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La force d'occupation américaine évacue Haïti, laissant un pays en ruines

Par Jacques Richard
Le 17 février 2000

En septembre 1994, une force d'occupation américaine de 20.000 hommes débarquait sur l'île caraïbéenne d'Haïti et remettait au pouvoir Jean-Bertrand Aristide, le président élu qui avait été renversé trois ans plus tôt dans un coup d'état sanglant. Il y a deux semaines, l' «Opération Restaurer la Démocratie » a connu une fin peu glorieuse. Alors que des gangs, composés en large mesure de membres de l'armée haïtienne dissoute, terrorisent la population au grand jour et que la violence de nature politique s'intensifie à l'approche des élections parlementaires prévues pour le mois prochain, les 300 derniers soldats américains en poste en Haïti ont plié bagage.

Lorsque les marines américains sont arrivés en Haïti, ils ont été accueillis presqu'en libérateurs par une population ayant subi les effets combinés de trois années de dictature militaire et d'un embargo économique dirigé par les Etats-Unis. Les dernières troupes américaines, par contraste, se sont retirées sans tambour ni trompette que ce soit en Haïti ou à Washington. Il n'y a pas si longtemps, le président américain Bill Clinton parlait du développement démocratique et du renouveau économique d'Haïti comme étant un objectif majeur de la politique étrangère de son administration. Maintenant, il en fait rarement mention. La question se pose : pourquoi l'Administration Clinton, l'establishment des services de sécurité américains et les médias de la grande entreprise sont-ils sont réticents à dresser un bilan public de l'intervention américaine en Haïti?

Une catastrophe sociale

Les quelques articles qui ont paru dans la presse nord-américaine sur Haïti tracent un portrait dévastateur. « Soixante pourcent de la population du pays le plus pauvre de l'hémisphère occidental est encore illettrée et survit avec moins d'un dollar par jour », a rapporté le Washington Post en septembre dernier. Intitulé « Une nation dans le besoin : après cinq ans de présence américaine, la démocratie ne se porte pas bien en Haïti », le reportage du Washington Post reconnaît que l'intervention dirigée par les Etats-Unis n'a pas réussi à jeter les bases pour un quelconque développement économique ou démocratique d'Haïti. « Le système judiciaire historiquement corrompu et peu efficace fait toujours face à de sérieux problèmes.

« Alors que l'intervention internationale tire à sa fin, elle laisse derrière elle un état faible et financièrement coincé, incapable de satisfaire aux besoins élémentaires de son peuple. À peine un quart de la population a accès à de l'eau potable, et la plupart des Haïtiens n'ont ni électricité ni téléphone. Près de la moitié des enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition, et les dépenses annuelles per capita pour la santé sont de $21, comparativement à $38 en Afrique sub-saharienne. »

Un rapport plus récent du Toronto Star évalue ainsi les conséquences de l' « Opération Restaurer la Démocratie » : « La misère est aussi profonde, les détritus continuent de s'accumuler, les gens sont toujours aussi malades et la situation politique reste aussi fragile qu'elle l'était, disons, il y a cinq ans. Sur toutes les questions cruciales, les choses continuent d'empirer. Il n'y a pas de junte militaire certes, mais il y a la répression politique, la peur, de continuels troubles politiques et l'émergence d'un autre genre de Tontons Macoutes, l'ancienne machine à tuer de la dictature des Duvalier. » L'article soulève la question clé : « Pourquoi les conditions ne se sont-elles pas améliorées malgré un haut niveau d'assistance et de participation étrangères? »

Dans la mesure où des politiciens et diplomates américains, canadiens et occidentaux fournissent la moindre réponse à cette question, c'est pour blâmer le peuple haïtien lui-même. Selon Michael Duval, représentant permanent du Canada à l'ONU, « la responsabilité de la reconstruction d'Haïtiet du maintien d'un environnement politique sécuritaire et stable revient surtout au peuple et au gouvernement d'Haïti ».

Ces sermons cyniques visent à brouiller les pistes historiques. Au cours du vingtième siècle, les Etats-Unis ont utilisé leur puissance militaire et économique pour empêcher tout changement socio-économique radical en Haïti. Washington a appuyé à maintes reprises des dictatures qui servaient à préserver les privilèges d'une mince élite locale, tout en maintenant les masses haïtiennes dans la misère.

