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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Les pablistes italiens soutiennent le premier ministre Prodi lors du vote de confiance au Sénat

Par Peter Schwarz
8 mars 2007

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Romano Prodi est confirmé dans ses fonctions à la tête du gouvernement italien. Mercredi, il a gagné un vote de confiance au Sénat, où sa coalition de neuf partis a obtenu une très courte majorité, (162 voix contre 157). Il lui fallait 160 voix pour l’emporter.

On s’attend à ce que le vote qui suivra à la Chambre des députés soit une simple formalité. La coalition centre-gauche de l’Unione du premier ministre Prodi y détient une importante majorité. [NDT : Au moment de la traduction, le résultat du vote de la Chambre des députés était connu. Prodi a recueilli 342 voix pour, 198 contre et deux abstentions.]

Prodi sort donc renforcé de la crise ministérielle qu’il a lui-même provoquée le 21 février après avoir perdu de justesse un vote au Sénat sur sa politique étrangère. Depuis, les neuf partenaires politiques de la coalition ont déclaré leur soutien sans réserve aux fondements de la politique de Prodi.

Prodi a insisté pour que tous les partis de la coalition donnent leur accord à un ultimatum en douze points qui comprend le soutien à l’intervention militaire controversée de l’Italie en Afghanistan, à laquelle une bonne partie de la population s’oppose, l’agrandissement de la base militaire à Vicence, la construction d’une ligne de train à grande vitesse entre l’Italie et la France et la « réforme » du système italien des retraites. De plus, l’accord donne à Prodi le pouvoir extraordinaire de régler à lui seul les conflits au sein de la coalition.

Parmi ceux qui ont soutenu Prodi lors du vote de confiance de mercredi, on trouve le sénateur Franco Turigliatto, dont l’abstention lors du vote sur la politique étrangère il y a une semaine avait été un élément clé de la défaite de Prodi.

Turigliatto avait été élu au Sénat italien en tant que membre de Refondation communiste (Rifondazione Comunista). Il appartient à la tendance Gauche critique (Sinistra Critica), affiliée internationalement au Secrétariat unifié pabliste, une tendance qui a rejeté les principes et le programme du trotskysme et quitté la Quatrième Internationale au début des années 1950 et qui a longtemps été sous la direction d’Ernest Mandel. Les membres italiens du Secrétariat unifié militent au sein de Refondation communiste depuis sa fondation en 1991, ayant joué un rôle majeur dans la construction de ce parti.

Le comité exécutif de Refondation communiste avait appelé à l’expulsion de Turigliatto après son abstention le 21 février. Turigliatto lui-même avait entrepris des démarches pour abandonner son poste de sénateur. Jusqu’à ce qu’il obtienne l’acceptation officielle de sa démission, il demeure au Sénat, mais n’est plus membre du groupe parlementaire de Refondation communiste. Il fait plutôt partie du groupe parlementaire mixte de la Chambre.

En refusant tout d’abord de voter pour Prodi puis, une semaine plus tard, en votant pour lui, Turigliatto et Gauche critique ont fait la démonstration de leur opportunisme sans borne qui caractérise non seulement la tendance pabliste, mais les groupes petits-bourgeois gauchistes en général.

D'un côté, Turigliatto et Gauche critique ne ménagent par leurs efforts pour se présenter comme des opposants socialistes du capitalisme. Ils ont critiqué de nombreux aspects de la politique du gouvernement de Prodi. De l’autre, ils insistent sur le fait qu’il n’y a pas d’alternative à ce gouvernement si ce n’est le retour au pouvoir du gouvernement de droite de Silvio Berlusconi. C’est sur cette base qu’ils demeurent membres de Refondation communiste, qui fait partie de la coalition de Prodi, et continuent à soutenir le gouvernement Prodi au parlement.

Ils s’opposent avec véhémence à un mouvement indépendant de la classe ouvrière dirigé contre le système capitaliste et son élite dirigeante. Leur organisation prône la politique de contestation, insistant sans arrêt sur la nécessité de se mobiliser et de manifester. Mais en tant que membres du gouvernement, ils soutiennent Prodi, et leur véritable rôle consiste à s’emparer de la direction de telles mobilisations dans le but de les conduire dans une impasse politique. Ils offrent une couverture de « gauche » à la politique de droite de Prodi.

Après neuf mois du gouvernement Prodi au pouvoir, il est clair qu’en ce qui concerne son programme anti-social dans le pays et sa politique étrangère impérialiste ce gouvernement est pratiquement indissociable du gouvernement précédent de Berlusconi. Cette situation a forcé les pablistes italiens, qui se décrivent comme un « courant » de Refondation communiste, à faire des contorsions encore plus grotesques pour justifier leur soutien au gouvernement.

Une conférence de Gauche critique qui s’est tenue les 27 et 28 janvier a été forcée d’arriver à la conclusion que : « Le bilan de la participation de Refondation communiste au gouvernement de l’Unione, la coalition de centre-gauche dirigée par Romano Prodi, est catastrophique. »

Dans le magazine pabliste international, International Viewpoint, la dirigeante de Gauche critique, Flavia d’Angeli, a rapporté : « Avec l’adoption du budget pour 2007, le budget de la plus grande austérité de toute l’histoire de la république, l’envoi de troupes au Liban, le maintien des troupes en Afghanistan, la confirmation de la soumission aux diktats du Vatican sur les questions de droits civils et de laïcité, les camarades de Gauche critique réaffirment la nécessité de la construction d’une opposition de gauche à ce gouvernement afin de réagir au malaise grandissant dans la société italienne. »

Cependant, la conférence n’a pas tiré la conclusion qui s’imposait : rompre avec le parti gouvernemental de Refondation communiste. Il a été décidé plutôt, selon le rapport d’Angeli, de « fonder sa propre association, sans toutefois se séparer du PRC ».

