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Rapport mondial sur le développement humain de l'ONU :

Augmentation des inégalités sociales et de la pauvreté dans le monde

Par Michael Conachy
Le 6 août 1999

Selon le dernier rapport mondial annuel des Nations Unies sur le développement humain (UNHDR) publié le mois dernier, « les inégalités dans les revenus et les niveaux de vie dans le monde ont atteint des proportions grotesques ».

Alors que 1,3 milliard de personnes luttent pour survivre avec moins d'un dollar par jour, les 200 personnes les plus riches de la planète ont doublé le montant net de leur richesse entre 1994 et 1998 pour atteindre plus d'un billion $US. Les trois plus gros milliardaires de la planète possèdent à eux seuls plus de biens que le produit intérieur brut de tous les pays les moins développés et leur population totale de 600 millions de personnes.

Environ 840 millions de personnes souffrent de malnutrition et près d'un milliard ont de la difficulté à satisfaire leurs besoins de consommation essentiels. Plus de 880 millions de personnes n'ont aucun accès à des soins de santé et 2,6 milliards à un système d'assainissement de base.

Loin de se rétrécir, l'écart entre les riches et les pauvres ne cesse de croître. Selon le rapport même, « certains avaient prévu une convergence des différences. Or, la dernière décennie a vu l'écart entre les revenus, les ressources et les richesses s'accroître parmi la population, les entreprises et les pays » .

L'écart des revenus entre le cinquième de la population mondiale des pays les plus riches et le cinquième de la population mondiale des pays les plus pauvres était de 74 pour 1 en 1997, en progression constante par rapport à 1990 (60 pour 1) et 1960 (30 pour 1). Les habitants des pays qui affichent les revenus les plus élevés possèdent 86 p. 100 du produit intérieur brut mondial, 82 p. 100 des marchés d'exportation internationaux, 68 p. 100 des investissements étrangers directs et 74 p. 100 des lignes téléphoniques de la planète. En contrepartie, les habitants des pays les plus pauvres ne représentent qu'un p. 100 de ces données.

Les pays de l'OCDE représentent 19 p. 100 de la population mondiale et contrôlent 71 p. 100 du commerce mondial des biens et services, en plus de consommer 16 fois plus que le cinquième le plus pauvre du globe.

Polarisation des biens et des revenus

Ces statistiques mondiales ne tiennent pas compte des énormes inégalités sociales au sein même des pays les plus riches. Certains données tirées des indices du développement humain du rapport montrent bien que cette polarisation des revenus affecte autant les pays industrialisés que les plus pauvres.

Aux États-Unis par exemple, le PIB réel par habitant en 1997 était de 29 010 $US, comparé à 992 $US pour les pays les moins développés. Cependant, le PIB réel du cinquième le plus pauvre de la population américaine n'était que de 5 800 $US, soit près de six fois moins que la moyenne, et neuf fois moins que le cinquième le plus riche qui s'élève à 51 705 $US. Selon les chiffres de 1989 à 1995, les indices montrent que 14,1 p. 100 de la population américaine subsiste avec seulement 14,40 $US par jour.

Des inégalités semblables se retrouvent dans tous les pays industrialisés. En Allemagne par exemple, ou le PIB moyen par habitant était de 21 260 $US en 1997, les 20 p. 100 les plus pauvres de la population affichaient un PIB moyen cinq fois moins important de 3 963 $US. Les 20 p. 100 les plus riches étaient près de dix fois plus riches avec un PIB réel par habitant de 38 164 $US. Au Royaume-Uni, la moyenne était de 20 730 $US, avec le cinquième le plus pauvre à 3 963 $US alors que le cinquième le plus riche était à 38 164 $US. À peine 13 p. 100 de la population du Royaume-Uni vit avec 14,40 $US par jour, tout comme font 11,5 p. 100 de la population allemande

Bien que les chiffres ne soient pas disponibles pour tous les pays pauvres, les inégalités y apparaissent encore plus criantes. En Zambie par exemple, le PIB réel moyen par habitant en 1997 était de 960 $US. Cependant, le cinquième le plus pauvre de la population enregistrait un PIB réel par habitant de seulement 216 $US, alors que le cinquième le plus riche affichait 2 797 $US. Près de 84 p. 100 de la population y subsiste avec un dollar par jour ou moins. En Guinée-Bissau, classé comme l'un des dix pays les plus pauvres au monde, le PIB moyen par habitant est de 810 $US. Quant au cinquième le plus pauvre, son revenu s'élevait en moyenne à 90 $US, et celui du cinquième le plus riche à 2 533 $US. Au moins 87 p. 100 de la population y vit avec moins d'un dollar par jour.

