Le 30 novembre, la commission électorale de
Wiesbaden, Allemagne, a officiellement confirmé la candidature du Parti de
l’égalité sociale (Partei für soziale Gleichheit, PSG) pour les
élections régionales du Land de Hesse qui auront lieu le 27 janvier prochain.
Le PSG a présenté sa liste de candidats durant le temps fixé après avoir réuni
plus que les 1000 signatures requises pour se présenter aux élections.
Le PSG est la section allemande de la
Quatrième Internationale. Il défend le projet de la construction d’un
nouveau parti ouvrier sur la base d’un programme international et
socialiste.
Le PSG est le seul parti dans cette campagne électorale à
sérieusement s’opposer à la politique droitière de l’actuel
gouvernement régional dirigé par le ministre président, Roland Koch (Union
chrétienne-démocrate, CDU), en offrant une alternative socialiste et
internationaliste réelle aux soi-disant partis d’« opposition »,
à savoir le Parti social-démocrate allemand (SPD, les Verts et le Parti de la
Gauche (aussi connu sous le nom de « La Gauche »).
Un total de 17 partis et listes de candidats ont été admis
lors de la réunion de la commission électorale. En plus des partis qui sont
déjà représentés au gouvernement régional (CDU, SPD, Verts et le Parti libéral-démocrate,
FDP), l’on compte un nombre de partis de droite et d’extrême
droite, plusieurs organisations et groupes spécialisés dans des questions
spécifiques, et La Gauche.
Pour la première fois dans l’histoire récente, le Parti
communiste allemand (Deutsche Kommunistische Partei, DKP) ne présente
pas de candidats. Une partie de cette organisation s’est dissoute en
rejoignant La Gauche. Le reste des adhérents a tiré les conséquences du constat
démoralisant fait il y a cinq ans lors d’un congrès du parti et qui a
conclu que « le socialisme n’était pas à l’ordre du
jour » pour renoncer à présenter des candidats. Le Parti
marxiste-léniniste d’Allemagne (MLPD), maoïste, ne participe pas non plus
aux élections de Hesse.
L’extrême droite ou les partis d’extrême droite
prenant part aux élections incluent les républicains, le Parti national
démocrate allemand (NPD), l’Alliance pour l’Allemagne (vote
populaire) et le Mouvement des droits civiques Solidarité (Büso). Deux autres
partis, les Electeurs libres de Hesse et la Politique citoyenne indépendante
affirment vouloir directement représenter les intérêts des
« citoyens » contre le pouvoir omniprésent des partis majeurs.
La candidature des Electeurs libres de Hesse est entourée de
controverse. Il y a deux ans, il avait été révélé que le ministre président
Koch (CDU) avait essayé de faire des concessions financières au parti pour
qu’il s’abstienne de présenter des candidats au niveau régional.
Normalement, cette organisation ne présentait des candidats qu’au niveau
municipal. Ses électeurs viennent surtout du camp de la droite bourgeoise et
l’organisation est vue comme une concurrente directe du CDU.
Un certain nombre d’autres partis ont présenté des
candidats et qui se concentrent sur des issues spécifiques comme le Parti de la
Protection des Animaux, le Parti de la Famille, le mouvement « Panthère
grise » (Graue Panther) ainsi qu’une organisation Les Pirates (Piraten)
qui réclame un nouveau système de droits d’auteur et davantage de liberté
d’information.
La polarisation sociale
Les élections de Hesse ont lieu dans un contexte de tensions
sociales et politiques grandissantes.
Selon les statistiques, le Land de Hesse est l’un des
plus riches du pays et abrite à Francfort sur le Main le centre financier de
l’Allemagne. De nombreuses grandes entreprises et banques allemandes et
internationales ont leur siège et leurs filiales dans cette ville. Dans le même
temps, le Land compte un quart de millions d’habitants qui sont soit
tributaires du versement tout à fait insuffisant de l’indemnité chômage Hartz
IV soit d’autres paiements d’allocations sociales. A Francfort, un
quart des enfants vivent dans la pauvreté et la municipalité voisine,
Offenbach, détient l’endettement le plus élevé d’Allemagne.
L’actuel ministre président, Roland Koch, est associé à
la section la plus droitière du CDU et applique une politique fondée sur un
Etat fort, une économie néolibérale, le chauvinisme national et une politique
impérialiste étrangère agressive. Depuis son entrée en fonction, Koch a
supprimé un milliard d’euros de subvention destiné à des projets sociaux
dans la région. Parallèlement, il cherche à imposer la privatisation totale ou
partielle de nombreuses institutions publiques sous le slogan public-private
partnership (Partenariat public privé).
L’un des exemples en vue est le sort de
l’université de Francfort qui est censée être transformée en une
fondation dépendante de dons reçus de promoteurs. Elle continuera d’être
financée par l’argent public du Land, mais celui-ci ne pourra jouer de
rôle dans le contrôle ou dans la gestion de l’université. L’afflux
de moyens financiers privés se reflétera inévitablement dans le contenu de la
recherche et des programmes d’études de ces universités qui seront de
plus en plus contraintes de s’orienter en fonction des intérêts des
grands groupes et des donateurs.
Koch est arrivé au pouvoir en 1999 grâce à une campagne
anti-immigration dirigée contre le droit à la double nationalité. Aujourd’hui,
sa priorité est la chasse de tous ceux qui ne disposent pas de permis de séjour
valables afin de les renvoyer impitoyablement dans leur pays d’origine.
Le 12 octobre 2005, le gouvernement régional a même voté un décret obligeant
les directeurs d’écoles et les médecins à dénoncer les étrangers
« illégaux », y compris les élèves scolarisés. A Francfort même
l’on évalue à quelque 5000 le nombre d’enfants et de jeunes qui
sont sans papiers, qui ne peuvent aller à l’école et qui vivent dans la
crainte de descentes de police sur leur lieu de travail où ils sont employés à
bas salaire.
Tout ceci est connu de l’opinion publique et a provoqué
un mécontentement dans de vastes couches de la population ce qui s’est
manifesté par une série de manifestations, de grèves et de protestations.
Néanmoins, selon les sondages, Koch et le CDU pourraient bien former le
prochain gouvernement qui aurait certes une majorité moins importante et
forcerait le parti à former une alliance gouvernementale.
L’état déplorable du SPD
Le CDU dépend fortement de la collaboration et de l’état
déplorable dans lequel se trouve le SPD en Hesse. Le SPD qui, jusqu’à la
fin des années 1960, a pu compter sur 50 pour cent des voix en Hesse est dans
une faillite telle qu’il n’a pas été en mesure de présenter son
propre candidat à l’occasion de la dernière élection du maire dans la
capitale régionale de Wiesbaden. Le SPD avait tout simplement oublié de
respecter la date butoir pour présenter son candidat.
La cause la plus profonde du déclin du SPD est toutefois le
rejet du parti par de vastes couches de la population, en particulier les
anciens électeurs de longue date du SPD. Il existe une opposition largement
répandue à la fois contre le CDU et le SPD. Une telle méfiance est tout à fait
justifiée. Un gouvernement dirigé par le SPD se différencierait à peine de
l’actuel gouvernement de Koch sur des questions politiques et économiques
importantes. L’unité des deux partis sur toutes les questions
essentielles se reflète dans le fait que le SPD est impliqué dans une coalition
avec le CDU au niveau fédéral.
En cela la situation du SPD ne s’améliore en rien par le
fait que la candidate tête de liste soit Andrea Ypsilanti qui appartiendrait à
l’aile « gauche » du parti. La plupart des électeurs ne se laissent
pas tromper et reconnaissent que les postures de gauche et les critiques
superficielles émises par Ypsilanti au sujet de l’injustice sociale ont
pour but de défendre les brutales « réformes » sociales centrales
introduites par l’ancienne coalition gouvernementale SPD/Verts dirigée
par Gerhard Schröder.
De plus, le partenaire traditionnel de coalition du SPD, le
parti des Verts, s’efforce de surpasser le FDP en termes de politique
droitière. En 1982, Hesse avait été le premier Land allemand dans lequel les
Verts, avec Joschka Fischer, avaient participé au gouvernement. Depuis cette
époque, le parti des Verts a à plusieurs reprises confirmé sa subordination aux
intérêts du patronat et des banques et a joué un rôle majeur dans la politique
de l’establishment. A maintes occasions, le parti a attaqué le SPD par la
droite et fait comprendre qu’il est lui aussi disposé à entrer en
coalition avec le CDU. Dans la plus grande ville de Hesse, à Francfort, les
Verts ont formé une coalition avec le CDU au niveau de l’administration
territoriale (« Magistrat » terme désignant le maire et ses adjoints)
dans le but d’appliquer une politique de privatisation néolibérale.