La différence exacte entre un « courant » est une « association » est laissée à l’imagination du lecteur, tout comme la question de savoir comment développer une « opposition de gauche » à un gouvernement auquel on appartient. Cependant, s’il est une chose qui reste sûre, ce sont les revenus considérables que les représentants de Gauche critique reçoivent de leurs mandats et de leur appartenance à un parti gouvernemental.

Trois semaines seulement après la conférence, Gauche critique a mené sa rébellion peu enthousiaste durant le vote sénatorial sur la politique étrangère. Malgré l’abstention de Turigliatto, d’autres sénateurs de Gauche critique ont voté pour.

Suite à la décision du comité exécutif de Refondation communiste d’exclure Turigliatto, Gauche critique a lancé une campagne internationale de solidarité qui s’est rapidement attiré le soutien de nombreux radicaux bien connus, comme Noam Chomsky, George Galloway, Tariq Ali, Olivier Besancenot, Alex Callinicos et le réalisateur Ken Loach.

La déclaration de solidarité appelle à s’opposer à « la décision incorrecte d’exclure Turigliatto ». L’appel se poursuit avec un franc-parler qui en dit long : « Nous avons besoin de gestes comme ceux-ci, même s’ils sont compliqués et difficiles, pour réduire le fossé entre la politique officielle et la société. » Autrement dit, les actions de Turigliatto visent à rétablir, et non à miner, la crédibilité de la « politique officielle » du gouvernement Prodi.

Dans une « lettre ouverte à tous ceux qui ont exprimé leur solidarité », Turigliatto a expliqué pourquoi il avait l’intention d’appuyer Prodi dans le vote de confiance qui devait avoir lieu sous peu, bien qu’il rejette les douze points de l’ultimatum de Prodi, qui, dit-il, « signifient l’accord avec une politique de libre échange, un politique de sacrifice et de guerre multilatérale ».

Il n’avait jamais eu l’intention de faire tomber le gouvernement Prodi, a-t-il protesté. Il ne cherchait qu’à faire avancer le « dialogue » avec les sections du mouvement et la gauche qui pensent de cette façon. « En agissant ainsi, le gouvernement devrait pouvoir rester en place », a-t-il déclaré.

Turigliatto a rendu un dernier service à Prodi en abandonnant volontairement son mandat sénatorial, une capitulation complète et couarde.

La résolution de solidarité réussit, tout à la fois, à faire bon accueil et à rejeter la démission de Turigliatto dans une seule et même phrase. Elle dit : « Dans un contexte politique où un siège au parlement est considéré comme plus important que tout, démissionner du Sénat après quarante années d’activité politique aux côtés des travailleurs et après avoir participé à la construction de Refondation communiste depuis le tout début, nous semble être un geste qui est à la fois sans précédent et moralement correct, même si nous pensons qu’il devrait retirer sa démission. »

L’évolution du gouvernement Prodi et de Refondation communiste ne surprend pas les marxistes. Le World Socialist Web Site — et les journaux papier du Comité international de la Quatrième Internationale qui l’ont précédé — ont montré clairement à plusieurs reprises que Refondation communiste sert de soutien de gauche à l’ordre bourgeois. Dans les années 1990, elle a soutenu politiquement le gouvernement technocrate dirigé par le chef de la Banque centrale Lamberto Dini et celui de Azeglio Ciampi, tout comme le premier gouvernement Prodi. Ces trois gouvernements ont entrepris des attaques importantes contre la classe ouvrière.

Pour leur part, Turigliatto et ses partisans se sont donné beaucoup de mal pour défendre et soutenir Refondation communiste, comme l’indique clairement la lettre ouverte de Turigliatto. Il écrit : « j’ai aidé à construire Refondation communiste à ses débuts. Je l’ai défendue lorsqu’elle a été attaquée. J’ai passé des centaines d’heures à parler avec des travailleurs devant des usines à Turin et durant mes voyages de par l’Italie. »

En fait, Turigliatto a induit en erreur et trompé les travailleurs. Si maintenant il est expulsé de Refondation communiste et se sent appelé à entreprendre toutes sortes de virages et contorsions politiques pour justifier son soutien au gouvernement de Prodi, c’est l’expression du gouffre profond qui s’est ouvert entre le gouvernement de coalition et la population en général.

Les ouvriers ne peuvent pas être si facilement déroutés. Ils commencent à comprendre que Prodi et son prédécesseur de droite, Berlusconi représentent les mêmes intérêts sociaux — ceux d’une petite élite dirigeante qui s’est enrichie aux dépens de la société en général, tout en menant continuellement des attaques contre la population ouvrière.  Les travailleurs commencent à chercher une alternative politique qui leur permettra de transformer fondamentalement la société.

La tâche de Turigliatto et de ses collègues de Refondation communiste et de Gauche critique est précisément de bloquer un tel développement.

(Article original paru le 2 mars 2007)


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