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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le gouvernement allemand envisage l’insolvabilité d’Opel

Par Dietmar Henning
4 août 2009

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Il y a deux mois déjà, les syndicats allemands, les comités d’entreprise et le gouvernement fédéral avaient annoncé le « sauvetage » d’Opel, General Motors Europe (GME), sur la base d’un soi-disant protocole d’accord (« Memorandum of Understanding » soumis par le groupe Magna. Dans le même temps, le WSWS avait qualifié l’ensemble du document non contraignant d’« importante manœuvre de diversion » destinée à empêcher une révolte des travailleurs.

Le gouvernement de coalition de Merkel est décidé à donner l’impression d’être occupé à trouver une « solution socialement compatible » pour Opel, du moins jusqu’en septembre, date des élections législatives. Entre-temps, toutefois, il devient clair que le gouvernement avait déterminé dès le début qu’il allait laisser aller l’entreprise automobile à la faillite.

Une discussion projetée lundi dernier entre les patrons de GM, les représentants du gouvernement et les deux investisseurs dans Opel restants n’eut pas lieu. Après que l’un des postulants, l’entreprise chinoise BAIC, se fut retiré la semaine passée de la course, deux autres postulants restaient en lice : l’équipementier austro-canadien Magna avec ses partenaires russes, le constructeur automobile russe GAZ et la banque russe Sberbank qui est entre les mains de l’Etat, ainsi que la holding financière belge RHJ International (RHJI).

Jusqu’à tout dernièrement, le gouvernement allemand et les gouvernements des pays où sont implantés des usines Opel, s’étaient publiquement déclarés être en faveur d’une reprise par Magna, tandis que les négociateurs de GM avaient préconisé RHJI. La semaine dernière des signes apparaissaient cependant selon lesquels le gouvernement allemand penchait publiquement en faveur de la solution proposée par le ministre fédéral de l’Economie et de la Technologie, Theodor zu Guttenberg (Union chrétienne-sociale, CSU) qui avait affirmé dès le départ que l’insolvabilité d’Opel était la meilleure solution.

Les intentions réelles du gouvernement de Berlin sont révélées par le fait qu’il a choisi l’ancien PDG de l’équipementier Continental, Manfred Wennemer, pour le représenter au sein du trust, l’organisme allemand chargé d’administrer temporairement Opel, et qui présentement détient 65 pour cent d’Opel Europe (GM détenant les 35 pour cent restants). Wennemer s’était forgé chez Continental la réputation d’être un chasseur de coûts intransigeant aux dépens des salariés en délocalisant des milliers d’emplois vers des pays à bas salaires et en exerçant un chantage sur les autres salariés. Il a également imposé la semaine de 42-43 heures sans compensation de salaire.

Vendredi dernier, le journal Handelsblatt, avait rapporté que lors des premiers entretiens avec la direction de GM, Wennemer avait proposé une insolvabilité planifiée pour Opel pour ensuite redémarrer avec l’aide de l’Etat. D’après le même article, le conseiller d’entreprise Dirk Pfeil (Parti libéral démocrate, FDP), qui siège au conseil d’administration du trust en tant que représentant des quatre Länder où des sites d’Opel sont implantés, plaide en faveur de la vente de l’entreprise à RHJI.

Pfeil entretient d’étroites relations avec le directeur exécutif de RHJI, Leonhard Fischer, un ancien membre du directoire de la Dresdner Bank et une personnalité bien connue dans le monde de la finance allemand. Il avait débuté sa carrière à Francfort dans la banque d’affaires américaine JP Morgan, puis occupa un poste de haut rang à la Dresdner Bank pour ensuite rejoindre le Credit Suisse Group. Au début de 2007, il prenait la direction de RHJ International.

Fischer et le RHJI sont avant tout intéressés à obtenir autant de fonds publics que possible pour GM-Europe. A la question de savoir pourquoi il était tellement intéressé par Opel, Fischer avait répondu, « En raison de la répartition asymétrique des risques, » c’est-à-dire, le risque majeur du sauvetage d’Opel est porté par l’Etat.

Samedi dernier, le conseil d’administration du trust d’Opel avait déclaré qu’aucune décision finale n’avait été prise. « A ce jour, les négociateurs de General Motors n’avaient pas réussi à soumettre ni une recommandation ni une proposition au trust de l’entreprise. » En plus de Pfeil et de Wennemer, deux représentants de GM font partie du conseil d’administration du trust ainsi que le président de la Chambre américaine de Commerce en Allemagne, Fred Irwin.

Il y a quelques mois toutefois, Reuters avait rapporté que le cabinet d’avocats d’affaires Clifford Chance était en train de préparer le plan d’insolvabilité. Selon le milieu des affaires, l’administrateur judiciaire Jobst Wellensiek, conseillerait aussi la direction d’Opel.

Toujours samedi, l’édition en ligne du Financial Times Deutschland avait rapporté qu’une étude réalisée par la banque d’affaires franco-américaine Lazard pour le compte du gouvernement avait conclu qu’Opel et sa marque sœur britannique Vauxhall étaient trop petits pour survivre en tant que groupes automobiles indépendants. La masse critique nécessaire à un constructeur automobile indépendant était « à peine réalisable. » Le rapport « strictement confidentiel » servira de base à Wennemer et Pfeil lors de leurs négociations avec General Motors.

Un plan d’insolvabilité entre en jeu dans presque un pour cent des cas d’insolvabilité, selon l’Institut de la recherche sur les PME de Bonn, mais aucune référence ne fut faite aux conséquences que cela a pour les salariés concernés. En effet, le document élaboré par Lazard ne fait que quatre pages.

Tout comme dans le cas de GM aux Etats-Unis, la faillite d’Opel Europe touchera les salariés le plus durement. « Le plan d’insolvabilité présente beaucoup d’avantages, » écrit le Financial Times Deutschland : « En moyenne, 60 pour cent des emplois seraient maintenus au sein de l’entreprise en faillite. » De plus, le processus dans le cas d’une insolvabilité planifiée est bien plus rapide qu’une insolvabilité normale, et les créanciers recevraient presque deux fois plus d’argent. « En principe en Allemagne les exigences des créanciers doivent être satisfaites en priorité selon la marge de solvabilité de l’entreprise. »

La réaction du syndicat IG Metall et des comités d’entreprise

Les comités d’entreprise d’Opel (la base syndicale) et l’IG Metall, le syndicat des travailleurs de l’industrie métallurgique, ont réagi fébrilement aux développements survenus la semaine passée. Dans une résolution mentionnée samedi dernier dans le Frankfurter Rundschau, les comités d’entreprise ont lancé un appel au gouvernement fédéral et aux gouvernements des Länder concernés de rester conséquent « et de rejeter la reprise d’Opel par RHJI. » Les comités d’entreprise n’étaient pas disposés à faire le moindre sacrifice pour RHJI, a précisé l’article.

En fait, les comités d’entreprise ont déjà fait de multiples concessions. Le comité d’entreprise du groupe et le syndicat IG Metall ont sacrifié des augmentations de salaire et des primes de vacances déjà convenues bien que la question du repreneur reste encore ouverte. A Bochum, les travailleurs ont refusé de sacrifier la prime de vacances après la concession déjà faite par l’IG Metall d’annuler l’augmentation de salaire. Un travailleur de Bochum a dit au WSWS, « Je ne veux pas financer la perte de mon emploi avec mon propre argent. »

S’ajoute à ceci le fait que les comités d’entreprise ont déjà accepté des « sacrifices » aux dépens des travailleurs s’élevant à un montant allant de 1 à 1,5 milliard d’euros pour permettre aux comités d’entreprise de mettre sur pied leur propre société de capitaux. (Voir « Les syndicats divisent systématiquement les travailleurs chez Opel et GM-Europe. »)

Cette société de capitaux à gestion participative qui devrait plutôt s’appeler « société pour l’enrichissement des comités d’entreprise » est cependant mise en danger en cas d’insolvabilité. C’est pourquoi, les comités d’entreprise s’élèvent contre l’insolvabilité mais pas en raison de scrupules quant au sort des travailleurs.

Klaus Franz, le président du comité d’entreprise du groupe et le vice-président du conseil de surveillance d’Opel, a réagi furieusement au rapport publié par Lazard qui affirme qu’il n’y a pas d’avenir pour Opel et Vauxhall. Samedi, il a dit aux médias que le ministre de l’Economie cherchait délibérément à provoquer une insolvabilité. Puis, lundi les comités d’entreprise d’Opel ont demandé de bénéficier d’une participation plus grande dans la recherche d’investisseurs pour le constructeur automobile.

