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WSWS : Nouvelles et analyses : Canada

Le gouvernement conservateur du Canada brandit le spectre d’une élection sur la question de la guerre en Afghanistan

Par Keith Jones
14 février 2008

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Le gouvernement minoritaire conservateur du Canada a présenté vendredi dernier au Parlement une motion visant à prolonger de 34 mois, soit jusqu’à la fin de 2011, la mission de combat des Forces armées canadiennes au sud de l’Afghanistan. Actuellement, 2500 soldats canadiens et un escadron de chars Leopard sont déployés dans la province de Kandahar, le centre historique des talibans.

Plus tôt la semaine dernière le gouvernement avait annoncé que le vote pour prolonger la mission afghane des Forces armées canadiennes au-delà de février 2009, qui est prévu pour la fin mars, allait probablement être un « vote de confiance ». Ainsi, advenant le rejet à la Chambre des communes de la motion visant à prolonger la mission de combat des FAC, on jugerait que le gouvernement conservateur en poste depuis deux ans aurait perdu la confiance du Parlement, entraînant alors la tenue d’une élection fédérale.

Le gouvernement conservateur de Stephen Harper ne cache pas l’importance qu’il accorde au déploiement des FAC en Afghanistan à travers lequel les FAC ont adopté un rôle dirigeant dans la guerre en Afghanistan et où l’Equipe consultative stratégique, menée par les FAC, acquiert un important pouvoir décisionnel en déterminant les politiques du gouvernement afghan mis en place par les Etats-Unis.

L’élite patronale du Canada a solidement appuyé les efforts du gouvernement Harper pour utiliser une armée canadienne développée et réarmée afin d’avancer ses intérêts économiques et stratégiques sur la scène mondiale. Mais les sondages ont démontré à maintes reprises que la majorité des Canadiens s’opposent à la guerre des FAC en Afghanistan. Ceux qui sont fortement en faveur d’un retrait des troupes canadiennes du sud de l’Afghanistan au plus tard en février 2009 sont beaucoup plus nombreux que ceux qui sont fortement en faveur d’une prolongation de l’actuelle mission de combat.

Les sentiments anti-guerre ont été attisés par l’augmentation du nombre de morts. 78 soldats des FAC ont été tués en Afghanistan depuis 2001, presque tous au cours des deux dernières années.

Tous les partis de l’opposition — les libéraux, le Bloc québécois (BQ) indépendantiste et le Nouveau Parti démocratique — ont appuyé la participation canadienne à l’invasion américaine de l’Afghanistan en 2001 et le déploiement des troupes canadiennes à Kandahar au début de l’été 2005.

Mais, en commençant par le NPD qui a retiré son appui à la mission de combat des FAC en août 2006, les partis de l’opposition ont commencé à trouver judicieux le fait de faire appel, bien que de façon limitée et presque entièrement rhétorique, aux sentiments populaires anti-guerre et anti-Bush.

Le BQ, dont le chef Gilles Duceppe avait qualifié la mission des FAC en Afghanistan de « noble cause », a néanmoins, durant la dernière année, soutenu qu’il s’opposait à toute prolongation de la mission de combat des FAC au-delà de février.

Les libéraux, le parti traditionnel de l’élite dirigeante canadienne, sont fortement divisés sur la question du soutien au prolongement de la mission de combat des FAC dans le sud de l’Afghanistan, une mission qui fut lancée par le gouvernement libéral de Paul Martin.

Conscient de ces divisions, Harper a demandé à John Manley (un ancien vice-premier ministre et ministre des Finances libéral bien connu pour son appui à  un alignement encore plus étroit avec Washington et à une prolongation du rôle majeur que joue le Canada dans la guerre en Afghanistan) de mener un comité des « sages » qui avait pour but de faire des recommandations au gouvernement sur ce qu’il devrait faire lorsque la mission des FAC atteindrait la fin de son présent mandat en février 2009.

De façon prévisible, Manley a déposé un rapport qui appuyait fortement la position du gouvernement selon laquelle les FAC doivent continuer de faire la guerre en Afghanistan pendant encore des années. Mais, le rapport fut rédigé de façon à encourager et à faciliter un consensus bipartisan entre les libéraux et les conservateurs qui serait en faveur d’un prolongement de la campagne de contre-insurrection des FAC.

La Commission Manley a critiqué le gouvernement pour ne pas en avoir fait assez pour rallier la population canadienne à la guerre afghane. Elle a dit aussi que son appui pour le prolongement d’une mission des FAC est conditionnel à ce que le gouvernement fournisse les FAC en hélicoptères et en drones de surveillance et qu’il convainque un allié de déployer 1000 soldats à Kandahar.

Malgré les appréhensions de plusieurs à la tête du parti, le chef libéral Stéphane Dion a refusé de se plier au rapport Manley. Plutôt, il est resté sur la position qu’il avait prise l’automne dernier selon laquelle la « mission de combat » à Kandahar devait se terminer en février 2009. Au même moment, Dion a mis l’accent sur le fervent appui des libéraux pour l’occupation de l’OTAN, menée par les États-Unis, de l’Afghanistan tout comme pour le déploiement continu et massif des FAC en Afghanistan. Mais le rôle des troupes canadiennes, a dit Dion, doit se limiter à l’entraînement des forces afghanes et fournir une protection pour différents projets de reconstruction et de développement.

