WSWS : Nouvelles et analyses : Economie mondiale
Confrontée à ce qui pourrait bien être sa plus grave crise depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’économie capitaliste mondiale n’a jamais eu autant besoin de politiques concertées de la part des plus importants gouvernements nationaux du monde.
Mais l’unité et la collaboration, nécessaires devant les problèmes croissants posés par les changements climatiques, la hausse des prix du pétrole et de la nourriture ainsi que la menace toujours présente de récession, ont été manifestement absentes de la rencontre des grandes nations industrielles du G8 tenue à Hokkaido au Japon cette semaine.
Les divisions ont été tout particulièrement apparentes dans la déclaration d’hier sur les changements climatiques. Après de longues négociations en coulisse, le G8 s’est finalement résolu à publier un communiqué dans lequel les grandes puissances industrielles s’entendent sur une « vision commune » afin « d’atteindre au moins 50 pour cent de réduction des émissions mondiales d’ici 2050 ». Toutefois, afin d’obtenir le soutien du président américain George Bush, qui a refusé de fixer aucune cible précise en l’absence d’engagements de la part de l’Inde et de la Chine, une clause fut ajoutée à la déclaration « admettant que ce défi mondial ne peut être surmonté que par une réaction mondiale, et en particulier par les contributions de toutes les grandes économies ».
Les scientifiques ont accueilli négativement la déclaration, affirmant qu’elle était bien en deçà de ce qui est nécessaire pour stopper les changements climatiques mondiaux.
« Ils auraient pu faire des progrès ici en étant plus précis sur les engagements à court terme que les pays industrialisés étaient prêts à prendre pour réduire leurs propres émissions, mais ils ne s’entendent pas là-dessus », a déclaré Aiden Mayer, porte-parole pour l’Union des scientifiques préoccupés.
« Ils auraient pu être plus précis quant à l’année de référence sur laquelle se base la cible de 2050, mais ils ne sont pas d’accord là-dessus. »
James Hansen, un éminent climatologue d’un institut de la NASA à New York (Goddard Institute for Space Studies), a affirmé que « les nations industrialisées faisaient semblant de comprendre le problème. En réalité, ils agissent d’une manière qui garantit que nous lèguerons à nos enfants des catastrophes climatiques qui seront hors de leur contrôle. »
La déclaration du G8 ne s’est engagée en rien concernant les réductions d’émissions de gaz à effet de serre au cours de la prochaine décennie, réductions que l’on considère cruciales. Le président du comité de l’ONU des experts sur le climat, Rajendra Pachauri, a déclaré que « des détails extrêmement cruciaux » étaient absents de la déclaration. « Plus tôt nous commençons à réduire les émissions, plus grandes seront les chances d’éviter les plus graves impacts et hausses de température qui surviendront dans une décennie environ », a-t-il soutenu.
La déclaration a été aussitôt critiquée par le G5, le groupe de soi-disant pays en développement, soit le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Mexique, qui devraient rencontrer le G8 aujourd’hui.
« Les pays en développement ne devraient pas être tenus responsables de ce qui est inévitablement la responsabilité des nations développées », a déclaré le président mexicain Felipe Calderon.
Le ministre de l’Environnement de l’Afrique du Sud, Marthinaus van Schalkwyk, a qualifié la déclaration du G8 de « slogan vide sans contenu ».
« Même si la déclaration peut sembler être un pas de l’avant, nous sommes inquiets qu’elle puisse, en fait, être une régression par rapport à ce qui est requis pour faire une contribution significative aux défis que posent les changements climatiques. Pour être significatif et crédible, un but à long terme doit avoir une année de référence. Il doit être appuyé par des objectifs et des actions à moyen terme ambitieux », a-t-il dit.
Dans tous les cas, même si de tels engagements étaient faits, ils ne s’avéreraient pas avoir plus de substance que ceux faits sur la pauvreté dans le monde. Trois ans auparavant, les chefs du G8 avaient accepté en grande fanfare lors de la réunion de Gleneagles en Écosse d’augmenter l’aide à l’Afrique de 25 milliards de dollars avant l’année 2010. Alors que le sommet de Hokkaido était en train d’être convoqué, il fut révélé qu’un maigre 14 pour cent de l’objectif avait été atteint.
L’économie mondiale
Les engagements du G8 concernant l’économie mondiale n’étaient pas plus précis que ceux concernant les changements climatiques. L’organisation fut mise sur pied en 1975 pour développer une action coordonnée afin de faire face aux problèmes posés par la récession et les bouleversements financiers causés par la hausse des prix du pétrole de 1973-1974. Trois décennies et demie plus tard, l’économie mondiale faisant face à ce que le Fonds monétaire international a qualifié de crise financière la plus sérieuse depuis la Grande Dépression, une telle action serait censée être à l’ordre du jour.
Mais la déclaration du G8 ne contient aucune mesure concrète. Après avoir noté que l’économie mondiale fait face à de l’« incertitude », qu’un « risque de chute persiste » et après avoir exprimé « une grande inquiétude concernant le prix élevé des denrées, particulièrement le pétrole et la nourriture », ses auteurs poursuivent en affirmant que « nous sommes déterminés à prendre continuellement des actions appropriées, individuellement et collectivement afin d’assurer une stabilité et une croissance dans nos économies et à l’échelle mondiale. »
La déclaration contient un appel voilé au gouvernement chinois pour qu’il permette un mouvement vers le haut du taux de change du yen afin d’atténuer les déséquilibres mondiaux.
« Dans quelques économies émergentes possédant des surplus importants et croissants de leur compte courant », peut-on lire dans la déclaration, il est « crucial de rendre effective la variation des taux de change pour que des ajustements nécessaires surviennent ». L’ajout du mot « quelques » marque un changement par rapport au communiqué de l’année dernière, qui référait simplement aux « économies émergentes » en général.
La question du taux de change est simplement un symptôme de problèmes plus profonds. Un porte-parole de Bush a déclaré au début de la réunion que le président était en faveur d’un « dollar fort ». Cependant, cela nécessiterait une montée des taux d’intérêt américains, action qui déclencherait presque assurément une autre crise financière aux Etats-Unis et ailleurs. D’un autre côté, une augmentation dans la valeur du dollar demanderait une baisse des taux d’intérêt dans d’autres régions, particulièrement dans la zone euro. Mais, au lieu de baisser les taux d’intérêt, la Banque centrale européenne maintient une politique monétaire relativement serrée dans le but de lutter contre les pressions inflationnistes mondiales.
L’impuissance du G8 n’est pas imputable à des dirigeants ou à des gouvernements en particulier. Elle exprime plutôt les vastes changements ayant pris place dans l’économie mondiale. Comme le Financial Times l’a noté dans un commentaire publié lundi, le G8 n’est pas maître de sa propre destinée, mais il est balloté par des « forces et des politiques provenant d’ailleurs ».
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