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Le dirigeant de la plus grande banque d'Espagne demande la fin de l'État-providence en Europe

Par Daniel O'Flynn
31 août 2004

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Plus tôt cette année, le dirigeant de la plus grande banque d'Espagne a déclaré qu'il ne restait plus beaucoup de temps avant d'éliminer ce qui reste des programmes sociaux en Espagne.

Dans un extrait très publicisé de son discours donné lors d'un dîner privé au Financial Club de Bilbao intitulé «La situation économique dans le monde, en Espagne et dans les marchés banquiers» a dit Alfredo Sáenz devant des gens de même opinion provenant du secteur des affaires et financier, que l'Espagne doit démanteler l'État-providence tout comme les autres gouvernement sont en train de le faire partout en Europe.

Sáenz déclara : «Nous devons améliorer la structure de notre main-d'oeuvre et de nos marchés financiers et ajuster nos niveaux d'impôts aux pays qui entreront en compétition avec nous et nous devons ajuster nos mesures régulatrices à des concepts beaucoup plus libéraux ou bien nous aurons vraiment un problème.»

Il continua : « Il n'est pas possible de penser que l'État-providence européen peut continuer, beaucoup moins après l'entrée de dix nouveaux membres dans l'Union européenne [le 1er mai 2004]... Les programmes sociaux, je le répète, doivent être démantelés et nous n'avons pas beaucoup de temps pour le faire La question est combien de temps nous avons pour le faire, et nous n'avons pas beaucoup de temps, pas plus de 15 ans.»

En tant que directeur exécutif de la Banco Santander Central Hispano (BSCH), Sáenz reflète la pensée des représentants en chef de la bourgeoisie espagnole. BSCH est aussi le plus grand établissement bancaire en Amérique Latine et a des relations très intimes avec des régimes qui ont imposé là-bas des politiques d'ajustements structurels qui ont produit des catastrophes sociales. Des gouvernements comme ceux de Lula, au Brésil, qui a commencé sa carrière politique en tant que leader du syndicat des travailleurs du métal, et qui a maintenant implanté des «réformes» législatives sur le travail qui permet plus facilement aux employeurs de congédier des travailleurs, d'abaisser les salaires et d'éliminer les avantages sociaux travaillent en étroite collaboration avec la banque Santander.

Le gouvernement espagnol en général et la BSCH en particulier ont pendant la dernière période accrus leurs liens politiques et économiques avec l'Amérique Latine s'élevant jusqu'à 87 milliards de dollars américains. Le type de régimes avec lesquels BSCH travaille en Amérique Latine est présenté par Sáenz au gouvernement du Parti socialiste de Luis Rodríguez Zapatero comme un modèle à imiter.

Le gouvernement Zapatero a accueilli ce discours par le dédain, alors que les syndicats espagnols, les Comisiones Obreras, ont qualifié les remarques de Sáenz d' «indécentes». Les syndicats ont déclaré : « Nous avons à protéger l' [État-providence] des voyous libéraux, particulièrement du monde financier, qui sont toujours prêts à sacrifier le bien-être des autres pour assurer le leur. »

Répondant à la colère du publique, Sáenz répéta que bien qu'il ne soit pas un politicien qui doit suivre un programme, « Il est incontestable que la croissance à long terme de l'économie est intimement reliée à plusieurs facteurs, notamment, et non les moindre, les réformes dans le marché du travail et cela inclut la sécurité sociale, les subventions, les heures de travail et l'assurance-chômage.»

La position de Sáenz est monnaie courante dans les salles de conférence du monde industriel et financier et dans les sphères gouvernementales de l'Europe. Des revues comme Business Week, Time, Newsweek et l'Economist demandent tous la fin de l'État-providence et recommandent que les conditions sociales en Europe de l'Ouest soient plus plus proches de celles que l'on trouve en Europe de l'Est. On y trouve des avertissement additionnels selon lesquels l'Inde, le Bangladesh et la Chine offrent de meilleurs marchés encore.

