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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

Afghanistan : élection à la pointe du fusil

Par James Cogan
22 août 2009

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Sous tous les aspects, l’élection présidentielle en Afghanistan est une mascarade. Elle a lieu alors que se poursuit l’occupation militaire étrangère, qui tente de consolider un gouvernement fantoche reconnu pour son non respect des droits de l’homme, sa corruption et son incapacité à satisfaire les besoins fondamentaux de la très grande majorité de la population. 

Le président sortant et favori, Hamid Karzaï, qui fut installé au pouvoir en 2002 par les Etats-Unis, est largement détesté par le peuple afghan. Quiconque s’oppose à l’occupation américaine et de l’OTAN est exclu de la liste des principaux candidats, même si une forte majorité de la population, particulièrement dans le sud de la région pachtoune où l’influence des talibans est marquée, s’oppose à cette occupation. Le principal rival de Karzaï et ancien ministre des Affaires étrangères, Abdoullah Abdoullah, a été porte-parole pour les milices de l’Alliance du Nord qui avaient aidé les Etats-Unis à renverser les talibans.

Malgré l’augmentation du nombre de soldats américains et de l’OTAN, les talibans et leurs alliés dominent de larges étendues de l’est et du sud de l’Afghanistan et appellent à un boycott des élections. Dans au moins 60 pour cent du pays, les bureaux de scrutin risquent d’être attaqués. Environ 440 des 7700 bureaux ne seront pas ouverts du tout, car ils ne peuvent être protégés. Quelque 100 000 soldats étrangers et 180 000 membres de l’armée et de la police du gouvernement afghan sont déployés pour assurer la sécurité lors du vote.

Les talibans et d’autres groupes d’insurgés, comme le mouvement Hezb-e-Islami de Gulbuddin Hekmatyar, intensifient leurs efforts pour chasser les Etats-Unis et l’OTAN du pays et renverser le gouvernement pro-américain. Tous les principaux candidats présidentiels promettent des pourparlers de paix et parlent même de partage de pouvoir avec les insurgés, mais les talibans et Hekmatyar, leur appui se développant, ont déclaré qu’ils n’allaient pas entamer de pourparlers sous l’occupation étrangère.

Pour démontrer leur force, les insurgés ont mené au cours de la dernière semaine des attaques remarquées contre les centres névralgiques de l’occupation. Le 15 août, un véhicule piégé a causé une importante explosion aux quartiers généraux de l’OTAN et à l’ambassade américaine à Kaboul. Mardi, des combattants talibans ont réussi à se positionner à distance du palais présidentiel situé au cœur de la capitale pour le bombarder de tirs de mortiers.  

De nombreuses autres attaques ont été portées ce mois-ci contre les troupes américaines et étrangères, les forces de sécurité afghanes, les candidats à l’élection et les officiels gouvernementaux, y compris dans les provinces du nord du pays où l’on croyait qu’il n’y avait pas d’insurgés talibans. Déjà, le nombre de victimes américaines et de l’OTAN pour le mois d’août a atteint 50, après avoir atteint le total record de 75 décès en juillet. Chaque mois, au moins 150 soldats et policiers du gouvernement sont aussi tués ; les chiffres officiels sont toutefois rarement rendus publics.   

On s’attend à ce que le taux de participation soit très bas au sud et à l’est. Un juge afghan de la province de l’Ourouzgan a affirmé à McClatchy News : « Seulement 10 à 20 pour cent des gens pourront voter. Comment peut-on parler d’élection transparente lorsque 80 pour cent des gens ne peuvent voter ? »

Les Etats-Unis vont sans aucun doute jeter le blâme sur la violence des talibans. Mais huit années d’attaques aériennes et d’assauts terrestres systématiques ainsi que des milliers de détentions arbitraires ont généré une profonde hostilité à l’occupation et à ses collaborateurs afghans.

L’invasion américaine a essentiellement ramené au pouvoir l’Alliance du Nord (le groupement de seigneurs de guerre qui furent renversés par les talibans en 1996). Les seuls nouveaux visages sont un regroupement d’hommes d’affaires cupides émigrés qui sont revenus des Etats-Unis et de l’Europe pour profiter des projets d’« aide » et de « reconstruction » de plusieurs milliards de dollars.

