Les attaques perpétrées contre trois réunions
publiques organisées par le Parti de l’Egalité sociale en Allemagne (Partei
für Soziale Gleichheit, PSG) pour la défense de Günter Grass représentent
une intensification sensible des attaques contre les droits démocratiques.
Il faut s'opposer à ces attaques et les rejeter.
Le PSG a organisé des réunions publiques pour
contrer les attaques sans précédent lancées contre Grass, écrivain âgé de 84
ans et prix Nobel de littérature. Depuis qu’il a désigné dans son poème « Ce
qui doit être dit » le fait incontestable qu’Israël qui dispose de l’arme
nucléaire est en train de faire des préparatifs de guerre contre l’Iran,
Grass fait l’objet d’une campagne de dénigrement calomnieuse. Ses
déclarations sont déformées et sa biographie est falsifiée. Aucune
accusation n’est assez odieuse, aucune insulte assez ignoble pour ne pas
être utilisée contre lui.
En étroite collaboration avec le gouvernement et
les autorités universitaires, des provocateurs pro-israéliens de droite ont
tenté d’empêcher que se tiennent des réunions du PSG. Leurs attaques
deviennent de plus en plus virulentes.
Vendredi dernier, un groupe de provocateurs a
tenté en vain de mettre fin à une réunion du PSG à Francfort. Ils ont occupé
la cage d’escalier située devant la salle de réunion, ils ont harcelé et
menacé ceux qui ont assisté à la réunion et déployé des drapeaux israéliens
et américains.
Lundi, la direction de l’Université technique de
Berlin a annulé à la dernière minute la réservation d’une salle de réunion.
Selon un membre de la direction de l’université, était entrée en ligne de
compte de cette décision l’existence des « relations avec les représentants
de l’Etat d’Israël, » signe indubitable que l’université était soumise à des
pressions politiques. Lorsque le PSG a tenté de trouver un autre lieu de
réunion, la police est intervenue pour exercer des pressions sur la gérante
afin qu’elle retire son autorisation d’utiliser la salle de réunion. La
réunion a finalement eu lieu après un nouveau transfert dans un café voisin.
Mardi, plusieurs dizaines de provocateurs ont
tenté d’envahir une réunion publique organisée par le PSG à l’université de
Leipzig. Ils ont vociféré des insultes à l’adresse de Günter Grass, harcelé
le personnel de sécurité du PSG et menacé un dirigeant du PSG avec un piolet
(l’instrument qui servit à assassiner Léon Trotsky). Lorsqu’ils se sont vu
refuser l’entrée à la réunion, ils ont bloqué l’accès à la salle de réunion
et tenu leur propre réunion dans le hall, munis d’un mégaphone et de
drapeaux israéliens.
Deux représentants du conseil étudiants de
l’université qui sont entre-temps arrivés sur les lieux n'ont pas demandé à
ceux qui étaient en train d’organiser la protestation non autorisée de
quitter les lieux mais sont intervenus au contraire pour mettre fin à la
réunion dûment autorisée de défense de Günter Grass. Ils ont affirmé que
comme il s’agissait d’une réunion publique, même des fauteurs de troubles
devaient être autorisés à entrer. Ils savaient pertinemment que quiconque
organise une réunion n’est pas tenu de laisser entrer un groupe organisé qui
menace de faire usage de la force physique et qui a l'intention déclarée de
perturber la réunion.
La signification politique de ces attaques
concertées dirigées contre trois réunions publiques, en l’espace de cinq
jours, organisées par le PSG et son organisation étudiante, l’Internationale
étudiante pour l’Egalité sociale (IEES), est on ne peut plus évidente. Elles
confirment le fait que les attaques perpétrées contre Grass même ont été
organisées par les médias et au plus haut niveau du gouvernement dans le but
d’intimider et de faire taire toute opposition à une relance agressive du
militarisme.
Le gouvernement allemand tente depuis des années
de trouver un moyen de surmonter la vaste opposition populaire au
militarisme et à la guerre. Même pour la guerre en Libye, Berlin ne s'est
pas senti en mesure d’y participer directement. A présent, ils tentent de
recourir à une odieuse campagne de diffamation pour imposer un changement de
cap. Ils ne veulent pas rester sur la touche lors d'une prochaine guerre au
Moyen-Orient.
Le cynisme avec lequel les accusations
d’antisémitisme sont jetées avec violence à l’encontre de Grass est
époustouflant. Dans un article intitulé « L’antisémitisme veut sortir »,
l’éditeur du journal Die Zeit, Josef Joffe, a mis Grass sur un pied
d’égalité avec des antisémites de la pire espèce. La même hystérie est
affichée dans d’autres journaux influents, pour ne pas parler de la presse à
scandale. Et pourtant, tout le monde sait, qu’après la Deuxième Guerre
mondiale, la classe dirigeante allemande a protégé des centaines de milliers
de nazis et en a même nommé un au poste de chancelier.
Ce n’est pas par hasard que Grass est devenu la
cible d’une campagne de diffamation. Il est le plus important écrivain
allemand vivant et qui a consacré sa vie littéraire à traiter de la
dictature nazie. S’il est possible de le discréditer et de le faire taire,
selon leurs calculs, alors personne d’autre n’osera se rebeller. Si Grass,
le plus célèbre écrivain allemand, peut être traîné dans la boue, ceux qui
sont moins célèbres peuvent facilement imaginer ce qui les attend.
La diffamation de Grass a été suivie par les
attaques contre les réunions publiques du PSG. C’est parce que le PSG a
organisé une campagne de réunions publiques pour la défense de Grass qu’il a
fallu le réduire au silence.
La concordance étroite entre les attaques menées à
Francfort, Berlin et Leipzig ainsi que la collaboration entre les
provocateurs droitiers, la police et les autorités universitaires montre
clairement que les ficelles sont tirées au plus haut niveau de l’Etat. Les
attaques ont suivi un modèle bien connu : une provocation droitière est
utilisée pour mettre fin à une réunion organisé par une organisation
ouvrière de gauche. Avant 1933, c’était chose courante en Allemagne.
Les « anti-Allemands », des rangs desquels les
provocateurs de Francfort et de Leipzig sont issus, forment une force
politique réactionnaire qui est parfaitement bien liée à l’establishment
israélien et allemand. Ils considèrent que la classe ouvrière allemande est
réactionnaire et ils ont ouvertement défendu le bombardement incendiaire de
Dresde durant la Deuxième Guerre mondiale et qui tua des dizaines de
milliers de civils innocents. Ils sont experts dans la justification des
pires crimes de l’impérialisme en recourant à de fausses accusations
d’antisémitisme. Ils décrivent l’Islam comme étant une nouvelle forme de
racisme et ont soutenu les guerres contre l’Afghanistan et l’Irak. Ils
rejettent même les négociations de paix entre Israël et la Palestine au
motif qu’« aucune concession ne peut être faite à un collectif
nationaliste-islamiste de haïsseurs de juifs tels les soi-disant
Palestiniens et qui sont actuellement en proie à une manie destructrice. »
Joffe, le rédacteur en chef du journal Die Zeit,
est aussi un spécialiste de la propagande impérialiste. Il entretient des
liens étroits avec les néoconservateurs américains ; en 2003 il avait fait
campagne pour la guerre en Irak en propageant le mensonge sur les présumées
armes de destruction massive en Irak.
La tentative de réduire au silence Günter Grass et
d’empêcher les réunions du PSG rappelle le chapitre le plus sombre de
l’histoire allemande. La suppression de tous ceux qui s’opposèrent à la
guerre durant la République de Weimar avait contribué à ouvrir la voie à la
montée au pouvoir de Hitler. Ainsi, l’éditeur pacifique de Weltbühne,
Carl von Ossiezky, fut condamné en 1931 à la prison pour espionnage parce
qu’il avait publiquement divulgué le réarmement illégal de la Reichswehr,
nom sous lequel était alors connue l’armée allemande. Après leur prise de
pouvoir, les nazis l’avaient envoyé dans un camp de concentration. Il mourut
finalement des séquelles de la torture, de la famine et des travaux forcés.
Il faut rejeter les attaques contre le PSG! Elles
représentent une attaque contre les droits démocratiques fondamentaux de
tous. Nous continuerons à intensifier la campagne pour la défense de Günter
Grass. Nous appelons tous les lecteurs du WSWS à soutenir le PSG à
l'encontre des attaques contre ses droits fondamentaux.
(Article original paru le 26 avril 2012)