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Questions sans réponses de l'accord OTAN-Russie

Par Martin McLaughlin
Le 8 mai 1999

Les représentants du G8 (États-Unis, France, Grande-Bretagne, Allemagne,Italie, Canada, Japon et Russie) ont annoncé le 29 avril dernier qu'ils étaient parvenus, après des semaines de manoeuvres diplomatiques entre les puissances de l'OTAN et la Russie, à conclure un accord pour mettre fin à la guerre dans les Balkans. Mais ce dernier laisse toute une myriade de questions sans réponse sur l'avenir du Kosovo.

Plus important encore, l'accord ne fait aucunement référence aux bombardements et par conséquent ne livre aucun détail quant aux circonstances sous lesquelles la destruction aérienne de la Yougoslavie prendrait fin. Le président yougoslave Slobodan Milosevic a déclaré que son gouvernement ne participerait à aucun effort diplomatique tant que les bombardements allaient continuer.

Bien que les ministres du G8 se soient entendus pour créer une force internationale au Kosovo, sa composition exacte (troupes de l'OTAN ou non, participation de la Russie, etc.) et le type d'armement qu'elle pourrait posséder sont restés vagues, de même que la question de savoir si Belgrade doit approuver l'accord et permettre l'entrée de cette force sur ce qui est toujours selon les lois internationales le territoire yougoslave.

D'autres points essentiels sont toujours laissés sans réponse : les forces yougoslaves devront-elles être retirées entièrement du Kosovo ? En quoi consiste exactement la « démilitarisation » de l'Armée de libération du Kosovo (UCK) et comment sera-t-elle appliquée ? Et enfin, quel type d'administration par intérim doit être mise sur pied au Kosovo selon les termes d'une éventuelle résolution du conseil de sécurité de l'ONU ?

L'accord du G8 ne laisse aucune possibilité tant aux Serbes qu'aux Kosovars de s'exprimer pour déterminer les conditions dans lesquelles la guerre doit se terminer ou sur la façon dont la province du Kosovo doit être réorganisée, ce qui est très significatif. Ces tâches sont en effet laissées au Conseil de sécurité de l'ONU (c'est à dire aux cinq grandes puissances ayant droit de veto) et à l'OTAN.

Voilà qui souligne le caractère profondément antidémocratique de la diplomatie pratiquée par les grandes puissances dans les Balkans. Malgré toutes les prétentions de sympathie des États-Unis pour le sort des Kosovars, malgré toute la démagogie de Moscou qui se prétend solidaire de ses frères serbes, les peuples de l'ex-Yougoslavie ne sont rien de plus que des pions sur l'échiquier de Clinton, Eltsine et des impérialistes européens.

Le rôle du régime Eltsine dans la crise des Balkans revêt une importante signification. Pour la première fois depuis la chute de l'Union Soviétique, la Russie intervient en effet en tant que puissance bourgeoise dans une crise internationale majeure. Ses actions reflètent les intérêts de la nouvelle classe bourgeoise russe, représentée par l'ancien premier ministre Victor Tchernomyrdine qui a été nommé par Eltsine comme son principal représentant dans les Balkans.

Ancien dirigeant de Gazprom, le monopole gazier de l'ère soviétique devenu depuis l'une des plus grandes entreprises capitalistes de Russie, Tchernomyrdine est représentatif des couches les plus corrompues des anciens bureaucrates staliniens transformés en millionnaires capitalistes. Il entretient d'étroites relations avec des capitalistes allemands possédant de gros investissements dans Gazprom et dans l'ensemble des industries pétrolière et gazière russes.

La nomination de Tchernomyrdine signale par conséquent que le régime russe a pris la décision de s'allier avec l'Allemagne contre les États-Unis en matière de politique balkanique. C'est un fait bien connu dans les cercles dirigeants américains qui n'est toutefois pas commenté en public ­ hormis dans l'éditorial incendiaire du Wall Street Journal du 7 mai dernier dans lequel l'accord du G8 était dénoncé comme une capitulation face à Milosevic et où il était suggéré que l'Allemagne et la Russie faisaient cause commune contre les États-Unis.

Tant les bourgeoisies russe et allemande se préoccupent des implications à long terme que revêt une présence militaire américaine substantielle dans les Balkans, notamment à la lumière de la poussée agressive des sociétés pétrolières et gazières américaines dans le bassin de la mer Caspienne.

Les pourparlers du G8 démontrent non seulement les énormes désaccords qui existent entre les États-Unis et la Russie, mais également les divergences croissantes entre les puissances européennes et les États-Unis d'un côté, mais aussi entre les Européens. Alors que les États-Unis continuent de demander le retrait total des soldats et des policiers yougoslaves du Kosovo, plusieurs des puissances européennes de l'OTAN et la Russie ont décrit cette demande comme incompatible avec le maintien de la souveraineté yougoslave dans cette province.

Les responsables américains ont été visiblement consternés de voir réapparaître Ibrahim Rugova, l'ancien chef du gouvernement albanais non officiel du Kosovo au cours des dix dernières années. Le département d'État s'est en effet tourné vers l'UCK comme principal instrument de sa politique au Kosovo, et le mois dernier, des rapports circulaient selon lesquels Rugova aurait été tué par des Serbes.

Par conséquent, l'arrivée de Rugova à Rome pour des pourparlers avec le premier ministre italien Massimo D'Alema et le ministre des Affaires étrangères Lamberto Dini a fait l'effet d'un choc direct pour Washington. Des responsables américains ont suggéré que sa libération n'était qu'un stratagème de Milosevic pour saper le support italien et allemand aux bombardements de l'OTAN, une attitude qui indique bien qui apparaît comme étant la véritable source de danger pour l'administration Clinton et sa politique dans les Balkans.

Les démonstrations d'enthousiasme en public de l'administration Clinton à propos de l'accord du G8 ne découlent pas du fait qu'une solution diplomatique à la crise des Balkans est imminente. Bien au contraire, les pourparlers de Bonn permettent au département d'État et au Pentagone de parler de paix tout en intensifiant en fait la guerre.

En jouant la carte diplomatique, les États-Unis apaisent le sentiment anti-guerre croissant en Europe, tout en mettant de l'avant une campagne de bombardement toujours plus brutale et déchaînée et les préparatifs d'un assaut terrestre. Le tout, sans faire la moindre concession que ce soit à la Yougoslavie, la Russie, ou aux rivaux européens du capitalisme américain.

Les indications selon lesquelles la Russie ne s'opposera pas à l'hégémonie de l'OTAN dans les Balkans, ce qui équivaut à encourager l'agression et l'imprudence des États-Unis, rendent en fait la possibilité d'un conflit majeur encore plus plausible.

La seule conséquence bénéfique des manoeuvres diplomatiques du début de mai a été que le voile de la rhétorique humanitaire a commencé à se déchirer et que les véritables intérêts politiques et économiques qui ont entraîné l'intervention des États-Unis et de l'OTAN dans les Balkans commencent à apparaître au grand jour.

Au fur et à mesure que le conflit va aller en s'amplifiant, les événements au Kosovo seront de plus en plus relégués au second plan alors que les questions essentielles qui divisent les grandes puissances capitalistes prendront le devant de la scène. Ceux qui se seront laissés manipuler par les médias auront alors raison d'être décontenancés par leur crédulité.

Voir ausi:
Les bombes de l'OTAN tombent sur la Serbie : Le « nouvel ordre mondial » prend forme 25 mars 1999
Les États-Unis et l'OTAN préparent l'opinion publique à la guerre terrestre contre la Serbie 30 mars 1999
Les troupes au sol vont-elles suivre ? Les bombes américaines tombent sur la capitale yougoslave 3 avril 1999
Derrière la guerre de Balkans; Réplique à un partisan des bombardements des États-Unis et de l'OTAN contre la Serbie 6 avril 1999
La « thérapie de choc » du FMI et la recolonisation des Balkans 17 avril 1999
Des "casques bleus" aux faucons, le Canada et la guerre menée par l'OTAN en Serbie 30 avril 1999
Comment l'ambassade de Chine a t-elle pu être bombardée par erreur ? 10 mi 1999


 

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