Les deux investisseurs restants pour Opel exigent une importante réduction du personnel. Des milliers d’emplois devraient disparaître, les salaires réduits et les primes de vacances et de Noël annulées. Dans la presse il est fait état d’une « contribution d’assainissement » versée par les salariés et totalisant entre 1,25 et 1,5 milliard d’euros sur les cinq prochaines années.

Après une réunion extraordinaire lundi, le comité d’entreprise du groupe a déclaré, « Sans notre participation dans le processus de prise de décision, nous refusons de verser des contributions dans l’entreprise, indépendamment de l’investisseur retenu par GM. » Autrement dit, ceci signifie que si les comités d’entreprise et l’IG Metall sont invités à participer aux négociations avec les investisseurs, ils sont tout à fait disposés à ce que les travailleurs versent une «contribution d’assainissement. »

Les comités d’entreprise et les syndicats ne cherchent qu’à rehausser leur salaire de honte. Ils ne sont prêts à signer des réductions de salaire et le démantèlement des acquis sociaux que s’il leur est attribué un leur rôle plus important dans l’entreprise.

Ils réclament aussi que la marque Opel devienne une marque mondiale sur tous les marchés du monde, ce que GM aurait empêché jusque-là. Ils réclament que l’influence exercée par GM soit réduite et qu’il soit refusé à l’ancien quartier général du groupe à Detroit tout droit de préemption ou de rachat et que les filiales européennes Opel et Vauxhall deviennent des entreprises indépendantes à part entière. Dans le même temps, la coopération avec la firme américaine devrait se poursuivre en ce qui concerne le développement et les ventes. En d’autres termes, Opel souhaiterait réaliser ses propres bénéfices sur les marchés tout en tirant profit de la coopération de GM.

Afin de pouvoir imposer la réduction des salaires et des acquis sociaux, les comités d’entreprise exigent une « garantie jusqu’en 2014 pour assurer l’avenir des actuelles usines d’Opel et de Vauxhall. » Tout le monde sait qu’une telle garantie ne vaut pas le papier sur lequel elle est écrite. Selon la déclaration des comités d’entreprise, « des alternatives » doivent être trouvées pour les usines d’Anvers (Belgique), d’Eisenach (Allemagne de l’Est), de Luton (Grande-Bretagne) ainsi que pour les usines Powertrain de Bochum, Rüsselsheim, Kaiserslautern et de Tychy (Pologne), toutes menacées de fermeture.

Les comités d’entreprise et l’IG Metall ont fait comprendre le véritable objectif de leurs exigences : le futur investisseur doit « faire des efforts substantiels du côté du revenu et du chiffre d’affaires… Il n’est pas acceptable que le potentiel considérable d’Opel ne soit pas mis en valeur tandis que dans le même temps des réductions des salaires et des traitements des employés sont exigées », peut-on lire dans la déclaration. En d’autres termes : les réductions de salaires et de traitements seront acceptées si le chiffre d’affaires, et les profits, s’améliorent.

Avec l’intéressement aux bénéfices issu de leur société de capitaux à gestion participative en vue, les comités d’entreprise et les fonctionnaires d’IG Metall plaident déjà en faveur de gains élevés, tout à l’image de la direction du groupe.

Dans le but de concrétiser une telle société de capitaux à gestion participative, les comités d’entreprise et l’IG Metall sont disposés à accepter des réductions sans pareil. La chose qu’ils redoutent plus que l’insolvabilité d’Opel c’est une lutte commune des travailleurs de l’automobile en Europe, aux Etats-Unis et de par le monde.

Ils sont même prêts à accepter une reprise par RHJ International qu’ils avaient rejetée avec véhémence samedi par le biais du Frankfurter Rundschau. Le responsable régional de l’IG Metall et membre du conseil de surveillance d’Opel, Armin Schild, a dit au Frankfurter Allemeine Zeitung qu’une reprise commune d’Opel par RHJI et Magna était « concevable… j’ai toujours dit qu’une combinaison entre un investisseur financier et un investisseur stratégique pourrait avoir du sens. »

(Article original paru le 30 juillet 2009)


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