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Bush endosse les plans d'annexion du territoire cisjordanien de Sharon

par Bill Van Auken
16 avril 2004

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En endossant mercredi dernier le «plan de désengagement» du premier ministre israélien Ariel Sharon, le président américain George W. Bush marque une rupture avec près de quatre décennies de diplomatie officielle américaine, abandonnant même la prétention que Washington désire un accord négocié dans le conflit au Proche-Orient. Il a donné le soutien public et sans équivoque de son gouvernement à l'agression israélienne et à la dépossession du peuple palestinien.

Le président américain, qui a lancé son invasion de l'Irak il y a un peu d'un an en prétendant défendre l'inviolabilité des résolutions des Nations Unies, n'a laissé aucun doute sur son mépris envers toutes les résolutions onusiennes sur les droits de Palestiniens. L'accord israélo-américain vient avaliser l'annexion des territoires palestiniens par l'Israël en contradiction flagrante avec des résolutions de l'ONU de longue date qui condamnaient l'occupation israélienne de la Cisjordanie et qui demandaient qu'on y mette fin.

L'accord unilatéral annoncé par Bush et Sharon prévoit le démantèlement d'une petite poignée d'enclaves israéliennes fortifiées dans la Bande de Gaza et l'évacuation d'environ 7500 colons en échange de l'appui des États-Unis au «droit» de l'Israël d'annexer de façon permanente une vaste portion du territoire de la Cisjordanie saisie par lui lors de la guerre de 1967 contre les États arabes voisins. Les colonies sionistes dans ce territoire comptent environ 240.000 personnes.

Sharon a aussi obtenu de Bush son endossement explicite pour continuer la construction de sa «barrière de sécurité», un long mur qui sépare la Cisjordanie et qui va signifier le déplacement d'autres centaines de milliers de Palestiniens.

Les représentants israéliens bien au fait des pourparlers ont dit que Sharon s'était rendu à Washington avec plusieurs propositions quant au territoire de Cisjordanie que son gouvernement proposait d'annexer. Bush a choisi la plus désavantageuse pour les Palestiniens. Il a engagé l'Israël à se retirer de seulement quatre colonies insignifiantes au nord-ouest des territoires occupés. Ces quatre colonies ne comptent que 500 colons.

Bush s'est aussi rallié à Sharon sur la question de l'abrogation unilatérale du droit des réfugiés palestiniens qui ont fui la terreur sioniste en 1948-49 à revenir chez eux dans ce qui est aujourd'hui l'Israël.

Sharon a été cité dans la presse israélienne pour avoir répondu à l'outrage qu'a provoqué l'accord chez les Palestiniens : «J'ai dit que nous étions pour leur donner un coup fatal et nous leur avons donné un coup fatal.»

Ce diktat israélo-américain marque la résurgence du type d'impérialisme et de colonialisme débridés qui existaient dans la région après la Première Guerre mondiale. Cela rappelle l'accord de Sykes-Picot qui traçait dans le sable les lignes démarquant les sphères d'influence coloniales. Les masses arabes n'avaient pas voix au chapitre et, à la pointe du fusil, ont été forcées de se soumettre.

Non seulement est-ce que les représentants palestiniens ont été exclus des pourparlers menant à cette saisie illégale du territoire, mais l'accord israélo-américain fut annoncé de telle façon qu'elle veut suggérer que le peuple palestinien et leurs demandes historiques n'existent pas.

Bush a déclaré que le plan de Sharon était «historique et courageux», ajoutant que «Si l'ensemble des parties choisissent de saisir cette occasion, elles peuvent ouvrir la porte au progrès». Mais Washington et Sharon n'ont reconnu d'autres parties qu'eux mêmes. Quant à «ouvrir la porte au progrès», le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat ne peut même pas ouvrir la porte de son quartier général assiégé à Ramallah sans risquer de se faire assassiner par un franc-tireur israélien.

«À la lumière des nouvelles réalités sur le terrain» a déclaré Bush, il ne serait «pas réaliste» pour les Palestiniens de s'attendre à ce que les Israéliens abandonnent les colonies illégales et rendent le territoire conquis en 1967. Du même souffle, il a insisté sur le fait que la seule voie vers un État indépendant ouverte aux Palestiniens était de supprimer toute résistance aux conquérants israéliens. «S'ils veulent un État qui offrira un avenir d'espoir à son peuple, ils doivent combattre la terreur. Ils doivent être résolus dans leur combat contre la terreur.»

Les «nouvelles réalités sur le terrain» auxquelles Bush fait référence sont, en fait, le résultat de la terreur systématique de l'État de l'Israël, qui a poussé les Palestiniens hors de leur territoire pour faire place à des colonies sionistes. La demande des Palestiniens pour le droit au retour est ainsi une réponse à la terreur sioniste déclenchée lors de la création de l'Israël où trois quarts de millions de personnes ont été forcées de quitter leurs foyers et leurs villages et dispersées dans des camps de réfugiés à travers la région.

Bush et Sharon ont posé pour les caméras à la Maison blanche en tant qu'alliés de la «guerre à la terreur» et en tant que champions de la paix et de la démocratie. Mais le monde sait qu'ils sont des partenaires dans l'agression. Les deux mènent des occupations prédatrices qui ont engendré une résistance de masse, et les deux ont été ébranlés par l'intensité de cette résistance.

Bush est arrivé au pouvoir avec deux objectifs étroitement liés quant à sa politique étrangère : premièrement, envahir l'Irak et deuxièmement, offrir l'appui entier des États-Unis aux attaques des Israéliens contre les Palestiniens. Ces buts font partie d'un plan plus large pour établir l'hégémonie sans partage des États-Unis sur le Moyen-Orient et ses réserves pétrolières.

Comme l'ancien secrétaire au Trésor Paul O'Neill l'a relaté dans le livre de Ron Suskind, Le prix de la loyauté, le président américain a indiqué une nouvelle orientation d'appui inconditionnel au régime israélien à la première réunion du Conseil de sécurité national (CSN) en janvier 2001.

Selon le contre rendu de O'Neill, Bush a annoncé au CSN : «Nous allons corriger les déséquilibres de la précédente administration dans le conflit du Moyen-Orient. Nous allons le faire pencher plus du côté de l'Israël.» Il a ajouté que les États-Unis se retireraient de toute tentative d'arriver à une entente.

Au secrétaire d'État Colin Powell qui l'avertissait qu'un tel geste, encourageant Sharon à faire usage de force militaire sans contraintes contre les Palestiniens, pourrait avoir des conséquences «très graves», Bush a répondu : «Peut-être que ce serait la meilleure façon de rééquilibrer les choses Parfois l'usage de la force par une des parties peut vraiment clarifier les choses.»

L'implémentation de cette politique a signifié un appui aux campagnes du régime Sharon d'assassinats politiques des militants et des dirigeants palestiniens et de sa politique de représailles de masse et de châtiment collectif en réponse aux attaques terroristes que ces assassinats contribuent à générer.

Depuis le début de la soi-disant Intifada al-Aqsa en septembre 2000 qui fut déclenchée par la visite provocatrice au Mont du Temple (al-Harem al-Sharif pour les Arabes) par Ariel Sharon, qui n'était à l'époque qu'un des dirigeants du Likoud, plus de 2700 Palestiniens ont été tués par les forces de sécurité israéliennes, la plus grande partie des civils, dont près de 600 enfants. Au cours de la même période, environ 840 Israéliens, y compris des soldats, des colons et des civils, dont 100 enfants, ont été tués par la série d'attentats à la bombe et d'autres attaques.

Alors que l'administration Bush utilise la «guerre au terrorisme» comme d'un prétexte pour envahir et occuper l'Irak, Sharon a invoqué les mêmes raisons pour couvrir la politique d'expansion israélienne et une campagne impitoyable pour extirper le nationalisme palestinien et pour réduire les Palestiniens à un peuple impuissant et humilié.

Pour les masses du monde arabe, les deux occupations et la résistance qu'elles génèrent sont de plus en plus perçues comme des parties intimement liées d'un même processus. En fait, le lien entre les deux devient de plus en plus clair.

Pendant plusieurs années, Israël a utilisé les armes américaines pour réaliser ses actes de répression contre les Palestiniens. Aujourd'hui, l'armée américaine utilise l'expertise israélienne et ses conseillers militaires pour élaborer des tactiques et des politiques militaires pour mener une campagne brutale de suppression du soulèvement nationaliste contre l'occupation américaine de l'Irak.

