran au-delà des sanctions, je pense qu’il va sentir beaucoup de
soutien de la part des Républicains car nous ne pouvons pas laisser
l’Iran développer une arme nucléaire. »
Le
sénateur Mark Udall (Démocrate du Colorado), qui s’était joint à Graham
en intervenant devant un forum lors de la conférence à Halifax, a préconisé le
maintien des sanctions contre le régime en ajoutant toutefois que « toutes
les options étaient sur la table, » un euphémisme faisant référence à une
agression armée des Etats-Unis.
En
prenant la parole lors de la même conférence, le ministre israélien de la
Défense, Ehoud Barak, a décrit l’Iran comme « une menace majeure
pour toute conception d’ordre mondial. » Il a reproché à Téhéran
d’être « déterminé à atteindre une capacité nucléaire
militaire, » qui a-t-il dit « serait la fin de tout régime de
non-prolifération concevable. »
Israël,
qui a défié les efforts de non-prolifération de l’ONU et qui est la seule
puissance à détenir l’arme nucléaire dans la région, a à plusieurs
reprises menacé l’Iran d’attaques militaires. Le mois dernier, le
ministre israélien des Finance, Yuval Steinitz, a prôné un blocus maritime –
ce qui est un acte de guerre – si Téhéran ne se pliait pas aux exigences
de Washington.
Ces
dernières menaces sont exprimées une semaine à peine avant la prochaine série
de négociations entre l’Iran et le P5+1 qui comprend les membres
permanents du Conseil de sécurité des Nations unies – la Grande-Bretagne,
la France, la Russie et les Etats-Unis – plus l’Allemagne. Les
pourparlers devraient avoir lieu à Vienne.
Le
triomphe des Républicains aux élections de mi-mandat infléchira encore
davantage à droite la politique étrangère américaine en intensifiant la menace
de guerre contre l’Iran. Ileana Ros-Lehtinen (Républicaine de Floride)
présidera en janvier le Comité des Affaires étrangères du Parlement. Elle
rejette une diplomatie avec l’Iran en préconisant le type d’embargo
économique qu’elle a soutenu de façon véhémente contre Cuba.
Ros-Lehtinen
est également une fervente partisane des Moudjahidine-e-Khalq (MEK) qui ont
affirmé avoir perpétré des attaques terroristes en Iran et qui ont été désignés
par le Département d’Etat américain comme « organisation terroriste
étrangère. »
Près
d’un tiers des Républicains de la Chambre des Représentants a soutenu en
juillet dernier la résolution accordant un soutien explicite à Israël pour
qu'il procède à des frappes militaires contre l’Iran.
Le
gouvernement Obama et les démocrates du congrès ont déjà durci les menaces
contre l’Iran. Après avoir fait passer de force une nouvelle série de
sanctions anti iraniennes au Conseil de sécurité des Nations unies, le
gouvernement a promulgué en juillet dernier une loi prévoyant une nouvelle
série de sanctions unilatérales américaines visant à paralyser l’économie
iranienne en accroissant la misère de la population dans le pays de façon à
déstabiliser le gouvernement.
Ces
sanctions pénalisent les banques et les entreprises étrangères qui investissent
ou qui négocient avec l’Iran en restreignant leur accès aux marchés
américains et en leur supprimant la possibilité d’accéder aux contrats du
gouvernement américain. Ces sanctions ciblent tout particulièrement le secteur
clé de l'énergie en Iran.
Selon
un article de David Sanger paru la semaine passée dans le New York Times,
même si l’Iran devait participer la semaine prochaine aux négociations à
Vienne, Washington n’engagerait pas de négociations sérieuses. Son principal
objectif motivant sa participation est de voir « si une nouvelle série
exceptionnellement vastes de sanctions économiques modifierait le calcul
nucléaire de l’Iran. »
L’article
explique que la nouvelle proposition américaine est « même encore plus coûteuse
qu'un marché que le dirigeant suprême du pays, l’ayatollah Ali Khamenei,
avait refusé l’année dernière. » Elle nécessiterait que l’Iran
stoppe la production d’énergie nucléaire et abandonne plus de deux-tiers
d’uranium en plus qu’il n’est stipulé dans l’accord
conclu à titre d’essai lors des pourparlers d’il y a un an.
