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WSWS : Nouvelles et analyses : Economie mondiale

Le sommet de Copenhague sur le changement climatique se termine dans la discorde

Par Patrick Martin
24 décembre 2009

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Le sommet sur le changement climatique organisé à Copenhague par les Nations unies se dirigeait tant bien que mal vers son terme vendredi soir, les représentants des principales puissances mondiales espérant sauver une courte déclaration de principes, sans un seul engagement contraignant, avant de clôturer ces deux semaines de conférence.

Le président américain Barack Obama a déclaré lors d'une conférence de presse à minuit que des « avancées significatives et inédites » avaient été accomplies dans les dernières minutes des discussions entre les États-Unis, la Chine, l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud, mais a annoncé qu'il devait partir avant qu'un accord final n'intervienne en raison d'une tempête de neige sur Washington DC.

Obama a admis qu'il y avait une « impasse fondamentale concernant les perspectives » entre les grands pays industrialisés comme les États-Unis, le Japon et l'Europe de l'Ouest d'un côté et les pays pauvres d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine de l'autre. Mais il a affirmé que la conférence « va nous aider à commencer à prendre nos responsabilités pour laisser à nos enfants et petits-enfants une planète plus propre ».

L'accord entre les États-Unis, la Chine, le Brésil, l'Inde et l'Afrique du Sud se borne à une déclaration sans effets concernant l'objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour 2050. Il abandonne toute référence à l'échéance de 2010 pour un accord légalement contraignant sur le climat, ce qui avait été la clef de voûte des versions antérieures, et s'en remet à une promesse de poursuivre les discussions lorsque la conférence se réunira à nouveau à Mexico l'année prochaine, ainsi que d'avoir réalisé des progrès pour 2016.

Alors qu'un document de travail proposait plusieurs objectifs quantifiés, comme une réduction de 80 pour cent des émissions pour 2050, par rapport au niveau de 1990, ces déclarations ne sont que des aspirations, sans objectifs réels pour chaque pays ou groupe de pays, et aucun mécanisme concret pour en surveiller l'application ou sanctionner les écarts. L'objectif de limiter l'augmentation de la température mondiale à 2 °C a été largement critiqué par les militants défendant l'environnement et les scientifiques, car il implique en réalité la désertification d'une grande partie de l'Afrique. Même cette « limite » n'est mentionnée qu'en tant que souhait, une admission du consensus scientifique, mais ne se traduit par aucune politique spécifique pour l'atteindre.

Tout en affirmant avoir réalisé des progrès, Obama a mis l'accent sur le fait que les États-Unis « ne seront pas légalement liés par ce qui s'est passé ici aujourd'hui », s'inclinant devant les critiques de droite dans son pays. Il a également admis que quelle que soit la résolution finalement adoptée par les délégués à la conférence, elle ne serait pas une réponse suffisante à la crise causée par le réchauffement de la planète.

Il est assez extraordinaire qu'aucun pays européen, ni l'Union européenne elle-même, n'ait été représenté dans les discussions privées, alors que le Danemark, le pays hôte, est membre de l'UE, et que les représentants de l'UE ont joué un rôle de premier plan dans l'aspect public de la conférence. Étant donné le rôle énorme des pays de l'UE dans l'activité économique mondiale, et dans l'émission de gaz à effet de serre, leur exclusion démontre que l'accord salué par Obama est quasiment insignifiant.

La conférence de Copenhague avait déjà entamé sa désintégration avant la fin des discussions privées à cinq membres. Le président russe Dmitri Medvedev était déjà rentré chez lui, et le Premier ministre japonais Yukio Hatoyama était en route pour l'aéroport.

Les réunions tendues et les manœuvres du dernier jour de la conférence ont été la preuve de deux données incontournables de la politique internationale du 21e siècle : la lutte de plus en plus intense entre les états capitalistes de toute la planète, dont les intérêts économiques divergents rendent toute réaction unifiée impossible contre la menace du réchauffement climatique ; et le déclin de la puissance de l'impérialisme américain en particulier, incapable d'imposer ses vues à Copenhague.

Ce n'était pourtant pas faute d'essayer. Après que la ministre des Affaires étrangères Hillary Clinton a fait miroiter un pot-de-vin de 100 milliards de dollars aux pays pauvres pour les écarter de leur alliance avec la Chine, l'Inde, le Brésil et quelques autres puissances en croissance rapide, Obama a enchaîné vendredi avec un discours qui mettait en avant le côté « mauvais flic » de l'interventionnisme américain.

Il n'a parlé qu'une dizaine de minutes, d'un ton impérieux, suintant d'une frustration évidente à l'égard de la Chine de l'Inde et d'un grand nombre des 130 pays pauvres groupés dans ce que l'on appelle le G-77 [créé en 1964, avec 77 membres à l'origine, à l'initiative de la Chine pour peser sur les négociations commerciales à l'ONU, ndt], lesquels insistaient sur le fait que les pays industrialisés doivent assumer l'entière responsabilité de la crise environnementale et accepter de réduire les émissions chez eux tout en apportant une aide financière à la reconversion des industries du Tiers-monde vers des technologies plus économes en énergie.

