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Le SEP au Sri Lanka commémore le 15e anniversaire de la mort de Keerthi Balasuriya

De notre correspondant
Le 31 décembre 2002

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Le Parti de l'égalité socialiste (Sri Lanka) organisait une réunion publique à laquelle beaucoup se sont rendus à Colombo le 21 décembre dernier pour commémorer le 15e anniversaire de la mort de Keerthi Balasuriya, le secrétaire général et fondateur du précurseur du SEP, la Revolutionary Communist League (RCL). Sa mort prématurée le 18 décembre 1987 suite à une crise cardiaque à l'age de 39 ans fut une perte tragique pour le mouvement trotskyste international.

Des travailleurs, des jeunes et des étudiants ­ tant cingalais que tamouls ­ sont venus de diverses régions de l'île pour assister à la réunion à laquelle Wije Dias le secrétaire général actuel du SEP prit la parole. La réunion fut présidée par Vilani Peiris, compagne de vie de Keerthi et également membre du comité central du SEP. Les deux autres conférenciers furent le membre du comité central Nanda Wickramasinghe et Aravindan qui s'est exprimé en tamoul.

Peiris a déclaré que le SEP avait organisé cette réunion pour commémorer le 15e anniversaire de la mort de Keerthi et expliquer la pertinente de son travail politique pour les travailleurs et les jeunes d'aujourd'hui. Elle a dit qu'il était un représentant exceptionnel du trotskysme de l'Après-guerre qui possédait une vaste connaissance de la théorie et de l'histoire marxistes. Jeune homme, il en vint à lire Léon Trotsky par amour de l'art. Puis il se plongea rapidement dans les écrits politiques de l'auteur et devint convaincu de l'exactitude du programme de la Quatrième Internationale.

Même lors de circonstances difficiles, déclara Peiris, Keerthi ne vacilla jamais dans ses convictions. Elle décrivit les conditions éprouvantes qui régnaient au début des années 1970, alors que la jeune RCL subissait la répression étatique et était minée politiquement par la vielle direction britannique du Comité International de la Quatrième Internationale (CIQI).

« Keerthi n'a jamais perdu sa foi dans le trotskysme, a déclaré Peiris. Il était confiant que les conditions difficiles changeraient finalement, même si ce n'était qu'à long terme, alors que les contradictions du capitalisme mondial évolueraient et forceraient les travailleurs à trouver une issue. Keerthi insistait toujours sur le fait que seul le trotskysme pouvait fournir le programme politique pour l'émancipation socialiste de l'humanité.

Principal conférencier de la réunion, Wije Dias a expliqué que l'expérience cruciale du développement politique de Keerthi fut la participation du Lanka Sama Samaja Party (LSSP) au gouvernement de madame Bandaranaike en 1964. La décision du LSSP de se joindre à un gouvernement capitaliste représentait une trahison complète du programme et des principes du trotskysme que ce parti avait auparavant défendu et qui était alors chaudement débattu parmi les jeunes.

Les opposants à l'entrée du LSSP dans le gouvernement Bandaranaike scissionnèrent pour former le LSSP (révolutionnaire), un parti qui n'offrit néanmoins pas de voie de l'avant. Au cours de cette période de confusion et de bouleversement politiques, une strate de jeunes membres inspirés par les positions de principes des débuts du LSSP et frustrés par les politiques du LSSP-R, scissionnèrent à leur tour pour former le groupe Shakthi (Force) afin de faire revivre le trotskysme. Mais moins de 10 mois plus tard, la nature centriste du groupe fut révélée lorsqu'une majorité des membres rejoignit le LSSP.

« Que pouvait on faire face à cette seconde, pour ne pas dire troisième trahison du trotskysme ? Pourquoi était-ce arrivé ? Comment cette difficile situation politique pouvait-elle être surmontée ? Telles étaient les questions soulevées dans l'esprit de tous ceux qui restaient, dont Keerthi. Nous étions catégoriques : nous devions trouver des réponses convaincantes » poursuivit Dias.

« C'est lors de cette période critique que le CIQI pris la décision d'intervenir au Sri Lanka. Tony Banda, l'un des dirigeants de la Socialist Labour League (SLL) britannique visita l'île à la fin de 1966 pour bâtir un groupe indépendant du LSSP-R. Sa visite suivait l'intervention cruciale faite par le secrétaire du SLL Gerry Healy qui était allé au Sri Lanka pour participer à la conférence de 1964 du LSSP et s'opposer à la décision de ce dernier de participer au gouvernement de Bandaranaike ».

L'opportunisme pabliste

Par l'entremise de Banda, poursuivit Dias, « ceux d'entre nous qui refuseraient de rejoindre le LSSP vinrent en contact avec le vieux trotskyste d'expérience Wilfred Pereira, le camarade Spike, qui s'était opposé aux politiques du LSSP et du LSSP-R ». Le groupe étudia attentivement la brochure de Healy, The Great Betrayal, (la grande trahison) où il expliquait que les racines de la trahison du LSSP ne se trouvaient pas à Colombo mais à Paris. Healy démontrait que la principale responsabilité politique de la dégénérescence du LSSP résidait dans les politiques opportunistes des mentors du Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale (SU) basé en France.

« Keerthi étudia intensément la lutte du CIQI contre la tendance opportuniste représentée par le SU. Il était le visiteur le plus régulier de la bibliothèque du camarade Spike et passait de longues heures à lire les documents du CIQI relatifs au développement d'un courant révisionniste dirigé par Michel Pablo et Ernest Mandel au sein de la Quatrième Internationale après la Seconde Guerre mondiale ».

Dias expliqua que le révisionnisme pabliste était une réponse impressionniste devant la force apparente de l'impérialisme mondial et des bureaucraties staliniennes suite à la restabilisation de l'après guerre du capitalisme à la fin des années 1940. Ayant perdu toute confiance dans la capacité révolutionnaire de la classe ouvrière, les pablistes s'adaptèrent au nom de « l'intégration dans le mouvement réel des masses » aux forces réactionnaires qui dominaient le mouvement ouvrier de chaque pays, soit au stalinisme, au réformisme et dans les pays semi-coloniaux, aux divers leaderships nationalistes bourgeois. Le CIQI fut fondé en 1953 pour défendre le programme et les principes du mouvement trotskyste.

« Keerthi tira de grandes leçons de son étude des documents du CIQI qu'il transmit à tous. Il devint profondément convaincu que la voie révolutionnaire pour la classe ouvrière ne pouvait être basée que sur les leçons historiques dérivées de la lutte des marxistes pour construire un mouvement révolutionnaire international de la classe ouvrière ».

Dias continua en disant que la présentation des idées de Bandaranaike avec des couleurs radicales et mêmes révolutionnaires par le LSSP tirait ses origines théoriques et politiques dans le révisionnisme pabliste qui fait la promotion du régime castriste de Cuba et des bureaucraties staliniennes de Moscou et de Beijing comme étant des voies vers le socialisme. Il expliqua que l'étude des documents du CIQI permit à Keerthi de distinguer la RCL, fondée comme une section du CIQI en 1968, des divers mouvements de jeunesse petits-bourgeois qui apparurent au Sri Lanka suite aux trahisons du LSSP et qui s'inspiraient de Castro, de Che Guevara, de Mao ou même de Kim Il Sung de la Corée du Nord. Tous ces mouvements étaient imprégnés de nationalisme et de racisme.

« Tirant les leçons de la lutte du CIQI contre le révisionnisme, Keerthi soumis les politiques de tous ces groupes, particulièrement celles du Janatha Vimukthi Peramuna (JVP), à une critique virulente basée sur l'internationalisme socialiste. Sa critique du mouvement naxaliste en Inde fut publiée dans News Letter, l'organe de la SLL britannique ».

La désertion de la SLL

Dias expliqua que c'est l'intense travail théorique de Keerthi qui permit à la RCL de survivre à l'impact de la dégénérescence politique de la SLL britannique, lorsque au début des années 1970 elle commença à s'adapter aux mêmes pressions qui étaient venues à bout des pablistes. En 1971, Keerthi écrivit à la SLL pour s'opposer à une déclaration faite au nom du CIQI sans aucune consultation et soutenant l'intervention militaire de l'Inde dans la lutte de libération nationale au Bengale-Oriental contre la domination pakistanaise.

Dans la lettre adressée à Cliff Slaughter, le secrétaire du CIQI, Keerthi écrivit : « la guerre de l'Inde contre le Pakistan n'est pas une guerre de libération... Il est impossible de soutenir la lutte de libération nationale du peuple bengalais et l'unification volontaire de l'Inde sur une base socialiste sans s'opposer à la guerre indo-pakistanaise. Sans opposition de l'intérieur de l'Inde et du Pakistan contre la guerre il est totalement absurde de parler d'une Inde socialiste unie qui seule est en mesure d'assurer le droit à l'autodétermination des nombreuses nations du sous-continent indien ».

Dias a fait remarquer que contrairement à la déclaration produite par la SLL, la RCL avait expliqué que les racines historiques du conflit au Pakistan oriental remontait à la partition du sous-continent indien en 1948 selon des lignes communales. Le parti appela les travailleurs à rejeter les prétentions de l'Inde d'être « la libératrice du Bengale-Oriental » et soutint que l'armée indienne intervenait pour supprimer la lutte du peuple bengalais. La RCL insista sur le fait que la solution à la crise passait par l'unification de la classe ouvrière en Inde, au Pakistan et au Sri Lanka, pour mettre fin à la domination capitaliste et au dépeçage impérialiste de la région.