Les indices du Rapport mondial sur le développement humain servent à évaluer la pauvreté humaine des pays industrialisés en faisant appel à la combinaison de divers facteurs : pourcentage de la population dont l'espérance de vie est inférieure à 60 ans, taux d'alphabétisme fonctionnel adulte, pourcentage de la population vivant sous le seuil des 50 p. 100 du revenu personnel moyen disponible et taux de chômage à long terme. C'est ainsi que l'Allemagne se classe troisième sur 17 pays industrialisés avec un taux de pauvreté de 8 p. 100, alors que les plus élevés sont enregistrés aux États-Unis (16,5 p. 100), en Irlande (15,3 p. 100) et au Royaume-Uni (15,1 p. 100).

Bien que certains pays aient enregistré une croissance du revenu moyen par habitant au cours de la dernière décennie, plus de 80 pays affichent néanmoins un revenu par habitant plus faible depuis le début des années 1990 et 55 autres connaissent actuellement une tendance à la baisse. Les déclins les plus importants sont survenus en ex-URSS et en Europe de l'Est. Dans les pays de l'Afrique sud-saharienne, la chute du revenu moyen par habitant a été constante, ce dernier passant de 661 $US en 1980, à 550 $US en 1985, puis 542 $US en 1990 et enfin 518 $US en 1997 (chiffes exprimés en dollars américains de 1987).

Toujours dans l'ensemble de l'Afrique sud-saharienne, 50 p. 100 de la population n'a aucun accès à de l'eau potable, et 56 p. 100 est privée d'installations sanitaires. Un tiers des enfants âgés de cinq ans sont chétifs et plus du tiers de la population a une espérance de vie de moins de 40 ans.

Alors que des masses de personnes subsistent péniblement sans la moindre infrastructure sociale, les fusions et les acquisitions ont concentré de vastes ressources entre les mains de quelques transnationales seulement. En 1998, les dix plus grands fabricants de pesticides contrôlaient 85 p. 100 du marché mondial de 31 milliards $US et les dix plus grandes entreprises de télécommunications contrôlaient 86 p. 100 d'un marché de 262 milliards $US. Dans d'autres secteurs, les dix plus grosses entreprises contrôlent des parts de marché de près de 70 p. 100 en informatique, de 60 p. 100 en médecine vétérinaire, de 35 p. 100 en industrie pharmaceutique et de 32 p. 100 en semence commerciale.

Suite à cette concentration des ressources, les pauvres du monde entier ne profitent que peu des avancements technologiques et des connaissances. Dix pays seulement effectuent 84 p. 100 des dépenses mondiales en recherche et développement et contrôlent 95 p. 100 des brevets américains. La recherche est plus que jamais déterminée par le profit plutôt que par les besoins sociaux. « Lorsque vient le temps d'établir les programmes de recherches, c'est l'argent qui prime plutôt que les besoins. C'est ainsi que les produits cosmétiques et les tomates à mûrissement lent figurent en tête de liste des priorités, avant les plants résistants à la sécheresse ou le vaccin contre la malaria », toujours selon le rapport.

Le développement des échanges commerciaux, de nouvelles technologies, de l'investissement étranger et l'expansion des réseaux de communications ne sont pas également ou équitablement répartis à l'échelle mondiale. Ainsi, l'investissement étranger direct (IED) atteint 400 milliards en 1997, mais 58 p. 100 est allé aux pays industrialisés et seulement 5 p. 100 aux soi-disant économies de transition de l'Europe centrale et de l'Est. Et des sommes qui sont allées aux économies en développement ou de « transition » dans les années 1990, plus de 80 p. 100 est allé à 20 pays, dont principalement la Chine.

Crises financières

À la lumière des transferts massifs qui s'élèvent à 1,5 billion $US par jour sur les marchés de change mondiaux, le rapport signale que les marchés financiers internationaux produisent pour bien des gens « de brusques dérèglements douloureux dans leur existence quotidienne ». Loin d'être des incidents isolés, les crises financières provenant des accumulations et des redressements rapides des mouvements de capitaux à court terme sont « maintenant reconnus comme des caractéristiques systémiques du marché international des capitaux. »

Le tumulte financier en Asie orientale de 1997-1999 a entraîné des sorties de capitaux équivalentes à 11 p. 100 du PIB de l'Indonésie, de la Corée du Sud, de la Malaisie, des Philippines et de la Thaïlande. L'impact humain inclut la perte de 13 millions d'emplois seulement dans cette région et un déclin des salaires réels qui varie de 40 à 60 p. 100 en Indonésie.