La dictature de trois décennies de la famille Duvalier était un allié majeur des Etats-Unis dans le cadre de la guerre froide dans les Caraïbes et en Amérique centrale. L'armée haïtienne qui a été dissoute durant l' « Opération Restaurer la Démocratie » avait été créée par les Etats-Unis durant une précédente occupation militaire américaine, de 1915 à 1934.

Les véritables motifs de Washington

Pour comprendre le résultat de la plus récente intervention américaine en Haïti, il faut d'abord se pencher sur ses véritables motifs. Dès le départ, il faut rappeler qu'une section importante de l'élite politique s'opposait à toute action contre le régime militaire haïtien, préférant exercer la domination américaine sur Haïti par les moyens traditionnels.

Les Républicains ont dénoncé Aristide comme étant un radical atteint de démence, et ils ont continué à s'opposer à son retour à la présidence même après qu'il ait ouvert les bras à une armée américaine d'occupation et ait accepté d'implanter les diktats du FMI. La furieuse opposition des Républicains à Aristide confirme la rumeur que la CIA, sinon l'administration Bush elle-même, a donné le feu vert à son renversement en 1991.

Plusieurs raisons expliquent pourquoi le successeur de Bush, Bill Clinton, a décidé de renverser, ou plutôt écarter en douce, le gouvernement militaire haïtien. Cependant, la question centrale qui réside au cur de toutes ces raisons était de trouver la meilleure façon de maintenir la domination économique et géopolitique américaine dans le monde de l'après-guerre froide.

Au lendemain du coup d'état de 1991, le parti démocrate de Clinton avait critiqué l'administration Bush pour avoir renvoyé chez eux des réfugiés haïtiens qui cherchaient à s'enfuir en Floride. À son arrivée au pouvoir, Clinton ne pouvait continuer cette pratique impitoyable sans porter préjudice à sa crédibilité tant au niveau national qu'international. Il lui fallait par conséquent un changement dans la scène politique haïtienne qui servirait, si ce n'est à stopper le flot des réfugiés haïtiens dans les eaux américaines, du moins à fournir à la nouvelle administration américaine un prétexte pour les renvoyer.

L'administration Clinton s'est tournée vers Aristide, qui vivait alors en exil à Washington et s'efforçait de convaincre le congrès et la maison blanche qu'il ne représentait aucune menace aux intérêts américains. Tandis que des ultra-droitistes tels le sénateur républicain Jesse Helmes continuaient de condamner l'ex-prêtre catholique comme étant un « communiste », le département d'état américain s'échauffait à l'idée qu'Aristide et ses conseillers, recrutés alors en grande partie parmi les intellectuels haïtiens vivant aux Etats-Unis et au Canada, pourraient mieux servir les objectifs américains que le régime militaire instable de Port-au-Prince.

En 1993, les Etats-Unis ont réuni Aristide et les dirigeants du régime militaire à Governor's Island pour des négociations face-à-face. Alors que le chef de la junte, Raoul Cédras, était prêt à donner de vagues assurances que les militaires se retireraient éventuellement du pouvoir, lui et les autres généraux ont bondi à toute suggestion qu'Aristide soit remis au pouvoir. Une entente était censée avoir été conclue, mais le régime militaire n'a pas tardé à la renier. Lorsqu'un navire militaire américain, le USS Harlem, a cherché à s'accoster à Port-au-Prince, le personnel américain a été chassé par un gang envoyé par la junte militaire.

Ce tour pris par les événements a poussé la Maison blanche à se résoudre à se débarrasser des généraux. L'attitude de défi de la junte haïtienne menaçait de couper court à la crédibilité internationale de la nouvelle administration. Cela se passait au moment où les Etats-Unis cherchaient à profiter de l'effondrement de l'URSS pour déployer leur force de frappe et s'ériger en gendarme dans le nouvel ordre mondial, tentative qui avait déjà été sérieusement contrariée par l'échec de l'intervention américaine en Somalie. Comme en Somalie, une intervention américaine en Haïti pouvait être présentée sous une façade démocratique et servir à légitimer l'utilisation de la force militaire américaine aux yeux des Américains et de l'opinion publique mondiale.

