Partout en Europe, les résultats
des élections ont montré la profonde opposition populaire aux mesures
d'austérité que le capital européen et américain applique impitoyablement
depuis que la crise économique mondiale a éclaté.
En France, cette colère sociale a
mené à la défaite du président droitier, Nicolas Sarkozy, et à l'élévation à la
présidence du candidat du Parti Socialiste (PS), François Hollande.
En Grèce, le principal objectif
des mesures d'austérité de l'UE depuis 2009, cela a produit un formidable rejet
du duopole - constitué par le parti social-démocrate PASOK et le parti droitier
Nouvelle Démocratie - ayant gouverné ce pays depuis la chute de la junte
militaire en 1974. Ces partis ont chuté à 13,2 pour cent et à 18,9 pour cent
des votes respectivement. La Coalition des partis de la Gauche radicale
(SYRIZA) a triplé son score pour atteindre 16,8 pour cent et devenir le
deuxième plus grand parti de la Grèce.
Par leurs voix, de vastes
sections de la classe ouvrière et des classes moyennes ont montré qu'elles
étaient en quête d'une alternative de gauche à la dictature politique et
économique de l'élite financière. Toutefois, les partis ayant obtenu des gains
sur la base d'un virage à gauche dans le sentiment des masses n'ont aucune
intention de réaliser une réforme économique importante quelconque et encore
moins une restructuration socialiste radicale du dispositif existant.
En France, Hollande a à maintes
reprises dit vouloir réduire drastiquement les budgets pour respecter le pacte
fiscal. Tout en se déclarant lui-même « non dangereux » devant des
banquiers londoniens et en parlant vaguement d'une politique de
« croissance » pour la subvention de banques et d'entreprises
choisies, il a fait l'éloge du « modèle allemand » qui prévoit des
salaires plus bas et une plus grande « flexibilité » du travail pour
les travailleurs. Les marchés financiers semblent prendre Hollande au mot. Le
lendemain de l'élection de Hollande, l'indice CAC-40 a terminé en hausse à 1,6
pour cent à la bourse de Paris.
Dans cette situation, une suite
de partis de « gauche » - dont quelques-uns se disent
« socialistes », « anticapitalistes » ou
« communistes » - joue un rôle traitre. Les poses qu'ils prennent de critiques
de la politique des banques sont une escroquerie consciente. Issus de et
représentant des couches aisées de la classe moyenne qui en termes d'intérêts
économiques et d'affinités culturelles s'identifient aux élites dirigeantes,
ils visent à bloquer tout défi réel à l'UE, à l'euro et aux autres institutions
du capitalisme européen.
En France, Hollande est arrivé au
pouvoir avec le soutien de plusieurs de ces partis, dont le Front de Gauche de
Jean-Luc Mélenchon qui a recueilli 11 pour cent des voix au premier tour de
l'élection présidentielle et le Nouveau parti anticapitaliste. Ils avaient tous
inconditionnellement appelé à voter Hollande.
En Grèce, le dirigeant de SYRIZA,
Alexis Tsipras, a dit que son parti recherchait un « New Deal de style
Roosevelt » pour modifier les conditions de sauvetage des banques imposées
à la Grèce. Il a dit, « Nous ne sommes pas contre l'euro, mais nous sommes
opposés à la politique qui est faite au nom de l'euro. »
De tels commentaires révèlent le
caractère de classe de ces partis qui acceptent une politique foncièrement
capitaliste et un cadre économique qui est une catastrophe pour la classe
ouvrière. En Grèce, les revenus réels ont été diminués de près des deux tiers, le
chômage a triplé et touche maintenant plus de 50 pour cent des jeunes, la
pauvreté et le nombre de sans-abri est en train d'exploser.
Ces partis sont totalement voués
à la préservation de l'UE, de l'euro et du capitalisme européen. Dans la mesure
où ils proposent quelque chose, ce sont des rêves de politique néo-rooseveltienne
mêlant de ridicules appels à des réformes symboliques à l'usage inflationniste
de la planche à billets. Ils s'opposent à une lutte pour le pouvoir et pour la
perspective de gouvernements ouvriers en Europe et dans le monde qui
appliqueraient une politique socialiste.
Toutefois, deux obstacles
importants se dressent devant eux : la réalité de la crise capitaliste
mondiale et les puissants intérêts de classe de l'aristocratie financière. Dans
la ruée pour des marchés mondiaux se rétrécissant et pour des produits et de la
main d'oeuvre bon marché, les bourgeoisies des différents pays européens
n'accepteront une politique commune que dans la mesure où elles peuvent rejeter
conjointement leur crise sur le dos des travailleurs.
La classe ouvrière a déjà fait d'amères
expériences avec la politique des partis petits bourgeois de
« gauche » quand ceux-ci étaient au gouvernement, notamment avec le
gouvernement italien du premier ministre Romano Prodi de 2006-2008 dont avait
fait partie Rifondazione Comunista. Ce parti avait soutenu les mêmes
attaques contre la classe ouvrière que les partis de droite : réduction
des droits à la retraite et coupes budgétaires, interventions en Afghanistan et
au Liban.
Si les partis pseudo-gauches
rejoignent des gouvernements aujourd'hui, au milieu d'une crise du capitalisme
mondial bien plus intense, leur politique sera le cas échéant encore plus
réactionnaire.
Aucun changement significatif
n'est possible sans une rupture avec le pouvoir politique de la bourgeoisie et sans
arracher l'économie de son emprise. Ceci exige une stratégie internationale et
une perspective unissant la classe ouvrière dans une lutte pour le renversement
du capitalisme.
Les travailleurs ne doivent apporter
aucun soutien à des forces appuyant le gouvernement réactionnaire de Hollande
en France, ou un gouvernement constitué de bric et de broc à partir de forces
issues de l'establishment politique en Grèce, ou des régimes similaires
en Europe.
Les travailleurs doivent refuser
tout appel à faire des sacrifices lancé au nom de l'UE, de sa politique
budgétaire et de l'euro. Loin de mener à une plus grande prospérité et à plus
de paix en Europe, ces institutions sont apparues comme le principal forum des
différentes bourgeoisies nationales pour tenter de régler leurs divergences
grandissantes en ruinant la classe ouvrière.
La tâche historique du prolétariat
n'est pas la réforme ou la renégociation du projet de l'UE mais la mobilisation
internationale de la classe ouvrière européenne toute entière dans une lutte
pour renverser celle-ci et construire les Etats socialistes unis d'Europe.