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WSWS : Nouvelles et analyses : Moyen-Orient

Turquie : la manifestation du 1er mai violemment réprimée à Istanbul

Par notre correspondant
8 mai 2008

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Le 1er mai, la police antiémeute a brutalement attaqué des manifestants pacifiques à coups de matraques, de spray à poivre et de canons à eau pour les empêcher de participer au défilé du 1er mai qui se dirigeait vers le Taksim Square, le principal point de ralliement à Istanbul.
Le 30 avril, le Parti de la justice et du développement (AKP) a décrété qu’il ne permettrait aucune manifestation sur la place Taksim disant que la place n’était juridiquement pas ouverte aux manifestations. Le premier ministre, Tayyip Ergdogan, a menacé les dirigeants syndicaux en disant « Nous prévenons tout le monde contre des actes et des provocations émanant d’organisations illégales et je demande instamment à tout un chacun de ne pas faire le jeu de ces provocations. »
Le gouverneur d’Istanbul, Muammer Güler, s’est dit déterminé à appliquer l’interdiction des manifestations du 1er mai sur la place Taksim, promulguée par la junte ayant pris le pouvoir  par le coup d’Etat militaire de 1980 et dont elle fit une loi que les gouvernements successifs ont appliqué à ce jour. Ceci revêt une signification symbolique particulière parce que le 1er mai 1977 des provocateurs de droite avaient, probablement avec l’aide des forces de police, ouvert le feu contre une manifestation de gauche à Taksim, faisant 37 morts.

La junte militaire a également aboli le 1er mai comme jour férié car elle considérait que cette date représentait pour « l’activisme de gauche » une occasion de se manifester. Le gouvernement de l’AKP a refusé de changer ces traditions établies par le régime militaire.

Selon les chiffres officiels annoncés par le gouverneur Güler et Celattin Cerrah, le chef de la police d’Istanbul qui a joué un rôle pernicieux dans la violence perpétrée contre la manifestation du 1er mai cette année, 530 manifestants furent interpellés et 38 personnes furent blessées durant cette journée.

Durant les jours qui ont précédé la manifestation, Güler a affirmé qu’il se trouvait en possession de renseignements précis indiquant que « des terroristes du PKK et des membres d’autres organisations marginales et illégales » attaqueraient la police et qu’il était déterminé à recourir à une « action préemptive ».

Bien qu’il ne soit pas possible de donner un chiffre exact, le nombre de personnes qui se sont rassemblées sur la place pour prendre part à la manifestation n’était probablement pas plus de 15 000 mais la présence policière était hors de toute proportion. Avec plus de 20 000 policiers en uniforme, sans compter ceux qui étaient en civil, la police était nettement plus nombreuse que les manifestants. Les rangs de la police avaient été renforcés par des équipes en provenance de districts avoisinants et que le gouvernement avait dépêchées sur place.

Des centaines de gendarmes furent déployés dans le parc Gezi à Taksim qui fut pratiquement transformé en caserne de police en plein milieu de la ville. La police a bloqué toutes les rues menant à la place et a systématiquement et brutalement dispersé des groupes de manifestants qui essayaient de rejoindre la place et même ceux qui attendaient aux abords de la place.

Certains services de ferry, de bus et de métro furent également suspendus des heures durant dans un effort d’empêcher que des manifestants ne se rendent sur la place.

Selon les chiffres officiels, des agents de police ont tiré plus de 1500 grenades de gaz lacrymogène et ont profité de la moindre occasion pour traiter les manifestants à coups de pied et pour les matraquer. Tout en lançant des bombes lacrymogènes, certains agents de police ont délibérément baissé leurs lance-grenades dans le but de toucher et de blesser des manifestants, y réussissant parfois.

La police a tiré des balles en plastique sur des manifestants qui jetaient des pierres et des briques. Il existe des rapports sur l’usage de balles en plastique par la police contre des manifestants pacifiques bien qu’aucun rapport officiel n’en ait fait état.

