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WSWS : Nouvelles et analyses : Moyen-Orient

Le discours de Bush signale une accélération du retrait des troupes d’Irak

Par James Cogan
12 août 2008

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Le président George Bush a annoncé le 31 juillet dans une brève déclaration que les cinq dernières brigades de combat et les trois derniers régiments de marine déployés en Irak et faisant partie du « surge », l’intensification des opérations militaires de l’année passée, étaient rentrées aux Etats-Unis, laissant entrevoir une autre réduction du nombre de troupes américaines vers la fin de l’année.

La Maison Blanche avait seulement annoncé que Bush ferait une déclaration sur l’Irak à la suite de plusieurs interviews prudemment optimistes que le commandant en chef des forces américaines en Irak, le général David Petraeus, avait données en début de semaine. Celui-ci  y réagissait à la confirmation que les pertes américaines avaient été à leur plus bas niveau en juillet depuis le début de la guerre. Seuls onze soldats avaient été tués le mois dernier en Irak dont cinq hors combat. Les 510 victimes parmi les forces de sécurité et les civils étaient également le bilan le plus bas enregistré depuis deux ans et demi et ce en dépit d’une série d’attentats à la bombe terribles survenus au cours de la dernière semaine du mois.

Dans des commentaires faits le 28 juillet à USA Today, Petraeus a déclaré qu’il y avait une « certaine durabilité » dans la baisse de la violence. « S’il était possible de réduire davantage encore ces attaques sensationnelles, alors je pense que l’on se rapprocherait presque de la normale, ou de la violence cachée » a-t-il précisé. Dans une interview donnée à Reuters le même jour, le général a reconnu qu’il était du « domaine du possible » que les forces du gouvernement irakien assument la sécurité dans l’ensemble du pays d’ici la fin de 2009 permettant ainsi le retrait de la majeure partie des troupes de combat américaines dans les prochains 18 mois.

Bush a débuté son discours en faisant référence à la « durabilité » et au « succès du ‘surge’ » cités par Petraeus. Il a déclaré que « les progrès faits en Irak » avaient permis au gouvernement de poursuivre une politique « basée sur le succès » en retirant régulièrement des unités du « surge », la stratégie d’augmentation des troupes. Faisant une prudente allusion à d’autres retraits, le président a dit : « Plus tard dans l’année, le général Petraeus me soumettra des recommandations concernant le niveau futur de troupes, y compris des réduction de nos forces de combat si les conditions le permettent. » Il a annoncé que le service actif en Irak des unités militaires passerait de 15 à 12 mois à partir du 1er août.

Mises à part les nuances tactiques, l’évaluation faite par Bush ne diffère que peu de celle faite par le candidat présidentiel du Parti démocrate, Barack Obama, lors de sa visite en Irak la semaine dernière.

Obama a refusé de qualifier le « surge » de succès vu qu’il s’exprime pour la partie de l’élite dirigeante américaine qui considère que la guerre en Irak dans son ensemble a été une faute stratégique coûteuse et qui a nui aux intérêts américains en général. Il a néanmoins déclaré que les « progrès » faits en Irak signifiaient que sa politique de retrait des troupes de combat dans les 16 mois suivant sa prise de fonction pourrait avoir lieu, à la condition toutefois que les militaires confirment que les conditions sur le terrain le permettent.

Bush, tout comme le candidat républicain, John McCain, acclame le « surge » comme un succès et déclarent qu’il a créé les conditions d’un retrait des troupes d’Irak. Le général Petraeus dont Bush et McCain insistent qu’il est la seule personne qualifiée pour déterminer le rythme des retraits, prévoit qu’il est possible que le plus gros des troupes de combat pourraient être retirées d’ici début 2010, en gros la même période que celle avancée par Obama.

Les camps républicain et démocrate s’accordent pour dire que des dizaines de milliers de soldats doivent rester indéfiniment en Irak dans le but de protéger l’Etat-client américain mis en place à Bagdad et pour superviser le bradage des ressources en pétrole et en gaz aux conglomérats américains de l’énergie.