La RCL fut cependant forcée de retirer sa déclaration. Keerthi écrivit alors à Slaughter : « nous pensons que si nous défendons la déclaration du CI, cela entraînera une immense confusion au sein de la classe ouvrière. Nul besoin de rappeler combien il est difficile de défendre la déclaration du CI. La clarté au sein de l'Internationale est plus importante que tout. Il nous est impossible de construire une section nationale sans lutter pour construire l'Internationale ».

Dias expliqua que la direction de la SLL n'informa même pas les autres sections du CIQI des sérieuses divergences politiques soulevées par la RCL, pas plus qu'elle n'organisa la moindre discussion internationale. Au cours des dix années qui suivirent, la dégénérescence opportuniste de la SLL, qui devint le Workers Revolutionary Party (WRP), allait avoir un impact encore plus destructeur sur le travail de la RCL au Sri Lanka et dans le sous-continent indien.

« En 1972, la SLL s'opposa avec véhémence à la défense par la RCL des droits démocratiques de la minorité tamoule opprimée alors que le gouvernement de coalition de Bandaranaike adoptait une constitution raciste pour diviser la classe ouvrière selon des lignes communales et accroître la discrimination anti-tamoule. Il s'ensuivit l'apparition de plusieurs mouvements radicaux petits-bourgeois communalistes parmi la jeunesse et les couches rurales pauvres tant cingalaises que tamoules.

« Au cours des quatre années qui ont précédé 1972, la RCL a mené une lutte constante pour contrer ces développements pernicieux au Sud et au Nord en rassemblant les masses petites-bourgeoises derrière la classe ouvrière dans la lutte pour une république socialiste. La brochure de Keerthi, The Politics and Class Nature of the JVP (Les politiques et la nature de classe du JVP), publiée en 1970, joua un rôle important pour démontrer le caractère raciste et petit-bourgeois des actions du JVP au sein de la jeunesse cingalaise. La lutte de la RCL au sein des Tamouls reçut également un support considérable. Mais la prise de position du parti fut sévèrement retardée par les positions politiques de la SLL ».

Ce n'est pas avant la scission au sein du WRP qui survint en 1985-1986 que la RCL et le CIQI purent clarifier leur perspective révolutionnaire basée sur la théorie de la révolution permanente de Léon Trotsky. Dias cita la déclaration du CIQI publiée en novembre 1987 à propos de l'Accord indo-sri lankais et l'intervention de l'armée indienne au nord du Sri Lanka, le dernier document sur lequel Keerthi travailla avant sa mort.

« En dépit des trahisons du LSSP, la seule perspective qui permet de sortir de l'impasse du nationalisme bourgeois est celle basée sur une lutte unifiée de la classe ouvrière tamoule et cingalaise. L'occupation indienne a exposé la base de classe de l'oppression de la nation tamoule et des masses cingalaises au sud. Elle soulève à nouveau la nécessité impérative de combiner la lutte nationale avec la lutte des classes sous la direction de la classe ouvrière cingalaise et tamoule. Concrètement, cela signifie d'arborer haut le drapeau des États-Unis socialistes de l'Eelam et du Sri Lanka ».

Les jours les plus heureux de la vie politique de Keerthi furent ceux qui suivirent la scission survenue au sein du WRP alors qu'il put collaborer étroitement avec ses co-penseurs du CIQI pour le développement d'une perspective politique.

Dias termina son intervention en lisant l'hommage rendu à Keerthi par David North, le président du comité de rédaction du WSWS, dans la préface de son livre The Heritage We Defend.

« Dans la préparation et la rédaction de cet ouvrage, l'auteur a énormément bénéficié des innombrables discussions qu'il a eu avec l'un des plus brillants et résolus trotskystes de l'Après-guerre, Keerthi Balasuriya, l'un des dirigeants du Comité International de la Quatrième Internationale et le secrétaire général de la Revolutionary Communist League du Sri Lanka...

« Courageux opposant de l'opportunisme, le camarade Balasuriya a joué un rôle décisif dans la lutte pour défendre le Comité International contre les attaques du Workers Revolutionary Party. Il a apporté à cette lutte sa vaste et profonde connaissance de l'histoire de la Quatrième Internationale et son âpre compréhension des implications des luttes qui ont duré des décennies contre le révisionnisme pabliste ».

À la conclusion de la réunion, l'audience a contribué généreusement à la campagne du parti pour s'opposer aux menaces de mort proférées par les Tigres de libération de Eelam tamoul (LTTE) contre des membres du SEP à l'île de Kayts. De nombreuses personnes sont restées pour des discussions informelles. Deux surs de Keerthi qui étaient présentes ont exprimé leur appréciation aux conférenciers pour avoir expliqué l'importance de son travail pour la classe ouvrière internationale. Plusieurs parmi les personnes présentes ont dit qu'elles avaient été particulièrement frappées par la façon dont l'étude de histoire du CIQI menée par Keerthi avait joué un rôle aussi crucial pour asseoir une base politique ferme pour la RCL.


 

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