wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

Canada : L'élection d'André Boisclair comme chef du Parti québécois : le PQ encore plus à droite

par Guy Charron
8 décembre 2005à

Utilisez cette version pour imprimer

L'élection d'André Boisclair le 15 novembre dernier comme chef du Parti québécois (PQ), le parti de la grande entreprise qui a formé le gouvernement provincial au Québec pendant 18 des 30 dernières années en alternance avec le Parti libéral du Québec, représente une nouvelle étape dans le virage vers la droite pour ce parti et pour la politique officielle au Québec.

Après l'arrivée à la tête du PQ en 1996 de Lucien Bouchard, un ancien ministre fédéral du gouvernement conservateur de Brian Mulroney, succédé par son ministre des Finances, Bernard Landry, le PQ s'est encore plus éloigné de la phraséologie de gauche des années 1970. Sous la gouverne de Boisclair, le PQ cherchera ouvertement une base dans les classes moyennes aisées, leur promettant des baisses d'impôt, pour attaquer les programmes sociaux publics et le niveau de vie des travailleurs et des sections les plus démunies de la population.

Boisclair est considéré à la droite de son propre parti. Des neufs candidats briguant la direction du parti, il est le seul à s'être solidarisé avec le manifeste Pour un Québec lucide, publié par Lucien Bouchard et une brochette de personnalités tant indépendantistes que fédéralistes.

Après avoir agité quelques épouvantails comme le déclin démographique et la concurrence de l'Inde et la Chine, Bouchard et Cie appellent à toute une série de prescriptions radicales de droite, comme réduire la dette gouvernementale afin de dégager de l'argent pour de soi-disant «investissements productifs» (comme l'enseignement et la formation), réduire les impôts sur le revenu et augmenter les taxes à la consommation, étendre les privatisations et les partenariats public privé, augmenter de façon importante les tarifs d'électricité résidentiels, développer un environnement de travail qui encourage la performance et l'innovation (c'est-à-dire alléger la réglementation du travail), augmenter les frais de scolarité universitaire ainsi que toute une panoplie de mesures visant à encourager l'entrepreneurship et la «liberté économique».

Boisclair est la réponse de l'establishment du PQ à l'évaporation de l'appui au parti. Après avoir passé neuf années au pouvoir de 1994 à 2003, le PQ ne peut guère compter pour l'appuyer que sur les bureaucrates syndicaux et des fractions de la petite-bourgeoisie. Aussi pour tenter de se dissocier de la «vieille garde» du parti, Boisclair, avec ses airs et son langage de jeune cadre, a joué à fond la carte de la jeunesse dans la course à la chefferie.

Pourtant, l'homme de 39 ans est député depuis la jeune vingtaine et est entièrement associé avec l'establishment du parti qui lui a d'ailleurs donné son appui majoritaire. Sous l'aile protectrice de Bouchard et ensuite de Landry, Boisclair a occupé plusieurs postes de ministres. En tant que ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, «qu'il dirigeait comme un entrepreneur sans pitié» dans les mots du Globe and Mail, il a joué un rôle clé dans l'imposition du programme de compressions budgétaires sauvages dans les services sociaux publics, le «déficit zéro», duquel il était un ardent supporteur.

Après que les prestations d'aide sociale eurent été gelées ou diminuées selon le cas, il avait développé de nombreux règlements pour justifier le retranchement d'une bonne partie des maigres prestations restantes. Il avait aussi permis aux sociétés de s'accaparer des surplus des caisses de retraite à l'époque de la bulle sur Wall Street.

La principale adversaire de Boisclair, Pauline Marois, a été battue précisément parce qu'elle était la représentante du PQ traditionnel. Malgré, ou plutôt à cause de sa longue expérience dans tous les ministères d'importances, comme la Santé et les Finances, Marois était vue comme la continuation de la politique traditionnelle du PQ avec laquelle l'aile droite veut brisée. Marois était considérée comme trop associée avec la génération qui a érigé le «modèle québécois» dans les années 1960-1970 et trop ouvertement liée avec la bureaucratie syndicale.

Boisclair au contraire n'a jamais caché qu'il considérait le parti trop à gauche. Lorsqu'il était ministre péquiste, Boisclair s'était distingué en lançant la charge de l'aile droite du parti contre le «modèle québécois» suivi peu après par Joseph Facal et Bernard Landry.

Le «modèle québécois» est le nom donné à la stratégie politique sur laquelle les élites politiques et du monde des affaires au Québec ont basé leurs politiques depuis les années 1960. Pour défendre les intérêts de la bourgeoisie francophone, les péquistes comme les libéraux ont utilisé tous les pouvoirs de l'appareil d'État provincial pour appuyer les entreprises appartenant à des Québécois et les filiales des multinationales installées au Québec, pour prendre en charge le système de santé et de l'éducation laissés jusque-là entre les mains du clergé catholique et pour institutionnaliser la collaboration corporatiste entre le gouvernement, le monde des affaires et la bureaucratie syndicale.

En appelant à la révision du «modèle québécois», Boisclair signalait qu'il voulait une nouvelle stratégie pour les élites québécoises pour cesser de soutenir les petites et moyennes entreprises québécoises et mettre au rancart ce qui reste de l'État-providence.

Boisclair et l'assaut contre le système de santé

Boisclair n'a pas perdu de temps pour montrer ses couleurs. Depuis sa nomination à la tête du PQ, il a pris ses distances par rapport à la position des députés à l'Assemblée nationale sur la question de la privatisation du système de santé. La question de la santé est considérée comme la question la plus sensible pour la population en générale, qui est opposée aux tentatives de réduire les services publics dans ce domaine. Il est aussi un sujet d'une importance pour les élites du Québec et du Canada qui s'insurgent contre l'attachement des travailleurs à ce programme social.

Pointant du doigt la longueur des listes d'attente pour les chirurgies, résultat d'une politique délibérée de rationnement des soins dans le secteur public, la Cour suprême a ordonné au gouvernement québécois d'instituer un système de santé privé pour les biens nantis. Ces derniers pourront contracter des assurances privées et financer ainsi un système de santé parallèle. Ces mêmes bien nantis exigeront ensuite que les sommes allant au système public de santé, le système de santé des démunis et des cas pas assez profitables pour être traiter dans le privé, soient réduites pour diminuer leurs impôts.

Déjà, le Québec est une des provinces où la part des soins offerts par le secteur privé est la plus grande au Canada, avec des centaines de cliniques médicales, de clinique radiologiques, de centres de tests sanguins privés. Les spécialistes imposent souvent une surcharge aux patients en sus des paiements gouvernementaux. Les médicaments, les examens de la vue, les soins dentaires, les prothèses, les orthèses ainsi qu'une bonne fraction des soins de longue de durée sont à la charge des individus ce qui, évidemment, se traduit par une grande carence dans les sections les plus pauvres de la population.
Lorsqu'ils étaient au pouvoir, les péquistes ont renforcé le système de santé privé, fermé des hôpitaux et instauré un système de rationnement des soins ce qui n'a pas empêché les députés péquistes, il y a deux semaines encore, de réclamer que le gouvernement Charest contourne le jugement de la Cour suprême en utilisant une provision de la Constitution canadienne suspendant l'application de la Charte des droits et liberté. Boisclair est venu mettre un terme à la stratégie de ses députés, signalant son intention d'appuyer les libéraux. Il a déclaré qu'il n'était pas «insensible aux discussions qui ont cours en ce moment dans la société québécoise» sur la place du privé en santé. «Je pense qu'on est prêts à discuter de façon intelligente et à participer au débat», insistant que les péquistes ne serait pas des «apôtres du statu quo», une référence au Manifeste pour un Québec lucide.
«On en a une bonne assurance en ce moment, a-t-il ajouté, celle de la Régie de l'assurance maladie du Québec. Est-ce qu'il y a des modifications à apporter, des évolutions? Bien sûr. Regardons ça sereinement».

Devant le virage à droite du PQ, la gauche officielle insiste encore plus que les travailleurs doivent suivre le PQ. Pierre Dubuc, le secrétaire de Syndicalistes et progressistes pour un Québec libre qui a été candidat pour la course à la chefferie du PQ a dû défendre l'appui que le SPQL a donné à Boisclair. «Des voix se sont élevées dans notre entourage politique pour critiquer notre ralliement, jugé précipité. On se demandait évidemment comment nous pouvions rallier ce nouveau chef, que nous avons décrit dans le feu des débats comme "l'incarnation de la droite".» Après avoir expliqué que l'objectif de réaliser la indépendance du Québec dépasse les divergences entre la droite et la gauche, Dubuc ajoute que le Parti québécois «se doit d'être un parti de coalition».

Françoise David, la dirigeante d'Option citoyenne qui s'unira avec l'Union des forces progressistes en janvier 2006 pour former un «parti de gauche» trouve que Dubuc en met un peu trop en associant André Boisclair avec la droite du PQ. Il a des positions «intéressantes» sur certains sujets, a-t-elle déclaré.

Voir aussi:



 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés