Quelque 100 000 personnes ont pris part aux manifestations de samedi dans
140 villes de France pour protester contre la politique répressive et
anti-immigrés du président Nicolas Sarkozy et sa répression féroce à
l'encontre des communautés Roms. Le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux
a riposté par une déclaration, « Je poursuivrai mon action déterminée pour
faire reculer toutes les formes de délinquance, défendre les droits des
victimes et ce, sans jamais stigmatiser quelque communauté que ce soit . »
Le gouvernement gaulliste conservateur de Sarkozy est dans une crise
profonde. La cote de popularité du président tourne autour de 30 pour cent
et quelque 70 pour cent de la population ont exprimé leur soutien pour la
journée d'action qui se tiendra le 7 septembre contre la politique de
rigueur du gouvernement.
Toute l'année il y a eu des grèves et occupations sporadiques des lieux
de travail pour s'opposer aux licenciements, fermetures et baisses de
salaire, tandis que les affaires de corruption se sont multipliées
impliquant l'ancien président gaulliste Jacques Chirac, Sarkozy et le
ministre du Travail de Sarkozy, Eric Woerth.
Dans un discours à Grenoble le 30 juillet, suite aux émeutes provoquées
par la mort entre les mains de la police d'un jeune Rom et d'un jeune
immigré lors de deux incidents séparés, Sarkozy a promis de démolir tout
campement rom illégal et de révoquer la nationalité française d'immigrés sur
la base d'une longue liste de méfaits. La révocation de la nationalité
française est largement perçue comme un rappel du régime de Vichy du
maréchal Philippe Pétain qui avait collaboré avec l'occupation nazie durant
la Seconde guerre mondiale. Ce gouvernement collaborateur avait retiré la
nationalité française à 15 000 citoyens naturalisés français et déporté des
milliers de Juifs et autres « indésirables », dont des gitans,vers les camps
nazis .
Le virage à droite de Sarkozy, contrairement à ses intentions, n'a rien
fait pour restaurer sa cote de popularité.
Les manifestations étaient organisées par le Parti socialiste (PS) et le
syndicat CGT (Confédération générale du travail, sous influence
stalinienne), et soutenues par le Parti communiste français (PCF), le Parti
de Gauche de Jean-Luc Mélenchon et le Nouveau parti anticapitaliste (NPA)
d'Olivier Besancenot. Toutes ces organisations sont, en fait, impliquées
dans les efforts pour attiser les préjugés anti-immigrés et anti-islamiques.
Ils avaient apporté leur soutien, manifeste ou tacite, à la campagne
islamophobe qui avait conduit à l'interdiction en 2004 du voile islamique
dans les établissements scolaires publics et cette année à l'interdiction du
port de la burqa dans les lieux publics. Aucune de ces organisations ne
soutient l'appel lancé par des travailleurs sans-papiers, dans la
manifestation de samedi, à la régularisation de ceux qu'on appelle des
immigrés « sans-papiers. »
La manifestation était dominée par la politique du PS et de ses
organisations satellites et soumise aux aspirations électorales du parti. Le
Parti socialiste cherche à se présenter comme le défenseur des droits
démocratiques et un rempart contre le fascisme.
Le PS a publié mardi dernier un avant-projet de politique étrangère
rédigé par l'ancien premier ministre Laurent Fabius et le député PS
Jean-Christophe Cambadélis, confirmant la nature impérialiste de ce parti
bourgeois. Il défend l'armement nucléaire français, exige la fin des coupes
dans le financement militaire et plaide pour des forces armées françaises et
de l'Union européenne qui soient capables d'intervenir partout dans le
monde, y compris en Afghanistan.
Le PS soutient les mesures d'austérité visant à réduire le déficit du
pays et à défendre l'euro. La présence de nombreux drapeaux français dans la
manifestation, insistant sur les supposées valeurs démocratiques de la
Cinquième République, soulignait l'orientation nationaliste des
organisateurs.
Un compte-rendu par Mediapart des manifestations en province rapportait
que dans certaines villes comme Avignon, des représentants du PS ont brillé
par leur absence. François Rebsamen, l'ancien lieutenant de la candidate PS
aux élections présidentielles de 2007, Ségolène Royal, a mis en garde dans
le Parisien vendredi contre le soutien à « des associations, comme la Ligue
des droits de l’homme. » Il a dit, « Attention à ne pas se laisser
embarquer. Le PS est le parti de l’alternance. Ne le perdons pas de vue…Que
ce type de manifestation n’aille pas jusqu’à demander à nos maires et nos
élus d’installer eux-mêmes des campements de Roms dans nos villes ou de
fermer les yeux sur certains squats…»
Les manifestations ont réuni des partis de l'ensemble du spectre
politique, du NPA soi-disant de « gauche » à des partis et des personnalités
de la droite officielle. Des sympathisants du nouveau parti gaulliste de
l'ancien premier ministre Dominique de Villepin, République solidaire,
manifestaient tout comme la députée européenne du MoDem droitier Corinne
Lepage qui a déclaré au cours de la manifestation, « Je trouve que les
projets concernant la déchéance de nationalité sont gravissimes. En ce qui
concerne les Roms, je considère que, là où il y a de l’illégalité, la loi
doit être appliquée. »
Alain Juppé, partisan de longue date de Sarkozy et ancien premier
ministre, actuellement maire de Bordeaux, n'a pas manifesté dans sa ville
aux côtés des syndicats et des partis de « gauche », mais son adjoint
Véronique Fayet y était.
Depuis le discours de Grenoble de Sarkozy, plus de 100 campements de Roms
ont été démantelés et 1 000 Roms déportés. Le Parti socialiste et ses alliés
n'ont organisé aucune campagne contre ces chasses à l'homme et rafles
quotidiennes. En effet le PS, y compris Martine Aubry, maire de Lille, ont
envoyé la police expulser des Roms et démanteler leurs campements.
Des étudiants en train de lire le tract du WSWS
A Paris, les sympathisants du Comité international de la Quatrième
Internationale (CIQI) ont distribué des tracts de la déclaration du World
Socialist Web Site « Retour à Vichy. »
Nicky
Il n'y avait pas dans la manifestation parisienne de banderole, pancartes
ou tracts s'opposant à la guerre en Irak et à la participation de la France
à l'occupation néo-coloniale de l'Afghanistan. Mis à part le tract d'un
groupe féministe, il n'y avait aucune déclaration d'opposition à la loi
interdisant le port du voile intégral en public.
Nicky, étudiant de l'université de Lille a dit au WSWS, « Sarkozy cherche
à détourner l'attention de la population des problèmes économiques et
sociaux et de l'affaire Bettencourt. »
Theo
Théo qui est étudiant en musique à la Sorbonne à Paris a dit: « Je suis
venu à la manifestation pour dire non à la déclaration de Sarkozy contre les
Roms. La méthode du gouvernement consiste à stigmatiser la population rom,
en faisant d'un cas isolé une généralisation. C'est la vieille méthode
sécuritaire pour regagner les voix de l'extrême-droite. »
«L'expulsion des Roms n'a pas de sens quand ils sont citoyens européens.
A certains égards, je suis pour la liberté de mouvement des immigrés
partout. Les attaques contre les Roms c'est la reconnaissance par le
gouvernement et les municipalités de gauche de leur échec car ils n'ont pas
rempli leurs obligations légales de fournir des sites d'accueil pour les
Roms. J'ose espérer que le PS et le PCF sont pour la défense des droits
démocratiques des travailleurs, mais ils n'ont pas évolué et n'ont pas une
perspective différente de celle de la mondialisation et du capitalisme,
auxquels ils s'adaptent. »