wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

Yasser Arafat, 1929-2004

Par Chris Marsden et Barry Grey
12 novembre 2004

Utilisez cette version pour imprimer

Le monde se souviendra de Yasser Arafat comme d'un homme doté d'un immense courage personnel et d'une loyauté indéfectible à l'endroit de la cause palestinienne. Des millions de personnes dans le monde rejetteront avec dégoût les calomnies colportées contre Arafat, le symbole international de la résistance palestinienne pendant près de quatre décennies, par des gens comme Ariel Sharon et George W. Bush, deux criminels de guerre assez téméraires pour traiter Arafat de terroriste.

Sur cette question, Arafat lui même avait donné une excellente réponse dans son discours aux Nations Unies en 1974 :

« La différence entre un révolutionnaire et un terroriste réside dans la raison pour laquelle il combat. Celui qui lutte pour une cause juste, pour la liberté et la libération de sa terre contre les envahisseurs, les colons et les colonialistes, ne peut être appelé un terroriste... Mais ceux qui combattent contre les causes justes, ceux qui mènent des guerres d'occupation et coloniales pour opprimer les autres peuples, eux ce sont des terroristes. Ce sont ces gens dont les actions doivent être condamnées et qui doivent être appelées des criminels de guerre, car c'est la justesse de la cause qui détermine le droit de lutter ».

La gravité du deuil vécu par les Palestiniens montre la profonde affection qu'ils nourrissaient pour Arafat. Mais il est nécessaire de tirer les leçons politiques de sa tragédie, qui est aussi celle non seulement des Palestiniens, mais également de l'ensemble des masses arabes.

Les masses ouvrières brutalement exploitées du Moyen-Orient n'ont jamais manqué de courage, de sens du sacrifice ou de volonté pour lutter. Ce qui leur manque, et ce qu'Arafat a été incapable d'apporter, c'est une perspective révolutionnaire viable pour mettre fin à la domination impérialiste et à ses conséquences inévitables que sont la pauvreté et la répression.

L'échec ultime du projet national d'Arafat ne peut être attribué aux qualités subjectives d'un individu. Les forces et les faiblesses d'Arafat ne font que refléter les problèmes et les contradictions du mouvement politique qu'il a dirigé.

L'impasse dans laquelle se retrouvent maintenant les masses palestiniennes n'est pas une exception mais bien la règle. Dans tout le Moyen-Orient, comme ailleurs dans le monde, la tentative de trouver une solution nationale à la domination étrangère et à l'injustice sociale s'est révélée non viable. Même dans les pays où les mouvements révolutionnaires nationaux ont réussi à mettre fin à la domination directe étrangère, tel qu'en Algérie par exemple, la domination des banques et des entreprises transnationales continue, les conditions sociales de la classe ouvrière et de la paysannerie restent désespérées, et des cliques bourgeoises locales corrompues ont remplacé les anciens administrateurs coloniaux.

La racine de la tragédie d'Arafat est la perspective politique erronée sur laquelle il a basé sa lutte politique. Plus que jamais, dans une économie mondiale dominée par une poignée de banques et d'entreprises transnationales, la leçon fondamentale du XXe siècle reste la même : le remède contre l'oppression nationale et l'exploitation sociale ne se trouve pas dans la voie nationale, mais bien dans la voie internationale et socialiste.

Le problème du peuple palestinien est un problème international. Il ne peut être résolu dans le cadre actuel des États-nations capitalistes du Moyen-Orient grâce auquel l'impérialisme exerce son contrôle. L'ajout d'un État palestinien dans l'actuelle équation au Moyen-Orient, quand bien même qu'il aboutirait, ne résoudrait pas les problèmes de base des masses palestiniennes. Ce cadre même doit être enlevé et remplacé par un nouveau système correspondant aux besoins des masses ouvrières. Ce nouveau cadre, ce sont les États-Unis socialistes du Moyen-Orient. La force sociale capable de le créer est la classe ouvrière, entraînant derrière elle les masses rurales pauvres, unies dans la lutte contre l'impérialisme et les classes nationales bourgeoises de la région.

