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Sommet européen: la France et l'Allemagne cherchent un rapprochement avec les Etats-Unis.

Par Chris Marsden et Julie Hyland
Le 19 avril 2003

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Les chefs d'état européens poursuivent leur politique de conciliation avec l'administration Bush suite à l'invasion américaine de l'Irak. Une déclaration de l'Union européenne (UE) faite lors du sommet d'Athènes du 17 avril légitime en fait la guerre de Washington.

La résolution de l'UE ne fait aucune mention du fait que la guerre a été conduite sans l'autorisation des Nations unies et donc en violation de la loi internationale. Elle ne mentionne pas non plus la mort de milliers de civils ni les blessures infligées par l'usage d'armes illégales telles que les bombes à fragmentation. De plus, aucune référence n'est faite à l'incapacité de la force d'occupation américaine, après l'effondrement du régime Baas, à défendre la population contre les pillards et les délinquants, à arrêter la destruction de trésors culturels irakiens d'une importance mondiale considérable, tels que la bibliothèque et les musées nationaux.

En effet, on ne trouve dans cette résolution pas la moindre critique sur les agissements américains suite à la guerre, bien qu'il y ait eu divers incidents de troupes américaines tirant sur des foules composées de civils non armés, ni sur le processus en cours pour établir un régime de style colonial sous la houlette du général américain Tommy Franks et de l'ex-général Jay Garner.

Au lieu de cela, l'UE admet que dans l'immédiat l'Irak doit être gouverné par des « forces de la coalition », c'est-à-dire les USA assistés de la Grande-Bretagne. C'est à eux qu'incombe la responsabilité d'assurer « un environnement sûr », vraisemblablement en tirant sur quiconque s'oppose à l'occupation de l'Irak. L'UE prétend de façon absurde que cette situation est compatible avec l'assurance de fournir au « peuple d'Irak l'opportunité de construire un nouvel avenir pour leur pays ».

Les puissances européennes ont pour préoccupation centrale que les Nations unies établissent un premier contact comme prétexte pour promouvoir leurs propres intérêts économiques et géopolitiques au Moyen-Orient. Une bonne partie des discussions sur la résolution a consisté en chicaneries, entre la Grande-Bretagne d'un côté et la France de l'autre, sur la description du rôle des Nations unies comme « central » ou « important ». Tony Blair, premier ministre britannique, était en faveur du terme « important » tandis que le président français, Jacques Chirac, insistait sur « central ». Chirac l'emporta, bien que malgré cela les porte-parole britanniques signalèrent que la résolution proposait que l'on donne aux Nations unies un rôle central mais non pas le rôle central.

L'UE accepta que dans un premier temps le rôle « central » des Nations unies ne consisterait qu'à aider à fournir une assistance humanitaire. Ce n'est qu'avec l'aval de l'administration Bush que son rôle se développerait pour refléter sa « capacité et son expérience uniques en matière de reconstruction de nations suite à un conflit ».

La résolution fut adoptée avec la collaboration du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan.

La victoire terminologique de Chirac est réellement une victoire à la Pyrrhus. Aucun dirigeant européen n'a le moindre doute que l'administration Bush entend transformer l'Irak en un protectorat américain et bloquera toute tentative de placer le pays sous l'autorité des Nations unies.

La Grande-Bretagne, l'Italie et l'Espagne ont jusqu'à présent soutenu la poussée guerrière de Washington et ses visées colonialistes en Irak dans l'espoir d'obtenir une part du butin de guerre. A présent la France et l'Allemagne abandonnent leur opposition tactique à la guerre. Ils espèrent ainsi se réconcilier avec les USA, faire taire les voix anti-européennes les plus belliqueuses au sein de l'administration Bush et protéger leurs propres intérêts économiques dans l'Irak riche en pétrole.

Avant même le sommet de l'UE, Paris, Berlin et Moscou avaient fait des pieds et des mains pour se rapprocher de Washington. Aussitôt que la victoire militaire a semblé assurée, des efforts frénétiques ont été entrepris pour rétablir les ponts avec les USA. Le chancelier allemand, Gerhard Schröder a rencontré Blair en route pour le sommet, une manière d'ouvrir le dialogue avec Bush, tandis que pendant ce temps Chirac téléphonait au président américain pour la première fois en six semaines s'engageant à « agir de façon pragmatique au cas par cas » en ce qui concerne l'Irak.

La prostration des puissances européennes devant la cabale guerrière de Washington ne fera qu'encourager les ambitions d'hégémonie mondiale de l'impérialisme américain. Déjà l'administration Bush profère des menaces à l'encontre de la Syrie évoquant la possibilité d'une attaque militaire.