En poursuivant un groupe de manifestants qui avaient été touchés par des tirs de gaz lacrymogène et qui affluaient vers l’hôpital Sisli Etfal pour se faire soigner, la police a également lancé du gaz lacrymogène à l’intérieur de l’hôpital, touchant une vieille femme et des enfants. L’on rapporte que de jeunes enfants qui y suivent un traitement contre la leucémie ont également été touchés par cette brutalité policière sans précédent.

Des visiteurs étrangers se trouvant dans le quartier de Taksim, un important lieu touristique, ont été visiblement choqués par ce qu’ils ont vu.

La direction générale de la Confédération des syndicats révolutionnaires de Turquie (DISK) qui est située à Sisli et qui a abrité plus de 1000 manifestants fut attaquée plusieurs fois par la police qui a tiré du gaz lacrymogène à l’intérieur du bâtiment.

Un permanent syndical a dit au Turkish Daily News, « La première attaque s’est produite sans avertissement alors que les gens étaient assis devant l’immeuble. Des députés du Parti de la société démocratique [DTP] et du Parti de la liberté et de la solidarité [ODP] ont essayé à plusieurs reprises d’appeler le gouverneur, le ministre de la Justice et le ministre de l’Intérieur, mais ceux-ci refusèrent de leur parler. » Ferhat Tunc, un chanteur engagé bien connu, a dit, « A un moment donné, dans le bâtiment [DISK], j’ai cru qu’ils allaient créer un incendie et nous faire périr. »

Après que le gouvernement AKP ait interdit la manifestation sur la place Taksim, la Confédération des syndicats turcs (Turk-Is) a promis de mobiliser jusqu’à 500 000 personnes au mépris de l’interdiction officielle. Mais ensuite, ils publièrent des communiqués contradictoires quant à leur position face aux protestations. En fin de compte, ils firent marche arrière en disant qu’ils ne soutiendraient pas la manifestation, une capitulation saluée par le ministre du Travail comme une preuve de « bon sens ».

Un résumé des enregistrements télévisés des événements ainsi que des photos publiées dans les quotidiens montrent que le but de la police n’a pas été de disperser la foule, mais d’attaquer brutalement les manifestants. Ceci est à peine surprenant, vu que l’écrasante majorité de la police turque est composée d’éléments islamistes droitiers et fascistes.

La grande majorité des médias bourgeois, à l’exception d’organes de presse islamistes, a critiqué et dans la plupart des cas condamné le gouvernement AKP ainsi que le gouverneur et le service de police d’Istanbul pour avoir employé une force excessive contre les manifestants. Ils ont signalé que le gouvernement AKP redoutait le rassemblement d’une masse de gens dans le centre d’Istanbul et ils ont condamné la dérive islamiste-conservatrice régnant dans le pays.

Les soi-disant médias laïques ont saisi cette occasion pour renforcer leur campagne continue à l’encontre du gouvernement AKP et qui a dernièrement atteint un point culminant avec une action en justice intentée dans le but d’une éventuelle interdiction du parti. Au cours de ces trois dernières décennies, les manifestations du 1er mai à Istanbul ont été marquées par un recours disproportionné à la force de la part de la police. Durant cette période, ces mêmes organes de presse ont défendu cyniquement la police. En fait, ils ne sont pas moins hypocrites que le gouvernement islamiste et ses partisans.

Certains commentateurs se sont demandés pourquoi l’AKP ne défendait pas les droits démocratiques dans des conditions où il est lui-même menacé d’interdiction. La raison est évidente et simple :

La brutalité des attaques du gouvernement AKP contre la classe ouvrière montre qu’il n’y a pas de différence majeure entre ce parti et ses adversaires au sein de l’establishment kémaliste quand il s’agit de maintenir l’Etat bourgeois et de faire respecter les exigences du capital international. Il y a peu, Erdogan a loué l’âge de départ à la retraite et a réduit les parts patronales de cotisations à la sécurité sociale.

L’attaque brutale des manifestants du 1er mai révèle le véritable caractère de classe de l’AKP qui opère comme un parti du patronat et qui est organiquement hostile aux intérêts des pauvres et des masses laborieuses en Turquie.

(Article original anglais paru le 5 mai 2008)


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