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WSWS : Nouvelles et analyses : États-Unis

Les discours de Bush, Cheney et Rumsfeld : nouveaux roulements de tambour pour la guerre

Par le comité de rédaction
4 septembre 2006

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Cette semaine, dans une série de discours coordonnés, les plus hauts représentants de l’administration Bush ont commencé une campagne publique de diffamation et d’intimidation contre les opposants de la guerre en Irak, tout en préparant le terrain politique afin d’entraîner le peuple américain dans une nouvelle guerre encore plus horrible, cette fois-ci contre l’Iran.

Les discours prononcés par le vice-président Dick Cheney à la base militaire d’Offutt au Nebraska et par le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld lors d’un congrès de la Légion américaine en Utah ont été les premiers à aborder la question, et ils ont été suivis jeudi par un discours du président Bush au congrès de la Légion américaine. Bush prononcera quatre autres discours lors de cette campagne, qui doit se terminer par un discours à l’Assemblée générale des Nations unies le 19 septembre.

Les médias américains ont pour la plupart qualifié les discours de vieux arguments recyclés, qui seraient motivés par les craintes de la Maison-Blanche que le Parti républicain perde le contrôle de la Chambre des représentants et possiblement du Sénat lors des élections législatives du 7 novembre. Il y a sans aucun doute des signes de désespoir, et même de panique, dans la campagne de peur sans retenue de l’administration. Mais cela va plus loin que les simples tactiques électorales à court terme.

On peut difficilement croire que le langage hystérique et les comparaisons historiques limitées ont réellement pour but de faire changer l’opposition maintenant largement reconnue du peuple américain à la guerre en Irak. Plutôt, le caractère vraiment ridicule des arguments et la manière brutale avec laquelle ils sont présentés ne serviront qu’à aliéner encore plus l’opinion publique : qui confierait les vies de ses fils et de ses filles à des dirigeants qui sont si clairement désorientés ?

L’administration Bush essaie non pas de convaincre le peuple américain, mais de le persécuter et de l’intimider. Elle veut rendre illégitime toute critique de la guerre en Irak qui irait plus loin que l’ergotage du Parti démocrate au sujet des tactiques et des compétences ou qui contesterait les prémisses de base de l’impérialisme américain et de ses efforts pour conquérir et réorganiser le Moyen-Orient.

En conformité avec la doctrine de guerre préventive de Bush, l’actuelle offensive contre l’opinion antiguerre a pour but d’attaquer d’avance tous ceux qui pourraient s’opposer à la prochaine guerre au programme de Bush, une guerre contre l’Iran, un pays trois fois plus grand et populeux que l’Irak, et qui a une histoire de résistance à la domination et à l’occupation étrangères vieille de mille ans.

Dans ce contexte, le lancement d’une campagne médiatique pro-guerre durant le mois d’août a un précédent sinistre. C’est en août 2002 que Cheney avait prononcé le premier discours menaçant d’une guerre contre l’Irak, à un endroit semblable : un congrès de vétérans. Même si l’administration Bush s’est soumise à un débat aux Nations unies et au Congrès, ainsi qu’au vote de résolutions exigeant que l’Irak accède aux demandes des Etats-Unis, Bush et Cheney avaient déjà décidé d’entrer en guerre avec l’Irak plusieurs mois avant le discours de Cheney.

Le scénario est clair, et un avertissement doit être lancé : il est tout à fait possible que l’administration ait déjà pris sa décision d’une guerre contre l’Iran. Comme Bush a fait remarquer durant son discours à la Légion americaine, exigeant que l’Iran se conforme aux demandes américaines et mette un terme à son programme d’énergie nucléaire : « Il est temps que l’Iran fasse son choix. Nous avons fait le nôtre. »

L’administration Bush a renouvelé ses plans d’urgence de frappes aériennes contre l’Iran. Selon un article de James Bamford, auteur et journaliste d’enquête, paru dans le magazine Rolling Stone du 10 août, en novembre 2003, Rumsfeld « a approuvé un plan connu sous le nom de CONPLAN-8022-02, qui, pour la première fois, mettait sur pied une capacité de frappe préventive contre l’Iran. Il a été suivi en 2004 par un plan top secret intitulé « Interim Global Strike Alert Order » [Ordre provisoire d’une alerte de frappe globale ] qui a placé l’armée en état de lancer une attaque de missiles contre l’Iran si Bush l’ordonnait. »

Une falsification historique grotesque

Le nouvel élément le plus évident dans les discours de Cheney, Rumsfeld et Bush est la tentative de regrouper les divers groupes nationalistes, islamiques et terroristes, qui sont actuellement en conflit avec la politique étrangère des Etats-Unis, et le fascisme du vingtième siècle. Cela a été exprimé le plus clairement lors du discours de Rumsfeld, qui présentait les opposants à la guerre en Irak comme les équivalents politiques et moraux de Neville Chamberlain, le premier ministre britannique du milieu des années 1930 qui avait défendu une politique d’apaisement envers Hitler.

De telles analogies s’appuient sur le manque abyssal de connaissances historiques entretenu par le système d’éducation américain, les médias de masse et par les deux principaux partis politique. Rumsfeld inverse la réalité. Le fascisme allemand était le régime d’un Etat impérialiste, la puissance industrielle la plus avancée d’Europe, avec une classe dirigeante qui aspirait à dominer le continent et ultimement le monde. Les éléments jihadistes islamiques proviennent de pays opprimés depuis longtemps par l’impérialisme, premièrement en tant que colonies de l’Angleterre, de la France et d’autres puissances européens, ensuite soit en tant qu’Etat client ou Etat cible des Etats-Unis, la puissance impérialiste dominante du monde.

Les Etats-Unis de Bush sont le pays, qui aujourd’hui, personnifie le plus clairement les objectifs et les méthodes de la politique étrangère de l’Allemagne nazie. Les caractéristiques de la crise mondiale des années 30 ont effectivement refait surface en 2006 : le militarisme galopant avec de puissantes nations envahissant et occupant de plus petites et plus faibles ; l’attitude effrontée de défiance envers le droit international des grandes puissances qui croient pouvoir utiliser la force militaire en toute impunité ; l’adoption de la méthode du « grand mensonge », avec la diffusion de propagande par les médias de masse pour manipuler la conscience populaire ; la création d’une atmosphère de peur omniprésente, la fabrication ou la manipulation de provocations (le Reichstag, le 11 septembre) pour précipiter la population à soutenir l’utilisation de méthodes dictatoriales.

Malgré toutes les différences entre les méthodes politiques et les conditions historiques, il a une similitude déterminante entre l’Allemagne de Hitler et l’Amérique de Bush. Dans les deux cas, l’élite dirigeante capitaliste a laissé le pouvoir à un régime téméraire et instable dont l’objectif est de bouleverser la structure existante des relations internationales pour ensuite l’adapter à ses propres besoins nationaux. La Drang nach Osten (« poussée vers l'Est » en allemand) de Hitler trouve son pendant dans la ruée de Bush vers le Moyen-Orient : ce qui débuta par une invasion de l’Afghanistan, soi-disant en réponse aux attaques terroristes du 11 septembre 2001, est devenu un effort américain visant à soumettre la région entière, de la côte de la Méditerranée jusqu’aux confins de l’Asie centrale, afin d’assurer la domination de l’Amérique sur les vastes réserves de pétrole et de gaz.

Qu’il y ait un élément de folie dans une telle politique ne signifie pas que Bush et Cie ne vont pas tenter de la réaliser. La politique de Hitler était certainement folle, plongeant délibérément l’Allemagne impérialiste dans une guerre sur deux fronts, ce que tous les dirigeants allemands précédents avaient cherché à éviter. Similairement, Bush rejette les conseils des mandarins de la politique étrangère, non seulement des précédents présidents démocrates, mais également de ceux de l’administration de son propre père.

Une masse de contradictions

La substance du discours de Bush expose la profondeur de la dégradation intellectuelle qui caractérise son administration. En considérant son texte, même brièvement, il faut constater le fait, non pas tant que Bush l’ait approuvé et lu, mais que des rédacteurs de discours d’expérience l’aient rédigé et que des vétérans politiques et responsables de l’élaboration de la politique étrangère l’aient examiné bien à l’avance en tant que déclaration politique du président des Etats-Unis. Ce qui en est résulté n’était pas seulement faux, mais faux à sa face même, contradictoire et absurde.

Prenez par exemple, l’amalgame de toute une variété de radicalismes musulmans, sunnite et chiite, dans ce que Bush appelle « un mouvement unifié, un réseau mondial de radicaux. » Alors qu’à Bagdad, sous occupation américaine, les forces sunnites et chiites, tirent les uns sur les autres au lieu de se rallier contre les Etats-Unis dans ce qui ressemble de plus en plus à une guerre civile. Toutes les distinctions d’histoire, de géographie et de culture sont dissoutes dans le terme « terrorisme », un concept qui décrit une tactique spécifique de violence, pas une idéologie, une tactique qui a été employée autant par le gouvernement américain que par ses opposants.

Bush a dit que cette guerre contre la terreur était « la bataille idéologique décisive du 21e siècle », plaçant les défenseurs de la liberté contre « le droit d’une poignée de personnes se désignant comme dirigeants à imposer leur point de vue fanatique à l’ensemble ». Cette dernière phrase pourrait très bien décrire la base sociale et politique de l’administration Bush elle-même, elle qui repose sur l’appui de fondamentalistes chrétiens fanatiques qui demandent, non seulement, la liberté de religion — ce dont ils bénéficient déjà en abondance —, mais la liberté d’imposer leur bigoterie médiévale à tout le monde aux Etats-Unis.

Quelques jours avant le discours de Bush, la femme qui a joué un rôle central pour lui donner la Maison-Blanche en 2000, l’ancienne secrétaire d’Etat de Floride Katherine Harris, a fait les unes des quotidiens du pays en dénonçant la séparation de l’église et de l’Etat pour être un mensonge pernicieux fomenté par les ennemis de la chrétienté. « Dieu est celui qui choisit nos dirigeants », a-t-elle déclaré dans une entrevue donnée durant sa campagne pour obtenir le poste de sénateur américain de la Floride. « Si vous n’élisez pas un chrétien, alors, en essence, vous allez légiférez le péché. Ils peuvent légiférer le péché. Ils peuvent dire que l’avortement est juste. Ils peuvent voter pour le mariage homosexuel. »

Bush a, lui, déclaré que sa politique étrangère représentait « un programme de liberté » pour l’établissement de gouvernements démocratiques à travers le Moyen-Orient, ignorant de façon pratique que les plus grands alliés des Etats-Unis dans la région étaient les régimes despotiques de Moubarak en Égypte, de la famille princière des Saoud et divers autres royaumes de cheiks du golfe Persique.

« Les gouvernements imputables à leurs électeurs se concentrent sur la construction de routes et d’écoles, pas sur la construction d’armes de destruction massive », a-t-il dit, n’expliquant toutefois pas comment ce truisme pouvait s’appliquer aux Etats-Unis, le pays qui a, de loin, développé le plus grand arsenal d’armes de destruction massive. Bush a fait ce commentaire deux jours seulement après avoir visité la Nouvelle-Orléans, la ville qui a été dévastée par l’ouragan Katrina et qui fait la démonstration que la démocratie américaine, c’est-à-dire la démocratie bourgeoise, est incapable de satisfaire les besoins sociaux les plus élémentaires des travailleurs.

En terme d’idiotie, il est difficile de faire pire que l’extrait suivant du discours de Bush faisant référence à la crise au Liban. « J’accueille les soldats promis par la France et l’Italie et d’autres alliés pour cet important déploiement international. Ensemble, nous allons rendre clair au monde entier que les forces étrangères et terroristes n’ont pas leur place dans un Liban libre et démocratique. »

Les forces étrangères n’ont pas leur place au Liban, ce que montre le déploiement d’une imposante force d’occupation constituée de milliers de soldats… de France et d’Italie !

Il n’y eut que quelques grains de substance dans le discours de Bush. L’avertissement d’une action imminente contre l’Iran a déjà été cité. Il y a aussi eu la référence qu’il a faite au régime fantoche de Nouri al-Maliki en Irak, duquel Bush a dit que les Etats-Unis continueraient à le soutenir « aussi longtemps que le nouveau gouvernement continuera à prendre les dures décisions nécessaires… » Ce sont des mots de code politiques pour demander que le gouvernement Maliki appuie et participe dans les actions contre la milice chiite de Moqtada al-Sadr, même si sa majorité au parlement dépend du soutien d’al-Sadr.

Finalement, Bush a cherché à justifier sa caractérisation de l’Irak comme un front central de la guerre au terrorisme en nommant comme copenseurs Oussama ben Laden, Ayman al-Zawahiri et d’autres dirigeants d’al-Qaïda. Al-Qaïda a souvent déclaré que l’Irak est le point focal de ses efforts actuels — même s’il n’y avait pas de présence notable d’al-Qaïda avant que l’invasion américaine et le renversement de Saddam Hussein ne la rendent possible. Il est significatif, toutefois, que Bush n’ait pas pu citer une seule autre autorité pour étayer son affirmation que l’invasion américaine de l’Irak constituait un recul pour les groupes terroristes.

La réponse des démocrates

D’importants démocrates ont répondu avec colère à la suggestion de Rumsfeld qu’ils étaient coupables d’apaisement envers les terroristes. Le sénateur Charles Schumer de New York, le président du comité pour la campagne démocrate au Sénat, a dit « Nous, du Parti démocrate, voulons lutter pour une très forte guerre au terrorisme. Personne n’a parlé d’apaisement. » Le sénateur Edward Kennedy, un prétendu opposant de la guerre en Irak, a dit « Ces avertissements lugubres sur le coût d’un échec en Irak ne font rien pour nous approcher du succès. » Le dirigeant démocrate au Sénat, Harry Reid, a ajouté « L’Irak est en crise, notre armée surutilisée et les groupes terroristes ainsi que les régimes extrémistes ont été renforcés en encouragés à travers le Moyen-Orient et le monde. »

La membre du Congrès Nancy Pelosi, la leader de la minorité démocrate qui est considérée pour le poste de speaker de la Chambre après les élections de novembre, a fait écho aux critiques des sénateurs démocrates que la guerre en Irak a affaibli les intérêts sécuritaires américains à travers le monde. « Les pressions que la guerre en Irak exerce sur notre armée ont beaucoup diminué notre capacité à mener la guerre contre le terrorisme et ont dangereusement limité notre capacité à répondre aux véritables défis de notre sécurité nationale à travers le monde », a-t-elle dit.

Pas un dirigeant démocrate n’a pu dire la simple vérité que la « guerre au terrorisme » de Bush était fausse du début à la fin. Il a utilisé la tragédie du 11 septembre — dont les liens avec les opérations secrètes des agences du renseignement américain doivent toujours être sérieusement enquêtés — pour justifier une campagne indéfinie de violence à l’étranger et de répression étatique à l’intérieur, y compris l’établissement de camps de concentration dans la baie de Guantanamo et ailleurs.

La suite de discours de Bush et de ces principaux adjoints a ainsi eu un effet salutaire : ils ont forcé le Parti démocrate à faire la démonstration encore une fois de son rôle en tant que deuxième parti de l’impérialisme américain, un parti qui défend autant son projet prédateur au Moyen-Orient, tout en ergotant sur les tactiques et les méthodes de l’administration Bush.



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