Derrière l’accord sur le retrait des troupes de l’Irak il y a le consensus qui s’est formé suite à l’appel d’Obama pour l’envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan. McCain s’est déjà joint à l’appel du sénateur de l’Illinois de déployer deux ou trois brigades de combat de plus en Afghanistan en déclarant le 15 juillet que « grâce au succès du ‘surge’, ces forces étaient devenues disponibles. »

Bien que Bush n’aie pas mentionné l’Afghanistan le 31 juillet, son discours signale que la Maison Blanche a rejoint le consensus. Actuellement, quelque 147.000 hommes se trouvent en Irak, y compris l’équivalent de 15 brigades de combat. La prochaine grande rotation doit survenir durant les premiers mois de 2009 où il est prévu que quatre brigades et deux régiments de marines rejoignent l’Irak pour remplacer des unités qui auront terminé leur tour de service. Les recommandations que Petraeus fera à Bush le mois prochain pourraient bien être que « les conditions permettent » que certaines ou toutes les unités de remplacement pourront aller en Afghanistan.

Les forces américaines et celles de l’OTAN sont confrontées à une opération insurrectionnelle anti-occupation croissante à la fois dans le Sud de l’Afghanistan et dans les régions tribales frontalières du Pakistan. Sur un plan plus fondamental, le nouvel accent placé sur l’Afghanistan est lié à une reconquête de l’influence américaine en Asie centrale. Pendant que l’attention des Etats-Unis avait été absorbée par l’Irak, la Russie et la Chine, étaient occupées par le biais des activités de l’Organisation de coopération de Shanghai à établir pratiquement un monopole sur les ressources de pétrole et de gaz d’Etats d’Asie centrale, tels que le Kazakhstan et le Turkménistan.

Richard Boucher, le sous-secrétaire d’Etat américain pour l’Asie du Sud et l’Asie centrale, avait révélé dans un discours tenu en septembre dernier, les véritables motifs de la guerre en Afghanistan. « L’un de nos objectifs est de stabiliser l’Afghanistan, de façon à ce que [ce pays] puisse devenir un point de passage et un pivot entre l’Asie du Sud et l’Asie centrale pour que les ressources énergétiques puissent couler vers le sud… et que les pays d’Asie centrale ne demeurent plus étouffés entre les deux énormes puissances de la Chine et de la Russie mais puissent bien plutôt disposer d’ouvertures vers le Sud ainsi que vers le Nord, l’Est et l’Ouest, » a-t-il dit.

La fragilité politique en Irak

Ce qui a été laissé à l’écart lors de la discussion sur le « succès » du « surge » c’est le véritable état des choses à l’intérieur de l’Irak. Au moment même où Bush tenait son discours, des développements ont souligné la fragilité de l’actuelle stabilité apparente.

Petraeus a réussi à réduire la violence principalement en supervisant un bain de sang sectaire et communautaire qui a laissé l’Irak divisé en sphères d’influence rivales chiite, sunnite et kurde. Rien qu’en 2007, plus d’un million de personnes furent chassées de leurs foyers et des dizaines de milliers furent tuées lors de combats brutaux entre des milices loyales aux partis chiites du gouvernement irakien dirigé par le premier ministre Nouri al-Maliki soutenu par les Etats-Unis et des groupes sunnites armés.

Au cours de l’an dernier, des communautés sunnites désespérées de Bagdad et des provinces environnantes ont cherché à se protéger des escadrons de la mort chiites en formant un groupe de miliciens des « Fils d’Irak ». L’armée américaine rétribue d’anciens combattants sunnites pour patrouiller les rues, assurer la garde des postes-frontières et faire la police dans leurs quartiers en échange de leur collaboration contre les groupes d’insurgés. Il y a présentement 103.000 miliciens des « Fils d’Irak » à la solde de l’armée américaine. Près de 50.000 de ces miliciens sont employés dans les banlieues sunnites de Bagdad. Ils considèrent que leur tâche primordiale est la protection des communautés sunnites contre les forces de sécurité dominées par les chiites.

Maliki a refusé d’incorporer la majorité des miliciens sunnites dans l’armée ou la police. Au lieu de cela, il exige qu’ils se dissolvent, donnant le droit aux forces gouvernementales de pénétrer dans leurs zones une fois que les forces américaines se seront retirées. Etant donné l’ampleur des tensions sectaires, ce n’est qu’une question de temps avant qu’une nouvelle montée de résistance sunnite à la fois contre l’occupation américaine et le gouvernement fantoche n’ait lieu.

L’envoi par Maliki cette semaine de quelque 50.000 soldats et policiers principalement chiites dans la province de Diyala et sa capitale Baqubah, où près de 5.000 anciens guérillas sunnites ont formé des groupes de « Fils d’Irak », représente une étincelle possible.

Le déploiement des forces gouvernementales visait en apparence à établir « la loi et l’ordre » et à traquer les derniers insurgés liés à Al Quaïda qui opèrent dans la province. Un article paru dans le Los Angeles Times a remarqué que les sunnites considéraient cette démarche comme une invasion chiite hostile de la région. Un membre de la milice sunnite à la solde des Etats-Unis a voulu savoir pourquoi les troupes américaines n’accompagnaient pas la police irakienne majoritairement chiite lors de leurs opérations de perquisition à domicile. A la réponse donnée que c’était parce qu’ils faisaient confiance à la police, l’homme a répliqué : « Alors nous serons tués. »

Les tensions entre communautés s’accroissent aussi dans la province riche en pétrole de Tamim. Les partis nationalistes kurdes, qui constituent le deuxième plus important bloc au parlement irakien, essaient d’incorporer Tamim et sa capitale Kirkouk dans le gouvernement régional kurde (KRG) qui dirige les provinces avoisinantes d’Irbil, de Dohouk et de Souleymanieh. Les vastes communautés arabes et turkmènes de Kirkouk rejettent leurs projets tout comme le gouvernement turc qui craint qu’un renforcement du KRG ne revigore l’agitation séparatiste au sein de sa vaste minorité kurde.

Pour asséner un coup aux ambitions kurdes, le parlement irakien a voté la semaine dernière de ne pas organiser d’élections provinciales à Kirkouk à la fin de cette année et a décrété que le gouvernement provincial dominé par les Kurdes devait être remplacé par un conseil comprenant 10 Kurdes, 10 Arabes, 10 Turkmènes et deux Chrétiens. Il a également voté pour que l’armée et les unités de milice opérant dans la ville et dominées par les Kurdes soient remplacées par des troupes arabes venant du Sud de l’Irak.

Le conseil présidentiel de l’Irak qui est présidé par Jalal Talabani, un dirigeant nationaliste kurde en vue opposa son véto à cette loi qui a néanmoins provoqué l’indignation dans les milieux nationalistes kurdes. Jeudi, la majorité kurde de la législature de Tamim a passé une résolution pour demander que Kirkouk soit incluse dans le KRG indépendamment de la position adoptée par le gouvernement irakien.

La réaction fut celle de menaces immédiates de conflit. Mohamed al-Djoubouri, un membre arabe du parlement de Tamim, a dit à Reuters : « Nous nous opposons totalement à ce que Kirkouk fasse partie du Kurdistan et considérons ceci comme le début d’une crise et de dissensions dans la ville. Cela pourrait conduire à une guerre civile à Kirkouk. » L’on ne peut pas écarter la possibilité que des tensions au sujet de Kirkouk ne dégénérent en guerre ouverte entre le gouvernement irakien et le KRG qui est en mesure de mobiliser une armée de plus de 200.000 miliciens peshmerga.

Une invasion de l’armée turque du Nord de l’Irak ne peut elle non plus être écartée. Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a personnellement contacté Talabani jeudi pour lui faire part de son inquiétude au sujet du vote à Kirkouk et pour mettre implicitement en garde que la Turquie recourrait à la force pour empêcher que la ville ne soit rattachée à la région kurde.

Tels sont les fondements pourris du soi-disant « succès » du « surge » irakien et des projets du déploiement de troupes supplémentaires en Afghanistan.

(Article original paru le 2 août 2008)


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