Deux autres facteurs ont sans aucun doute joué un rôle majeur dans la décision de l'administration Clinton, après l'échec de l'accord de Governor's Island, d'intensifier la pression sur la junte et de préparer une occupation à part entière d'Haïti.

Premièrement, il y avait des craintes réelles que les militaires commençaient à perdre leur emprise sur Haïti et que le pays serait bientôt secoué par des soulèvements sociaux.

Deuxièmement, il y avait le rôle d'Aristide lui-même : sa popularité parmi le peuple haïtien, à cause de son opposition courageuse à la dictature des Duvalier et de ses successeurs, combinée à une servitude manifeste envers Washington.

La transformation d'Aristide en un pion américain, prêt à donner sa bénédiction à l'occupation d'Haïti par une puissance étrangère qui avait été le principal soutien de la dictature des Duvalier, était le résultat logique de sa politique antérieure. Lors du coup d'état de 1991, Aristide avait ordonné à ses partisans en Haïti, surtout dans les quartiers ouvriers, de s'abstenir de toute « violence », ou en d'autres mots, d'accepter la prise du pouvoir par les militaires.

Il les a conseillés de faire plutôt confiance aux Nations Unies et à la « communauté internationale », avant tout le Canada, la France et les Etats-Unis, pour que ceux-ci fassent pression pour un retour de la démocratie. Ainsi, dès le début, les espoirs d'Aristide pour un retour au pouvoir étaient liés aux intrigues de la diplomatie des grandes puissances. Cela signifiait qu'il devait prouver à l'impérialisme qu'il serait un meilleur garant de l'ordre social que ses opposants militaires.

Durant les négociations et les manuvres qui ont ultimement résulté en son retour au pouvoir, Aristide a fait d'autres concessions, acceptant de servir d'instrument pour briser le contrôle de l'état haïtien - c'est-à-dire les militaires et le gouvernement mené par Cédras - sur une bonne partie de l'économie. Les investisseurs étrangers pourraient ainsi avoir un plus grand accès aux ressources et aux marchés haïtiens.

En 1993, durant les négociations de Governor's Island, Aristide avait accepté un programme dicté par le FMI qui exigeait le maintien de bas salaires, la privatisation des entreprises d'état, et l'élimination des tarifs et autres mesures de contrôle sur les importations. Un an plus tard, il était forcé de donner un engagement encore plus détaillé qui allait dans le même sens. Ce marchandage n'était pas un secret. En avril 1995, le premier ministre haïtien d'alors, Smarck Michel, a expliqué que la politique économique de son gouvernement n'était pas définie par le cabinet, mais par « deux documents précis qui faisaient partie de toutes les négociations qui ont assuré le retour du président ».

Suppression des preuves de la complicité américaine

Le fait que l' « Opération Restaurer la Démocratie » n'avait rien à voir avec ce qu'elle prétendait être a été clairement démontré par les efforts déployés par les Etats-Unis pour protéger les dirigeants du coup d'état et rassurer leurs partisans au sein de l'élite haïtienne. Comme condition pour son retour au pouvoir, Aristide a dû accepter que les trois années du pouvoir militaire soient comptabilisées comme une partie intégrante de son propre mandat présidentiel. (La constitution du pays l'empêchait déjà de briguer un second mandat consécutif.)

Washington de son côté a tout fait pour satisfaire les dirigeants militaires. Avant que le premier soldat américain débarque en Haïti, l'ancien président américain Jimmy Carter s'est rendu à Port-au-Prince pour conclure une entente qui assure qu'aucune confrontation ne prenne place entre soldats américains et haïtiens. Il a également arrangé un départ sécuritaire et profitable pour le chef du coup d'état, le général Cédras, ainsi que ses complices. Non seulement Cédras a-t-il pu aller impunément en exil doré à Panama, mais les Etats-Unis ont aussi dégelé ses comptes bancaires et même accepté de lui verser des milliers de dollars par mois pour louer ses villas de Port-au-Prince durant l'occupation.

La toute première opération menée par la force d'occupation américaine a été de prendre contrôle du quartier général du FRAPH, une force paramilitaire établie par les dirigeants du coup d'état. L'armée américaine a vite fait de saisir plus de 150.000 pages de documents détaillant les opérations du FRAPH.