Dans l'une des grandes ironies de l'histoire, l'échec du programme nationaliste palestinien reflète la débâcle d'un autre mouvement national important du XXe siècle : le sionisme. Le « succès » du sionisme n'a servi qu'à transformer un peuple opprimé, qui a souffert l'une des plus grandes tragédies de l'histoire, en oppresseur d'un autre peuple, les Palestiniens.

L'histoire de l'Organisation de libération de la Palestine et d'Arafat a démontré à maintes reprises que la subjugation du peuple palestinien a été maintenue non seulement à cause de la violence et de la puissance militaire d'Israël, mais également par la trahison de la bourgeoisie arabe. Sur la base de son programme nationaliste, Arafat a tenté d'exercer des pressions sur les régimes arabes et de manoeuvrer entre eux. Mais il n'a jamais été capable d'établir quelque indépendance véritable à leur égard comme à celui de leurs maîtres impérialistes. Dans la même veine, ses tentatives de s'appuyer sur l'Union soviétique pour faire contrepoids à Israël et aux États-Unis l'ont inexorablement entraîné à rechercher le soutien de l'opposant le plus déterminé des masses palestiniennes et arabes : l'impérialisme américain.

La grande catastrophe

Arafat est né au Caire en 1929 sous le nom de Mohammed Abdel Rahman Abdel Raouf Arafat Al Qudua Al Husseini. Ses parents palestiniens avaient quitté Gaza deux années auparavant. Son père était un petit commerçant. Après la mort de sa mère lorsqu'il avait cinq ans, Arafat est allé vivre chez des proches de la famille habitant dans la vielle ville de Jérusalem. C'est à l'adolescence qu'Arafat se lie étroitement à la lutte pour la libération de la Palestine, un engagement dont il ne se détournera jamais.

Le puissant sentiment de classe pour l'unification des travailleurs juifs et arabes dans une lutte commune contre le capitalisme qui prévalait alors mena à la formation du Parti communiste palestinien (PCP) en 1921. Mais la bureaucratie stalinienne qui consolida subséquemment son pouvoir à Moscou utilisa le PCP pour servir ses propres besoins en matière de politique étrangère. Ces derniers gravitaient autour de la formation d'alliances avec les divers régimes nationaux bourgeois du Moyen-Orient pour faire contrepoids aux puissances occidentales impérialistes. En échange, Moscou s'engageait à supprimer toute initiative politique indépendante de la part de la classe ouvrière.

Suite au génocide nazi contre les Juifs d'Europe qui créa un flot de millions de réfugiés, l'Union soviétique s'est jointe aux États-Unis pour appuyer l'établissement de l'État d'Israël. Les sionistes réussirent alors à persuader l'assemblée générale des Nations Unies de voter pour la partition de la Palestine en deux États : un palestinien et un juif. Les Britanniques quittèrent la région et l'État d'Israël fut proclamé en mai 1948.

Les Palestiniens cherchèrent de l'aide auprès des divers régimes arabes. Mais les armées de la Ligue arabe étaient irrémédiablement divisées entre elles et inférieures en nombre face aux Israéliens. De plus, les puissances impérialistes réussirent à faire appel aux intérêts de classe des diverses cliques bourgeoises arabes en concurrence : leur désir de territoire, la possibilité d'exploiter « leur propre » classe ouvrière et paysannerie et d'établir des relations étroites avec l'une ou l'autre des grandes puissances.

Bien que beaucoup de Palestiniens quittèrent leurs maisons pour fuir la guerre entre Israël et les régimes arabes, beaucoup d'autres furent contraintes de s'exiler par les forces armées israéliennes lors d'une brutale campagne de purification ethnique. L'impact de la terreur, incarnée par le massacre de Deir Yassin a été décrit par Arafat qui disait des sionistes : « ils ont occupé 81 % de la Palestine et par le fait même déraciné un million d'Arabes. Les sionistes occupent 524 villes et villages arabes, dont 385 ont été détruits, entièrement oblitérés dans ce processus. Ils ont ensuite construit leurs propres villages et colonies sur les ruines de nos fermes et de nos terres ».