Un article de presse a dit d'Obama qu'il adoptait « le ton d'un professeur impatient dont les étudiants n'avaient pas rendu leur mémoire à la date fixée ». Le journal britannique Guardian a écrit : « Un Obama visiblement en colère est venu dire aux dirigeants mondiaux qu'ils étaient en retard pour arriver à un accord […], mais Obama n'a rien offert de nouveau – que ce soit sur les réductions d'émissions ou sur une éventuelle contribution américaine à un fonds climatique pour les pays pauvres. »

Le discours d'Obama a énervé une bonne partie des délégués, qui lui ont fait un accueil ostensiblement réservé.

Que ce soit avant ou après le discours d'Obama, la conférence a été le théâtre d'un échange de piques entre les États-Unis et la Chine. Selon le New York Times, peu après son arrivée à bord d'Air Force One, « Obama s'est rendu à une réunion improvisée avec un groupe de dirigeants de haut niveau représentants 20 pays et organisations. Wen Jiabao, premier ministre chinois, décida de ne pas se rendre à cette réunion, préférant y envoyer le vice-ministre des Affaires étrangères, He Yafei, une rebuffade qui fit bouillir les représentants américains et européens. »

Les représentants chinois se sont sentis humiliés à leur tour par le ton et le contenu du discours d'Obama. Déclarant à la conférence que le temps était venu d'« agir » et non plus de « parler », il n'a fait qu'exposer la position américaine, y compris l'exigence très controversée que la Chine et les autres pays acceptent le contrôle de leurs engagements sur les réductions d'émissions, et a demandé que la conférence l'adopte.

Il s'est moqué de l'opposition de la Chine – sans la nommer directement – à toute forme de vérification internationale de ses efforts pour atteindre les objectifs de réduction des émissions. La Chine considère que ce genre d'exigences américaines revient à demander une réduction du taux de croissance économique du pays, ce que Pékin considère comme une menace sur la stabilité du pays.

Lorsque Wen Jiabao est monté sur scène pour faire un discours au nom de la délégation chinoise, il a dénoncé les pays industrialisés pour leur incapacité à tenir les promesses faites à la conférence de Kyoto en 1997, dont le protocole officiel avait été rédigé par le gouvernement Clinton, mais jamais soumis au Congrès pour ratification. « Il est important d'honorer les engagements déjà passés et d'entreprendre des actions réelles », a-t-il dit dans un discours qui a été décrit comme « méfiant » dans les articles de presse.

Un dernier incident s'est déroulé vendredi dernier, lorsque les dirigeants chinois, indien et brésilien étaient en réunion privée et qu'Obama s'y est imposé en déclarant qu'il ne voulait pas qu'ils négocient en secret. Le représentant de l'Afrique du Sud, s'est également invité à cette réunion, ce qui a entraîné la soumission à la conférence d'un accord « de travail » à ratifier.

Les groupes environnementalistes ont condamné le discours d'Obama. Bill McKibben, militant sur le réchauffement climatique l'a qualifié d'ultimatum « à prendre ou à laisser ». Le groupe des Amis de la Terre a publié dans une déclaration : « Obama n'a pas seulement déçu ceux qui écoutaient son discours à la conférence de l'ONU, il a déçu le monde entier. »

Un porte-parole du World Developpement Movement a déclaré, « Il n'a montré aucune conscience de l'inégalité et de l'injustice qu'il y a dans le changement climatique. Si l'Amérique a vraiment fait un choix bien arrêté, c'est un choix qui condamne des centaines de millions de gens à subir les désastres du changement climatique. »

Dans un éditorial du Guardian vendredi, l'environnementaliste George Monibot a fait une comparaison très juste en décrivant les attitudes intéressées des représentants des grandes puissances industrielles. Faisant référence au partage colonial de l'Afrique à la fin du XIXe siècle, il a écrit, « C'est une ruée sur l'atmosphère comparable par son style et ses intentions à la ruée sur l'Afrique. À aucun moment l'injustice fondamentale du multilatéralisme n'a été prise en compte ou même simplement évoquée : les intérêts des Etats et les intérêts de la population mondiale ne sont pas les mêmes. Ils sont souvent diamétralement opposés. Dans ce cas, la plupart des pays riches et des pays en développement rapide ont cherché par l'intermédiaire de ces négociations à s'emparer de la plus grande part possible d'atmosphère – à mettre la main sur plus de droits à polluer que leurs rivaux. »

S'il est vrai que « les intérêts des Etats et les intérêts de la population mondiale » sont opposés, il faut aussi reconnaître que le système des États-nations ne peut pas être séparé du capitalisme, lequel s'est développé parallèlement et est conjoint au système des États-nations.

On ne peut s'attaquer au risque de dommages irréparables à l'environnement de la planète et à sa population qu'en menant une lutte pour mettre fin à la fois au capitalisme et au système d'Etats-nations, et établir une économie mondiale démocratique, scientifiquement organisée – c'est-à-dire socialiste.

(Article original paru le 19 décembre 2009)


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