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Le gouvernement Chrétien lance un nouvel assaut sur les chômeurs

Par François Legras
20 octobre 1998

Le gouvernement libéral de Chrétien se prépare à mener un nouvel assaut contre l'assurance-chômage. En effet, le ministre des Finances, Paul Martin, a annoncé qu'il allait changer la loi pour permettre au gouvernement de légalement détourner les milliards de dollars accumulés dans la caisse de l'assurance-emploi.

Sur papier, la caisse déborde actuellement d'un surplus qui va atteindre $20 milliards d'ici la fin de l'année, accumulé à raison de 5 milliards par année. En vertu de la loi sur l'assurance-emploi et de la constitution, la caisse est indépendante de la caisse générale de l'État et l'argent ne peut pas servir à d'autres fins que celles prévues dans la loi, principalement de payer les chômeurs admissibles.

Le gouvernement Chrétien avait jusqu'à maintenant affirmé que les surplus étaient accumulés dans un fonds de réserve en vue des temps difficiles. C'était devenu un secret de polichinelle qu'en fait les surplus étaient saisis pour combler le déficit et payer la dette. Mais le 26 septembre, pour la première fois, le premier ministre Chrétien a dû avouer que non seulement il n'y avait pas « ... de caisse de côté avec de l'argent dedans » , mais aussi qu'il allait continuer à saisir les surplus pour financer les opérations du gouvernement ainsi que des baisses d'impôt sur les revenus des particuliers.

Cette proposition a soulevé un tollé de protestations du milieu des affaires et révélé une division significative entre la grande et la petite entreprise au Canada. Le Conseil Patronal sur les Questions Nationales (CPQN), qui représente les 150 plus importantes entreprises au Canada, appuie la politique du gouvernement sur l'utilisation des surplus, tandis que le Parti Réformiste, le Parti Conservateur ontarien et les gouvernements des autres provinces s'y opposent.

La petite entreprise soutient que les cotisations à la caisse sont une taxe sur la masse salariale qui doit être radicalement réduite pour assurer leur compétitivité, tandis que le CPQN avance l'argument que les taxes sur la masse salariale au Canada sont moins élevées que dans les autres pays industrialisés. Le CPQN demande au ministre Martin de réduire l'impôt personnel, en particulier la surtaxe de 5% imposée aux salariés les mieux payés, ce qui aurait pour effet d'augmenter les revenus des riches, tout en diminuant les demandes d'augmentation de salaires des professionnels qualifiés qu'ils embauchent.

Mais toutes les sections de la classe dirigeante sont d'accord sur un point central : il n'est pas question d'investir un dollar dans le régime d'assurance-chômage. D'une part, le patronat veut enlever toute marge de manoeuvre au gouvernement et maintenir la pression fiscale sur ce dernier pour qu'il intensifie sa politique de coupures dans les dépenses sociales. D'autre part, les profondes coupures dans l'assurance-chômage assurent à la grande entreprise une vaste réserve de travailleurs qui, sans autres ressources, sont forcés d'accepter de travailler à n'importe quelles conditions.

L'assaut contre l'assurance-chômage n'a pas été essentiellement motivé par une question d'équilibre budgétaire, mais fait partie du virage vers la droite de la bourgeoisie en matière de politique sociale. Depuis le début des années 90, ce virage s'est accéléré et un vaste transfert d'argent a été effectué des poches des travailleurs vers les coffres des banques et des grandes entreprises par la destruction des programmes sociaux. Ces programmes, surtout l'assurance-chômage, étaient le dernier mince filet de sécurité qui évitait aux travailleurs sans emploi de tomber dans le dénuement et l'exploitation sans limites.

La politique de démantèlement

L'accumulation d'un surplus ne vient pas surtout d'une diminution du nombre de chômeurs, mais des coupures et des restrictions imposées par le gouvernement fédéral conservateur puis son successeur libéral. Les contre-réformes des années 90 ont exclu plus de la moitié des travailleurs du régime et ont transformé la loi en une nouvelle forme de taxe régressive.

La loi actuelle oblige le maintien d'un équilibre entre les revenus de la caisse et les prestations versées. À la fin de l'année, il devrait y avoir une réduction de 25 à 30 % des cotisations, l'équivalent du surplus annuel actuel. C'est cet échéancier qui a forcé le ministre Martin à montrer ses cartes. Pour y faire face, il se prépare à éliminer l'ajustement obligatoire des cotisations pour permettre la croissance du surplus ou, comme il l'a laissé entendre, éliminer la comptabilisation séparée de la caisse du reste des finances du gouvernement.

Le ministre Martin a entre autres rejeté la proposition de Pettigrew, le ministre des ressources humaines, responsable de la loi sur l'assurance-emploi, qui consistait à utiliser 200 à 300 millions des surplus pour prolonger plusieurs programmes d'employabilité mis en place lors de la réforme de 1996 et arrivés à terme.

Le gouvernement Chrétien a intensifié le démantèlement entrepris par le gouvernement conservateur de Mulroney en 1990, puis étendu en 1993. Ce sont les réformes de Chrétien en 1994 et surtout en 1996 qui ont finalisé la transformation du régime, d'un filet de sécurité social en une taxe qui contribue à l'appauvrissement des travailleurs en les excluant des prestations pour les pousser vers des emplois à bas salaires.

Quelques chiffres illustrent ce fait : la première année de la mise en oeuvre de la réforme de 1996 a vu le montant des prestations versées par chômeur éligible passer de 7300$ à 3900$, une chute de près de 50% en un an. Le montant total des prestations versées a baissé de 11,5% en un an. En 1997, seulement 42 pourcent des chômeurs ont pu recevoir des prestations de chômage, comparativement à 83 pourcent en 1989 et à 90 pourcent en 1971.

La réduction des impôts sur le revenu semble être la voie prisée par le gouvernement quant à l'utilisation des surplus. Ottawa va prendre l'argent des cotisants pour le remettre dans les poches de la classe dirigeante et de sections privilégiées de la classe moyenne. L'impôt sur le revenu est une taxe progressive, qui augmente selon le revenu net. Il sert à financer les programmes sociaux et à réduire ainsi les inégalités sociales. En utilisant les cotisations à la caisse de chômage, c'est-à-dire une taxe régressive assumée en majorité par les bas salariés ( à partir d'un certain revenu il n'y a plus de cotisation supplémentaire à payer ) pour réduire les impôts, le gouvernement va accroître les inégalité sociales.

Les prochains « temps difficiles » en prévision desquelles l'argent était amassé, selon Chrétien, risquent en effet d'être très difficiles pour les travailleurs. Durant la dernière récession de 91-92, un membre d'une famille sur trois avait reçu de l'aide financière de l'assurance-chômage. Une nouvelle vague de mises-à-pied s'annonce, sans le mince « filet de sécurité » de l'assurance-chômage; et les travailleurs vont être livrés à une compétition féroce pour tenter d'avoir et de maintenir un emploi dans des conditions similaires à celles des années trente.

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