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Histoire, programme et «unité de la gauche» : Un échange de lettres

8 octobre 2003

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Voici une lettre envoyée par un de nos lecteurs, suivie d'une réponse de Jerry Isaacs du World Socialist Web Site.

Au rédacteur:

Il y a plusieurs choses sur la gauche aux États-Unis sur lesquelles je me pose des questions, mais peut-être celle qui me dérange le plus est la prolifération des partis politiques. Selon mon propre décompte, il y a cinq partis gauchistes/socialistes qui sont plus connus aux États-Unis: le parti communiste, le parti communiste révolutionnaire, le parti socialiste, le parti socialiste démocrate et le parti socialiste pour la liberté. Les points de vue adoptés par tous ces partis et les solutions qu'ils offrent sont pratiquement identiques.

Je reconnais qu' historiquement la gauche socialiste a été profondément divisée par des disputes internes, mais je crois qu'il est maintenant temps, spécialement pour les partis politiques, de mettre de côté les disputes mineures et insignifiantes qui nous divisent. Il me paraît très sensé de combiner tous les partis socialistes-communistes en un seul parti/organisation, à moins qu'ils ne souhaitent être relégués éternellement aux oubliettes politiques. Chacun de ces partis possède ses forces et ses faiblesses, mais s'ils étaient tous unis, je crois qu'ils formeraient une force politique puissante capable d'établir une société juste et équitable.

CJ


* * *


Cher CJ,

Merci pour votre lettre. Elle reflète la pensée de plusieurs personnes qui sont largement sympathiques aux idées socialistes, mais qui sont soit ignorantes des grandes questions et des grandes luttes politiques et théoriques qui ont dominé et modelé le mouvement socialiste ouvrier, soit indifférentes à elles.

Parmi ceux qui appartiennent à la première catégorie, les plus cohérents et les plus sérieux seront portés à examiner et à étudier les différences dans les programmes, les stratégies et les méthodes politiques qui séparent les authentiques tendances révolutionnaires des tendances opportunistes qui se sont développées dans l'histoire du mouvement socialiste, et essaieront de savoir quels impacts ces différences ont eu sur les luttes de la classe ouvrière et comment elles ont modelé la situation politique actuelle, aux États-Unis et internationalement.

Ceux appartenant à la dernière catégorie vont soit abandonner leur manque de sérieux vis-à-vis l'histoire et les principes politiques ou rejoindre, consciemment ou non, un milieu rempli d'opportunisme et de pessimisme concernant les capacités révolutionnaires de la classe ouvrière et les chances d'une victoire du socialisme. Pour eux, le pronostic politique n'est pas bon.

Le parti de l'égalité socialiste se bat pour construire un parti politique de masse de la classe ouvrière. Un aspect crucial de la construction d'un tel parti est d'éduquer les travailleurs, les étudiants et les intellectuels sur les leçons de l'histoire et, en particulier, les expériences stratégiques de la classe ouvrière survenues lors du siècle dernier.

Le 20e siècle a été témoin de plusieurs luttes révolutionnaires. Cependant, le mouvement ouvrier international n'a pas été capable de renverser le capitalisme mondial. Cela a été longtemps la mode parmi les ex-radicaux et les sceptiques intraitables d'imputer les défaites encaissées par les travailleurs aux travailleurs eux-mêmes, et d'utiliser ces défaites pour affirmer que la conception marxiste du rôle révolutionnaire du prolétariat est fondamentalement fausse.

Le mouvement trotskiste a toujours insisté sur le fait d'examiner le rôle des chefs, des partis politiques et des programmes lorsqu'on enquête sur les raisons des opportunités ratées et des défaites. Un examen sous cet angle révèle que plus d'une fois, les élans révolutionnaires de la classe ouvrière furent arrêtées par des mouvements politiques qui avaient, sous une forme ou une autre, capitulé au statut quo capitaliste . Le seul moyen de prévenir la répétition de tels reculs et défaites, et préparer la voie à de futures victoires, est de dresser les leçons de ces expériences et d'évaluer le rôle politique des différents chefs, partis, syndicats, etc. Voilà pourquoi nous prenons au sérieux l'histoire des différentes tendances politiques ainsi que le rôle qu'elles ont joué dans la lutte des classes.

Votre lettre trahit deux problèmes importants. Tout d'abord, elle présume incorrectement et sans aucune preuve, que le «point de vue adopté par tous ces parties et les solutions qu'ils offrent sont pratiquement identiques». Même parmi les cinq organisations que vous citez comme les plus connues et que nous ne considérons pas comme de véritables représentants du marxisme, il y a des différentes importantes.

Par exemple, les socialistes démocrates d'Amérique (je suppose que c'est le parti que vous avez en tête lorsque vous faites référence au parti socialiste démocrate) appuient ouvertement des sections du parti démocrate et préconisent une politique d'infiltration au sein du parti démocrate dans le but de le pousser à gauche. Est-ce que l'appui pour une telle perspective est «pratiquement identique» à la préconisation d'une rupture avec le parti démocrate et la formation d'un parti indépendant? Est-ce qu'une différence sur cette question (qui a par ailleurs embrouillé le mouvement ouvrier américain depuis ses débuts au 19e siècle) est vraiment «mineure» et «insignifiante»?

Que diriez-vous si votre docteur vous disait, après avoir observé chez vous des symptômes de la grippe, que la cause de celle-ci est soit un virus, une bactérie ou un autre truc microscopique, ou bien un empoisonnement sanguin, et qu'en insistant pour connaître le vrai coupable vous faisiez preuve d'une obsession «insignifiante» pour des détails «mineurs»? Vous le prendriez probablement pour un charlatan et vous iriez voir ailleurs. Et bien, le charlatanisme politique existe aussi.

Le deuxième problème, relié au premier, qui est révélé par votre lettre est un manque de connaissances historiques. Vous suggérez qu'un mouvement socialiste viable peut être construit par un rassemblement de tous les « partis politiques gauchistes/socialistes », peu importe le rôle qu'ils ont joué dans le passé.

Examinons trois des partis politiques auxquels vous suggérez au PES (parti de l'égalité socialiste) de s'unir.

Le parti communiste est le parti du stalinisme, des procès de Moscou et de la contre-révolution en Espagne, au Chili et dans plusieurs autres pays, sans mentionner la restauration du capitalisme en URSS. La bureaucratie du Kremlin fut responsable du meurtre d'innombrables révolutionnaires qui s'opposaient à la trahison du socialisme, y compris Léon Trotsky. Aujourd'hui, le parti communiste américain est une sorte de conseiller semi-officiel de certaines sections du parti démocrate et de la bureaucratie syndicale de l'AFL-CIO.

Les socialistes démocrates d'Amérique font partie de la Deuxième Internationale, qui a précipité les travailleurs dans le massacre de la première guerre mondiale et qui est par la suite devenu un instrument central du capitalisme en Europe de l'Ouest. Aujourd'hui, le parti travailliste de Tony Blair, qui a procuré un soutien crucial à la guerre de Bush en Irak, constitue un de ses partis affiliés. Les socialistes démocrates d'Amérique comptent actuellement dans leurs rangs le président de l'AFL-CIO John Sweeney, dont la fédération syndicale, comme c'est bien connu, collabore aux activités contre-révolutionnaires de la CIA.

Ensuite, nous retrouvons le parti communiste révolutionnaire, basé sur le Maoïsme, tendance nationaliste et petite-bourgeoise qui a désorienté une génération entière de jeunes dans les pays arriérés et qui est responsable des politiques répressives et pro-capitalistes du régime stalinien chinois.

Si vous voulez adhérer à de telles organisations, libre à vous. Mais c'est plus qu'un peu présomptueux d'embellir un tel projet en le plaçant sous la bannière du socialisme.

Un examen concret des différentes perspectives relatives à seulement un évènement politique important et d'actualité, l'élection de rappel en Californie, révèle les différences de principes qui existent entre plusieurs organisations de la «gauche» et le PES.

Une grande variété de groupes appuyait ouvertement le rappel et était indifférente à la menace aux droits démocratiques des travailleurs posée par les forces de droite derrière le rappel. Ces groupes comprennent le parti socialiste pour la liberté, le parti ouvrier socialiste (Socialist Workers Party), la ligue spartaciste et le groupe Action Socialiste établi en Californie.

Il y a aussi ceux, dont le parti communiste et les socialistes démocrates d'Amérique, qui s'opposaient au rappel uniquement dans l'optique de défendre le gouverneur Gray Davis et de garder la classe ouvrière attaché au parti démocrate.

Finalement, il y a les groupes qui n'ont pas eu le courage de prendre position concernant le rappel, et qui ont soit recommandé aux électeurs de s'abstenir ou n'ont rien proposé du tout. On retrouve parmi ceux-ci le parti socialiste, le parti mondial des travailleurs (Workers World Party), le parti communiste révolutionnaire et l'organisation socialiste internationale.

Le candidat du parti vert Peter Camejo a supporté avec enthousiasme le rappel, s'accrochant aux jupons de la droite républicaine et menant par la suite sa campagne pour le poste de gouverneur de façon à gagner une respectabilité aux yeux de l'opinion publique bourgeoise et à faire accepter le parti vert comme faisant partie de l'establishment.

Lorsque les sondages ont révélé 10 jours avant les élections que le candidat républicain Arnold Schwarzenegger détenait une avance considérable, Camejo a déclaré qu'il «comprendrait» que ses partisans votent pour le démocrate Cruz Bustamante.

Le PES est intervenu aux élections en Californie dans le but de mettre à nu et de combattre la tentative de la droite républicaine de renverser les résultats de l'élection du gouverneur en 2002 et d'imposer son agenda réactionnaire. Par le fait même, nous n'avons offert aucun appui au gouverneur Davis, au gouverneur-adjoint Cruz Bustamante ou à n'importe quelle section du parti démocrate. Le PES a endossé la campagne de John Christopher Burton, qui avançait une alternative socialiste aux deux partis de la grande entreprise.

Le PES n'est pas intéressé par la politique à court terme basée sur des alliances opportunistes et dépourvues de principe. Nous maintenons que la société est divisée en classes et que, en raison de sa position dans la société capitaliste, la classe ouvrière est en conflit irréconciliable avec l'ordre actuelle et sera poussée vers des luttes révolutionnaires. C'est nécessaire, toutefois, d'amener la conscience socialiste parmi la classe ouvrière. Cela veut dire, en partie, qu'il faut clarifier les questions politiques et appeler les choses par leurs vrais noms.

Nous croyons que les grands mouvements d'émancipation doivent être construit sur la base de grandes idées et des leçons de l'histoire. La classe ouvrière doit posséder le plus haut niveau de conscience politique et la tâche du PES et de nos co-penseurs du Comité International de la Quatrième Internationale est de développer cette conscience.

Jerry Isaacs, pour le comité de rédaction du WSWS

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