L’article
du Times dit que Washington croit que jusque-là on « n’a pas
obtenu grand-chose » pour ce qui est des sanctions « ce qui a
déclenché une discussion à la Maison Blanche quant à la question de savoir
s’il serait utile ou contre-productif s’il [Obama] parlait plus
ouvertement des options militaires.
Dennis
Ross, le conseiller spécial d’Obama sur les Affaires du Proche-Orient, a
eu un discours identique lors d’une allocution prononcée le 25 octobre à
l’occasion d’une conférence du Comité américain des affaires
publiques d’Israël, le principal groupe de pression américain pro Israël.
Après
s’être vanté que les sanctions américaines avaient provoqué une
importante crise économique, de l’inflation et du chômage en Iran, Ross a
soulevé la menace implicite d’une guerre : « Finalement nous
espérons que la forte pression à laquelle l’Iran est confrontée
aujourd’hui l’obligera à adopter une autre attitude. La porte de la
diplomatie reste ouverte et nous recherchons bien sûr une solution pacifique à
notre conflit avec l’Iran. Mais si l’Iran devait poursuivre son
attitude défiante en dépit de son isolement grandissant et des dommages causés
à son économie, ses dirigeants devraient écouter attentivement le président
Obama qui a souvent dit, « nous sommes déterminé à empêcher que
l’Iran obtienne l'arme nucléaire. »
L’appel,
peut-être le plus glaçant, à une escalade de la menace militaire contre
l’Iran se trouve dans une rubrique intitulée « La relance par la
guerre? », écrite la veille des élections de mi-mandat par le chroniqueur
du Washington Post, David Broder, le soi-disant « doyen des
chroniqueurs politiques de Washington. »
Se
plaignant de ce que l’aggravation de la crise économique est en train de
créer une « situation décourageante » pour espérer qu'Obama remporte
un deuxième mandat en 2012, Broder, un partisan servile du président démocrate,
a imaginé deux scénarios à l’aide desquels ce défi pourrait être
surmonté. Le premier est l’espoir vain que la crise économique sera
surmontée par une relance économique. Broder conclut que « le marché ira
où il doit aller » et qu’un tel résultat n’était pas fiable.
Il
suggère une autre solution fondée sur l’histoire tumultueuse du 20ème
siècle.
« Rappelez-vous
FDR [Franklin Delano Roosevelt] et la grande dépression, » écrit-il.
« Qu’est-ce qui a finalement résolu cette crise économique ? La
Seconde guerre mondiale. »
« Et
c’est là qu'Obama pourrait réussir. Recueillant un fort soutien des
Républicains au Congrès s'il défie les ambitions de l’Iran de devenir une
puissance nucléaire, il peut passer une grande partie de 2011 et 2012 à
orchestrer une épreuve de force avec les mollahs. Ceci l’aidera politiquement
parce que le parti d’opposition l’encouragera dans ce sens. Et, à
mesure que la tension va monter et que nous accélérerons les préparatifs de
guerre, l’économie s’améliorera. »
Et
voilà où l’on en est: une modeste proposition pour relancer
l’économie et gagner la campagne pour un second mandat, au prix de la
mort de centaine de milliers sinon de millions de personnes.
Ce
qui sous-tend de telles propositions sanguinaires ne sont pas seulement les
cyniques calculs politiques de l’un ou de l’autre des deux partis
américains droitiers pro-impérialistes mais plutôt le déclin historique du
capitalisme américain et la plus profonde crise du système capitaliste mondial
depuis la Grande dépression des années 1930.
Ces
deux partis souscrivent au militarisme. Ceci reflète le consensus, au sein de
l’élite dirigeante, que le capitalisme américain est en mesure de
compenser son déclin économique par le recours à la force militaire pour
établir l’hégémonie américaine dans les régions riches en énergie et
géo-stratégiquement cruciales du Moyen-Orient et d’Asie centrale.
Les
paroles de Broder et des Républicains ainsi que les actions du gouvernement
Obama soulignent la menace d’une nouvelle guerre qui sera bien plus
sanglante et qui impliquera le danger d’une conflagration mondiale.