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WSWS : Nouvelles et analyses : États-Unis

Les orientations politiques de la manifestation du 27 janvier à Washington

Par Barry Grey à Washington, D.C.
31 janvier 2007

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Des dizaines de milliers de personnes se sont rendues à Washington samedi dernier pour signifier leur opposition à la politique d'intensification de la guerre en Irak de l'administration Bush et pour demander la fin de la guerre et le retrait des soldats américains. Des étudiants et des jeunes de plusieurs régions du pays ont participé à l'événement. Il y avait aussi une délégation importante de vétérans de la guerre en Irak ainsi que des familles de soldats tués ou blessés en Irak ou encore de soldats présentement en Irak ou en Afghanistan. Plusieurs dizaines de soldats en service ont aussi participé à la manifestation.

Toutefois, tous ceux qui se sont rendus à Washington parce qu'ils avaient un désir sincère de mettre fin à la guerre n'ont pu trouver aucune perspective sérieuse ou honnête de la part des organisateurs de la manifestation. Ces derniers l'ont délibérément subordonnée aux manœuvres des démocrates au Congrès et aux ambitions électorales du Parti démocrate dans la course présidentielle de 2008.

Unis pour la paix et la justice (UFPJ, United for Peace and Justice), le collectif qui a organisé le ralliement de Washington ainsi que des manifestations de moindre envergure à Los Angeles, San Francisco et d'autres villes, a invité plusieurs politiciens démocrates à la tribune du National Mall, y compris le représentant de l'Ohio au Congrès, Dennis Kucinich, qui tente d'obtenir la candidature démocrate pour les élections présidentielles de 2008, les représentants Maxine Waters et Lynn Woolsey de Californie, le représentant du Michigan, John Conyers et Jessie Jackson.

Une déclaration émise samedi par UFPJ, intitulée « Pourquoi nous manifestons », a clairement établi l'alliance politique entre les organisateurs de la manifestation et le Parti démocrate. Elle louait une loi proposée par les membres du Congrès, Woolsey, Waters et Barbara Lee, demandant le retrait de l'Irak des soldats américains au cours des six prochains mois et déclarait : « Nous nous rangeons avec ce groupe de membres du Congrès, qui ne cesse de croître. Il est maintenant temps pour le Congrès d'agir dans le cadre de ses pouvoirs, de faire l'histoire, d'utiliser son pouvoir d'autorisation des dépenses pour arrêter le financement de la guerre. »

En fait, cette loi et une mesure similaire qui sera présentée au Sénat par Russ Feingold n'ont aucune chance d'être acceptées ou même d'obtenir un appui significatif des législateurs. La direction du Parti démocrate à la Chambre des représentants — la chef de file Nancy Pelosi et le leader de la majorité Steny Hoyer — et le leader de la majorité au Sénat, Harry Reid, ont affirmé qu'ils s'opposaient au blocage du financement pour l'envoi de 21 500 soldats supplémentaires, et qu’il était hors de question pour eux de cesser le financement de la guerre dans son ensemble.

Au contraire, ils tentent cyniquement, au moyen de résolutions non exécutoires contre l'intensification militaire de Bush, d'apaiser et de désamorcer le sentiment anti-guerre de masse, tout en développant une nouvelle stratégie bipartisane pour sauver l'aventure coloniale américaine en Irak.

Le but des manœuvres législatives, comme la loi présentée par Waters et compagnie à la Chambre et par Feingold au Sénat, est de donner un peu de crédibilité aux démocrates et de renforcer les illusions que ce parti impérialiste est réceptif aux pressions visant à lui faire adopter une politique étrangère pacifiste.

Alors que l'administration Bush méprise sans se gêner l'opinion publique sur la question de la guerre en Irak, et qu'elle perd ses appuis au Congrès, même parmi les républicains, pour sa politique téméraire d'intensification de la guerre en Irak et ses menaces de guerre contre l'Iran, l'establishment politique dans son ensemble se dirige vers une crise politique et constitutionnelle de proportions potentiellement historiques. Les deux partis sont terrifiés à l’idée que l’opposition de masse à la guerre puisse s’associer à d’autres revendications sociales des travailleurs et déclencher un mouvement social hors du contrôle de ces partis ou de toute autre institution de l’élite dirigeante américaine.

Cette crainte est partagée par ceux qui ont organisé les manifestations du 27 janvier. Le collectif Unis pour la paix et la justice comprend l'organisation démocrate libérale MoveOn.org et est dirigé par des défenseurs « de gauche » du Parti démocrate comme la chef stalinienne du Parti communiste Judith LeBlanc et l'organisatrice expérimentée Leslie Cagan.

Ils ont très consciemment fait en sorte de présenter le Parti démocrate comme le seul point de rencontre légitime de toute activité anti-guerre. Ils ont aussi volontairement bloqué l'émergence d'un mouvement contre la guerre impérialiste venant de la gauche, c'est-à-dire un mouvement indépendant du système biparti mettant de l'avant un programme socialiste et articulant les intérêts de la classe ouvrière américaine et internationale.

Ceux qui se sont exprimés au rassemblement du 27 janvier ont maintes fois dit à la foule que le moyen de mettre un terme à la guerre était de faire pression sur le nouveau Congrès démocrate. L'appel à faire pression sur le Congrès démocrate s’accompagnait d’appels, à peine voilés, à élire un président démocrate en 2008. (On a fait peu de cas de l'absence des principaux candidats démocrates à la présidence : Hillary Clinton, Barack Obama, John Edwards ou Joseph Biden.)

