wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

France: la fin des protestations accompagne la destruction de 5.000 emplois chez Moulinex

Par Gérard Naville
Le 30 novembre 2001

Le 23 novembre des milliers de travailleurs de la société française Moulinex apprirent qu'ils étaient définitivement licenciés. L'annonce faisait suite à deux mois et demi de protestations, manifestations et autres actions parfois spectaculaires destinées à défendre leurs emplois. Moulinex qui est un important producteur de matériel électroménager employait près de 9.000 ouvriers en France et à l'étranger. Alors que la plupart des usines produisant des fer à repasser, des fours micro-ondes, des cocottes-minute, etc. se trouvent en Normandie, la société a aussi des filiales au Brésil et en Chine.

Moulinex avait déposé son bilan début septembre. Les semaines qui suivirent virent se dérouler un combat inégal entre les ouvriers qui avaient l'intention de défendre leurs emplois dans une région déjà touchée par la désindustrialisation d'une part et les grandes banques, les industriels rivaux, les partis politiques, le médiateur gouvernemental, le gouvernement et les tribunaux de l'autre. Les banques et certaines sociétés rivales étaient pressées de mettre la main sur la carcasse de Moulinex, tandis que les autres tentèrent de les y aider, en particulier en s'assurant que tout se passe avec un minimum de résistance de la part des ouvriers.

SEB, le principal producteur français de gros électroménager reprendra Moulinex tout en augmentant considérablement sa taille et ses chances sur le marché mondial. Quelque 5.200 emplois sur 8.800 seront détruits dans le processus, avec la fermeture d'au moins quatre usines en Normandie, et la perte de 3.700 emplois en France.

Les syndicats jouèrent un rôle essentiel dans le démontage de Moulinex. Après l'annonce par la société de son insolvabilité il y eut une agitation considérable parmi les ouvriers. Les syndicats organisèrent le blocus de plusieurs usines en Normandie, mais tentèrent principalement d'empêcher l'extension des grèves et autres actions, tandis que les cadres, les créanciers et l'Etat français se mettaient à la recherche d'«acheteurs» qui feraient l'affaire. Les deux candidats finalement choisis furent SEB et la société Fidei, connue seulement pour le fait qu'elle fut engagée dans le rachat de la compagnie aérienne AOM, il y a quelques mois et qui aboutit à de nombreuses suppressions d'emplois.

Les syndicats déployèrent leur énergie à soutenir l'offre de Fidei, une solution qui, selon eux, sauverait 1.000 emplois de plus que le rachat version SEB. Selon des articles de presse, ce dernier ne fut jamais une option sérieuse, mais les syndicats avancèrent cette option comme «l'alternative» qui sauverait des emplois. Il est utile de noter qu'en 1988 Moulinex avait déjà été racheté par ses employés et fut géré conjointement par les syndicats, la direction et d'autres actionnaires importants.

Le 23 octobre, le tribunal de Commerce de Nanterre nomma SEB comme il fallait s'y attendre comme le repreneur de Moulinex. Les syndicats prirent alors certaines mesures pour empêcher que des matériels et des machines ne soient déménagés de certaines usines et les piquets de grève qui bloquaient les usines furent renforcés. Alors que les travailleurs s'aperçurent que les emplois étaient perdus et que les usines allaient fermer, les protestations devinrent plus virulentes et plus désespérées. Le 14 novembre, alors que des milliers de personnes défilèrent contre les fermetures à Caen, la plus grande ville de Normandie, des pneus empilés furent mis à feu devant certains bâtiments publics et des oeufs pourris furent lancés contre les voitures de police.

C'est alors que les syndicats placèrent au centre de leur «lutte» le paiement de l'indemnité de licenciement supplémentaire. Le blocus des usines, comme ils l'appelaient, devint un moyen de faire pression à cet effet sur les nouveaux patrons à la table de négociation, mais SEB, soutenu par le Medef, l'organisation patronale, refusa de payer, expliquant que ceci relevait de la responsabilité du gouvernement.

Des travailleurs commencèrent à déchirer leurs cartes d'électeurs pour indiquer qu'ils se sentaient abandonnés par les partis politiques et qu'ils ne voteraient plus. Sans stratégie politique indépendante toutefois qui ferait avancer leur lutte, l'opposition aux licenciements ne mena qu'à la frustration. Dans une des usines menacée de fermeture, à Cormelles-le-Royal, près de Caen, des tonneaux remplis de substances explosives furent placés autour des bâtiments en menaçant de les faire sauter.

La direction et les syndicats voulaient à tout prix faire cesser le mouvement et la semaine dernière toutes les parties négociantes s'entendirent sur les indemnités supplémentaires. Celles- ci s'échelonnaient de 30.000 francs pour ceux qui avaient moins de deux ans d'ancienneté à 80.000 francs pour ceux avec plus de 25 ans d'ancienneté - à peine assez pour survivre pendant un an. Le 23 novembre, les syndicats signèrent l'accord renfermant des arrangements inférieurs aux revendications initiales. Les ouvriers reçurent leurs lettres de licenciement peu après.

En dépit des poses parfois radicales que prend la bureaucratie syndicale, elle partage les conceptions des employeurs et du gouvernement, à savoir qu'il est nécessaire de défendre le capitalisme français sur le marcher mondial. Le journal l'Humanité, publié par le Parti Communiste français, qui influence encore une grande part de la CGT, le principal syndicat, fit ce commentaire sur le rachat de Moulinex par SEB: «En effet, si SEB abandonne le type de productions où la France était la championne de l'innovation, comme les fours à micro-ondes et le gros électroménager en faveur d'un développement aux Etats-Unis, il ouvre la porte à une invasion de la concurrence asiatique». Cela a lieu «malheureusement avec la complicité du gouvernement français, qui, a l'encontre des Etats-Unis, refuse d'imposer des amendes douanières sur les produits en provenance de tels pays à bas coûts».


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés