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Nouvelles grèves et manifestations en France

Par Marianne Arens et Françoise Thull
8 février 2001

Une vague de manifestations, de rassemblements et de grèves a déferlé sur l'ensemble de la France ces dernières semaines. Des centaines de milliers de travailleurs sont descendus dans la rue, paralysant ainsi la vie publique de Paris et de nombreuses autres villes. Dans certaines villes, le nombre des participants a même dépassé celui de l'automne 1995 quand le mouvement de grève avait entraîné la chute du gouvernement de droite d'Alain Juppé.

Outre des revendications salariales, les protestations ont pour cible la tentative d'augmenter progressivement l'âge de la retraite de 60 ans actuellement à 65 ans. Jusque-là, il est possible, en France, de partir en retraite à taux plein dès 60 ans après 40 annuités dans le privé et 37,5 annuités dans la fonction publique; pour ce qui est des métiers particulièrement astreignants il existe des modalités de préretraites.

Les attaques contre la retraite avaient, tout au long du mois de janvier, occasionné des grèves et des manifestations dans divers secteurs de la fonction publique pour atteindre leur point culminant le 25 janvier quand plus de 300 000 travailleurs participèrent aux manifestations. Rien qu'à Marseille, 40 000 personnes descendirent dans la rue. Les transports en communs, le réseau de la SNCF, des journaux régionaux, Radio-France et Air France étaient touchés. De plus, le personnel de Renault, du fabricant de pneumatiques Michelin ainsi que le personnel de quelques supermarchés parisiens avait également débrayé.

A peine quelques jours plus tard, le 30 janvier, l'ensemble des salariés de la fonction publique descendait dans la rue après que les négociations salariales entre les sept fédérations de fonctionnaires (CGT, CFDT, FO, FSU, Unsa, CFTC, CGC) et le gouvernement aient été interrompues le 18 janvier sur un constat d'échec. Les agents des hôpitaux, des écoles, de l'administration, de la poste, des transports en commun de la RATP débrayèrent si bien que la grève prit l'ampleur d'une grève générale de 24 heures.

Jusque-là, les actions de la fonction publique avaient toujours été soigneusement séparées de celles du privé, mais cette fois elles eurent lieu en commun. La police ainsi que des unités de CRS agressèrent brutalement les manifestants. À Lille, dans le Nord de la France, un sapeur-pompier de 54 ans eut la main droite déchiquetée par une grenade lacrymogène. (voir article «Des grévistes violemment attaqués par des CRS à Lille»).

En dépit des nombreux inconvénients, la population fut largement favorable aux grèves. Toutefois, cette solidarité ne peut dissimuler le fait que, dans ce conflit, les grévistes sont surtout les traqués et non les traqueurs. L'organisation patronale Medef ayant sciemment provoqué ce conflit.

Début janvier, le président du Medef, le baron Ernest-Antoine Seillière, avait, de façon insolente, donné l'ordre aux entreprises de ne plus verser de cotisations à l'association pour la structure financière (ASF) qui finance les retraites complémentaires entre 60 et 65 ans. Il ne peut s'agir ici que d'une provocation bien calculée et d'un défi, étant donné que le conflit pour la retraite dure depuis plusieurs années déjà et que toute tentative d'introduction de mesures à caractère restrictif s'est heurtée jusque-là à une violente résistance. L'interruption de paiement des cotisations à l'ASF se répercute immédiatement sur le montant des pensions, si bien que les salariés ayant pris leur retraite dès la soixantaine verront, à partir d'avril prochain, leur pension réduite de 22 pour cent.

Seillière, qui se trouve à la tête du patronat depuis 1997, est bien connu pour de telles provocations. Il y a un peu plus d'un an, il avait mobilisé les patrons pour manifester contre la loi sur l'introduction de la semaine de 35 heures et, il y a quelques mois à peine, il avait imposé une détérioration massive de l'indemnisation en cas de chômage. À l'avenir, toute indemnisation en cas de chômage, sera conditionnelle à l'acceptation de propositions d'embauche qui seront soumises au chômeur. Seillière met systématiquement en application ce qu'il appelle la «refondation sociale», voire son concept de détruire pièce par pièce le système sociale.

Le gouvernement du premier ministre Lionel Jospin a une attitude très ambiguë. Tout en se montrant favorable aux revendications syndicales, il ne cesse de souligner la nécessité d'une réforme du système des retraites en signalant au Medef son approbation. La réforme du système des retraites avait, dès le départ, fait partie du programme gouvernemental de Jospin. En avril 1999, puis à nouveau un an plus tard, il avait lui-même avancé la proposition, en vue d'alléger les caisses de retraite, d'allonger également la durée de cotisation des fonctionnaires de 37,5 à 40 annuités. Pour faire passer la pilule, il suggéra de prendre en compte une partie des primes dans le calcul des retraites, ce qui n'augmenterait que très légèrement ces dernières et ce sur quoi le patronat lui reprocha son immobilisme.

Depuis, le gouvernement s'active à ménager les caisses de retraite au moyen de la capitalisation privée - la soi-disant «épargne salariale». Dominique Strauss-Kahn, le premier ministre de l'économie et des finances de Jospin, qui avait démissionné en automne 1999, et qui avait été à plusieurs reprises eu droit aux louanges de Seillière pour sa politique budgétaire restrictive, avait défendu des conceptions similaires. Il y a dix-sept ans, il avait rédigé en commun avec le vice-président du Medef, un ex-maoïste, du nom de Denis Kessler, un ouvrage sur la réforme du système des retraites intitulé «L'Epargne et la Retraite. L'avenir des retraites préfinancées». Le successeur de Strauss-Kahn, le ministre de l'économie et des finances, Laurent Fabius, poursuit aujourd'hui cette politique qui tend à instaurer en douce des fonds de pension.

Etant parfaitement conscient du détonateur social que représente toute attaque du système des retraites, Jospin préfère de loin que les protestations prennent pour cible le Medef et son président plutôt que son gouvernement. Le grand mouvement de grève et les manifestations de masse qui avaient conduit à la chute de son prédécesseur, Alain Juppé, lorsque celui-ci avait tenté d'allonger l'âge de la retraite, sont encore vivement en mémoire.

Dans ce conflit, les syndicats - comme souvent - jouent double jeu. Alors qu'ils lancent des appels à la grève et aux manifestations, critiquent d'un ton virulent Seillière et le Medef, ils organisent, derrière le dos des grévistes, des entretiens confidentiels avec Seillière. L'objectif primordial des syndicats est de défendre la gestion paritaire des organismes sociaux et, de ce fait, de sauvegarder leur propre position sociale. Les grèves des salariés ne leur servent en cela que de masse manipulable.

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