Le discours prononcé la semaine dernière par le président américain Obama
et présentant le déploiement de 30.000 soldats supplémentaires en
Afghanistan comme le prélude à un retrait des troupes fut une prestation
cynique faite de double langage, de faux-fuyants et de falsifications.
Ce nouveau déploiement de troupes représente une forte escalade dans une
guerre impopulaire et conduira à la mort d’innombrables milliers d’Afghans
et de Pakistanais et à une hausse significative des victimes américaines.
Nombreux en effet sont les cadets de l’académie militaire de West Point
réunis en assemblée pour entendre le président qui seront envoyés en
Afghanistan pour combattre dans une guerre rejetée par la majorité des
Américains.
Le fait qu’Obama invoque les attentats du 11 septembre 2001 pour pouvoir
présenter la guerre comme une défense vis-à-vis du terrorisme est une
fraude. La véritable raison de l’occupation de l’Afghanistan – discutée en
long et en large parmi ceux qui font la politique étrangère -- est de
maintenir, dans l’intérêt de la stratégie globale de l’impérialisme
américain, une position dominante dans une Asie centrale riche en pétrole
Ce mois-ci marque le trentième anniversaire de l’invasion soviétique de
l’Afghanistan que le président américain de l’époque, Jimmy Carter, a
dénoncé comme un acte illégal d’agression internationale. Ce qui était peu
connu alors, c’est que les Etats-Unis ont délibérément incité l’Union
soviétique à se lancer dans cette aventure militaire en finançant et en
armant la guérilla des moudjahidines opposés au régime pro soviétique de
Kaboul. Parmi ceux que la CIA employaient alors il y avait Oussama Ben Laden
et d’actuels dirigeants des talibans.
Le résultat de cette politique impérialiste, dont la paternité revient à
Zbigniew Brzezinski, le conseiller à la Sécurité nationale d’alors et
l’actuel conseiller en politique étrangère d’Obama, a été trois décennies de
guerre, de guerre civile et de destruction sociale. L’administration Obama
est en train d’intensifier cette entreprise coloniale.
On ne peut accorder aucune foi aux histoires d’Obama selon lesquelles on
entamerait un retrait des troupes au mois de Juillet 2011. D’abord cette
prétendue date de retrait est flanquée de références aux « conditions sur le
terrain » et de plus, elle est suivie de formules disant que la guerre en
Afghanistan n’est que l’une de nombreuses interventions militaires à venir.
« La lutte contre la violence extrémiste ne se terminera pas rapidement »
a dit Obama « et elle s’étend bien au delà de l’Afghanistan et du
Pakistan ». Il appela cette lutte « un défi permanent » et poursuivit en
parlant de « régions d’où l’ordre était absent » et « d’ennemis imprécis »,
mentionnant ici la Somalie et leYémen.
En réalité la durée de l’entreprise coloniale américaine en Asie centrale
est indéfinie. Le Washington Post de lundi citait ainsi un
responsable américain : « Notre jeu est de les convaincre [l’armée
pakistanaise] que notre engagement en Afghanistan et dans la région est de
longue durée. On ne va pas faire nos valises et les abandonner dès qu’on en
aura terminé. »
L’escalade militaire d’Obama, loin de signifier une fin rapide de la
guerre, crée au contraire les conditions de conflagrations militaires plus
grandes et plus nombreuses. L’apport de troupes supplémentaires aggravera
encore les tensions dans la région et au-delà – tensions entre l’Inde et le
Pakistan, entre l’Inde et la Chine, entre l’Iran et les Etats-Unis, entre la
Russie et la Chine et les Etats-Unis.
Le plus gros mensonge est peut-être cette affirmation que la guerre est
menée dans le but de protéger le peuple afghan. En fait, celui-ci s’oppose
dans son immense majorité à l’occupation étrangère conduite par les
Etats-Unis.
La décision d’Obama signifie que 2010 sera une année où la mort et la
destruction redoubleront, tant en Afghanistan qu’au Pakistan. Un aspect
central du nouveau déploiement de troupes américaines est le
« verrouillage » de Kandahar, un centre d’opposition insurrectionnelle à
l’occupation des Etats-Unis et de l’OTAN. Cela ne peut signifier qu’une
campagne pour terroriser autant que possible la population locale et pour
tuer autant d’insurgés et d’Afghans ordinaires soupçonnés de sympathiser
avec la résistance que possible.
