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Le World Socialist Web Site lance un appel : opposons-nous aux attaques des extrémistes hindous contre la réalisatrice indienne Deepa Metha

 

Par le bureau de rédaction
28 février 2000

Le World Socialist Web Site dénonce la campagne des fondamentalistes hindous en Inde visant à stopper la production du dernier film de Metha Deepa, L'eau. Le WSWS fait appel à tous les réalisateurs, artistes, intellectuels et travailleurs du monde pour qu'ils prennent fermement position contre cette attaque sur les droits démocratiques.

Metha a été forcée de suspendre la production de L'eau suite à une campagne soutenue d'attaques violentes, de provocations bureaucratiques et de menaces physiques contre les comédiens et l'équipe de tournage du film par une coalition d'extrémistes hindous associé au Bharatija Janatha Party (BJP). Le BJP est le principal parti de la coalition gouvernementale et détient le pouvoir dans plusieurs provinces de l'Inde.

Le tournage du film, L'eau, dont le scénario se déroule dans les années trente et qui relate les souffrances de veuves frappées par la pauvreté dans un temple hindou, devait commencer le 30 janvier dernier à Varanasi, dans l'État d'Uttar Pradesh. Ce même jour, une émeute provoquée par des extrémistes hindous, dirigée par les politiciens locaux du BJP, a détruit le plateau de tournage, causant pour $650 000 de dommage. Ils prétendaient que le film dénigrait la veuve hindoue et faisait partie d'un complot chrétien contre l'hindouisme.

Le 6 février, Metha a dû quitter la province d'Uttar Pradesh après que le gouvernement de la province, dirigé par le BJP, ait bloqué la production du film deux fois de suite en sept jours sous prétexte qu'il était à la source de désordres sociaux. Bien que le premier ministre Atal Bihari Vajpayee prétende défendre Metha dans son droit à produire son film, il n'a rien fait pour empêcher les attaques orchestrées par le gouvernement provincial de concert avec les forces religieuses.

Vajpayee et le ministre de l'Intérieur, L. K. Advaani sont depuis toujours des membres du Rastriya Swayangsevak Sang (RSS) - une formation politique d'extrême droite, impliquée dans l'assassinat de Mahatma Gandhi en 1948. Le ministre de l'Industrie lourde, Manohar Joshi, est quant à lui, dirigeant du Shiv Sena, une organisation fasciste ainsi qu'un allié et un partenaire de coalition du BJP. Advani est celui qui a dirigé la campagne qui a mené à la destruction de la mosquée Babri Masjid dans l'Ayodhya en 1992 provoquant le pire massacre religieux depuis la partition de l'Inde en 1947. Une enquête menée par une commission judiciaire conclut que le Shiv Sena de Joshi avait utilisé la question de la mosquée Masjid pour fomenter et organiser les émeutes de Bombay en janvier 1993, qui ont mené à la mort de centaines de musulmans.

Le Shiv Sena et le Vishawa Hindu Parishad (Le Forum Hindou Mondial) ont tous deux juré de jeter Metha en dehors de l'Inde et certains groupes extrémistes religieux ont menacé de tuer ou de se faire tuer afin d'empêcher la production du film de Metha

Metha, dont les premiers films - Le feu (1996) et La terre (1998) - l'on mise en conflit avec l'extrémisme hindou, a déclaré qu'elle ne se laisserait pas intimider par ces menaces, qu'elle qualifie de « censure pré-production imposée par des voyous ». Elle a déclaré à un journal que si le film était définitivement stopper, cela représenterait « la fin de la démocratie en Inde ».

Ces avertissements devraient être pris au sérieux. La campagne des extrémistes hindous pour stopper la production du film de Metha n'est pas un incident isolé, mais fait partie de l'effort visant à imposer une conception idéologique étatique et nationaliste de droite en Inde basée sur certains aspects de la religion hindoue.

Le cinéma joue un rôle puissant en Inde. Ce n'est pas pour rien que les extrémistes hindous et leurs alliés ont pris pour cible les réalisateurs qui, d'une façon ou d'une autre ont présenté des oeuvres examinant d'un point de vue critique certains aspects de la société indienne.