La Gauche, un garant de l’ordre existant
La Gauche, qui présente pour la première fois des candidats à
l’élection régionale de Hesse, a émergé de la fusion entre le Parti du
socialisme démocratique (PDS), organisation issue de l’ancien parti
stalinien au pouvoir dans l’ancienne Allemagne de l’Est, et le
groupe de l’Alternative électorale
Travail et Justice sociale (Wahlalternative Arbeit und Soziale Gerechtigkeit,
WASG), un rassemblement de syndicalistes et de sociaux-démocrates désenchantés
de l’Allemagne de l’Ouest. Alors que le parti est souvent qualifié
dans les médias d’alternative de gauche au SPD, la réalité est tout
autre : l’objectif de La Gauche est d’empêcher que de vastes
couches de travailleurs désillusionnés non seulement se détournent tout
simplement du SPD, mais rejettent le réformisme dans son ensemble.
La Gauche reconnaît ouvertement son adhésion au capitalisme et
la défense des relations de propriété bourgeoise. Sa phraséologie de gauche
n’est pas censée munir l’opposition sociale croissante d’une
orientation socialiste. Au contraire, elle est déterminée à détourner toute
opposition et à empêcher que celle-ci ne devienne une menace à l’ordre
existant.
La Gauche a émergé comme le nouveau facteur pour assurer la
stabilité : au lieu d’ouvrir les yeux des travailleurs sur le déclin
du SPD, elle lance une planche de salut au parti. Sous le mot d’ordre
central de sa campagne en Hesse: « Koch doit partir, » elle se
prépare à se lancer au secours du SPD pour l’aider à constituer une
majorité gouvernementale.
Ceci avait déjà été évident après le congrès fondateur de La
Gauche en Hesse en août dernier. Au lieu de soutenir le syndicaliste de longue
date et fonctionnaire du SPD, Dieter Hooge, qui avait été sélectionné par la
direction du parti pour devenir le candidat tête de liste en Hesse, les
délégués ont choisi un ancien membre du Parti communiste allemand (DKP), Pit
Metz, parce que celui-ci s’était clairement prononcé contre toute
coalition avec le SPD. Les dirigeants de La Gauche, Gregor Gysi et Oscar
Lafontaine, sont pourtant absolument en faveur d’une telle coalition. Il
aura fallu moins d’une semaine pour que la pression exercée par la
direction du parti à Berlin pousse Metz à retirer sa candidature de tête de
liste. Il a été immédiatement remplacé par un vétéran sans appartenance
politique, Willi van Ooyen.
Le vrai rôle de La Gauche a également été révélé durant la
grève des conducteurs de train qui est en cours. Des dirigeants influents du
parti La Gauche ont condamné l’action déclenchée par les conducteurs de
train en grève en se positionnant ouvertement du côté des briseurs de grève du
syndicat Transnet qui est soutenu par la Fédération allemande des syndicats
(DGB), le SPD et la direction des chemins de fer et le gouvernement. Dans leur
détermination d’empêcher toute lutte des travailleurs indépendante du
contrôle de la bureaucratie du DGB, ils ont décidé à présent de poignarder les
conducteurs de train dans le dos.
Le rôle de La Gauche souligne l’urgence de construire un
nouveau parti ouvrier basé sur une perspective socialiste et sur
l’internationalisme et qui est totalement indépendant des vieilles
bureaucraties. C’est précisément le but de l’intervention du Parti
de l’égalité sociale dans les élections de Hesse. Au cours des prochaines
semaines, le PSG va entreprendre une campagne énergique pour encourager la
discussion sur notre programme politique et nos perspectives. Le PSG appelle
tous les lecteurs du WSWS à voter pour nos candidats, à suivre le
déroulement de notre campagne sur le World Socialist Web Site et aussi à
l’aider par tous les moyens possibles.