wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France : Défaite de la « gauche » aux élections législatives

Par Antoine Lerougetel
13 juin 2007

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

Cinq semaines après que la candidate du Parti socialiste Ségolène Royal ait perdu les élections présidentielles, la « gauche » a subi une deuxième défaite cuisante.

Après le premier tour des élections législatives de dimanche, il apparaît déjà clairement que le président Nicolas Sarkozy disposera d’une majorité écrasante à la nouvelle Assemblée nationale. Son parti gaulliste, l’UMP (Union pour un mouvement populaire) va contrôler au moins deux tiers des sièges. Sarkozy est depuis quelque temps le porte-parole de la droite de l’UMP et s’est engagé à prendre des mesures spectaculaires pour démanteler l’Etat providence.

La composition exacte du nouveau parlement sera connue dimanche prochain à l’issue du second tour des élections. Les candidats en lice sont ceux ayant obtenu les voix de plus de 12,5 pour cent des inscrits dans chaque circonscription où la majorité absolue (plus de 50 pour cent) n’a pas été obtenue au premier tour.

Alors que les deux tours des élections présidentielles avaient vu une participation particulièrement grande, respectivement 84 et 85 pour cent, l’abstention massive a été un facteur important du vote de dimanche. 39,6 pour cent des inscrits ne se sont pas déplacé, pour voter, soit une abstention record pour le premier tour des élections législatives depuis la mise en place de la Cinquième République en 1958. A l’évidence, ce sont surtout les partis de « gauche » qui n’ont pas réussi à mobiliser leurs électeurs.

Le résultat de dimanche rappelle par certains aspects les dernières élections législatives de 2002 où l’UMP, alors sous la direction de Jacques Chirac, avait obtenu une importante majorité. La victoire de l’UMP aux législatives de 2002 faisait suite à la victoire de Jacques Chirac qui se présentait pour un second mandat présidentiel, dans une situation où les partis de la « gauche » officielle faisaient campagne contre son rival du deuxième tour, Jean-Marie Le Pen du parti d’extrême-droite, le Front national. Les partis socialiste, communiste et Verts avaient appelé à voter pour Chirac, candidat du patronat, le présentant comme le garant de la démocratie, tandis que les partis dits « d’extrême-gauche » rejoignaient ouvertement ou tacitement la ruée vers Chirac.

Lors des élections législatives qui avaient suivi, Chirac avait obtenu une grande majorité au parlement. Cette fois, la majorité présidentielle sera probablement encore plus grande.

L’UMP a déjà obtenu 39,5 pour cent des voix, contre 33,3 pour cent en 2002. Au total 104 candidats de l’UMP ont obtenu plus de 50 pour cent des voix et ont été élus dès le premier tour.

Les estimations pour le second tour donnent à l’UMP entre 338 et 501 sièges sur les 577 sièges que compte l’Assemblée nationale. Actuellement, les gaullistes détiennent 359 sièges, auxquels on peut ajouter les 29 sièges de l’ancienne UDF (Union pour la démocratie française) qui était alliée à l’UMP lors des élections de 2002.

Le Parti socialiste a obtenu 24,7 pour cent des voix, soit quasiment le même pourcentage qu’en 2002. Seul un candidat du Parti socialiste a obtenu plus de 50 pour cent des voix et été élu dès le premier tour.

Avec ses alliés du PRG (Parti radical de gauche) et du MRC (Mouvement républicain et citoyen, conduit par Jean-pierre Chevènement), le Parti socialiste compte obtenir entre 80 et 140 députés. Il y a actuellement 149 députés PS au parlement.

Le Parti communiste (PCF) a fait un peu mieux qu’on ne s’y attendait, mais a quand même fait moins bien qu’en 2002. Il a obtenu 4,29 pour cent des voix, soit 0,5 pour cent de moins qu’en 2002, mais beaucoup plus que le score de 1,9 pour cent obtenu par Marie-George Buffet à l’élection présidentielle.

Bien que le PCF n’ait conclu aucun accord électoral avec le PS et qu’il ait été confronté, notamment dans ses bastions traditionnels de « la ceinture rouge » de Paris, à une campagne agressive de la part des candidats PS, il est probable qu’il retienne encore entre 9 et 15 députés. Il en a actuellement 21.

Le PCF perdra cependant son statut officiel de groupe parlementaire. Dans l’histoire de la France d’après-guerre, le PCF a toujours joui de ce statut parlementaire officiel, à la seule exception de 1958 lorsque Charles de Gaulle vint au pouvoir.

Frédéric Dabi de l’institut de sondage IFOP a qualifié la perte pour le PCF du statut de groupe parlementaire de « cataclysme » en terme de financement et de visibilité. « Cela va encore plus le transformer en groupuscule. »

Le PCF a perdu un certain nombre de circonscriptions traditionnelles, dont la quatrième circonscription de Marseille qu’il détenait depuis le gouvernement de Front populaire de 1936.

Avec un total de 35,6 pour cent, le Parti socialiste et ses anciens alliés de la « gauche plurielle » (le PCF, les Verts, le PRG et le MRC) ont obtenu à peu près les mêmes résultats qu’en 2002.

Un total de 890 000 voix a été obtenu par les partis soi-disant « d’extrême-gauche ». Cela représente 3,4 pour cent des voix, soit un pour cent de plus qu’il y a cinq ans. Du fait du système de scrutin majoritaire, les candidats « d’extrême-gauche » n’ont aucune chance d’obtenir une représentativité à l’Assemblée nationale.