Déjà, sous le régime légal indien actuel, les scénarios des réalisateurs étrangers, financés de l'étranger, voulant tourner en Inde, doivent être soumis et approuvés par le gouvernement central.

Si le scénario est approuvé, le gouvernement désigne un officier de liaison spécial avec de vastes pouvoirs l'autorisant à s'immiscer dans tous les aspects de la production. L'officier de liaison peut faire arrêter le tournage s'il juge que le réalisateur s'éloigne du scénario approuvé.

Ces restrictions à la liberté d'expression artistique ne se limitent pas aux productions de films étrangers. Des réalisateurs indiens - incluant Mani Ratnam, Mira Nair et Shekhar - ont aussi été victimes de la censure gouvernementale et des violences des extrémistes durant le tournage ou la production de leurs films. Ce type d'attaques n'est pas réservé exclusivement aux réalisateurs. La campagne contre Metha n'est qu'une parmi une série d'attaques contre les droits démocratiques des créateurs artistiques et des intellectuelles. Cette campagne prend de l'ampleur depuis la montée du BJP au cours de la dernière décennie.

Des attaques violentes ont été organisées contre des artistes, la plus récente étant celle contre M.F. Hussein, un peintre en vue de l'Inde. Hussein était accusé d'obscénité pour son nu des déesses hindoues, Saraswati et Draupadi. Au même moment, les forces du BJP au sein du gouvernement central et dans les États, ont demandé que le système d'éducation soit «hindouisé»; ils ont déjà réussi à imposer des changements dans les curriculums des écoles et dans certains textes scolaires.

À la mi-février, quelques jours avant l'expulsion de Metha de l'Uttar Pradesh par les extrémistes religieux, les forces du BJP-RSS ont ordonné, depuis leur position dominante au sein du Conseil indien de Recherche historique, d'arrêter la publication de deux volumes de Vers la liberté, un projet de publication en plusieurs volumes d'une série de documents historiques retraçant l'histoire de l'Inde. Les deux volumes en question ont été édités par des historiens de renom, le professeur Sumit Sarkar et le professeur K. N. Pannikkar.

Auteur de L'Inde Moderne et de plusieurs autres monographies historiques et d'articles spécialisés, Sakar est certainement en Inde un historien et un intellectuel de stature internationale et reconnu comme tel. Il a déclaré aux médias que le BJP tentait de remodeler le passé pour « l'assortir à son agenda fasciste » et que cela constituait « un geste vers l'élimination de la démocratie » en Inde.

Pannikkar, qui est président des archives historiques de l'université Jawaharlal Nehru, a averti que le BJP tentait de restructurer le système d'éducation indien en entier et de prendre le contrôle de son syllabus.

L'intimidation politique d'artistes et d'intellectuels par les forces gouvernementales et extrémistes n'est pas unique à l'Inde, mais l'expression manifeste d'un état de fait commun à travers le sous-continent indien: la montée de l'extrémisme religieux pour faire taire la dissidence politique.

L'auteur originaire du Bangladesh, Tasliman Nasren, est décrit comme un «ennemi de l'islam» dans ce pays, où ses livres ont été bannis. L'auteur en exil fait face à des accusations de blasphème et a été menacé de mort par des chauvins islamistes. L'année dernière, les extrémistes islamistes ont presque réussi à assassiner Shamsur Rahman, un des poètes les plus populaires du Bangladesh. Rahman avait été attaqué à la hache.

L'auteur indien internationalement reconnu, Salman Rushdie, fait toujours face au fatwa, un décret religieux émis il y a onze ans par Ayatollah Khomeini, appelant les musulmans à tuer l'auteur pour ses Versets Sataniques. Khordad-15 un groupe de fondamentalistes iraniens ont offert 2,5 millions de récompense à celui qui tuerait Rushdie.