Dans les provinces du centre et du nord, ce sont principalement les seigneurs de guerre tadjiks, uzbeks et hazaris qui décideront de l’issue de l’élection. On s’attend à ce que Karzaï soit le gagnant dans ces régions. Ses deux candidats à la vice-présidence ainsi que d’autres supporteurs se recrutent parmi les plus importants membres de l’alliance du Nord. Il a aussi l’appui de nombreux chefs pachtounes opposés aux taliban du sud du pays, y compris son frère, Ahmed Wali Karzaï, que l’on soupçonne d’organiser la plus grande partie du trafic de l’opium et de l’héroïne hors de la province de Kandahar.

Même  l’administration Obama a dû admettre que le résultat de l’élection sera terni par la fraude électorale généralisée, principalement par les responsables électoraux nommés par Karzaï lui-même. On croit qu’il y a au moins 3 millions de cartes d’électeur frauduleuses ou en double pour un total de 17 millions d’électeurs. La BBC a rapporté cette semaine que ses journalistes masquant leur véritable identité n’ont eu aucune difficulté à se procurer mille cartes d’électeurs dans les rues de Kaboul, au coût de 10 $ chacune.

Si Karzaï n’obtenait pas 50 pour cent des voix, un second tour serait alors nécessaire le confronta avec le deuxième candidat le plus populaire. Le plus récent sondage réalisé par l’Institut républicain international des Etats-Unis prédisait que Karzaï obtiendrait 44 pour cent des voix contre 26 pour cent pour son plus proche rival, Abdoullah Abdoullah. Deux autres candidats  importants, Ashraf Ghani et Ramazan Bashardost n’obtenaient chacun pas plus de 10 pour cent des voix.

Le caractère frauduleux du sondage est montré par l’intervention ouverte de l’administration Obama dans le processus électoral. Malgré qu’il ait loyalement servi les forces d’occupation dirigées par les Américains, Karzaï est de plus en plus critiqué aux Etats-Unis à cause de la corruption de son gouvernement et du peu de soutien dont il jouit auprès des Afghans. Les critiques timides des frappes aériennes  par Karzaï ont mis l’état-major américain en colère. Malgré la prétention à la neutralité de Washington, l’ambassadeur américain Karl Eikenberry a participé à un événement public plus tôt cette année aux côtés de deux rivaux de Karzaï.

La Maison-Blanche a aussi signalé son mécontentement envers Karzaï en condamnant publiquement le retour en Afghanistan samedi dernier de l’homme fort d’origine uzbek, Abdul Rashid Dostum, un des seigneurs de guerre les plus brutaux de la période d’avant les talibans et un allié essentiel des Américains lors de l’invasion du pays en 2001. L’an dernier, Dostum a été pressé de quitter volontairement le pays pour la Turquie après qu’il ait assassiné un de ses adversaires politiques. De retour au pays à l’invitation de Karzaï, Dostum a immédiatement appelé pour la réélection du président sortant.

L’ambassade américaine a publié une déclaration hypocrite déclarant que Dostum confrontait « des questions quant à sa culpabilité pour des violations des droits de l’homme en masse ». L’accusation ne porte pas sur ses crimes de guerre commis durant les années 1990, mais au meurtre de masse de prisonniers talibans capturés par son Alliance du Nord dans Kunduz en 2001. On ne mentionne pas de l’implication d’agents de la CIA et des Forces spéciales américaines dans un massacre de la même espèce à Mazar-i-Sharif.

Les Etats-Unis et leurs alliés semblent vouloir empêcher Karzaï de gagner dès  le premier tour. L’ambassadeur britannique en Afghanistan, David Kilcullen, un des principaux conseillers de l’état-major américain, a décrit Karzaï dans des termes très durs plus tôt ce mois et l’a comparé au président du Vietnam Sud Ngo Dinh Diem que l’administration Kennedy a fait assassiner en 1963.

Washington va discrètement de l’avant avec son plan limiter autant que possible les pouvoirs du président en installant un « officier exécutif en chef » qui s’occupera de gérer le gouvernement afghan dans son quotidien. Parmi les candidats envisagés pour remplacer Karzaï, on trouve Ashraf Ghani qui a travaillé à la politique étrangère pour le Brookings Institute, la Banque mondiale et les Nations unies.

Une fois l’élection terminée, l’administration Obama et le Pentagone vont aller de l’avant avec leurs plans pour intensifier la guerre. Des dizaines de milliers de soldats supplémentaires ont déjà été envoyés en Afghanistan et les commandants américains se préparent à demander qu’encore plus de soldats soient déployés en Afghanistan pour tuer et se faire tuer dans cette guerre néo-coloniale et brutale.

(Article original anglais paru le 20 août 2009)

 


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