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Dissensions chez les fascistes en France

Le Front National de Le Pen divisé

Par Gérard Naville
Le 23 décembre 1998

Après plusieurs jours de luttes internes virulentes, le Front National fasciste s'est divisé en deux. Une aile est toujours dirigée par Jean-Marie Le Pen, le fondateur du FN, l'autre l'est par son ancien lieutenant, Bruno Mégret. Les deux tendances luttent pour le contrôle du membership et des avoirs du parti.

Mégret a insisté sur la nécessité de tenir un congrès spécial, espérant ainsi gagner plus d'appui en revêtant le manteau de l'unification et de la « démocratie ». Ce à quoi s'est opposé Le Pen en utilisant ses pouvoirs en tant que président du mouvement et brandi la hache administrative pour expulser et chasser ses opposants. Parmi les récriminations mutuelles qui circulent au sein des comités FN et dans les médias, il y a le recours à la justice pour régler la question des avoirs du parti. À Marseilles, l'un des bureaux mégretistes a été envahi par des supporters de Le Pen qui étaient à la recherche de listes des membres du parti.

Cette crise s'est développée pendant plusieurs mois. Elle s'est intensifiée lorsque le FN a remporté la direction de plusieurs conseils locaux, principalement dans le Midi, et que le parti a marqué des points aux élections régionnales de mars 1998. Les choses ont empiré lorsque Le Pen a apostrophé rudement et agressé une candidate du Parti Socialiste (PS) pendant la campagne électorale. Le Pen a été reconnu coupable d'attaque non provoquée, ce qui a pour effet de l'empêcher de se présenter comme candidat aux élections européennes de 1999 comme principal candidat du parti. Depuis, la voie est dégagée pour Mégret. Le Pen imposa néanmoins de façon bureaucratique sa femme à la tête de la liste du parti contre Mégret, le numéro 2 du FN. Depuis, une série d'attaques et de contre-attaques touchant toutes les couches du FN s'est développée. Cette lutte acerbe au grand jour a culminé avec la scission.

Si l'on se penche sur leur programme de base, il n'y a aucune différence fondamentales entre Mégret et Le Pen. Bien que Mégret utilise souvent une phraséologie démocratique, les deux hommes partagent tous deux la même idéologie fasciste.

Mégret a tenté d'instiguer une « réforme » au FN afin de gagner un plus vaste appui et rendre le parti plus acceptable comme partenaire des partis de droite traditionnels que sont le RPR gaulliste et l'UDF. En Italie, une transformation similaire a également eu lieu lorsque Gianfranco Fini transforma le MSI fasciste en Alleanza Nationale plus « respectable », ce qui lui permit de former une alliance avec le parti populiste de droite Forza Italia de Berlusconi. Pour la première fois de l'histoire italienne d'après-guerre, un parti se réclamant directement de la tradition de Mussolini entra au gouvernement en au printemps de 1994. Le régime de Berlusconi et de Fini a mené des attaques drastiques sur les conditions de vie de la classe ouvrière italienne, provoquant des protestations et des manifestations massives.

Mégret tente le même scénario en France mais cela est plus difficile du fait des éléments lumpen et semi-lumpen sur lesquels se base le FN. Sous son influence, le FN se présente comme un parti de « politiciens efficaces » dans les conseils qu'ils dirigent. Bien qu'il tente de prendre ses distances des éléments « brutaux » du FN, les politiques de Mégret ne sont pas moins racistes pour autant. À Vitrolles, où sa femme a été élue mairesse, le FN a expulsé des familles algériennes des HLM du conseil, couper les fonds aux organisations culturelles en désaccord avec leur s objectifs et retirer les ouvrages « de gauche » des bibliothèques.

Après s'être opposé aux tentatives de rapprochement avec les gaullistes et les conservateurs dans un premier temps, Le Pen approuvait finalement cette démarche à reculons au mois de mars de l'an dernier. Les politiques de Mégret pour rendre le FN plus acceptable comme partenaire de coalition ont connu un certain succès lors des élections régionales. Par exemple, dans la région de Rhône-Alpes qui ceinture Lyon, les votes du FN au conseil régional ont été décisifs pour le choix du président régional. Le support croissant pour Mégret au sein du FN a entraîné Le Pen a mené une contre-attaque.

Le quotidien français Le Monde a cité Mégret : « La position de Le Pen en est une d'opposition stérile... Il préside à la diabolisation du front National afin de rester assis dans un bunker confortable... et devenir le grand diviseur de ... droite nationale... après en avoir été le fondateur. Il veut lancer l'offensive pour prendre le pouvoir ».

Après les élections régionales de mars, les partis traditionnels de droite déjà affaiblis se sont désintégrés. Leur processus de restructuration est toujours en marche. En mai dernier, le Président de l'Assemblée nationale lors du gouvernement Juppé, Philippe Séguin, fonda son propre groupe, l'Alliance, à la lumière des résultats obtenus par le RPR et l'UDF lors des élections régionales. Séguin tentait ainsi de réunir en un groupe politique unique tous les éléments du RPR et de 'UDF qui s'opposent à toute collaboration directe avec le FN. L'Alliance n'a cependant jamais connu quelque succès appréciable.

L'UDF s'est également effondré face à ;a question de la collaboration avec le FN. Des grands noms de ce parti tels l'ancien président Valérie Giscard d'Estaing et l'ancien premier-ministre Édouard Baladur ont apporté de la crédibilité aux thèses racistes du FN. D'Estaing a notamment défendu l'idée que son parti pouvait se fier aux votes FN pour soutenir l'élection de présidents régionaux de l'UDF et Baladur s'est déclaré en faveur d'un débat avec les fascistes.

De cet éclatement des partis traditionnels de droite, François Million, ancien ministre de la Défense, a créé La Droite. Son objectif était de regrouper tous les éléments de l'UDF et du RPR prêt à collaborer avec les politiciens FN. La Droite n'a pas accueilli seulement les supporters de Mégret, mais également par les principaux sympathisants de Le Pen, tels que le numéro 3 du parti Bruno Gollnish de la région de Lyon.

Depuis un certain temps déjà, le FN est en mesure de jouer un rôle d'arbitre dans plusieurs élections du fait de la faiblesse partis parlementaires de droite. Bien qu'ils ne soient pas représentés au parlement national, le FN occupe néanmoins une position centrale sur la scène politique en France. Le parti a en effet obtenu un peu moins de 16 p. 100 des voix lors des élections régionales où ils ont déjà plusieurs conseillers élus.

La création de l'Union monétaire européenne depuis le 1er janvier dernier a amené tous les partis bourgeois, y compris le FN, à faire certains ajustements politiques. L'un après l'autre, tous les partis, du RPR au PCF stalinien, ont abandonné toute opposition à l'Euro. L'une de raisons pourquoi le Parti Socialiste et Lionel Jospin ont remporté les élections générales de 1997 réside justement dans leur attitude pro-européenne plus prononcée par rapport aux autres partis.

Ce n'est pas un hasard si le conflit qui a explosé au sein du FN porte justement sur la question de savoir qui serra à la tête de la liste FN pour les élections européennes. Dans des conditions où la grande bourgeoisie soutient la monnaie unique et l'alliance » avec le capitalisme allemand, la violente opposition nationale du FN à l'accord de Maastricht pose en effet problème. De nombreux politiciens appuyés par le FN lors des dernières élections régionales, notamment François Million, sont partisans d'une Europe fédérale.

La responsabilité première de la capacité du FN à augmenter son influence incombe aux staliniens du Parti Communiste français (PCF) qui fut le plus grand parti politique en France au cours des deux décennies qui ont suivies la Seconde guerre mondiale. Dans les années 80, le PCF a abandonné sa politique de réformes sociales pour privilégier les coupures sociales. Il apporta ensuite son soutien ;a l'application de ces politiques en participant au « gouvernement des gauches ». au niveau des conseils régionaux, le PCF s'est montré tout aussi raciste que le FN lorsque des maires issus d es rangs du parti communiste ont supervisé l'éviction forcée de travailleurs immigrés. Le chauvinisme du PCF s'exprime également dans sa politique de « la France d'abord ».

En attaquant la classe ouvrière directement au nom du grand Capital en tant que membres du gouvernement bourgeois pendant les années 80 et 90, le PCF et le PS ont poussé des couches inférieures de la classe moyenne et même des sections plus réactionnaires de la classe ouvrière dans les bras des démagogues fascistes. Sous le gouvernement droitiste d'Alain Juppé, les syndicats se sont alliés au PS et au PCF afin de démobiliser l'opposition de masse qui a culminé avec les grèves de novembre et décembre 1995 et dirigé le soutien derrière les social-démocrates de Jospin, le PCF et les Verts.

Maintenant que ces partis sont au pouvoir, ils font tout leur possible pour permettre au FN de résoudre sa crise. Leur réaction est de donner la main et de collaborer encore pus avec la soi-disant « droite républicaine » formées de sections du RPR et de l'UDF opposées à toute alliance ouverte avec le FN. Le Parti socialiste est actuellement engagé dans une campagne pour « déstabiliser les alliances entre la droite et le FN » à l'échelon des conseils régionaux en appelant à l'élection de politiciens UDF et RPR comme conseillers régionaux. De cette façon, le PS crée les conditions politiques où l'extrême-droite pourra résoudre sa crise sans qu'aucune intervention indépendante de la classe ouvrière et prépare en conséquence la voie à de futurs désastres.

 

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