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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Avec les craintes d'une extension internationale des manifestations grecques

Le gouvernement suspend la réforme des lycées français

Par Kumaran Ira
20 décembre 2008

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Le 15 décembre, face aux manifestations de lycéens et après avoir consulté le président Sarkozy le ministre de l'Éducation Xavier Darcos a annoncé le retrait temporaire d'une réforme très contestée des lycées.

La décision de suspendre temporairement la mise en pratique de la loi, qui réduirait les effectifs d'enseignants et modifierait les programmes scolaires, constitue une volte-face embarrassante pour le gouvernement. Une semaine plus tôt, Darcos avait promis qu'il maintiendrait la réforme, expliquant que les manifestations des lycéens « sont presque une habitude… Je ne suis pas le ministre de L'Hésitation nationale, j'ai un devoir envers les générations futures. Nous devons réformer un pays qui en a bien besoin ».

Depuis lors, cependant, il y a eu l'éruption de violentes et massives manifestations anti-gouvernementales en Grèce, après que la police a abattu un garçon de 15 ans, Alexis Grigoropoulos. Des manifestations par sympathie se sont communiquées vers de nombreux pays européens, dont la France.

La jeunesse française devant faire face à des perspectives inquiétantes pour l'économie et l'emploi, la presse française a largement commenté le fait que les manifestations contre la réforme pourraient être infectées par ce qu'ils appellent le « syndrome grec ».

Darcos a expliqué sur Europe 1 : « Ce qui m'inquiète ce n'est pas tant le fait que des lycéens puissent contester des réformes, c'est une chose à laquelle nous sommes habitués, c'est qu'à cette occasion-là d'autres événements se produisent. … il y a une agitation sociale, une angoisse qui va bien au-delà de savoir si l'an prochain on va faire des modules en seconde, tout cela va beaucoup plus loin. Je ne veux pas que la réforme du lycée soit otage de cette tension sociale et de ces inquiétudes, qui sont évidemment liées à des raisons autres que des questions lycéennes. Aujourd'hui le climat ne se prête plus à parler sereinement, il n'est pas très grave que l'on repousse ça d'un an. »

Les lycéens s'opposent à la réforme parce qu'ils s'inquiètent des réductions du budget de l'éducation et des heures d'enseignement, des tentatives de mettre en concurrence les écoles publiques avec les écoles privées, et des risques que la réforme ne porte atteinte à la crédibilité de leurs diplômes auprès des employeurs. Ils sont également en colère contre les réductions d'effectifs dans l'éducation : le gouvernement a décidé de supprimer 13 500 emplois d'enseignants l'année prochaine, après en avoir supprimé 11 200 cette année.

Depuis que la réforme Darcos a été présentée en octobre, les lycéens ont monté de nombreuses manifestations contre elle. Pendant les deux dernières semaines, un certain nombre de manifestations et d'occupations d'écoles ont pris place dans des villes comme Rennes, Nantes, Amiens, Aix-en-Provence, Paris, Marseille, et Nîmes. Des incidents violents ont eu lieu dans l'Ouest de la France. À Brest, la police a utilisé des gaz lacrymogènes contre un petit groupe de jeunes, principalement des lycéens, qui ont répondu en lançant des pierres.

Les conditions économiques qui ont constitué le fondement des émeutes grecques existent dans toute l'Europe, et en particulier en France. Le chômage des jeunes en France, parmi les plus élevés d'Europe, se monte à 23 pour cent et plus de 35 pour cent dans certains quartiers. Cinq ans après avoir fini leurs études, plus d'un cinquième des Français entre 20 et 30 ans n'ont toujours pas d'emploi. Ils sont forcés de choisir entre un emploi précaire et pas d'emploi du tout.

Après qu'un jeune homme perde la vie au cours d'une poursuite policière dans les banlieues de Paris en 2005, des jeunes de la classe ouvrière, employés ou au chômage, se sont rebellés pendant plusieurs jours, les manifestations qui avaient commencé dans les banlieues de Paris se sont communiquées à 300 autres villes françaises. Le gouvernement y a répondu en déclarant l'état d'urgence pendant 3 mois et en utilisant d'importants détachements de police anti-émeute. Des émeutes s'étaient également produites à Paris en novembre 2007, après que la police a fui la scène d'un accident dans lequel une de leurs voitures avait tué deux jeunes à mobylette.

Ces tensions sociales s'intensifient actuellement avec le développement de la crise économique mondiale, avec des rachats de dettes massifs par les Etats et des fermetures d'usines dans toute l'Europe. Le futur des étudiants est encore plus sombre dans une économie capitaliste lorsqu'il n'y a aucune garantie sur l'avenir des emplois et de l'industrie. De plus, en insistant pour retirer quelques millions d'euros des budgets de l'éducation pour éliminer des emplois d'enseignants, tout en trouvant rapidement 360 milliards d'euros pour racheter les dettes des banques françaises, le gouvernement a fortement montré son caractère de classe.

Dans un éditorial du 11 décembre, le quotidien Libération écrivait, « L’aggravation de la situation économique met à vif des difficultés anciennes : la précarité chiche dans laquelle vit une grande partie de la population, au premier chef la génération des 20-30 ans… L’Elysée, dit-on, observe avec intensité le moindre indice de révolte. Sage précaution : divisée, angoissée, désabusée, la France a le profil grec. »

L'ex-premier ministre socialiste Laurent Fabius remarquait, « Ce qu’on voit en Grèce n’est pas hors du champ de ce qui peut arriver en France. Quand vous avez une telle dépression économique, une telle désespérance sociale, il suffit d’une allumette. »

Le discrédit des syndicats, avec les défaites répétées des grèves et des manifestations contre les politiques anti-sociales de Sarkozy ces deux dernières années, a créé un sentiment populaire encore plus dur. L'Etat n'a aucune confiance dans la capacité des syndicats étudiants et de salariés de contrôler les manifestations lycéennes.

Dans un article intitulé, « Nous sommes assis sur un baril de poudre », Libération a demandé à la sociologue Isabelle Sommier de l'Université de Paris, si « Les syndicats et les partis politiques peuvent canaliser ce désespoir. » Elle répondait : « Ils sont en plein marasme et sans crédibilité, n’offrant aucune alternative, c’est-à-dire aucun horizon autre que la préservation de ce qui est. Certes, ils sont capables de mobiliser, mais cela débouche, depuis plusieurs années, sur rien. Les réformes passent en dépit du niveau de mobilisation. D’où l’inclination, chez certains jeunes, à l’action directe. »

Des fonctionnaires français de haut rang surveillent les manifestations en Grèce et en France.

Un aide de la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, a déclaré au Monde : « On suit avec attention les mouvements qui se développent autour des lycées. Le climat est nerveux, certaines villes moyennes sont touchées par des dégradations. »

Ces fonctionnaires reçoivent également des informations quotidiennes de la part du gouvernement grec durant les émeutes. Le Monde a écrit, « [Le ministre de l'Immigration] Brice Hortefeux a pris contact avec le ministre de l'Intérieur grec, qu'il connaît bien, pour prendre la mesure de la situation. Il craint une « surexploitation » du phénomène en France.

Lire aussi :

France: Emeutes en banlieue parisienne après la mort de deux jeunes dans une collision avec une voiture de police [29 novembre 2007]

Paris frappée par des émeutes anti-police [2 novembre 2005]


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