Les données sur le coût de la main d'oeuvre et des heures travaillées montrent l'étendue de l'offensive préparée par les gouvernements de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne et de la France et aussi comment l'avantage traditionnelle de l'Espagne sur ses compétiteurs, par rapport aux bas salaires et aux longues heures de travail, a été sapé.

 Données de 2003    
  Heures moyennes travaillées Coût de la main d'oeuvre par heure (euros)
 Allemagne  1446  26,9
 France  1453  25,1
 Grande-Bretagne  1673  25,2
 Espagne  1898  15,1
 Slovaquie  1814  5,3
 Pologne  1956  5,3
 République tchèque  1972  5,4

Des taux d'imposition sur les sociétés plus faibles dans les nouveaux pays de l'Union européenne ainsi que les exemptions d'impôts accordées aux investisseurs internationaux sont des facteurs qui mettent de la pression additionnelle sur les gouvernements capitalistes de l'Ouest. Le taux d'impôt moyen sur les sociétés dans les dix nouveaux États membres est de seulement 21,3 pour cent. Même si les impôts sur les sociétés ne sont pas l'unique facteur sur lequel s'appuie les entreprises lorsqu'elles se relocalisent dans un autre pays, l'équation devient claire lorsque l'impôt est jumelé avec les coût de production.

La revue l'Economist a publié un supplément d'information le 26 juin intitulé, «La deuxième transition : Une enquête sur l'Espagne», la première étant la transition en 1975 de l'État fasciste de Franco vers la démocratie bourgeoise. Le supplément d'information louangeait la «démocratie efficace» de l'Espagne, particulièrement le programme de libéralisme économique de l'ancien premier ministre José Maria Aznar, un euphémisme servant à désigner la dérégulation et la privatisation.

L'économie espagnole dépend de l'investissement étranger. L'ouverture aux investissements étrangers n'a pas commencé avant les années 1980 et s'est développée sous le gouvernement du Parti socialiste de Felipe Gonzalez, lorsque le slogan «Espagne à vendre» fut lancé. L'investissement étranger net en Espagne a triplé pour passer de 413 milliards de pesetas (3 milliards $US) en 1983 à 1235 milliards de pesetas (9 milliards $US) en 1992. Fréquemment, de tels investissements ont été faits pour s'approprier des parts de marchés et des réseaux de distributions par l'acquisition de compagnies espagnoles. En revanche, il y avait relativement peu de multinationales espagnoles.

L'hostilité aux attaques sur le niveau de vie par le gouvernement Gonzalez a crû parmi la classe ouvrière. Le taux de chômage atteignit 25 pour cent en 1994, accompagné d'un mécontentement social menant à plusieurs grèves générales tout comme à de large mobilisation des mineurs, des travailleurs de l'industrie lourde et du secteur publique ainsi que des agriculteurs. En 1996, la classe dirigeante a perçu le gouvernement du Parti socialiste comme une force épuisée et incapable de défendre ses intérêts dans une économie de marché internationalisée se développant rapidement et d'étouffer l'opposition publique à ses politiques socialement destructrices.

Le Parti populaire d'Aznar fut élu en 1996 en tant que gouvernement minoritaire dans une coalition avec les partis nationalistes catalans et basques. Il s'est empressé de déréglementer et de privatiser davantage l'économie et de faire des changements majeurs dans le marché du travail. Il est parvenu à réaliser ceci à l'aide du Pacte de 1997 entre le gouvernement, les employés et les syndicats qui a facilité le congédiement des travailleurs ainsi que le recours à des contrats temporaires et flexibles. Aznar louangea les leaders syndicaux pour leur «grande maturité» et pour avoir abandonné leurs «préjugés» pour l'amour du «consensus».

Face à une «opposition» totalement compromise, Aznar fut réélu en mars 2000 avec une écrasante majorité et alla de l'avant avec ses plans pour introduire la concurrence dans les industries de l'électricité et du pétrole. L'année suivante, Aznar, encouragé par la prostration des syndicats, mit en branle d'autres réformes radicales du marché du travail espagnole qui incluait l'abolition des vieilles réglementations des heures de travail, donnant ainsi aux employeurs plus de marge de manuvre pour façonner les horaires selon les besoins de la grande entreprise.