A vrai dire, la différence entre les positions des libéraux et des conservateurs n’est pas tellement grande. Ou plutôt, la différence prend seulement une grande importance en raison de la présente situation de l’occupation des forces de l’OTAN en Afghanistan, c’est-à-dire l’isolation croissante du gouvernement de Kaboul et les frictions et les divisions dans l’OTAN à savoir qui portera le fardeau de la guerre de contre-insurrection.

La presse était divisée sur la décision du gouvernement de proclamer vote de confiance le vote sur le prolongement de la mission de combat des FAC. Les éditorialistes du National Post, la voix des néoconservateurs canadiens, l’ont qualifiée de « coup de maître stratégique » : « Les libéraux pourraient défaire la motion et forcer une élection qu’ils ne veulent pas (et ne peuvent se permettre), s’abstenir et avoir l’air aussi pathétique que lorsqu’ils se sont abstenus devant le discours du Trône l’automne dernier ou bien voter en faveur de la mission et ne pouvoir faire de cette question un point central lorsqu’il y aura finalement des élections. »

Mais d’autres journaux de la grande entreprise ont critiqué les conservateurs pour ne pas en avoir fait davantage pour obtenir un consensus bipartisan sur une question « nationale » d’une si grande importance. Ils appréhendaient également que la motion des conservateurs ne précipite une élection sur la question centrale mais très impopulaire de la guerre. « La défaite du gouvernement sur cette question, déclarait le Globe and Mail, (…) amènerait les conservateurs à faire campagne sur une mission pour laquelle l’appui demeure faible. C’est une stratégie dangereuse et peu recommandable. »

Des sections importantes des médias officiels préféreraient une entente bipartisane prolongeant la mission en Afghanistan, qui serait ainsi largement écartée du débat public même si, pour obtenir une telle entente les conservateurs devaient faire certaines concessions à Dion, par exemple, en acceptant l’aspect « formation » de la mission des FAC.

Ceci étant dit, il ne fait aucun doute qu’il y aura des pressions importantes de l’élite dirigeante pour pousser les libéraux à voter en faveur de la motion du gouvernement afin de « sauver » la mission afghane. Le Globe and Mail a sermonné tant Harper que Dion pour ne pas avoir réussi à mener « un effort bipartisan sérieux pour aller de l’avant ». Mais le journal concluait dans son éditorial  principal de jeudi en avertissant les libéraux que s’ils votaient contre la motion conservatrice, ils allaient « tirer le tapis sous les pieds des troupes » et seraient « responsables de l’échec de la mission », des « lâcheurs » et des « hypocrites ».

L’annonce du gouvernement conservateur de faire de la motion pour le prolongement de la mission un vote de confiance fait partie d’une attitude plus agressive des conservateurs suggérant qu’Harper cherche à précipiter la chute de son propre gouvernement.

Les conservateurs ont également annoncé cette semaine leur intention d’introduire une nouvelle motion à la Chambre des communes qui sera soumis à un vote de confiance si le Sénat contrôlé par les libéraux n’adopte pas son projet de loi sur la loi et l’ordre qui a déjà franchi les premières étapes en vue de son adoption à la Chambre des communes le mois dernier.

Les sondages d’opinion continuent de montrer que les conservateurs sont loin d’avoir l’appui populaire nécessaire pour s’assurer une majorité parlementaire. Mais les signes évidents d’une crise économique en Amérique du Nord les ont apparemment mené à la conclusion qu’ils auraient de bien meilleures chances de gagner une majorité maintenant que plus tard.

Compte tenu de l’impopularité de la guerre en Afghanistan, il peut sembler étrange que les conservateurs menacent l’opposition avec une élection sur cette question. Ils calculent, cependant, que les parties de l’opposition se partageront le vote « anti-guerre » — même si dans les faits, ils sont tous complices dans la guerre — et qu’avec l’appui de la plus part des médias officiels ils seront capable de mener une campagne nationaliste agressive et belliqueuse. Durant les dernières années, les conservateurs ont régulièrement dénoncé les partis de l’opposition de « laisser tomber les troupes » d’être « laxistes » face au terrorisme et même d’être pro-taliban.

A cet égard, il est important de noter que le chef les Forces armées canadiennes, Rick Hillier, qui a joué un rôle majeur dans la promotion de la mission afghane, dénonçait la position des libéraux la semaine dernière sur la mission des FAC. Questionné sur ce qu’il pensait de l’appel des libéraux pour que les FAC passe d’une mission de combat à une mission d’entraînement et de protection après février 2009, Hillier déclarait, « En étant à Kandahar, les opérations de combats sont nécessaires, l’armée afghane n’est pas encore capable d’assurer la sécurité d’elle-même. »

(Article original anglais paru le 9 février 2008)


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