Les chefs d’Etat américain, européens, japonais et
canadien se sont rassemblés hier pour un sommet G8 de deux jours à Camp
David, au Maryland, et qui sera suivi d’un sommet de l’OTAN à Chicago.
L’ordre du jour se concentre sur les craintes d’un effondrement économique
en Europe dans le contexte d’une opposition populaire grandissante contre
les mesures d’austérité, ainsi que sur l'intensification des guerres et des
tensions militaires internationalement.
Le président Barack Obama a rencontré hier matin
le président français, François Hollande, qui a battu le président sortant,
Nicolas Sarkozy, lors des élections du 6 mai qui tournaient autour de la
question du soutien de Sarkozy à la politique de rigueur définie par la
chancelière allemande, Angela Merkel. La secrétaire d’Etat américaine,
Hillary Clinton, a également rencontré le ministre français des Affaires
étrangères nouvellement nommé, Laurent Fabius.
Les deux présidents auraient discuté de l’économie
européenne, des guerres en Afghanistan et en Syrie ainsi que des tensions
avec l’Iran.
Après la réunion, lors d’une conférence de presse
avec Hollande, Obama a dit: « Nous comptons avoir une discussion fructueuse
ce soir et demain avec les autres dirigeants du G8 sur la manière de trouver
une approche responsable combinant consolidation budgétaire et programme de
croissance fort. »
Obama ce faisant a signalé son accord avec la
politique de Hollande présentée durant les élections françaises : l’ajout
d’un « volet de croissance » au pacte fiscal européen prescrivant des
réductions budgétaires draconiennes sur l’ensemble du continent.
La politique qui en découle combinerait des coupes
anti-classe ouvrière avec des versements plus importants aux banques et un
nombre relativement plus faible de projets d’infrastructure dans le but
d’éviter le genre d’effondrement économique que l’Union européenne a imposé
à la Grèce. Etant donné que l’économie de la Grèce est en train de
s’effondrer plus rapidement que le pays n'est en mesure de rembourser ses
dettes, sa dette souveraine est en train de progresser vers les 160 pour
cent de son produit intérieur brut (PIB).
Des appels en faveur d’une relance économique qui
accompagne l'austérité, au nom d’une « politique de la croissance », se sont
heurtés à l’opposition de Berlin où Merkel a déclaré la semaine passée :
« Financer la croissance par un plus grand endettement nous mènerait tout
droit au commencement de la crise. » Certains responsables allemands
envisagent de s'occuper de la Grèce et peut-être aussi d’autres pays
européens hautement endettés en les expulsant de la zone euro. Ceci signifie
assécher le financement en les obligeant à réintroduire leur propre monnaie
nationale.
Le commissaire européen au Commerce, Karel De
Gucht, a dit que les responsables européens travaillaient sur des plans
d’urgence au cas où la Grèce quitterait la zone euro.
Le président grec, Karolos Papoulias, a dit lors
d’un entretien téléphonique hier que Merkel avait suggéré que la Grèce
organise un « référendum sur l’adhésion à l’euro » parallèlement aux
élections du 17 juin qui ont été prévues après que les partis politiques
grecs n’eurent pas réussi former un gouvernement après le scrutin du 6 mai.
Une porte-parole du gouvernement allemand a
ensuite démenti les commentaires de Papoulias comme étant « faux ». D’après
la déclaration allemande, le porte-parole du gouvernement grec, Dimitris
Tsiodras, a dit à la BBC qu’il n’avait « rien à ajouter » aux commentaires
de Papoulias.
Lors de leur conférence conjointe, Obama et
Hollande, se sont opposés aux projets d’expulser la Grèce de la zone euro.
Hollande a dit avoir« la même conviction que la Grèce doit rester dans la
zone euro. »
Hollande qui n’avait pas critiqué la politique
étrangère de Sarkozy durant la campagne électorale, a indiqué vouloir rester
étroitement aligné sur l’impérialisme américain en matière de questions
militaires. Avant de quitter les Etats-Unis, Fabius a cyniquement fait
remarquer, « qu’en fonction des résultats électoraux, les pouvoirs passent
mais les intérêts de la France demeurent. »
Lors de sa rencontre avec Obama à la Maison
Blanche, Hollande a fait marche arrière sur sa promesse électorale de
retirer les 3.400 troupes françaises d’Afghanistan d’ici fin 2012 en disant
qu’il n’évacuerait que les troupes de « combat ». Laissant en suspens la
possibilité que des troupes françaises restent pour aider à l’entraînement.
Hollande a aussi dit que la France avait une
« convergence » de vues et a promis d'entamer une « conversation » avec les
Etats-Unis sur l’Iran. Des discussions au sujet de l’Iran et
l’intensification de l’intervention des puissances de l’OTAN en Syrie
seraient prévues aujourd’hui au sommet du G8 ainsi que la situation
sécuritaire à Maynmar (Birmanie).
Ces discussions soulignent le vaste impact
international de l’opposition populaire croissante à la politique de
rigueur. Les attentes, notamment que les élections du 17 juin en Grèce
puissent résulter en un gouvernement dirigé par SYRIZA – parti
petit-bourgeois de « gauche » qui a proposé de bloquer de nouvelles mesures
d’austérité et de renégocier avec l’UE et les banques la dette de la Grèce –
sont en train d’intensifier les tensions internationales.
Hier, le chef de file de SYRIZA, Alexis Tsipras, a
dit au Wall Street Journal: « Notre premier choix est de convaincre
nos partenaires européens que, dans leur intérêt, le financement ne doit pas
cesser… S’ils décident d’une action unilatérale de leur côté, en d’autres
termes, s’ils assèchent leur financement, alors nous seront obligés de
stopper le remboursement de nos créanciers, de cesser le paiement des
échéances à nos créanciers. »
Visiblement, Tsipras est en train de lancer un
appel pour que Washington, Paris et les puissances partageant les mêmes
points de vue, pressent Berlin d’accepter des renflouements plus importants
et un ralentissement de l’imposition des coupes sociales. Réclamant une
« solution européenne », il a dit : « Quoique nous fassions, les choses
seront difficiles. Mais, ce sera difficile aussi pour l’ensemble de l’Europe
parce que l’euro s’effondrera » si le financement de la Grèce est stoppé.
Ni l’exigence de Merkel en faveur de coupes
sévères et immédiates ni les propositions d’Obama et de Hollande de combiner
les réductions avec davantage de renflouements bancaires et de projets
d’infrastructure symboliques n'offrent une perspective à la classe ouvrière
pour aller de l’avant. Elles représentent tout au plus des formes
différentes de pillage. Les deux politiques se servent de la dette
souveraine croissante pour justifier de brutales coupes sociales et de
versements massifs aux banques responsables de la crise financière qui a
éclaté en 2008.
Certains commentateurs bourgeois refusent de se
montrer indulgents à l’égard de la dette grecque essentiellement parce que
ceci découragerait la poursuite de coupes sociales à travers l’ensemble de
l’Europe. Et donc, Michael Gerson, écrit dans le Washington Post :
« La Grèce pourrait faire défaut au sein de la zone euro en ayant une grande
partie de sa dette annulée. Mais… quel message ceci enverrait-il à l’Italie,
à l’Espagne, à l’Irlande et au Portugal – qui tous sont engagés dans un
difficile programme de rigueur – si l’Union européenne accordait un
traitement spécial à son membre le moins digne de confiance ? »
La question cruciale à laquelle est confrontée la
classe ouvrière est de développer une direction socialiste révolutionnaire
pour s’opposer à l’assaut des banques contre la classe ouvrière
internationale – y compris les propositions de poursuivre les attaques sous
couvert d’une politique de « croissance » élaborée entre Wall Street,
Athènes et Paris.
La classe dirigeante est, quant à elle, en train
de planifier une intensification de la répression et une guerre contre
l’opposition grandissante de la classe ouvrière. Hier, la ministre italienne
de l’Intérieur, Annamaria Cancellieri, a mentionné « un risque réel
d’escalade » des protestations et des grèves pour justifier des « plans de
sécurité d’urgence » formulés conjointement par le service de renseignement,
la police et les responsables militaires italiens dans le but de déployer
l’armée et de réprimer l’opposition en Italie.
Dans le même temps, comme les discussions au sujet
de la guerre en Syrie et en Iran le montrent clairement, les puissances
européennes et américaines sont en train de planifier une intensification
des guerres impérialistes à l’étranger – au Moyen-Orient, puis contre
d’autres adversaires.
Le quotidien français, Les Echos, a mis en
garde contre une baisse des dépenses militaires européennes comme
conséquence de la crise en citant le fait que « d’autres puissances
économiques et militaires comme le Brésil, la Chine et l’Inde, émergent. »
Le journal poursuit en disant : « Ces pays, souligne à raison le dirigeant
danois [le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen], ‘n’ont pas
beaucoup d’intérêt à mettre en cause l’ordre mondial qui leur a permis de
construire leur propre prospérité’. Mais ces pays ainsi que la Russie, s’ils
n’ont pas empêché l’opération militaire en Libye menée par la France et
l’Angleterre avec le soutien de l’OTAN, et des Etats-Unis, n’y ont pas, non
plus, pris part…Leurs intérêts ne coïncident pas – toujours – avec ceux de
l’Organisation [OTAN]. »