Avec le Parti socialiste de Zapatero maintenant au pouvoir, les pressions pour une «deuxième transition» réfèrent non seulement à la continuation des politiques du dernier gouvernement, mais à leurs accélérations. En juin, la compagnie de télécommunication espagnole Telefónica a annoncé l'abolition de 15.000 emplois en Espagne d'ici 2007 alors qu'elle essaie de se tailler une place dans le marché mondial des télécommunications. Elle a concentré ses opérations dans des pays latino-américains comme le Chili, le Mexique et le Pérou, où le coût de la main d'oeuvre est beaucoup plus bas et où elle peut prendre avantage de la langue commune entre l'Espagne et ses vieux dominions impériaux.

De plus, vu que l'Espagne a déjà été un des pays les plus pauvres de l'Union européenne, elle recevait plusieurs subventions. Elle était la plus grande bénéficiaire net du fonds régional de l'UE, qui lui octroya jusqu'à 8,4 milliards d'euros. Avec l'entrée des dix nouveaux États dans l'Union européenne le premier mai de cette année, l'Espagne est devenue pour la première fois un donateur net. Même si l'Espagne a encore une économie basée sur de faibles salaires, elle a été battue par des échelles de salaires encore plus basses en Europe de l'Est et ses subventions lui ont été retirées.

L'Institut national de statistique (INS) a étudié le déclin social à partir de cette période entière pour le troisième trimestre de 2003. Son enquête démontre que 10 pour cent des familles ont eu ce qu'ils appellent «de grandes difficultés» à joindre les deux bouts à chaque mois. Un autre 46 pour cent ont dit qu'eux aussi commençaient à être à la limite. 65 pour cent de ceux interrogés ont dit qu'ils étaient incapables d'épargner une quelconque partie de leurs revenus.

Le discours de Sáenz est sorti seulement quelques semaines avant le rapport de l'Union européenne montrant qu'en 2003 plus de 33 pour cent des Espagnoles avaient « des emplois « de mauvaises qualités » et que plus du tiers des contrats de travail dans le pays étaient temporaires. Sur ces contrats, six sur dix étaient d'une durée de moins de six mois, faisant de l'Espagne le pire pays en Europe en terme de précarité du travail.

Un récent article du Business Week intitulé «Biting the Bullet» explique la réponse des sociétés et des gouvernements en Allemagne, en Espagne et en France à la poussée pour la compétitivité mondiale : imposer de plus longues heures, des salaires plus bas et démolir les programmes sociaux et les avantages relatifs à l'emploi. Commençant avec l'Allemagne, la revue fait remarquer, « Cette dynamique n'ébranle pas uniquement les employés de Daimler [Chrysler auto] qui devront maintenant travailler plus sans augmentation de salaire. En juin, des travailleurs de deux usines d'équipements de téléphones Siemens en Allemagne ont accepté d'augmenter leur semaine de travail de 35 à 40 heures, après que la compagnie les ait menacés de déménager en Hongrie. Le fabricant d'automobile Seat, qui plus tôt a déménagé ses manufactures de l'Espagne à la Slovaquie, a reçu des concessions de la part des syndicats espagnols en mai qui lui permettra d'exigera des travailleurs qu'ils fassent des heures supplémentaire pendant les pointes de production sans supplément. Même la France est en train de repenser à la semaine de 35 heures entrée en vigueur en 1998. Le 20 juillet, des employés d'une usine d'assemblage de pièces d'autos Robert Bosch près de Lyon ont voté en majorité pour commencer à travailler en moyenne 36 heures par semaine, après que la compagnie a dit qu'elle pourrait relocaliser ses opérations en République tchèque.»

Ce n'est pas seulement un catalogue d'emplois perdus et d'amélioration de rendement, mais une indication de l'offensive qui est branle partout en Europe et qui va prendre de l'ampleur malgré les paroles ambiguës du PSOE et des syndicats.


 

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