Ces documents, qui forment un véritable catalogue de la terreur commise par le FRAPH en collaboration avec les militaires, ont été par la suite transférés à l'ambassade américaine, où ils demeurent jusqu'à ce jour. Washington a rejeté les demandes des autorités haïtiennes et de l'ONU pour qu'ils soient rendus au gouvernement haïtien. Néanmoins, il a été révélé que le chef du FRAPH, Emmanuel Constant, était au service de la CIA.
De son côté, le département d'état américain a admis l'existence de liens entre les Etats-Unis et le FRAPH, en se déclarant prêt à rendre les documents du FRAPH à condition de pouvoir éliminer les références à un « petit nombre » de citoyens américains.

Grand cas a été fait par les partisans de l' « Opération Restaurer la Démocratie » de la dissolution de l'armée haïtienne et son remplacement par une nouvelle Police nationale. Mais une section importante de l'armée a été incorporée à la nouvelle force.

Fait tout aussi significatif, la force d'occupation américaine s'est montrée peu désireuse de désarmer les soldats renvoyés du service. Et Aristide, dans le cadre de l'entente qui l'a remis au pouvoir, se devait de s'opposer à toute tentative de mobiliser les masses contre les partisans armés de la réaction. Selon l'Agence haïtienne de presse, « beaucoup reprochent à la force multinationale de n'avoir pas adopté des mesures adéquates pour désarmer les membres de l'ancienne armée, [et] les para-militaires ».

L'article du Toronto Star cité plus haut rapporte ceci : « La Police nationale haïtienne forte de 6.000 membres, entraînée initialement par la Police Montée [du Canada] sous l'égide des Etats-Unis, a été problématique. Elle a été impliquée dans des actes de bastonnade, des meurtres extrajudiciaires, la corruption et le trafic de la drogue. En mai dernier, l'ancien chef de la police Jean Coles Rameau a été arrêté après que la police ait mis les menottes à 11 hommes, pour ensuite les aligner contre un mur [dans un quartier ouvrier à l'ouest de la capitale] et les abattre de balles à la tête. Trois étaient soupçonnés d'être des gangsters, les autres étaient des passants.Un rapport de la coalition nationale pour les droits des Haïtiens fait état d'arrogance endémique de la part de la police. Des officiers paradent dans l'île comme les miliciens Tonton Macoutes de François Duvalier et de son fils Jean-Claude 'Baby Doc', ou les troupes de choc du dirigeant du coup d'état, le général Raoul Cédras. »

L'impact de l' « ajustement structurel » du FMI

La politique économique poursuivie par Aristide et son successeur, René Préval, sur les ordres du FMI, est l'antithèse de la véritable démocratie. Non seulement a-t-elle servi à perpétuer le contrôle de l'économie haïtienne par une minuscule élite, mais elle a accru la pauvreté et l'inégalité sociale, dans un pays où existe déjà un immense fossé entre les riches et les pauvres.

Une revue en profondeur de l'économie haïtienne, écrite en 1997 par Lisa McGowan et intitulée Ajustement Structurel et le mythe de l'Aide en Haïti, documente l'impact catastrophique des diktats du FMI sur les masses haïtiennes. « Le haut niveau de conformité par les gouvernements Aristide [et Préval] aux demandes du FMI et des pays donneurs », rapporte McGowan, « n'a apporté presqu'aucun avantage au peuple haïtien, et a très peu donné en termes d'investissements privés ».

Sur la privatisation, elle écrit : « Avant même que le président Aristide ne retourne en Haïti, l'aide des pays donneurs dépendait explicitement de son engagement à privatiser neuf entités sur une liste de plus de 40 entreprises d'état. La liste de priorité comprenait les compagnies d'électricité et de téléphone, une cimenterie et une minoterie, l'aéroport et les ports de la nation, une usine de fabrication d'huile de cuisine et deux banques d'état ».

« De nombreux citoyens haïtiens », continue McGowan, « voientles entreprises d'étatcomme étant une source clé de génération de revenuspour leur pays si dépourvu de ressources. Ce point de vue est entré en collision avec les calendriers et les priorités des pays donneurs ».