Il y a de fortes chances que la France, l'Allemagne et la Russie se fassent envoyer promener pour leurs efforts à se faire bien voir. Des faucons de premier plan au sein de l'administration Bush jubilent d'avoir humilié l'Europe et s'opposent à toute concession à l'égard des rivaux de l'Amérique. Ces derniers jours, Paul Wolfowitz, secrétaire adjoint américain à la Défense et John Snow, secrétaire américain au Trésor ont dit que le rôle principal que la France, l'Allemagne et la Russie peuvent jouer pour assurer l'avenir de l'Irak est de faire grâce à l'Irak de sa dette de milliards de dollars. Etant donné que les revenus de pétrole de l'Irak serviront à payer le coût de la guerre, cela représenterait un paiement indirect par l'Europe à l'Amérique.

Le mépris à l'égard de l'Europe est clairement exprimé dans un article du Washington Post en date du 14 avril déclarant que les Nations unies pourraient « être invitées à aider pour certains travaux de courte durée en matière d'assistance humanitaire et d'administration civile » et poursuit en disant que la France fut admise comme membre permanent du Conseil de sécurité en 1945 « en guise de psychothérapie pour soulager une crise d'amour-propre causée par sa mauvaise conduite ».

L'article poursuit: « Il n'y a aucun droit pour la France, l'Allemagne, la Russie et les Nations unies. Ils ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour laisser Saddam Hussein au pouvoir, ce qui les rend complices de tyrannie et de crimes de guerre. »

En légitimant après coup la guerre illégale et prédatrice menée par les USA, les gouvernements bourgeois d'Europe rendent un service crucial à l'administration Bush qui a grand besoin de crédibilité au niveau international. Ces gouvernements sont tout à fait conscients du sentiment anti-guerre énorme dans leurs propres pays et dans le monde entier, y compris aux USA. En suggérant à présent que la conquête de l'Irak était justifiée par le renversement du régime de Saddam Hussein, et que l'on peut établir la démocratie et le progrès par une guerre d'agression et une occupation militaire sous l'égide de l'impérialisme américain, ils sèment la confusion politique et aident Washington à conditionner l'opinion publique, spécialement au sein des Etats-Unis eux-mêmes, et à la préparer à de futures aventures militaires encore plus brutales.

La présidence de Bush est confrontée à une crise intérieure grandissante qui conduit la presse à se demander si Bush suivra les traces de son père en gagnant la guerre mais en perdant les élections. La Maison Blanche cherche à imposer des coupes budgétaires impopulaires dans les services essentiels à un moment où l'économie rencontre de sérieuses difficultés et que de nombreux états américains sont effectivement en faillite. En même temps le gouvernement mène une politique de guerre qui n'a pas le soutien de la majorité de la population.

Le sommet européen d'Athènes met en évidence les dangers politiques inhérents à la position de ces tendances au sein du mouvement anti-guerre qui comptent sur l'Allemagne, la France ou la Russie pour agir comme contrepoids au militarisme américain. Chirac, Schröder et le président russe Vladimir Putin sont les représentants politiques de leur propre bourgeoisie et sont incapables de s'opposer sérieusement à la dynamique de guerre. Leurs gouvernements ont refusé de sanctionner les plans de guerre de l'Amérique essentiellement parce que leurs propres intérêts dans la région étaient menacés et parce que le militarisme et l'unilatéralisme américains empiètent sur les intérêts mondiaux des puissances européennes.

Ils étaient prêts à utiliser jusqu'à un certain point le sentiment populaire anti-guerre pour essayer de gagner de l'influence sur Washington, mais ils ont été toujours hostiles à ce qui était l'expression initiale d'un mouvement anti-impérialiste d'envergure mondiale, de peur que celui-ci n'échappe à leur contrôle et ne menace leurs propres intérêts vitaux.

Ce sentiment populaire anti-guerre persiste. Le sommet d'Athènes fut assailli par des milliers de manifestants qui s'en prirent à l'ambassade britannique et à British Airways.

La dynamique de guerre n'est pas simplement le produit des intentions subjectives de la cabale de droite qui détient le pouvoir aux Etats-Unis. Elle est enracinée dans la crise du capitalisme mondial, qui trouve son expression la plus explosive et la plus maligne dans la crise sociale et politique du capitalisme américain.

En ce moment, l'Amérique jouit d'un avantage militaire énorme sur ses rivaux européens, ce qui explique en partie l'effort fait actuellement pour apaiser Washington. Cependant cela ne fera qu'inciter à redoubler d'efforts pour transformer l'Europe en une puissance militaire capable de défier avec succès les USA ­ politique qui ne peut se mener que sur la base d'attaques du niveau de vie et des droits démocratiques de la classe ouvrière européenne.

Avant le sommet d'Athènes, la France, l'Allemagne et la Russie s'étaient rencontrées à St Pétersbourg pour discuter d'une stratégie commune, et le parlement européen avait voté la mise en place d'une politique commune d'acquisition de matériel militaire de défense pour les forces armées d'Europe. La Belgique, avec le soutien de la France et de l'Allemagne, a convoqué un sommet sur la défense européenne pour le 29 avril.

Ainsi, dans la mesure où les classes dirigeantes d'Europe cherchent à développer une position indépendante de Washington, elles ne proposent qu'une autre forme de militarisme, apportant avec elle le spectre d'une nouvelle course aux armements et une descente vers la troisième guerre mondiale.

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