Des 1.200.000 Palestiniens qui vivaient dans les anciennes zones de la Palestine qui sont maintenant territoires israéliens, il n'en reste plus que 200.000, traités comme des citoyens de deuxième classe. Les autres vivent dans des camps de réfugiés dans les pays limitrophes, principalement en Jordanie qui comprend la Cisjordanie. Leur existence même en tant que peuple a été niée, non seulement par Israël (dans une déclaration fameuse, la dirigeante Golda Meir a dit des Palestiniens qu'« ils n'existent pas »), mais également par les leaders arabes qui n'ont nourri aucun désir d'assimiler les Palestiniens ou de lutter pour leur redonner leurs terres.

Arafat était bien conscient de la perfidie des dirigeants arabes, mais depuis le début il voyait bien qu'il n'avait pas d'autre solution que de manuvrer entre eux, ce qui eut des conséquences désastreuses.

Le colonel Abdul Nasser prit le pouvoir en Égypte en 1954. Il encouragea les illusions populaires dans le monde arabe en prônant un programme limité de reformes sociales et économiques qu'il qualifia de « socialisme arabe » et il appela à l'unité pan-arabique sous son leadership.

Arafat partit alors s'établir à Gaza, zone alors administrée par l'Égypte, où il devint actif au sein des groupes paramilitaires palestiniens qui effectuaient des raids contre Israël. Il s'allia aux forces d'Abu Iyad et d'Abu Jihad. Nasser qui jouissait du soutien économique et militaire du régime stalinien de Moscou, signa l'accord de l'ONU menant à la création de la FUNU (Force d'urgence des Nations Unies) pour patrouiller Gaza et empêcher la guérilla palestinienne d'organiser des raids contre Israël. Le mouvement de guérilla palestinien fut encerclé et Arafat et ses alliés se retrouvèrent isolés.

En 1957, Arafat et Abu Jihad quittèrent le Caire pour le Koweït pour rejoindre les forces d'Abu Iyad et former le Mouvement de libération nationale de la Palestine, ou Al Fatah. L'organisation prônait la lutte armée dans un seul but : reprendre les terres saisies par Israël et créer un État palestinien démocratique et laïque.

En 1964, lorsque Israël menaça de détourner les eaux du haut Jourdain, l'Égypte joua un rôle pour amener l'Organisation de libération de la Palestine sous les auspices de la Ligue arabe. Nasser chercha à dominer l'OLP par l'entremise de son leader, Ahmed Shukairy, et les forces armées de l'OLP furent intégrées aux armées de Égypte, de la Syrie, de la Jordanie et de l'Irak.

Le Fatah se joignit à l'OLP mais Arafat avait l'intention de faire échouer cette tentative de neutralisation des militants palestiniens et il continua de prôner la lutte armée contre Israël. En représailles, les membres du Fatah subirent une répression accrue. En Jordanie, le roi Hussein ordonna que tous les militants du Fatah soient traqués et emprisonnés.

La guerre israélo-arabe de 1967 fut un point tournant tant pour les Arabes que pour les Juifs. La destruction des armées arabes par Israël en l'espace de six jours seulement discrédita indubitablement les régimes nationalistes laïques d'Égypte et de Syrie et leurs bailleurs de fonds staliniens en URSS. Israël augmenta énormément la superficie de son territoire, entraînant ainsi l'exode de 350 000 réfugiés de plus, en plus d'annexer Jérusalem Est.

Cette guerre signala la fin du projet panarabe de Nasser. Depuis, tous les régimes arabes bourgeois ont rapidement avancé vers la droite. Des régimes militaires ou appuyés sur l'armée ont pris le pouvoir en Syrie et en Irak, et l'Égypte est devenue tributaire des États conservateurs pro-occidentaux riches en pétrole.

Le Fatah prend la direction de l'OLP

La défaite arabe a donné naissance à diverses organisations de guérilla préconisant une campagne militaire indépendante pour la libération de la Palestine. Dorénavant, la lutte contre Israël allait être menée sous la bannière du nationalisme palestinien en utilisant les tactiques de guérilla adoptées par les Algériens et les Vietnamiens.

De toutes ces organisations de guérilla, le Fatah est devenu la plus importante, surtout après avoir affronté les Israéliens en mars 1968 à Karameh en Cisjordanie. Il a évincé la direction de l'OLP à un congrès palestinien tenu à Caire en février 1969. Arafat est alors devenu le nouveau président de l'OLP.

Le nombre de membres du Fatah est alors passé de quelques centaines à plus de 30.000 et il a organisé des raids constants contre Israël. Suite à ses succès politiques et militaires, l'OLP sous la direction du Fatah a été transformée en un véritable mouvement de masse des Palestiniens. Depuis la fin des années 1960, la lutte du peuple palestinien et de l'OLP est devenue un catalyseur et le point focal des luttes révolutionnaires à travers le Moyen-Orient.

La trahison de 1970-1982

Dans les vingt années suivantes, l'OLP allait subir des attaques répétées de la part des régimes arabes : le « Septembre noir » de 1970 qui a vu la Jordanie massacrer des Palestiniens; la complicité de la Syrie dans le carnage fasciste libanais de Palestiniens aux camps de Karantina et de Tal al Zaatar cinq ans plus tard; les massacres similaires aux camps de Sabra et Chatila en 1982; et le refus jusqu'à ce jour des régimes arabes de s'opposer à la répression israélienne dans les territoires occupés.

L'intervention de la Syrie contre l'OLP, qui après 1970 était basée au Liban, a été particulièrement féroce. Au milieu des années 1970, l'OLP a été entraînée dans la guerre civile qui s'étendait au Liban entre les forces nationalistes dirigées par Kamal Jumblatt et les fascistes de la Phalange chrétienne. Arafat a soutenu Jumblatt et les forces de gauche étaient sur le point de vaincre l'aile droite lorsque la Syrie est intervenue contre elles. Les massacres à Karantina et Tal al Zaatar furent le résultat de cette trahison.

En 1982, lorsque Israël, appuyé par les États-Unis, a envahi le Liban dans le but d'en expulser l'OLP, le régime bourgeois syrien a encore une fois fait la démonstration de sa haine envers la cause palestinienne en refusant de lever le petit doigt pour défendre l'OLP, qui a dû quitter le Liban et établir son quartier général en Tunisie.

C'est la classe ouvrière israélienne qui a mis fin au pogrom de Sabra et Chatila. Plus de 400.000 personnes, soit un dixième de la population, sont descendues dans les rues de Tel-Aviv en opposition au gouvernement du Likoud de Menahem Begin et du ministre de la Défense, Ariel Sharon, qui avaient permis le massacre. Ce fut une puissante expression d'un sentiment démocratique et progressiste et révéla le potentiel pour forger une lutte unifiée des travailleurs juifs et arabes. Une telle lutte n'était possible que sur la base d'un programme socialiste qui répondait aux intérêts de classe des travailleurs et des opprimés de tout le Moyen-Orient.

Après la guerre du Kippour en 1973, le dirigeant égyptien Anouar Sadate a commencé à faire des ouvertures directes à Israël et aux États-Unis, processus qui a abouti à la reconnaissance d'Israël à Camp David en 1978. Israël avait gagné la neutralité du plus important pays arabe dans toutes ses futures guerres contre ses voisins, isolant ainsi l'OLP et renforçant sa position contre les Palestiniens.

L'intifada et l'effondrement de l'Union soviétique

Au milieu des années 1980, d'importants changements politiques prenaient place qui auront pour conséquence de pousser Arafat dans les griffes de l'impérialisme américain. Le plus important fut le tournant de la bureaucratie stalinienne sous Michael Gorbatchev vers la restauration capitaliste et l'intégration de l'Union soviétique dans les structures de l'impérialisme mondial. En 1987, «l'URSS avait signalé qu'elle appuierait une solution politique au conflit avec Israël, réduirait la vente d'armes à ses clients traditionnels et augmenterait ses contacts diplomatiques et économiques avec l'Égypte, la Jordanie et Israël» (Marr & Lewis, Riding the Tiger, Westview Press, 1993, p.92).