En septembre 1995, la résistance populaire et parlementaire à la privatisation était telle que le cabinet s'est abstenu de signer une lettre d'intention à la Banque mondiale qui engageait Haïti à mettre en vente encore plus d'entreprises d'état. Cela a entraîné la chute du gouvernement du premier ministre Smarck Michel.

Mais un an plus tard, après une visite en Haïti de Michel Camdessus, le directeur des opérations du FMI, une loi de privatisation était adoptée par le parlement. Le successeur d'Aristide à la présidence, son ancien premier ministre René Préval, a organisé la vente de feu de la cimenterie et de la minoterie au coût de centaines d'emplois. La compagnie de téléphone, l'aéroport et les ports d'Haïti, qui emploient ensemble plus de 7.500 travailleurs, sont les prochains sur la liste. Le gouvernement Préval a également coupé des milliers d'emplois dans le gouvernement par des retraites anticipées, bien que le taux réel de chômage en Haïti dépasse largement les 50 %.

Pour rassurer le FMI, la compagnie d'électricité a réduit son personnel et augmenté les tarifs de 21 % en novembre 1994. Puis, deux mois plus tard, le gouvernement Aristide annonçait une série d'incitatifs spéciaux pour attirer les investissements étrangers en Haïti. Ces incitatifs comprenaient une réduction des taux sur le téléphone et l'électricité, ainsi que les frais de douane.

Mais la principale carte d'Haïti dans la course pour attirer les investissements étrangers reste les bas salaires. Comme l'explique McGowan, « à US$2,40 par jour, le vrai salaire minimum vaut 40 % de moins aujourd'hui qu'en 1980, et est le plus bas de l'hémisphère ».

Mais pour le FMI, même ce salaire de misère est trop élevé. Il a fait abolir l'article 137 du code haïtien du travail, qui stipulait que le salaire minimum devait être augmenté chaque fois que l'inflation dépassait 10 % par année . « La loi de gel salarial exigée par le FMI signifie qu'avant de pouvoir augmenter les salaires de ses employés, le gouvernement devra d'abord licencier du personnel », écrit McGowan.

Malgré ces mesures, les investisseurs continuent d'ignorer Haïti, à cause de son manque d'infrastructures, sa force de travail peu formée et les craintes de troubles politiques. Au même moment, les réformes du FMI ont eu un impact dévastateur sur la paysannerie, qui constitue les deux tiers de la population d'Haïti. Selon McGowan, l'élimination des tarifs a placé les paysans haïtiens «en compétition directe avec les fermiers subventionnés et mécanisés d'autres pays, bataille qu'ils ne peuvent tout simplement pas gagner ».

« Il y a dix ans », continue McGowan, « les paysans produisaient presque tout le riz consommé en Haïti. Au cours de la dernière décennie cependant, ils ont reçu coup sur coup par les politiques commerciales et fiscales imposées dans le cadre de l'ajustement structurel.Le résultat est qu'Haïti ne produit aujourd'hui qu'environ 50% de ses besoins en riz ».

Résumant l'impact de l' « ajustement structurel » du FMI, McGowan déclare : « Au lieu d'aider l'économie haïtienne à surmonter ses distorsions, l'effet combiné des politiques du FMI a été d'imposer une camisole de force financière qui comprime l'activité économique générale. De telles politiques continuent de servir les intérêts d'un petit nombre de créditeurs, quelques investisseurs et consommateurs étrangers et une petite classe d'élites haïtiennes aux dépens du peuple haïtien ». (Le texte complet de son rapport se retrouve sur l'internet à l'adresse suivante : http://www.igc.org/dgap/haiti97.html).

Si les conditions des masses haïtiennes n'ont fait qu'empirer durant l'occupation américaine, c'est parce que les buts de cette entreprise - empêcher toute révolte populaire visant à restructurer radicalement la vie économique, raccommoder et renforcer un appareil d'état qui maintien la domination d'une mince élite locale, et ouvrir l'économie haïtienne à la domination effrénée du capital international - sont incompatibles avec une véritable démocratie et un véritable développement économique.

La vraie démocratie ne peut être établie que par le bas, par un mouvement qui articule le besoin des masses pour de vastes et profonds changements socio-économiques et qui, sous la direction de la classe ouvrière haïtienne, planifie et organise sa lutte dans le cadre d'une offensive internationale de la classe ouvrière contre le capital global.


 

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