Au Sri-Lanka, le gouvernement est si fragile qu'il ne peut tolérer la moindre critique. Des menaces de morts, des coups physiques et des explosions de résidences ont été utilisés contre des musiciens, des acteurs, des artistes et des intellectuels s'opposant au gouvernement de l'Alliance du Peuple.

Les attaques contre la liberté d'expression vont jusque dans les pays avancés, là où les fondamentalistes chrétiens et d'autres groupes de pressions conservateurs exercent beaucoup d'influence.

En septembre dernier aux États-Unis, le maire de New York Giuliani a tenté de fermer Sensation, une exposition d'artistes britanniques au Musée de Brooklyn, sous prétexte que l'art affiché faisait « violence au catholicisme » et était anti-religieux. Quelques semaines plus tard au Michigan, les autorités ont fermé une exposition d'art contemporain à l'Institut d'Art de Détroit.

À la fin novembre, la Galerie d'Art Nationale d'Australie, a annulé l'exposition Sensation, après que son directeur ait reçu quelques lettres de protestation et discuté de l'exposition avec le gouvernement conservateur de Howard. En Australie, les réalisateurs ont eux aussi à faire face aux gestes du gouvernement visant à imposer une censure cinématographique plus sévère.

L'an dernier la police berlinoise a perquisitionné et saisi des films provenant dans un magasin de location vidéo se spécialisant dans le répertoire classique et les oeuvres maisons.

Pourquoi la liberté d'expression artistique est-elle si gravement attaquée ? C'est relié à la tension sociale de plus en plus grande produite par la disparité croissante entre les riches et les pauvres sur une échelle globale et par la nécessité pour la classe dirigeante de faire taire ceux qui mettent à nu cette réalité.

Les réalisateurs et les artistes les plus sérieux explorent en profondeur le monde qui les entoure. Ce processus créatif pose de grands dangers aux tout-puissants, car tout travail artistique honnête force son audience à examiner plus attentivement la réalité sociale et ses contradictions. La liberté de création, un droit démocratique de base pour permettre l'exploration artistique de tout phénomène, est une menace à ceux qui tentent d'imposer leur propre agenda politique et économique rétrograde. Une population consciente et au fait de son histoire et de ses droits sociaux est un opposant politique plus fort qu'une population superstitieuse et confuse.

La campagne actuelle des fondamentalistes contre Deepa Mehta rappelle les méthodes utilisées par les nazies de Hitler dans les années 30, alors que ses hommes de main brûlaient des milliers de livres jugés inacceptables par le régime. Le poète allemand du 19 siècle Heinrich Heine, a dit, dans une déclaration prophétique : « là où ils brûlent des livres, ils vont finirent par brûler des humains. » La mobilisation des fondamentalistes pose les mêmes dangers et exige une réponse déterminée.

Le World Socialist Web Site fait appel à tous ceux de l'industrie du film, à tous les artistes et écrivains et à tous les travailleurs pour qu'ils se portent à la défense de Deepa Metha et s'opposent à cette escalade contre les droits démocratiques et artistiques. Si la campagne des fondamentalistes Hindous fait son chemin sans opposition, il va encourager et renforcer les éléments extrémistes de partout dans le monde. Tout comme la recherche scientifique ne peut progresser dans un environnement infesté par les restrictions politiques ou suivant les besoins politiques gouvernementaux, de même la créativité artistique ne peut pas se développer sans une totale liberté d'expression et d'exploration.

Les lettre de protestations devraient être postées ou faxées à :

Atal Bihari Vajpayee
Premier ministre de l'Inde
South Block, Raisina Hill
New Delhi, Inde-110 011
Fax: 91-11-3019545 / 91-11-3016857

Shri Ram Prakash Gupta,
Ministre en Chef
Uttar Pradesh 5,
Kalidas Marg Lucknow, Inde
Fax: 91-522-239234 / 91-522-230002
E-mail: cmup@upindia.org & cmup@up.nic.in

 

SVP veuillez envoyer une copie de vos lettres de protestation au WSWS à l'adresse électronique suivante : E-mail : editor@wsws.org


 

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