Au même moment, en décembre 1987, l'intifada, un soulèvement spontané des travailleurs et des jeunes des territoires occupés, éclatait. L'intifada n'ébranla pas seulement les Israéliens, mais aussi la bourgeoisie arabe et l'impérialisme américain, qui craignaient qu'un mouvement révolutionnaire pourrait se développer hors de leur contrôle et avoir pour impact la radicalisation du Moyen-Orient.

Dans un contexte où tous les régimes arabes sur lesquels il avait compté n'avaient rien de plus pressant à faire que la paix avec Washington et où les États-Unis n'avaient pas d'adversaires sérieux à leur domination du Moyen-Orient, la marge de manoeuvre d'Arafat s'était beaucoup rétrécie. En décembre 1988, dans une déclaration dont tous les mots avaient été dictés par le secrétariat d'État américain, Arafat garantissait la sécurité d'Israël, acceptait qu'un accord de paix avec Israël était une «stratégie et pas une tactique provisoire», et renonçait à toutes les formes de terrorisme, «y compris le terrorisme individuel, de groupe ou d'État». Reconnaissant franchement l'humiliation que cela signifiait lors d'une conférence de presse où on lui demandait de déclarer qu'il acceptait Israël, Arafat a répondu «Que voulez-vous? Que je fasse un strip-tease? Ça ne serait pas convenable.»

Dans un dernier effort pour s'assurer une base pour pouvoir s'opposer aux États-Unis et à Israël, Arafat a déclaré son appui au régime baasiste de Saddam Hussein lorsqu'il a été attaqué par Washington en 1991. Mais il s'est retrouvé entièrement isolé alors que les régimes arabes appuyèrent la campagne guerrière des États-Unis. Une fois la Guerre du Golfe terminée, Arafat a été forcé d'entreprendre des négociations qui ont mené aux accords d'Oslo de 1993.

Les termes de l'accord accepté par Arafat à Oslo et créant l'Autorité palestinienne étaient très loin du but avoué du Fatah, une Palestine laïque et démocratique. L'accord palestino-israélien représentait la renonciation de la demande du peuple palestinien pour tout son territoire, l'accord n'en accordant que 22 pour cent. Il prévoyait qu'une autorité provisoire dirigée par l'OLP prendrait responsabilité de la sécurité dans les territoires occupés, libérant Israël du poids de l'occupation militaire, tout en laissant le régime sioniste en contrôle des frontières, de la politique étrangère et de la protection des colonies illégales en Cisjordanie et à Gaza.

Dans les faits, Arafat était chargé de mater l'opposition populaire des masses palestiniennes à l'occupation et à la répression israéliennes.

Le soi-disant «processus de paix» d'Oslo était une fraude. Les dix dernières années ont été les plus amères qu'ait connues l'endurant peuple palestinien. Sa position sociale et économique est plus mauvaise aujourd'hui qu'avant la création de l'Autorité palestinienne. Il a connu la brutalité constante et les incursions militaires répétées, l'assassinat de ses dirigeants et la consolidation d'une couche bourgeoise corrompue à la tête de l'Autorité palestinienne qui est maintenant prête à signer n'importe quel accord traître que pondraient les États-Unis et Israël.

Israël a renié sa promesse faite lors des accords d'Oslo de mettre un terme à ses activités illégales de colonisation qui duraient depuis 1993. Le gouvernement sioniste a continuellement refusé de négocier sur les questions clés du statut de Jérusalem Est et du retour des réfugiés palestiniens et de leur descendance.

Les concessions même limitées qui ont été faites provoquèrent une furieuse opposition de la droite israélienne et des partis pro-colonies, commençant par l'assassinat en novembre 1995 de celui qui négociait avec Arafat, le premier ministre du Parti travailliste, Ytzhak Rabin. Ce meurtre avait été précédé d'une activité frénétique contre Rabin par Benjamin Netanyahou, le dirigeant du Parti du Likoud, pro-colonies, menant la veuve de Rabin à accuser directement Netanyahou d'avoir été l'instigateur du meurtre. L'assassinat de Rabin a marqué un changement de direction dans la politique de l'élite dirigeante israélienne l'éloignant d'un règlement du conflit avec les Palestiniens.

L'élection du Likoud sous la direction de Netanyahou inaugure une politique de sabotage délibéré de toutes les négociations avec les Palestiniens et de demande de concessions de plus en plus onéreuses de la part d'Arafat - le désarmement, l'abandon du droit de retour et de Jérusalem Est - concessions qu'Arafat ne voulait pas et était incapable d'accepter face à la montée de l'opposition populaire parmi les Palestiniens.

En juillet 2000, lors de discussions menées par le président américain Bill Clinton à Camp David dans le Maryland entre l'OLP et le premier ministre travailliste d'Israël, Ehud Barak, Arafat était prêt à accepter de nouvelles concessions par rapport à Oslo, incluant la possibilité pour Israël d'annexer les colonies juives les plus densément peuplées et mêmes certaines restrictions au droit de retour, en échange de compensations provenant d'un fonds international.

Mais Arafat ne pouvait accepter la proposition que Jérusalem demeure entièrement sous la souveraineté d'Israël. Les discussions furent rompues et des centaines de Palestiniens marchèrent à Gaza demandant la reprise de l'intifada contre Israël. Arafat fut accueilli en héros par les foules à Alexandrie en Égypte et par l'autorité palestinienne à cause de son refus de céder sur la question de Jérusalem.

La seconde intifada, qui fit éruption à l'automne de l'année 2000, a été provoquée délibérément par le Likoud et Ariel Sharon pour mettre un terme aux pressions exercées sur Israël par la communauté internationale. Depuis ce temps, Arafat a été la cible des dénonciations d'Israël et de l'administration Bush pour son refus de mater les Palestiniens avec la brutalité exigée par ces administrations. C'est à son crédit. Mais ses héritiers n'auront pas la même retenue. Dans ceci, comme dans toutes choses, ce ne sont pas les intentions subjectives et qualités des dirigeants individuels qui sont déterminantes, mais les forces sociales qu'ils représentent.

C'est un hommage au rôle historique d'Arafat et à sa fidélité envers son peuple, malgré ses limites politiques, qu'il ait été l'objet d'une haine sans retenue de la part de l'élite dirigeante américaine et israélienne durant ses dernières années de vie. Il n'y a probablement aucun autre personnage politique de premier plan qui, au cours des cinquante dernières années, a dû supporter autant de persécution qu'Arafat. Il a vu l'assassinat de ses alliés politiques et camarades les plus proches, et a lui-même été la cible de nombreuses tentatives d'assassinat.

Le traitement que lui ont fait subir Israël et les États-Unis était barbare. Vieux et de santé fragile, il a été forcé de vivre des mois durant sous arrêt dans les quelques pièces du quartier général de l'Autorité palestinienne à Ramallah, encerclé par les troupes israéliennes et privé des installations les plus élémentaires. Malgré cela, il a obstinément refusé de quitter son poste, craignant qu'Israël ne lui refuse à jamais d'y retourner.

Même à la fin, il a accepté de quitter Ramallah pour recevoir des traitements médicaux à Paris seulement après que le gouvernement d'Israël lui ait garanti le droit de revenir. Tel était son dévouement à la lutte de son peuple.

Arafat a laissé un héritage contradictoire et conflictuel. Mais les générations futures, dans un monde purgé de l'oppression impérialiste et de l'inégalité, reconnaîtront et honoreront sa contribution à la cause de la libération palestinienne. Il est l'un des rares personnages politiques qui ne sera jamais oublié par les femmes et hommes en lutte.

Voir aussi :


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés