Les enseignants français du primaire et du secondaire ont
répondu massivement à l’appel de leurs syndicats à une grève de 24 heures le
27 septembre contre les coupes du gouvernement dans l’Education nationale.
La politique du gouvernement de réduire le nombre des travailleurs du
service public par le non remplacement d’un retraité sur deux a suscité la
colère de la population. Selon une évaluation des syndicats, plus de la
moitié des 800.000 enseignants du secteur public ont débrayé une journée et
165.000 ont participé à des manifestations partout en France.
Plus de 45.000 enseignants sont descendus dans la rue à Paris pour
manifester leur hostilité à la politique gouvernementale de suppression des
postes d’enseignants.
Une indication de l'opposition grandissante contre les attaques à
l’encontre du niveau de vie des travailleurs est la participation au
mouvement de grève pour la défense des postes d’enseignants, pour la
première fois depuis 1984, des enseignants des établissements privés, en
majorité catholiques, représentant 20 pour cent des établissements
scolaires, .
Depuis 2008, 150.000 postes de fonctionnaires ont été supprimés dont
70.000 postes d'enseignants. Ce programme d’austérité a été conçu pour
réduire le déficit en détruisant le niveau de vie des travailleurs au nom
des banques et pour maintenir la note de crédit maximale AAA de la France.
La banderole de l’Institut universitaire
de Formation des Maîtres (IUMF)
L’affirmation de Sébastien Sihr, du SNUiPP-FSU, principal syndicat
unitaire des instituteurs et professeurs des écoles, proche du Parti
communiste français (PCF), selon laquelle les syndicats des enseignants
voulaient « délivrer un message fort pour que l’éducation soit au cœur des
priorités de notre pays » a été entièrement démenti par le caractère
restreint de la grève. En limitant la grève à une action de 24 heures, les
syndicats ont cherché à isoler les enseignants et les étudiants du reste de
la classe ouvrière qui, tout entière, subit les attaques de la politique
d’austérité du gouvernement.
Ceci, ainsi que le bilan des syndicats de trahison des protestations de
masse de 2003 et 2010 pour la défense des retraites et des droits sociaux,
qui ont conduit à des défaites et à la dégradation de la qualité de vie des
travailleurs, a enhardi le ministre de l’Education Luc Chatel à déclarer que
la grève de 24 heures «fin septembre dans l’Education nationale, ce n’est
pas révolutionnaire. » Son évaluation de l’opposition des syndicats à la
rigueur du gouvernement a été de l’appeler par son vrai nom – à savoir une
fausse opposition de la part des syndicats, ces derniers ayant déjà sacrifié
depuis 2003 le niveau de vie de leurs membres en trahissant la lutte pour
les retraites.
Manifestation parisienne
Le gouvernement considère à juste titre que les syndicats sont
impuissants et sont les exécutants consentants de la politique
gouvernementale. Cette attitude des syndicats enseignants a pour but de
rassembler le maximum de voix lors des élections aux commissions
administratives paritaires qui se tiendront début octobre.
Le président Sarkozy a réagi à la mobilisation de 24 heures des
enseignants en tentant de monter les travailleurs du secteur privé contre
ceux du secteur public en disant, « les fonctionnaires ont un travail
difficile, mais ils ont un statut qui les protège. Vous [le secteur privé],
vous êtes exposés. Mon désir de chef de l’Etat est d’abord de penser aux
ouvriers, aux salariés et aux cadres qui sont lancés dans la compétition
internationale et qui ont besoin du soutien de l’Etat. » Le message est que
les enseignants sont improductifs et doivent être soumis aux besoins du
marché.
Les enseignants participant à la manifestation parisienne, et qui ont été
rejoints par d'importants contingents de lycéens, rejetaient les attaques du
gouvernement contre les postes d’enseignants. Les manifestants ont fait part
au WSWS de leurs craintes pour l’éducation de leurs enfants depuis l'arrivée
au pouvoir du gouvernement Sarkozy.
Un manifestant a dit: « On n’aura jamais notre retraite, mais tous ces
sénateurs nouvellement réélus, eux, ils auront leur retraite. Ils prendront
leurs valises (pleines de pognon de dessous-de table) en partant à la
retraite. La solution, c’est la lutte permanente sans relâche – sans faire
de concessions. Il faut être sûr de virer Sarkozy au premier tour [des
présidentielles]. »
Un professeur de sciences naturelles s’est plainte de faire des
remplacements pendant trois ans dans différents établissements scolaires.
Pour régler les problèmes actuels, l’élection présidentielle n’est pas la
solution. « Il faut une coopération internationale pour résoudre les
problèmes économiques. Cela ne peut pas être franco-français avec juste une
élection présidentielle en 2012. La jeunesse c’est la base, c’est le futur.
En supprimant des postes de prof depuis quatre ans, on ne favorise pas les
jeunes. »
Des enseignants dans la manifestation
parisienne
Un récent rapport de l’Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) a souligné le déclin du niveau de l'éducation en France.
Avec 6,1 pour cent d’enseignants pour 100 élèves ou étudiants, la France
arrive derrière la Grèce ou le Portugal. Le rapport conclut que la
rémunération des enseignants français est « faible en comparaison
internationale. » Les coupes dans l’éducation touchent les couches de jeunes
les plus vulnérables. Plus de 135.000 jeunes quittent chaque année l’école
sans qualifications.
L’ampleur de la mobilisation des enseignants a montré la détermination
des travailleurs à défendre tous les acquis sociaux arrachés depuis la
Seconde Guerre mondiale. L’objectif des syndicats d’enseignants a été au
contraire de limiter les protestations au secteur de l’éducation sans lancer
d’appel à d’autres travailleurs à participer, ignorant les implications
mondiales de la crise économique et essayant de canaliser la frustration et
la colère derrière le candidat du Parti socialiste (PS) le plus susceptible
d’affronter l’actuel président Nicolas Sarkozy lors des élections
présidentielles de 2012, François Hollande.
Hollande a promis de rétablir la plupart des 80.000 postes d’enseignants
supprimés par le gouvernement Sarkozy. Ces promesses creuses sont démenties
par le programme du PS de réduire le déficit public en faisant payer
l’addition à la classe ouvrière conformément à ses homologues
sociaux-démocrates George Papandreou en Grèce et José Luis Zapatero en
Espagne.
Entre 2007 et 2012, les coupes budgétaires du gouvernement à l’Education
nationale auront réduit de 80.000 le nombre de postes d’enseignants dans le
cadre du programme d’austérité pour sauver de l’abîme le capitalisme
français.