Eleanor Smeal, présidente de la Fondation de la majorité féministe, a déclaré : « Nous élirons des majorités encore plus importantes en 2008... Gardez aux pieds vos chaussures de lobbying. »

Faisant référence au Congrès démocrate, Susan Schaer de Women's Action for New Directions (Mouvement des femmes pour de nouvelles directions) a déclaré : « Ce sont eux les décideurs, et non pas Bush. Ce sont eux qui commandent. C'est maintenant à eux de faire le changement ... À chaque étape nous devons être derrière eux. Une résolution non exécutoire c'est bien, mais ce n'est pas assez... Nous pouvons y arriver. Nous l'avons fait en novembre et nous pouvons le refaire l'an prochain. »

La manifestation était en grande partie organisée en toile de fond d’une nouvelle tentative pour faire pression sur le Congrès, intitulée « Américains contre l'intensification de la guerre en Irak », qui a été lancée récemment par une coalition de syndicats et MoveOn.org.

La complicité des démocrates dans la guerre, de ses débuts à aujourd'hui, a été largement ignorée, et il n'y a eu aucune explication des causes fondamentales de l'éruption du militarisme américain dans la crise du capitalisme américain et mondial.

En fait, la manifestation de Washington avait un caractère semi-officiel. Dans les jours qui ont précédé le rassemblement, le Washington Post a publié des articles qui prédisaient une participation massive, a fourni un plan du site et a même affiché les portraits de célébrités de Hollywood, telles que Jane Fonda, Susan Sarandon, Tim Robbins et Danny Glover, qui allaient être sur place. L'édition de vendredi a même annoncé que la manifestation allait profiter d'une douce journée ensoleillée. Le Washington Post du dimanche avait en première page un article sur la manifestation avec une grande photo des manifestants — une pratique totalement différente de la couverture médiatique insignifiante que le journal avait faite lors des précédentes manifestations anti-guerre.

Certaines indications soulignent la nature semi-officielle de la manifestation et de la coordination entre les organisateurs et la direction du Parti démocrate, comme le fait que la bureaucratie de l'AFL-CIO ait donné son appui. La fédération syndicale, qui au départ appuyait la guerre et qui est demeurée silencieuse durant plusieurs mois alors que le carnage s'intensifiait, a envoyé Fred Mason, le président de l'AFL-CIO du Maryland-DC, pour accueillir le rassemblement au nom du président de l'AFL-CIO John Sweeney.

Un événement organisé sur la base de cette fausse perspective ne peut pas devenir un véhicule pour l'expression de la haine intense des travailleurs et des jeunes envers la guerre et l'administration Bush et des grandes préoccupations sociales et économiques des larges masses.

Un des aspects les plus odieux de l'événement fut le discours démagogique de Dennis Kucinich, imposteur et vaurien politique de première classe. Le représentant de l'Ohio au Congrès cherche à rejouer le rôle qu’il avait joué dans la course à la candidature présidentielle des démocrates de 2004, où il s'était présenté comme le soi-disant candidat anti-guerre le plus déterminé pour finir par soutenir le candidat pro-guerre John Kerry au congrès de nomination du Parti démocrate.

Avant de faire subir à la foule un sermon de plus de Jesse Jackson sur le refrain de « Gardons l’espoir » le coordonnateur national d'Unis pour la paix et la justice a présenté de façon révérencieuse cet imposteur politique aguerri comme « une personne qui fait partie de ce mouvement et de tous les mouvements pour la justice sociale et économique. »

Lorsque le journaliste du WSWS a interviewé Jackson avant son discours, toutefois, sa position sans principes et jouant sur deux tableaux a été exposée clairement. Lorsqu'il lui fut demandé s'il était en faveur d’interrompre le financement de la guerre, Jackson a répondu « Oui. Il est impossible de faire autrement. »

Ensuite, à la question « Tout le financement ou simplement celui concernant l'augmentation  du nombre des soldats ? », Jackson a éludé la question : « A, stopper l'augmentation du nombre des soldats et B, commencer à regrouper une véritable coalition de volontaires pour commencer la transition pour nous sortir de là… » a-t-il dit.

Quand je lui ai demandé s'il était en faveur de la destitution de Bush, il a encore évité de répondre, disant « Je suis en faveur d'audiences et d'enquêtes. Commençons au moins le processus pour déterminer ce qui a mal tourné et qui a fait quoi et à quel moment. »

Derrière de telles dérobades et un tel double langage, on trouve la politique d'un parti qui, quelles que soient ses critiques de la politique de Bush en Irak, défend entièrement les intérêts de l'élite américaine du monde de la finance et des affaires tant dans le pays qu'à l'étranger. Il n'y a pas un iota d'opposition de principes soit à la continuation du bain du sang en Irak ou aux lancements de nouvelles guerres impérialistes.

Il faut tirer les leçons politiques décisives de la complicité du Parti démocrate dans les guerres avec l'Afghanistan et l'Irak, sans parler de la guerre d'Israël contre le Liban de l'été passé soutenue par les Etats-Unis. Il faut aussi tirer les leçons de la politique des alliés opportunistes prétendument de gauche du Parti démocrate, comme ceux qui ont organisé les manifestations de samedi dernier.

L'unique et véritable base pour le développement d'un mouvement de masse contre le militarisme et la guerre est la mobilisation des travailleurs à échelle internationale, indépendamment des partis de l'élite dirigeante capitaliste et en les combattant. Cela signifie qu'il faut rompre de façon irrévocable avec le Parti démocrate et construire un mouvement de masse socialiste indépendant.

(Article original anglais publié le 29 janvier 2007)


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