Au même moment, Bush et Sharon a été poussés à se rencontrer à la Maison blanche mercredi dernier par les crises politiques que chacun confronte. Devant l'opposition grandissante à sa politique en Irak et les révélations incriminantes sur la faillite de la Maison blanche à entreprendre la moindre action pour empêcher les attaques terroristes du 11 septembre 2001, Bush a vu dans l'annonce de son appui sur le plan d'annexion de Sharon une occasion de distraire l'attention publique et de tromper le peuple américain en lui faisant croire qu'il est pour la paix au Proche-Orient.

Sharon, qui fait face à la possibilité d'être accusé de corruption et selon toute vraisemblance à la rupture de sa coalition de droite, espère que l'appui inconditionnel du gouvernement qui fournit l'argent, l'aide et les armes qui permettent à l'Israël de survivre lui permettra d'éviter la défaite.

L'accord de Washington signale l'effondrement du soi-disant «processus de paix» qu'on sait déjà n'être qu'une fiction suite à la décennie qui a suivi la poignée de main de 1993 entre Yasser Arafat et le premier ministre israélien Yitzhak Rabin dans le jardin de roses de la Maison blanche.

Cet événement était une humiliation de plus pour Arafat, qui avait accepté l'accord piloté par les États-Unis avec Israël sur la base que l'on échangeait «le territoire pour la paix». En réalité, le pacte était basé sur les mêmes prémisses que ceux qu'imposent aujourd'hui unilatéralement l'Israël et Washington, le maintien d'une moins une partie des colonies en Cisjordanie et la renonciation du droit au retour, mais en tant que partie d'un accord négocié sur le résultat final qui impliquait la création d'un État palestinien.

Tous les gouvernements israéliens depuis cette date ont cherché à saboter tout progrès vers un État palestinien ou toute solution réellement démocratique de la question palestinienne. Plutôt, la position de négociation a toujours été de demander qu'Arafat réprime toute résistance à l'occupation israélienne, ce qui n'a pu que mener à le discréditer aux yeux des larges masses du peuple palestinien.

Les gouvernements américains, autant républicains que démocrates, n'ont pas exercé de réelles pressions sur Israël. Après que l'accord Bush-Sharon fut annoncé mercredi dernier, le candidat présidentiel pressenti des démocrates, le sénateur du Massachusetts John Kerry a émis une déclaration qui endossait le geste unilatéral comme «un pas en avant». Il a dit au Washington Post : «Ce qui est important, évidemment, c'est la sécurité de l'État de l'Israël, et c'est cette question que le premier ministre et le président, je crois, veulent résoudre.»

Dans une autre entrevue au New York Sun, Kerry a déclaré : «J'ai toujours eu l'impression que le droit au retour était contraire à la viabilité de l'État juif, et c'est ce qu'est l'Israël.»

Pour le prétendant démocrate, comme pour le républicain sortant, le peuple palestinien n'existe pas.

Sans doute, Bush et Kerry ont considéré la politique intérieure pour élaborer leurs positions. Les deux courtisent le lobby sioniste dans l'espoir d'en tirer argent et votes. Bush fait aussi appel à sa base «chrétienne-sioniste», qui considère la domination israélienne comme la voie vers Armageddon.

Mais de façon plus essentielle, l'appui de Washington aux politiques d'expansion de l'Israël est lié au même type de campagne pour l'hégémonie qui sous-tend son aventure coloniale en Irak. Les États-Unis soutiennent l'Israël avec une aide et des prêts estimés à 6 milliards par année dans le but de maintenir un État-garnison au moyen duquel ils projettent leur puissance dans le Moyen-Orient.

Les politiques qu'adoptent Washington et l'Israël déstabilisent toute la région et créent les conditions pour des soulèvements révolutionnaires. Non seulement Arafat, mais tous les régimes arabes corrompus ont été exposés par l'accord israélo-américain. La visite du président égyptien Hosni Moubarak aux États-Unis juste avant l'annonce de mercredi et la visite prévue du roi jordanien Abdallah II le 21 avril nous donne la mesure de la servilité des classes dirigeantes arabes face à l'impérialisme américain.

Ce pacte colonial ne permettra aucunement au peuple israélien de sortir du cercle vicieux de la répression et de la violence. Plutôt, il ne va qu'enflammer encore plus les masses palestiniennes.

Seul un programme qui unira les Juifs et les Arabes sur une base démocratique, laïque et véritablement anti-impérialiste, une base socialiste en d'autres mots, offre une issue à l'impasse sanglante.

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