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La signification de la pensée de Léon Trotsky pour l'Afrique aujourd'hui

Par Chris Talbot
28 octobre 2000

Le Comité international de la Quatrième internationale et le World Socialist Web Site ont tenu en septembre dernier deux réunions pour commémorer le soixantième anniversaire de l'assassinat de Léon Trotsky et expliquer la signification contemporaine de son oeuvre. Nous reproduisons ci-dessous le discours prononcé le 24 septembre à Londres par Chris Talbot, membre du bureau de rédaction du WSWS en Grande-Bretagne.

Cette réunion a été appelée pour insister sur l'intérêt et l'importance pour la vie politique de notre époque des idées de Léon Trotsky, l'un des dirigeants de la Révolution russe de 1917 et probablement le plus grand penseur marxiste du vingtième siècle.

Les idées et les conceptions théoriques de Trotsky ont guidé le développement de notre mouvement, la Quatrième internationale, et sont la motivation principale pour la pratique politique dans laquelle nous sommes à présent engagés, le World Socialist Web Site.

Les conditions actuelles en Afrique sont peut-être la plus grande remise en cause du capitalisme moderne. Considérons les points faits dans le dernier rapport de la Banque mondiale: le revenu total de l'ensemble des 48 états africains sub-sahariens est à peu près égal à celui d'un pays aussi petit que la Belgique. En moyenne, chaque état a un revenu avoisinant $2 milliards par an, c'est-à-dire à peu de chose près ce dont dispose une petite ville occidentale de 60.000 habitants. Si l'on fait le calcul, cela revient à moins d'un dollar par jour.

Le produit intérieur brut de ce vaste continent représente moins d'un pour cent du produit intérieur brut mondial. Les conditions sociales se sont détériorées par rapport aux gains minimes faits après l'indépendance dans les années soixante. Si on exclut l'Afrique du Sud, il y a moins de routes dans toute l'Afrique qu'en Pologne et il n'y a que 5 millions de téléphones. On peut présumer que ces statistiques consternantes ne sont pas exagérées étant donné que la Banque mondiale doit admettre au moins une part de responsabilité pour ce qui est arrivé.

Dans le domainde de la santé, une plus grande partie de la population meurt maintenant de maladies infectieuses qu'à aucun autre moment depuis le début du vingtième siècle. L'impact du sida en Afrique est absolument dévastateur. Les chiffres des Nations unies estiment à 24,5 millions le nombre de personnes infectées par le virus du sida en Afrique, dont 4 millions rien qu'en 1999. Le sida a tué 2,2 millions de personnes en Afrique l'an dernier, 80 pour cent du total de morts dans le monde. Dans certains pays, comme au Zimbabwe et au Botswana, les écoles et les usines ne peuvent plus fonctionner en raison de l'énorme taux de mortalité parmi les travailleurs. Comme nous l'avons précisé dans nos articles sur le sida, il n'existe pas, à l'heure actuelle, la possibilité de prendre les mesures d'urgence qui s'imposent et de mobiliser les ressources et les médicaments nécessaires pour empêcher ces millions de personnes de mourir, et encore moins de mener une discussion sérieuse au sein des gouvernements occidentaux.

En cherchant une explication dans les médias de ce qui s'est passé en Afrique, nous sommes immédiatement confrontés à des préjudices réactionnaires qui ont plus ou moins cours. La Banque mondiale et les politiciens occidentaux prétendent que l'Afrique a été socialement dévastée à cause de la corruption de ses dirigeants qui à ce jour n'ont toujours pas appliqué les règles de la «transparence» et de «bon gouvernement». Ces dirigeants se sont engagés à des «dépenses gouvernementales excessives», etc. Aucune explication n'est cependant avancée quant à savoir pourquoi cette espèce particulière de dirigeants n'est un problème qu'en Afrique. Lorsque des tentatives sont faites en vue d'élucider le problème de régimes corrompus, celles-ci se font généralement en des termes pseudo-sociologiques de la «domination des structures tribales». Par conséquent, au lieu des valeurs de la classe moyenne urbaine que nous trouvons en Occident, ce sont les coutumes locales qui prédominent. La conclusion essentielle à tirer de ces considérations est que l'Afrique a besoin d'une «mission civilisatrice», ce qui revient essentiellement aux conceptions racistes avancées pendant la période victorienne.

D'habitude, le sous-développement de l'Afrique est réduit à des causes géographiques ou biologiques des plus simplistes. L'écrivain scientifique, Jared Diamond, par exemple, affirme que le problème était que l'agriculture s'est développée bien plus facilement en Europe et en Asie. Les Africains ne sont jamais arrivés à domestiquer leurs animaux tels les rhinocéros et les hippopotames! Diamond n'est apparemment pas au courant de l'existence des anciens empires africains d'Egypte et de Carthage, ou bien des économies agricoles relativement développées durant la période médiévale sur l'ensemble de l'Afrique. Que de telles théories soient prises au sérieux est peut-être une indication du déclin intellectuel de notre temps. Le magazine The Economist inclut ces idées dans un article récent intitulé «L'Afrique, continent sans espoir».

La théorie de la Révolution permanente de Trotsky

En opposition à ces théories franchement stupides, nous affirmons qu'il n'est pas possible de comprendre ce qui est arrivé à l'Afrique sans étudier les idées de Trotsky. Celles-ci ont été, bien sûr, initialement développées au début du vingtième siècle par rapport à une grosse région sous-développée du monde, à savoir l'empire russe.

Trotsky a insisté sur le fait que le développement international de la classe ouvrière signifiait qu'il n'était plus concevable que les politiciens capitalistes en Russie puissent jouer un rôle progressiste et donner une solution démocratique nationale comme ils l'avaient fait en France et en Amérique les siècles précédents. Ils allaient plutôt collaborer avec la réaction impérialiste contre la classe ouvrière et les paysans de leur propre pays. Trotsky a souligné que, dans les pays sous-développés, le mouvement ouvrier aurait à assumer le rôle politique principal et la révolution démocratique serait intégrée à la révolution socialiste.

Il a soutenu en outre que l'impérialisme, c'est-à-dire la division du monde entre les principales puissances occidentales et la domination de l'économie mondiale par le capitalisme financier, avait miné le système d'états-nations au sein duquel le capitalisme s'était développé. La conception de Trotsky était basée sur le rôle dominant de la situation mondiale par rapport à toute condition nationale. Par conséquent, une révolution nationale, même si la bourgeoisie était en mesure de la mener, ne pourrait pas libérer de la domination de l'impérialisme les peuples opprimés de l'Afrique, de l'Inde, ou de la Chine et de l'Orient.

Ces idées, élaborées dans la théorie de la révolution permanente, étaient les conceptions auxquelles Lenine a été gagné en 1917. Elles ont constitué la base théorique de la Révolution d'Octobre en Russie. Ce sont aussi les idées pour lesquelles Trotsky s'est battu, et qu'il a développées dans les années vingt et trente du siècle dernier, en opposition aux conceptions nationalistes mises de l'avant par Staline et la bureaucratie soviétique, et résumées dans leur plaidoyer en faveur du «socialisme dans un seul pays».

Les conditions de l'économie et de la politique mondiales ont changé immensément depuis le début du vingtième siècle. Et nous ne proposons pas de juste appliquer mécaniquement la théorie de Trotsky aujourd'hui. Cependant, les conceptions fondamentales demeurent solides.
Comment ces idées se rapportent-elles à ce qui s'est passé en Afrique et comment montrent-elles le chemin vers l'avant pour les travailleurs et les masses pauvres de ce continent?

L'Afrique doit être comprise comme le produit du capitalisme mondial et, particulièrement, comme partie essentielle de l'impérialisme du vingtième siècle. Pendant plusieurs siècles, le commerce des esclaves a formé une partie clé du développement du capitalisme en Europe et en Amérique. Il a privé l'Afrique de millions de personnes robustes et a fomenté des guerres prédatrices qui ont perturbé son économie. Ces conditions ont rendu possible la «mêlée pour l'Afrique» vers la fin du dix-neuvième siècle, c'est-à-dire la division du continent entier et son exploitation brutale par les puissances européennes. Pendant la première moitié du vingtième siècle, l'Afrique était sous autorité coloniale directe. Chaque territoire était conditionné pour l'exportation d'une gamme limitée de minéraux et de produits de base, utilisant l'exploitation la plus brutale des travailleurs locaux. Et presque toute la richesse produite retournait sous la forme de profits occidentaux.

L'indépendance africaine d'après-guerre

Alors que la plupart des colonies africaines ont officiellement accédé à l'indépendance nationale dans les années 1960, elles ne se sont libérées ni de la domination politique des anciennes puissances coloniales, ni de l'exploitation des énormes compagnies qui contrôlaient le commerce des marchandises africaines. Encouragés à faire des emprunts dans les années 1970, alors que les taux d'intérêts montaient en flèche dans les années 1980 et que le prix des produits de base chutait pendant les années 1980 et 1990, la quasi totalité des pays africains se sont enfoncés de plus en plus profondément dans la dette. Dans le milieu des années 1980, les remboursements de dettes de l'Afrique étaient plus importantes que les sommes reçues sous la forme d'aide et d'investissements. L'Afrique est devenue un exportateur net de capitaux vers l'Occident bien qu'elle comprenne certains des pays les plus pauvres de la terre.

La domination du monde financier est maintenant telle que le FMI et les programmes d'ajustement structurel de la Banque mondiale extraient tout ce qu'ils peuvent des budgets de ces pays. Les soi-disant «plans de réduction de la dette» annoncés l'année dernière par le Président américain Bill Clinton et le Chancelier britannique Gordon Brown, ont imposé encore plus de conditions et eu pour conséquence que le pays en tête de liste pour la réduction de la dette, l'Ouganda, doit payer plus qu'avant l'introduction du plan.

La domination des pays sous-développés par l'impérialisme, que Trotsky considérait comme une question fondamentale même au début du vingtième siècle, alors que l'agriculture paysanne de subsistance prédominait dans de grandes régions de l'Afrique, est certainement une réalité aujourd'hui.

«L'indépendance nationale» d'après-guerre a signifié la division de l'Afrique selon les frontières absurdes imposées par l'impérialisme. Elle a permis un développement économique très limité dans les années 1960 et, parfois, l'introduction de mesures sociales dans le domaine de la santé et de l'éducation. Mais en raison des restrictions financières occidentales imposées durant ces deux dernières décennies, ces projets ont subi des reculs considérables.

Ces développements sont une confirmation brutale et négative de tout ce que Trotsky avait écrit concernant l'impossibilité d'un progrès économique au sein de frontières nationales fermées. Contrairement à l'Union soviétique, où les relations de propriété avaient été renversées par la Révolution de 1917, les pays africains et leurs régimes sont restés complètement dominés par l'impérialisme, même quand leurs dirigeants prétendaient être socialistes.

Stalinisme et Panafricanisme

Ceci m'amène aux mouvements politiques en Afrique, spécialement les luttes pour l'indépendance qui ont duré de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'aux années 1980, et 1990 en Angola, au Mozambique et en Namibie.

C'est, je crois, en examinant ces luttes pour l'indépendance que l'analyse de Trotsky se révèle être la plus perspicace. Sa mise à nu de la trahison de la révolution chinoise dans les années 1920 par les dirigeants staliniens contient une des plus importantes leçons stratégiques de notre mouvement. En opposition totale à l'analyse de Trotsky, Staline avait soutenu que le mouvement nationaliste en Chine, le Guomindang, mènerait une révolution démocratique contre les propriétaires terriens féodaux et la domination impérialiste. Une énorme campagne avait également été menée pour dénigrer les idées de Trotsky et de ses partisans.

Staline a ordonné au parti communiste chinois d'entrer dans le Guomindang et de se soumettre à sa discipline. Le résultat a été un désastre complet, finissant avec la défaite de la révolution et l'assassinat de milliers de communistes chinois par les nationalistes en 1927.

Le genre de nationalisme bourgeois qui s'était développé en Chine est devenu l'inspiration politique des futurs dirigeants panafricains qui allaient établir plus tard leurs régimes en Afrique après la Seconde Guerre mondiale. Il y a, en fait, un lien très direct. Si vous lisez l'autobiographie d'Azikiwe, le premier président du Nigeria, vous verrez que durant ses études menées à l'Université de Howard aux Etats-Unis au début des années 1930, soit après le massacre des communistes chinois, il a expliqué combien il a été impressionné par Sun Yatsen et Tchang Kaï-chek, les dirigeants du Guomindang.

Azikiwe a étudié à Howard où les intellectuels noirs comme Tubman (le futur Président du Liberia), et Kwame Nkrumah (le futur Président du Ghana) ont développé les idées panafricanistes. L'influence de l'Antillais George Padmore est indubitable, il est peut-être l'un des dirigeants intellectuels du panafricanisme le plus connu et qui, après l'indépendance, s'est établi au Ghana comme conseiller de Nkrumah.

Padmore était un dirigeant international du Parti communiste et un partisan dévoué de Staline. Son travail à Moscou au début des années 1930 était de servir dans un comité spécial qui enquêtait sur le Parti communiste chinois pour trouver des «trotskistes» et opposants à la ligne stalinienne. Ceux qui soutenaient que le parti devrait se baser sur la classe ouvrière en furent chassés. Padmore a entièrement accepté la «théorie des deux étapes», qui est devenue la politique stalinienne officielle dans les pays sous-développés. Selon cette théorie il y aurait, dans ces pays, d'abord une révolution nationale démocratique, ce qui signifiait que les communistes devaient soutenir toute une série de mouvements paysans et nationaux bourgeois, le socialisme ne venant qu'à une date non spécifiée (et d'habitude lointaine). Padmore n'a rompu avec le parti communiste qu'à la fin des années 1930, lorsqu'il est devenu évident que Staline n'avait aucun intérêt véritable dans la croissance des mouvements nationalistes en Afrique ou ailleurs, sauf en tant que pions dans les accords qu'il essayait de conclure avec l'impérialisme. Mais les idées de Padmore sur le nationalisme, qui dérivaient du stalinisme, sont demeurées essentiellement inchangées.

Padmore a influencé la plupart des futurs dirigeants africains à la fin de la Seconde Guerre mondiale, y compris Nkrumah, Kenyatta et Nyerere qui devaient devenir les dirigeants des anciennes colonies britanniques. Nombre d'entre eux étaient présents à la conférence panafricaine tenue à Manchester en 1945. Des développements analogues ont eu lieu en France où des dirigeants formés par les staliniens, comme Sekou Touré en Guinée, commençaient à être connus.

L'idée fondamentale de Padmore était que la lutte nationale pour l'indépendance servirait à contenir dans d'étroites limites le mouvement de la classe ouvrière qui se développait rapidement en Afrique au lendemain de la guerre. Une petite élite d'Africains noirs, qui aspirait à devenir une bourgeoisie noire, serait appelée sur cette base à prendre le pouvoir politique. A cette époque, il existait déjà d'énormes agglomérations de travailleurs en Afrique, spécialement dans l'industrie minière, et l'on comptait déjà nombre de grandes grèves. Des milliers de mineurs en Afrique du Sud s'étaient organisés contre les propriétaires des mines britanniques. Au Congo, jusqu'à un million de mineurs travaillaient dans les mines de cuivre et de diamants, et c'est aussi là que l'uranium pour la bombe atomique était extrait. Ce mouvement faisait partie d'une vague révolutionnaire internationale qui a déferlé tout de suite après la guerre et s'est étendue à l'Inde, à la Chine et à des parties entières de l'Europe.
Comme le disait Padmore: «La seule force capable de retenir le communisme en Asie et en Afrique est le nationalisme dynamique se basant sur un programme socialiste d'industrialisation...» [1]. C'est sur cette base qu'il a appelé les pouvoirs impérialistes à accorder l'indépendance.

Le socialisme dont il parlait, ainsi que Nkrumah, Nyerere et d'autres, signifiait une espèce d'interventionnisme et d'Etat-providence, idées qui étaient considérées d'un il favorable par les capitalistes dans les conditions de la crise d'après-guerre, et qui ont été reprises, par exemple, par le Parti travailliste en Grande-Bretagne. Cela n'avait rien à voir avec le socialisme, dans la tradition du marxisme pour lequel Trotsky s'était battu. Trotsky avait toujours insisté sur le fait que le socialisme signifiait la construction d'un mouvement ouvrier indépendant et politiquement conscient pour renverser l'impérialisme. Les panafricanistes y étaient opposés et, quand ils sont parvenus au pouvoir dans les années 1960 partout en Afrique, ils ont étouffé les grèves et réprimé l'opposition ouvrière.

Leur valeur a été reconnue par les puissances impérialistes comme le montre clairement un document publié récemment sur des discussions ayant eu lieu entre le Ministère des affaires étrangères britannique et les Etats-Unis. «Le panafricanisme, en soi, n'est pas nécessairement une force que nous avons besoin de considérer comme suspecte et effrayante. Au contraire, si nous pouvons éviter de l'éloigner et pouvons le guider vers une ligne qui soit généralement en sympathie avec le monde libre, il pourrait bien s'avérer, à plus long terme, être un barrage solide indigène à la pénétration par l'Union soviétique de l'Afrique.»[2]

La classe dirigeante britannique avait pris la mesure de la bureaucratie soviétique, avec qui elle avait travaillé tout au long de la guerre. Elle avait aussi été témoin de la valeur des staliniens pour la suppression des mouvements révolutionnaires d'après-guerre à travers le monde entier. Ce qu'elle redoutait, c'était la croissance de mouvements ouvriers qu'elle ne pourrait pas contrôler.

Il n'y a pas assez de temps pour examiner en détail les expériences du mouvement trotskiste pendant le demi-siècle passé en ce qui concerne le développement de la théorie de la révolution permanente contre les staliniens et les radicaux de la classe moyenne, ou autrement dit, la défense du point de vue de l'internationalisme ouvrier par rapport au nationalisme bourgeois. Mais, si l'on considère la période d'après-guerre en Afrique dans son ensemble, quelles ont été les expériences de la classe ouvrière et des paysans, durant ces quelques 40 ans passés sous le panafricanisme ou sous des régimes qui ont initialement embrassé le panafricanisme? Quel a été l'héritage de la politique nationaliste de Padmore, Nkrumah et des autres, politique inspirée du stalinisme?

Encore une fois, cette expérience a confirmé l'analyse de Trotsky et a eu des conséquences tragiques pour les masses. Dans une certaine mesure, ces régimes et les mouvements de libération nationale pouvaient se tourner vers la bureaucratie stalinienne pendant la guerre froide. Cela a créé un peu d'espace pour manuvrer et même permis parfois l'introduction de mesures sociales limitées. Mais, avec la fin de la guerre froide et les changements profonds de l'économie mondiale associés à la mondialisation au cours des deux dernières décennies, nous avons été témoins de l'effondrement complet des mouvements bourgeois nationalistes. Le caractère faux de ces «Etats indépendants» a été révélé. Quel que soit le contenu progressiste limité qu'a eu à une époque précédente la lutte de ces mouvements contre l'impérialisme, de nos jours, il n'en reste plus rien.

Chacun des panafricanistes, ou leur progéniture politique, s'est rendu à l'impérialisme. Tous ont adopté l'économie de marché, la domination de l'Afrique par le FMI et les compagnies transnationales, en acceptant la terrible catastrophe sociale qui engouffre à présent le continent. Il suffit de considérer le cas du Colonel Kadhafi en Libye qui négocie avec l'Union européenne, du MPLA en Angola qui négocie avec des compagnies pétrolières américaines, de Musevini et de Kagame (les soi-disant nouveaux dirigeants de l'Ouganda et du Rwanda, selon Clinton) qui se prennent maintenant à la gorge au sujet du contrôle des diamants et de l'or du Congo; ou de dictateurs féroces comme Charles Taylor, qui a transformé le Liberia en son fief privé avec le soutien de Jesse Jackson ; ou même de Thabo Mbeki et de l'ANC en Afrique du Sud, qui sont en train de licencier des travailleurs conformément à un programme de privatisations. Partout où l'on regarde, il n'existe pas un seul mouvement ou dirigeant nationaliste qui ait fait progresser les conditions de la population d'un iota. Ils ont plutôt aidé l'impérialisme à reculer la pendule en ouvrant maintenant la voie au genre de recolonisation que mène la Grande-Bretagne au Sierra Leone.

Notre travail en ce qui concerne l'Afrique sur le World Socialist Web Site révèle la puissance de la pensée de Trotsky. Il confirme les conséquences néfastes de la domination impérialiste sur ce continent et, particulièrement, le rôle crucial qu'ont joué pendant les cinquante dernières années, le nationalisme et le stalinisme pour faciliter cette domination des puissances occidentales. Le développement du mouvement révolutionnaire de la classe ouvrière sur le plan international dépend de l'assimilation de ces leçons. Les questions cruciales à traiter en Afrique sont celles de la confusion et de la désorientation causées par toutes les variétés de panafricanisme.

L'analyse distinctive présentée sur le WSWS est en train de trouver un public croissant. Nous sommes convaincus que la renaissance des idées de Trotsky et de la culture marxiste dans leur totalité peuvent être développées par ce travail sur l'internet et fournira la base pour la construction de la Quatrième internationale au vingt et unième siècle en Afrique et à travers le monde entier.

Notes:
1. George Padmore, Pan-Africanism or Communism?, Dobson, 1956, p. 339
2. Africa: the Next Ten Years, Foreign Office document, December 1959, cité dans Decolonisation, The British experience since 1945 de Nicholas J. White, Longman, 1999, pp. 125-126


 

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