Le nouveau parti centriste de François Bayrou, le MoDem (le Mouvement démocrate) a obtenu 7,6 pour cent, soit moins de la moitié du score de Bayrou (18 pour cent) au premier tour de la présidentielle. Il n’est pas certain que Bayrou soit reconduit au parlement dimanche prochain, et son parti ne devrait pas obtenir plus de quatre sièges. Il pourrait même finir bredouille.

Le résultat de 4,29 pour cent du Front national représente son score le plus bas depuis le début des années 1980. Une bonne partie de son électorat traditionnel a été siphonnée par la démagogie raciste, sécuritaire et patriotique de Sarkozy. Seule la fille de Jean-Marie Le Pen, Marine Le Pen, qui se présente dans la circonscription industriellement dévastée d’Hénin-Beaumont dans le nord de la France, est arrivée au second tour.

Le quotidien Libération qui avait soutenu Royal à la présidentielle, attribue le succès de l’UMP au soi-disant génie de Sarkozy. Il écrit, « Cette victoire aux trois quarts achevée est le résultat d’une sorte de sans faute sarkozien. Une campagne vigoureuse autour d’un projet clairement orienté à droite, un discours pugnace, nuancé ici et là d’une touche de sollicitude pour l’adversaire, puis les premières décisions d’un gouvernement, cohérentes avec la campagne, dussent-elles mettre à mal les finances publiques et favoriser d’abord les plus aisés des soutiens du nouveau président. »

Ceci n’explique peut-être pas grand-chose, mais il y a quand même là un brin de vérité. Sarkozy est un combattant conscient, vigoureux et résolu des intérêts de la classe qu’il représente. Ségolène Royal, son compagnon et premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande et tous les autres « éléphants » du PS considèrent avec dérision et mépris la classe sociale dont ils prétendent représenter les intérêts. Ce ne sont pas des combattants, mais des opportunistes qui s’adaptent toujours à la droite. Ils se sentent bien plus proches des riches et influents que des travailleurs et des gens ordinaires, sans parler des jeunes et des immigrés des banlieues. Ils n’ont aucun désaccord fondamental avec Sarkozy auquel ils vouent une secrète admiration.

Si Sarkozy était confronté à une opposition politique sérieuse, il serait rapidement réduit à une espèce de personnage comique, dévoré par l’ambition et la vanité.

Aussitôt les résultats du premier tour connus, Royal s’est tournée vers Bayrou et son MoDem de droite partisan du libéralisme, lui proposant une alliance. Julien Dray, porte-parole de Royal lors de la campagne présidentielle, a déclaré lundi que son parti ne fera pas « barrage » aux candidats du MoDem, afin de créer « toutes les conditions d’un Parlement pluraliste. » Royal a dit qu’elle contacterait Bayrou avant le second tour.

Royal et Hollande ont tous deux fait porter la responsabilité du fort taux d’abstention aux jeunes et aux travailleurs, plutôt qu’à leur propre manque de perspective significative pour la masse de la population. Dans un appel à la mobilisation pour dimanche prochain, Royal a déclaré avec arrogance, « Vous devez venir voter pour vous-mêmes d’abord, vous les jeunes, qui êtes restés chez vous alors que souvent vous vous étiez inscrits pour la première fois… Il y a un record d’abstention alors qu’il y avait eu un sursaut citoyen [à la présidentielle] … C’est qu’il y a quelque chose qui ne va pas, mais je ne vous accable pas bien sûr. »

Elle a ajouté d’un ton moralisateur, « Il y a dans le monde des hommes et des femmes qui risquent leur vie pour avoir le droit de vote. » Hollande a pontifié, « Ce sont souvent les jeunes et les catégories populaires qui sont les plus vulnérables à l’abstention. »

Le dirigeant de l’UMP Patrick Devedjian a fait remarquer avec mépris, mais justesse, que « l’abstention l’a plutôt touchée elle [la gauche] que la droite » parce que « la gauche n’a aucun projet... et n’a fait campagne que contre le projet de Nicolas Sarkozy ».

Marie-George Buffet du Parti communiste, ainsi que la LCR (Ligue communiste révolutionnaire) « d’extrême-gauche » se sont opposés à une alliance avec le MoDem mais tous deux soutiennent, ouvertement (pour le PCF) ou tacitement (pour la LCR), le Parti socialiste.

Une déclaration affichée sur le Site Internet de la LCR dit, « Au deuxième tour, il faudra battre la droite et l’extrême-droite et donc éliminer le maximum de leurs candidats (UMP, MoDem, Nouveau centre, MPF et FN.) » Cela revient clairement à appeler à voter pour le PS. Tout comme en 2002, la LCR fait tout pour empêcher la classe ouvrière de rompre avec le Parti socialiste.

Arlette Laguiller de Lutte ouvrière ne propose aucune perspective politique, et se contente d’en appeler à la lutte syndicale : « Si François Fillon [premier ministre UMP] a les mains libres à l’Assemblée nationale, il ne les a pas dans le pays… Le monde du travail est imprévisible, car il peut être sujet à des colères soudaines…Il l’a montré dans le passé et la moindre petite grève ignorée peut, en certaines circonstances, se propager comme une traînée de poudre. »

Cette dérobade devant les grandes questions historiques et politiques confrontant la classe ouvrière est la marque de fabrique de cette organisation « d’extrême-gauche » et va de pair avec son adaptation politique à la bureaucratie syndicale et sa prostration devant les partis de la « gauche » officielle.

(Article original anglais paru le 12 juin 2007)


Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés