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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le plan en six points de l'Allemagne pour l'instauration d'ateliers de misère en Europe

Par Peter Schwarz
31 mai 2012

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Il est désormais pratique courante de détruire les salaires et les droits des travailleurs en engageant une procédure de mise en faillite. Le cas le plus connu est celui du géant américain de l'automobile General Motors qui a licencié 30.000 travailleurs, réduit de moitié le salaire des ouvrier nouvellement recrutés et diminué les prestations sociales des retraités. Si le gouvernement allemand parvient à ses fins, cette procédure sera imposée à des pays entiers.

Selon un rapport paru dans le magazine d'information Der Spiegel, la chancellerie de Berlin a élaboré un plan en six points pour des « réformes structurelles » de grande portée en Grèce et dans d'autres pays lourdement endettés de l'Union européenne. Le plan comprend la vente d'entreprises d'Etat, la destruction des droits du travail des salariés, la promotion d'un secteur de main-d'ouvre à bas salaire, l'élimination des contraintes imposées aux entreprises et l'établissement de zones économiques spéciales et d'agences de privatisation inspirées du modèle de la Treuhand allemande.

Le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, n'a pas confirmé le plan mais il ne l'a pas démenti non plus. Selon Der Spiegel, il constituera la base des négociations lors du soi-disant « sommet pour la croissance » de l'Union européenne fin juin. Der Spiegel a écrit que la chancelière Angela Merkel profitera de l'appel en faveur d'une politique de croissance lancé par le président français nouvellement élu, François Hollande, « pour appliquer le principe des judokas : utiliser l'impulsion de l'adversaire pour engager sa propre attaque. »

Si Merkel arrive à ses fins, la « croissance » sera entièrement atteinte par l'intensification de l'exploitation des travailleurs et non par une reprise économique ou une augmentation des dépenses sociales. Merkel croit que Hollande se montrera ouvert à ces propositions étant donné que le sommet de l'UE se tiendra le 17 juin, après les élections parlementaires françaises et que le nouveau président français ne sera plus contraint par l'opinion de ses électeurs ou par ses propres promesses de campagne.

Le gouvernement allemand s'efforce d'imposer des niveaux d'exploitation similaires à ceux que l'on ne trouve actuellement qu'en Europe de l'Est et dans les paradis asiatiques à bas salaires tels la Chine et le Vietnam. Les zones économiques spéciales ont joué un rôle crucial dans l'émergence de la Chine en tant que plus grand atelier de misère du monde. Ces zones permettent aux entreprises de s'affranchir du paiement des taxes et des réglementations environnementales ainsi que des normes de travail, réduisant les travailleurs au niveau d'esclaves industriels appauvris.

Le modèle d'agences de privatisation recommandé par les experts siégeant dans le bureau de la chancellerie est la Treuhand qui a rendu obsolète le paysage industriel de l'Allemagne de l'Est après l'effondrement du régime stalinien en 1989. Gérée par des confidents du patronat et des banques, triés sur le volet et n'ayant de compte à rendre à aucun organisme démocratique, la Treuhand a décidé du sort de millions de personnes. Elle a bradé 8.500 entreprises disposant de 45.000 installations à des prix dérisoires ou les a purement et simplement fermées. Seule une petite fraction des 4 millions d'emplois industriels d'origine sont restés.

Le plan en six points élaboré par la chancellerie est incompatible avec l'autodétermination nationale ou la démocratie. Le journal Tagesspiegel a interviewé plusieurs experts économiques allemands qui ont exprimé, avec une franchise brutale, leurs vues sur les perspectives d'avenir de la Grèce.

Thomas Straubhaar, directeur de l'Institut de recherche sur l'économie mondiale (HWWI) de Hambourg, a lancé un appel pour mettre la Grèce sous « protectorat européen ». Il a dit que quel que ce soit le résultat des prochaines élections du 17 juin en Grèce, le pays restera un « Etat failli », à qui il manque « la force de prendre tout seul un nouveau départ. »

Le terme de « protectorat » évoque d'effroyables souvenirs. L'impérialisme britannique faisait référence à ses anciennes colonies comme étant des protectorats lorsqu'il permettait à des fantoches locaux, comme en Egypte et dans plusieurs émirats du Golfe, de jouer le rôle de chefs d'Etat. Le terme était devenu tristement célèbre durant la période précédant la Deuxième Guerre mondiale après l'occupation nazie de la Tchécoslovaquie et de l'établissement du Protectorat de Bohême et Moravie.

Le fait que ce terme est réintroduit dans le vocabulaire officiel révèle ce que les cercles dirigeants en Allemagne et en Europe ont à l'esprit. Le débat sur les zones économiques spéciales et les protectorats se déroule dans le contexte de l'aggravation de la crise économique.

En conséquence du programme d'austérité dicté par la troïka - l'UE, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne, l'économie grecque est en chute libre. Le pays est dans sa cinquième année de récession. Les petites et moyennes entreprises sont en train de s'effondrer. Rien que cette année, la fédération des entreprises s'attend à la fermeture de 61.000 entreprises et à la suppression de 240.000 emplois. L'industrie touristique dont dépend un emploi sur cinq en Grèce a vu ses revenus décliner de 45 pour cent l'année dernière.

Les banques du pays risquent de s'effondrer parce que les emprunteurs ne sont plus en mesure de rembourser leurs prêts et que les investisseurs et les déposants retirent leur argent. Les experts parlent d'une ruée « au ralenti » sur les banques qui menace de se propager à l'Espagne et à l'Italie. Depuis le début de la crise, les citoyens privés et les entreprises ont retiré 63 milliards d'euros des comptes grecs c'est-à-dire un tiers du total des dépôts. Depuis le milieu de l'année dernière, 100 milliards d'euros ont été retirés des banques espagnoles et 160 milliards d'euros des banques italiennes.

Dans ces circonstances, la classe dirigeante arrive à la conclusion qu'elle ne peut plus se payer le luxe de la démocratie. D'influents responsables tels le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, et la directrice du FMI, Christine Lagarde, ont menacé la population grecque d'une faillite immédiate si les élections du 17 juin favorisaient les partis préconisant un assouplissement de la politique d'austérité dictée par les banques par le biais de la troïka.

Dans le même temps, l'Union européenne est en train de planifier la faillite nationale grecque et la sortie de la Grèce de l'euro. Le Groupe de travail sur l'euro, un comité des ministres des Finances des 17 pays de l'euro, a chargé tous les gouvernements de préparer des plans d'urgence pour la sortie de la Grèce de l'euro. En Grèce même, la classe dirigeante est en train d'élaborer secrètement des plans (Voir : « L'élite dirigeante grecque se prépare à une épreuve de force avec la classe ouvrière  ») pour recourir à l'armée afin d'écraser l'opposition populaire contre les mesures d'austérité.

La Grèce montre clairement ce à quoi la classe ouvrière est confrontée partout en Europe. Près de quatre ans après le déclenchement de la crise financière mondiale, les structures démocratiques sont en train de s'effondrer et les représentants de l'élite financière et patronale sont en train de défendre leur régime par des attaques incessantes contre les salaires, les emplois et les programmes sociaux.

La classe ouvrière ne peut contrer cette offensive qu'en serrant les rangs internationalement et en luttant pour un programme socialiste. La tâche n'est pas de réformer l'Union européenne mais de mobiliser la classe ouvrière pour la renverser et pour la remplacer par les Etats socialistes unis d'Europe.

(Article original paru le 30 mai 2012)

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