Les Etats-Unis menacent en même temps de lancer des opérations de combat
en territoire Pakistanais en plus des attaques menées à l’aide de missiles
lancés à partir de drones téléguidés et qui tuent déjà des centaines de
civils pakistanais. Rapportant la récente visite à Islamabad du général en
retraite James L. Jones, conseiller à la Sécurité nationale d’Obama, le
Washington Post cite un responsable américain disant : « si le Pakistan
ne peut pas produire les résultats désirés, il [Jones] a averti que les
Etats-Unis pourraient être forcés d’utiliser tous les moyens à leur
disposition pour battre les insurgés établis le long de la frontière
occidentale et méridionale avec l’Afghanistan. »
Pour les peuples d’Asie centrale le prix à payer est incalculable. Quant
au peuple américain, il doit payer la politique de guerre de l’élite
dirigeante des Etats-Unis par la perte de milliers de vies supplémentaires,
le gaspillage de billions de dollars en ressources, par des attaques sans
précédent sur les services sociaux et par une érosion supplémentaire de ses
libertés civiles.
La contradiction la plus criante dans un discours qui en était rempli a
été la tentative d’Obama de dissocier la guerre en Afghanistan de celle en
Irak. « Je m’oppose à la guerre en Irak, dit il, précisément parce que je
crois que nous devons montrer de la retenue dans l’usage de la force
militaire… ». Mais il fut incapable de montrer une quelconque véritable
différence entre cette entreprise criminelle et sa guerre en Afghanistan.
L’escalade militaire d’Obama est une violation flagrante de plus de la
volonté du peuple américain. Election après élection celui-ci a été aux
urnes pour exprimer son hostilité aux guerres en Irak et en Afghanistan. A
chaque fois sa volonté a été ignorée et ces guerres ont été étendues.
Obama est parvenu à la présidence en faisant une campagne d’opposant à la
guerre en Irak et en faisant appel à l’opposition populaire au militarisme.
Une fois au gouvernement, il a rapidement augmenté de 21.000 soldats
supplémentaires les troupes déployées en Afghanistan, tout en reniant sa
promesse d’un retrait rapide d’Irak. A présent, il porte le nombre total de
soldats en Afghanistan à 100.000, plus de deux fois ce que Bush y avait
envoyé.
Dans sa politique militaire et dans sa politique étrangère tout comme
dans sa politique économique au bénéfice de Wall Street et dans son attaque
des droits démocratiques, Obama continue et intensifie le programme
réactionnaire de Bush. La décision d’étendre la guerre en Asie centrale
démasque de façon irrécusable le système politique américain. Les deux
partis, républicain et démocrate, et le Congrès sont des instruments de
l’oligarchie financière régnante dont ils défendent les intérêts, en
opposition aux besoins et aux vues de la classe ouvrière, c'est-à-dire de la
grande majorité de la population.
L’alignement international des puissances impérialistes derrière la
guerre menée par les Etats-Unis en Asie centrale a une immense portée. La
participation de la Grande-Bretagne, de la France et d’autres puissances à
cette guerre constitue un assaut mené au niveau international et destiné à
soumettre toute cette région du globe aux intérêts impérialistes. Chacun de
ces gouvernements agit en violation des sentiments anti-guerre de sa
population.
Cela met en évidence le fait que la lutte contre la guerre requiert de la
part de la classe ouvrière une lutte internationale contre l’impérialisme
mondial et contre le système capitaliste qui est la cause première de la
guerre.
Aux Etats-Unis, la lutte contre la guerre ne peut être menée que comme
une lutte contre le gouvernement Obama, le système politique bipartite et
l’oligarchie financière américaine. Elle doit se fonder sur un programme
socialiste et internationaliste et sur la construction d’une nouvelle
direction de la classe ouvrière afin d’intégrer la lutte contre la guerre,
la lutte contre le chômage et la pauvreté et la lutte contre l’attaque des
libertés civiles dans une lutte politique indépendante pour un gouvernement
ouvrier.
C’est là le programme du Parti de l’égalité socialiste et du Comité
international de la Quatrième Internationale. Tous ceux et celles qui
s’opposent à la guerre impérialiste devraient prendre la décision de
rejoindre le SEP en tant que nouvelle direction révolutionnaire de la classe
ouvrière.