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WSWS : Nouvelles et analyses : Canada

Trois morts lors du déneigement à Montréal : la sous-traitance en cause

Par Éric Marquis
9 février 2009

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Mardi dernier à Montréal, trois personnes ont perdu la vie après avoir été happées par des camions assignés aux opérations de déneigement. Ces décès sont liés au recours de la ville de Montréal à des sous-traitants qu’elle soumet à de fortes pressions. Ces derniers adoptent en retour des pratiques qui menacent la sécurité des citoyens et des camionneurs tandis que les autorités gouvernementales ferment les yeux.

Lors du premier accident, un couple de septuagénaires qui traversaient une intersection ont été écrasés sous les roues du camion qui leur a coupé la route. L’homme est mort sur le coup et le décès de la femme a été constaté par la suite à l’hôpital. Plus tard dans la même journée, une femme de 76 ans a été heurtée par un autre camion de déneigement dans des circonstances similaires. Dans les deux cas, les victimes avaient le droit de passage et priorité sur les véhicules. Les deux camionneurs impliqués dans les accidents, sous le choc, ont affirmé n’avoir jamais vu les personnes traverser la rue.

Ces trois morts s’ajoutent au décès d’une femme qui avait été heurtée en décembre dernier à Montréal par une niveleuse. Deux autres personnes étaient mortes en raison de travaux de déneigement en 2005. Dans tous ces accidents, ce sont des entrepreneurs privés mis sous contrats par la Ville de Montréal qui étaient impliqués.

Pour environ la moitié de ses opérations de déneigement, Montréal fait affaire avec des sous-traitants et l’autre moitié est réalisée par ses propres cols bleus. Le transport de la neige est toutefois presque entièrement géré par le privé. Alors que les cols bleus sont rémunérés à un taux horaire, la ville paye les sous-traitants au volume de neige ramassée.

François Pilon, propriétaire d’une entreprise de déneigement dans l’arrondissement Côte-des-Neiges, dit faire affaire avec des camionneurs indépendants qui ont leur propre camion. Ces derniers doivent souvent traiter avec plusieurs entrepreneurs pour obtenir un revenu suffisant et payer leur véhicule qui peut leur coûter de 2500 à 3000 dollars par mois. Les entrepreneurs peuvent se voir imposer des amendes par l’arrondissement s’ils ne complètent pas les opérations de déneigement assez vite.

Dans ce contexte, les camionneurs indépendants sont poussés à travailler un nombre déraisonnable d’heures, mettant potentiellement leur vie et celle des autres en danger. La loi qui limite le nombre d’heures de conduite admissible pour tout conducteur de véhicule lourd au Québec laisse presque toute latitude à l’exploitation la plus éhontée. Elle permet aux camionneurs d’enregistrer jusqu’à 70 heures de conduite par semaine et jusqu’à treize heures par jour. Et aux dires de plusieurs travailleurs, ces limites sont couramment transgressées dans le cas des opérations de déneigement.

Un camionneur privé a confié au Journal de Montréal sous le couvert de l’anonymat qu’il n’avait dormi que six heures en près de quatre jours. Les camionneurs profitent de leurs pauses et de leurs dîners pour dormir quelques minutes. Selon M. Pilon, il arrive que les conducteurs travaillent parfois 24 et même 36 heures de suite. Un contrôleur aurait affirmé qu’il n’est pas rare de retrouver des comprimés servant à rester éveillé sur les tableaux de bord des véhicules.

Le premier accident qui a enlevé la vie à deux personnes est survenu à 9h40. Le camionneur avait commencé son quart de travail à 20h la veille. Dans un autre accident qui s’est produit à Lévis près de la ville de Québec, un jeune camionneur est entré en collision avec un autre véhicule. Il en était à sa douzième heure de conduite consécutive.

La réponse du gouvernement à cette situation troublante est de réduire sa propre surveillance. Peu avant que ne surviennent les trois décès, le ministère des Transports du Québec s’apprêtait à émettre une directive qui aurait retiré aux contrôleurs routiers de la province le droit de contrôler les véhicules affectés au déglaçage et au ramassage de la neige. Ces contrôles, disait-on, « peuvent compromettre à l'occasion l'efficacité des opérations de déneigement » qui doivent « s'effectuer le plus rapidement possible pour assurer la sécurité du public ». Cette directive fut jetée aux poubelles après les morts tragiques de la semaine dernière.

La ville de Montréal affirme ne pas être prête à changer immédiatement ses pratiques et dit vouloir attendre les résultats d’une enquête publique. Le maire Gérald Tremblay s’est d’ailleurs montré plutôt méprisant face aux victimes de la semaine passée. Il a invité les piétons à se montrer prudents : « Assurez-vous de traverser aux intersections et d'avoir un contact visuel avec les chauffeurs. »

Ce n’est pas sans rappeler les propos de l’ancien responsable municipal Marcel Tremblay, le frère du maire, en réaction à la grogne populaire suscitée par le déneigement et le déglaçage inadéquats des trottoirs de Montréal. « Sans dépenser des fortunes », avait-il déclaré, « les gens peuvent avoir des crampons à neige ou à glace. Pourquoi ils n'en achètent pas ? »


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