La précarité de l'emploi n'est pas confinée aux régions de la planète frappées par la crise. La compétition mondiale affaiblit en effet la protection légale des emplois dans le monde entier, et des millions de travailleurs travaillent maintenant sans aucun contrat. En Europe, la croissance économique soutenue n'a pas entraîné de baisse du chômage, ce dernier étant resté à 11 p. 100 tout au long de la décennie, ce qui représente 35 millions de sans-emploi.

Dans les pays les plus pauvres, les paiements destinés à assurer le service de la dette combinés avec des revenus d'impôts la baisse ont entraîné de nouvelles compressions dans les services sociaux tels que la santé et l'éducation. C'est ainsi que la Tanzanie a dû dépenser neuf fois plus pour payer sa dette que dans la santé, et quatre fois plus que dans l'éducation primaire.

Les problèmes de santé et environnementaux ne cessent de croître. Plus de 16 000 personnes sont infectées par le virus HIV du SIDA tous les jours, 95 p. 100 des nouveaux cas étant recensés dans les pays en voie de développement. Neuf pays africains prévoient enregistrer une baisse de 17 ans de l'espérance de vie moyenne de leur population d'ici 2010 à cause du SIDA, ce qui les ramène aux niveaux des années 60. Chaque année, près de trois millions de personnes meurent de la pollution de l'air, et plus de cinq millions décèdent suite à des maladies diarrhéiques causées par la contamination de l'eau.

Selon le rapport, l'insécurité économique et sociale provoque l'éclatement de la cohésion politique de la communauté. Des 61 principaux conflits armés recensés entre 1989 et 1998, il n'y en avait que trois qui opposaient des États différents, tous les autres étant des guerres civiles.

Le rapport signale également la croissance du crime organisé. Il estime que six grands syndicats du crime contrôlent quelques 1,5 billion $US, rivalisant ainsi avec les transnationales en matière de biens possédés et d'influence économique. On estime que le commerce illégal des stupéfiants représente 8 p. 100 du commerce mondial, ce qui le place devant le commerce des véhicules automobiles, du fer et de l'acier. Le blanchiment d'argent est évalué correspondre à l'équivalent de 2 à 5 p. 100 du PIB mondial.

Les marchés sont incompatibles avec l'idée de l'égalité sociale

Sous-titré la mondialisation à visage humain, le rapport de l'ONU met l'accent sur l'interdépendance croissante de la population mondiale qui résulte de la mondialisation des processus économiques. Les auteurs se disent préoccupés par l'exclusion des pauvres, de régions et de pays entiers des aspects positifs de ce processus.

La mondialisation est « entraînée par l'expansion du marché qui ouvre les frontières nationales au commerce, à la circulation des capitaux et de l'information, faisant ainsi fi de la gestion des marchés et de leur répercussions sur les gens ». Les auteurs démontrent que le débat économique et les prises de décision actuels négligent « les préoccupations humaines plus vastes » telles la vie, la liberté, la justice, l'égalité et la tolérance. « Les marchés concurrents sont peut être la meilleure garantie d'efficacité, mais pas nécessairement de l'équité... Et les marchés ne sont pas la seule voix et ils ne doivent pas avoir le dernier mot en matière de développement humain » toujours selon les auteurs du rapport.

Bien qu'ils critiquent les excès du marché, les auteurs n'ont rien d'autre à offrir que quelques demandes de régulation et de contrôle. Leur prise de position est résumée dans l'avant propos du rapport qui est signée par l'administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Mark Malloch Brown. « En dressant la liste des répercussions négatives des marchés sur les populations, il est important de ne pas donner l'impression de rejeter le marché comme principe organisateur central de la vie économique mondiale. Les marchés ont besoin d'institutions et de règles, et trop souvent ils ne sont pas adéquatement assujettis au contrôle de l'un et de l'autre sur l'arène mondiale. »

Ce qui manque dans ce rapport, cependant, ce n'est pas seulement une politique alternative, mais également les moyens de mettre en uvre même la plus petite des règles économiques mondiales dans des conditions où les rivalités nationales s'intensifient. Ayant présenté un acte d'accusation atterrant du fonctionnement du marché capitaliste, l'ONU est incapable de tirer les conclusions qui s'imposent : pour abolir la pauvreté et les inégalités sociales, il faut remplacer l'anarchie du marché et de la production pour le lucre personnel par un nouveau principe organisateur de la vie économique mondiale : l'utilisation planifiée des immenses ressources de la planète pour satisfaire les besoins sociaux de l'ensemble de l'humanité.

 

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