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La plainte contre le secrétaire d'Etat à la défense américain, Donald Rumsfeld

Des avocats allemands font le point

Par Justus Leicht
Le 14 Juin 2005

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Le week-end dernier des juristes et des avocats venus des Etats-Unis, d'Allemagne et d'autres pays se sont exprimés lors d'une conférence sur le thème « Constitution mondiale vs. politique réaliste - Sur l'avenir et le présent de la loi de compétence universelle ». Les organisateurs en étaient l'Association républicaine des avocats, Allemagne (RAV) et le Centre américain pour les droits constitutionnels (CCR) avec le soutien de la Chambre des avocats de Berlin ainsi que diverses organisations internationales de défense des droits de l'homme.

La tenue de la conférence était due en particulier à la plainte déposée contre le secrétaire d'Etat à la défense américain, Donald Rumsfeld, et contre des représentants de l'armée et des services secrets des Etats-Unis pour crimes contre l'humanité commis à la prison d'Abou Ghraib, en Irak. La plainte avait été formulée par le CCR au nom de victimes irakiennes de la torture et déposée en Allemagne par Wolfgang Kaleck, un avocat berlinois qui est également le président de la RAV, sur la base du Code de droit pénal international allemand (VstGB) de 2002.

Les actes d'accusations étaient documentés sur 170 pages, annexes détaillées à l'appui, et le plus souvent basées sur des documents américains officiels. La plainte était juridiquement bien construite et solidement documentée. Et pourtant, Kai Nehm, le procureur général fédéral auprès de la cour fédérale de justice allemand refusa même d'ouvrir une instruction. La décision de refus fut délivrée début février, exactement un jour avant la visite officielle de Rumsfeld en Allemagne.

C'est dans ce contexte que les initiateurs de la plainte s'exprimèrent lors d'une conférence de presse. Seul un nombre restreint de représentants des médias étaient présents, aucun microphone et aucune caméra de télévision n'était visible. Manifestement, les médias allemands trouvent cela tout à fait naturel que l'accusateur de la plus haute instance d'Allemagne refuse au mépris de la loi même du pays de demander des comptes aux représentants du plus puissant gouvernement du monde pour atteintes au droit international.

On retrouva la même capitulation devant la force exprimée dans le journal Junge Welt. A l'occasion de la conférence, il publia un article sous le titre « Un glaive émoussé » - signifiant le code pénal international ­ et qu'il a mis à la disposition de la conférence de presse. Leur reporter indiqua dans son intervention qu'un recours judiciaire pour crimes de guerre de l'OTAN dans la guerre en Yougoslavie n'avait pas abouti.

Dans son introduction, l'avocat Kaleck se déclara être contre une telle position défaitiste. L'enjeu étant « une lutte pour le droit » et aussi de « rendre le glaive tranchant », précisa-t-il. Il rappela qu'il y avait eu des cas où les défenseurs des droits de l'homme et de principes de l'Etat de droit avaient pu du moins remporter des victoires partielles. Le dernier exemple est la poursuite en justice d'Abdelghani Mzoudi, accusé de complicité dans les attentats du 11 septembre et qui a été acquitté par manque de preuves par la Cour de justice fédérale allemande.

Scott Horton, avocat, professeur de droit international public et président du Comité de droit international auprès de la Chambre des avocats de New York, a déclaré qu'aux Etats-Unis la discussion sur les atteintes aux droits de l'homme avait gagné en intensité et en rigueur.

L'« effet Newsweek » domine présentement les médias. Certes, une campagne d'intimidation massive avait été lancée contre le journal après les révélations sur les brutalités infligées aux prisonniers de Guantanámo. Dans l'intervalle, des preuves auraient été passées aux journalistes sur la responsabilité dans les atteintes aux droits de l'homme de responsables au plus haut niveau politique et qui devraient être publiées sous peu.

De plus, un groupe de huit sénateurs républicains auraient suivi l'appel de la Chambre des avocats et de trente organes de presse pour préparer un projet de loi dans le but de mettre sur pied une commission de contrôle. Pour la première fois, quelques journaux, tel le Boston Globe et d'autres, auraient même débattu récemment d'une procédure de destitution du président George W. Bush.

Peter Weiss, vice-président du CCR, souligna que la plainte n'avait pas été déposée en Allemagne parce qu'elle était « anti-américaine ». Les Etats-Unis sont un pays compliqué, d'une part il y règne la violence et l'arbitraire, comme l'actuel gouvernement les pratique et, d'autre part, un dévouement profond aux idéaux de l'Etat de droit, des droits de l'homme et de justice. L'on serait venu en Allemagne car aux Etats-Unis il « n'y a pas la moindre chance » de poursuivre en justice pour atteintes aux droits de l'homme les responsables au plus haut niveau.

Le refus d'engager une procédure d'instruction par le procureur général fédéral Kai Nehm l'a donc profondément déçu dit-il et cela avant tout parce que, contre tout principe de l'Etat de droit, il n'a pas analysé les arguments des plaignants. Le procureur général aurait « réduit à néant » la volonté du législateur du VstGB.

Malgré cela Weiss ne voit aucune raison d'être pessimiste : il y a à peine deux mois, un officier de marine argentin aurait été déclaré coupable par un tribunal espagnol pour avoir participé à la « disparition forcée » de personnes durant la période de la junte militaire. Le CCR aurait reçu entre-temps de nombreuses offres émanant de cabinets d'avocats pour venir en aide à la défense de détenus d'Abou Ghraib et de Guantanámo.

Weiss rapporta aussi que trois avocats militaires du grade de lieutenant-colonel auraient engagé une procédure de recours constitutionnel contre Bush en raison de Guantanámo et bien que ceci puisse nuire à leur carrière militaire.

Ensuite, Wolfgang Kaleck fit une fois de plus le point sur la procédure. Présentement, une soi-disant procédure de contrainte à l'accusation serait pendante. Ce faisant, l'on aurait foulé un terrain juridique vierge car à proprement parler aucun recours n'étant prévu dans le VstGB. Au cas où la procédure de contrainte à l'accusation ne serait pas couronnée de succès l'on déposera peut-être une plainte auprès de la Cour constitutionnelle fédérale d'Allemagne. Cette procédure serait toutefois très laborieuse, une autre possibilité serait d'ailleurs de déposer une nouvelle plainte.

Kaleck souligna que, d'un point de vue purement juridique, il n'aurait pas dû y avoir de plainte. Le procureur général fédéral était tenu d'instruire l'affaire au plus tard après la publication des photos d'Abou Ghraib.

Mais l'on voyait clairement qu'il ne souhaitait pas d'instruction car, pour des raisons politiques, le gouvernement fédéral n'en voulait pas non plus. Un procédé juridique isolé ne serait en soi pas suffisant pour entamer des poursuites pénales contre les crimes de guerre. Cela requiert un autre climat politique.




 

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