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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France : les « gauchistes » opportunistes s'unissent à la CGT pour faire dérailler la lutte pour les emplois

Par Pierre Mabut et Antoine Lerougetel
29 septembre 2009

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Une manifestation de travailleurs de l'industrie automobile luttant contre les fermetures d'usine et les licenciements de masse représente l'exemple par excellence de la manière dont les syndicats, avec le soutien des opportunistes petits-bourgeois de Lutte ouvrière (LO) et du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) conduisent les travailleurs dans une impasse.


Banderole de Continental

La manifestation qui s'est tenue à Paris le 17 septembre a réuni quelque trois mille travailleurs de toute la France. La plupart sont engagés dans des luttes tenaces et dans certains cas désespérées pour la défense de leur emploi. En règle générale, ces luttes ont été trahies par les fédérations syndicales qui les ont isolées usine par usine et ont vendu les emplois contre de maigres indemnités de licenciement.

L'appel initial à manifester est venu de la branche CGT de l'entreprise de pneumatiques Goodyear d'Amiens où 817 travailleurs sont menacés de licenciement. La CGT (Confédération générale du travail), l'une des plus importantes confédérations syndicales françaises est proche du Parti communiste (PC.)

L'appel à la manifestation a reçu le soutien immédiat des travailleurs licenciés de l'entreprise de pneumatiques Continental de Clairoix. Six parmi eux ont écopé de peines de prison avec sursis de trois à cinq mois et des amendes pour avoir saccagé des bâtiments de la sous-préfecture en signe de protestation contre la fermeture de leur usine. Ils font appel de leur condamnation.

D'autres délégations de travailleurs présentes à la manifestation venaient des industries automobiles Peugeot et Renault, General Motors de Strasbourg, Ford à Blanquefort, Delphi, Wagon et des pneus Michelin (Montceau-les-Mines), Freescale (Toulouse), New Fabris et Molex.

Les travailleurs de New Fabris avaient menacé il y a quelques semaines de faire sauter leur usine et ont à présent accepté un plan de licenciement. Les travailleurs de Molex, après onze mois de lutte ont voté à contrecœur en faveur d'un plan négocié par la CGT et d'autres syndicats deux jours seulement avant la manifestation. L'accord comprend le licenciement de 283 travailleurs et une indemnité de licenciement d'un mois de salaire par année travaillée dans l'entreprise. Christian Estrosi, ministre de l'Industrie, qui a participé aux négociations chez Molex a qualifié ceci d’« issue positive ».

Une grande amertume est en train de se développer chez les travailleurs de l'industrie automobile face à l'abandon par les syndicats de la défense des emplois et des sites. A la fin de la manifestation parisienne, des personnes excédées ont fait irruption à la Bourse et couvert les murs de graffitis anticapitalistes. Pendant ce temps, les organisateurs de la marche donnaient la possibilité à ceux-là mêmes qui sabotent leur lutte de se présenter comme leurs défenseurs.

A l'invitation de la bureaucratie syndicale de Continental Clairoix et de Goodyear Amiens, des dirigeants des fédérations CGT de l'industrie automobile étaient présents à la manifestation parisienne ainsi que diverses personnalités des partis de « gauche » bourgeois. Parmi eux se trouvaient Cécile Duflot (Verts), Pierre Laurent (PC), Jean-Luc Mélenchon (ancien ministre du Parti socialiste et fondateur du Parti de Gauche) et Arnaud Montebourg, social-démocrate droitier.

Arlette Laguiller de Lutte ouvrière (LO) et Olivier Besancenot du NPA étaient bien en vue dans le cortège et leurs organisations bien représentées. Ils ont entrepris la tâche de contenir la colère accumulée des travailleurs envers les dirigeants syndicaux et de les maintenir en situation de subordination.

L'animosité s'est développée particulièrement contre Bernard Thibault, le dirigeant de la CGT, qui collabore ouvertement et quasiment au jour le jour avec le programme du président droitier Nicolas Sarkozy et qui consiste à faire payer à la classe ouvrière le prix de la crise économique. Il s'est opposé à toute mesure d'étendre au reste de la classe ouvrière.la lutte menée par les usines menacées.

Thibault qui s'est fait traité de « racaille » par le leader CGT de Clairoix a brillé par son absence à la manifestation. Il avait dit à un journaliste de Médiapart qu'il était pris ailleurs. Il avait ajouté : « Notre tâche est d’autant moins facile qu’on [les membres de la CGT] attend peut-être trop du syndicalisme. »

Les industries de l'automobile et de l'équipement automobile sont parmi les plus touchées par la récession. La CGT évalue les pertes d'emplois dans cette industrie à 150.000 depuis le début de la crise.

Les dirigeants des fédérations CGT de métallurgie et de chimie au niveau national et local, sous la pression de la base, essaient de se distancer de la direction confédérale. Mais en droite ligne avec la direction confédérale, aucune n'a appelé ses membres à faire grève pour soutenir la manifestation du 17 septembre.

Le quotidien du PC stalinien, L'Humanité, a donné la raison de la présence des directions fédérales de la CGT à la manifestation du 17 septembre. C'est pour servir de « tremplin avant deux journées d’action interprofessionnelle prévues les 7 et 22 octobre ». Le 7 octobre est la journée internationale des syndicats pour un « emploi décent. » Le 22 octobre est la journée « des enjeux de l'industrie », qui est en préparation pour que se tiennent des discussions entre le gouvernement, les patrons et les syndicats lors d'états-généraux proposés par Thibault de la CGT à Sarkozy afin de développer une politique visant à soutenir l'industrie française dans la crise mondiale.

En d'autres termes, la manifestation parisienne a été cyniquement utilisée pour soutenir la politique de collaboration de classe de Thibault et d'autres dirigeants syndicaux, et les protestations symboliques organisées par les syndicats sont là pour désamorcer la situation. Olivier Besancenot a couvert cela en saluant cette manifestation parisienne, la qualifiant de « convergence de luttes. »

LO et le NPA ont tous deux apporté leur soutien sans critique aux dirigeants syndicaux CGT de la Chimie d'Amiens Goodyear (Mickaël Wamen) et de Clairoix (Xavier Mathieu) dont la démarche consiste à obtenir les meilleures indemnités de licenciement possible. Ils glorifient Mathieu comme l'homme qui a obtenu 50.000 euros d'indemnité de licenciement pour chaque travailleur de Continental licencié dans son usine, et pourtant l'accord conclu entre les syndicats, les patrons et le gouvernement comprenait l'acceptation de la fermeture de l'usine et l'engagement de ne pas mobiliser contre les licenciements et les fermetures dans les autres sites Continental d'Europe.

De tels accords permettent aux entreprises de diminuer la production puis de fermer leurs usines tout en contenant la résistance des travailleurs et la possibilité d'une contagion de la mobilisation au niveau  national et international. Pratiquement toutes les entreprises qui ferment des sites et qui licencient des travailleurs sont des transnationales engagées dans des restructurations à échelle internationale (Continental, Goodyear, Molex, New Fabris.)

Tandis que le NPA couvre la bureaucratie syndicale, elle lance des appels de pure forme à une loi pour l'« interdiction des licenciements » à une « grève générale » et à des mobilisations syndicales pour « faire reculer vraiment et durablement pouvoir et patronat ». Mais à plusieurs reprises, Besancenot du NPA a rassuré les syndicats et le gouvernement disant qu'en appelant à une grève générale le NPA n'envisageait aucunement « le grand soir. »

L'appel du NPA aux syndicats a pour but de maintenir les travailleurs sous le contrôle de ces organisations dont le rôle est de faire porter aux travailleurs le fardeau de la crise. LO et le NPA ne mettent jamais en avant un programme pour une mobilisation politique de la classe ouvrière qui soit indépendante. Au contraire, ils présentent une liste de revendications sociales dont ils prétendent qu'elles peuvent être gagnées avec les syndicats en augmentant la pression sur les patrons et le gouvernement.

Besancenot du NPA a exprimé sa satisfaction de cette journée d'action, déclarant qu'elle représentait une vraie lutte contre la destruction des emplois. « Ça faisait des mois et des mois, cette fois-ci c’est devenu une réalité. Et c’est venu pas par le haut, mais par la base, parce qu’il y avait beaucoup d’obstacles. »

Xavier Mathieu, faisant référence aux travailleurs de Goodyear qui les premiers ont appelé à la manifestation a déclaré: « Eux, ils ont réussi à faire bouger les fédérations du secteur automobile et de la métallurgie et du caoutchouc et à créer une vraie unité. » Malgré ses attaques contre Thibault, les différences politiques entre Mathieu et la direction de la CGT sont marginales.

Des reporters du WSWS ont parlé à plusieurs travailleurs lors de la manifestation. Florian de l'usine Goodyear d'Amiens a un poste de technicien de maintenance. « La situation est très vague. les syndicats sont très désunis. Pour la lutte contre la crise économique, il faut éviter la délocalisation et augmenter les salaires. On ne peut pas défendre nos intérêts sans défendre ceux de la classe ouvrière d’autres pays. Oui, c’est une question internationale. »

Thierry, des pneumatiques Continental n'est pas syndiqué. « La situation, c’est qu’ils ferment l’usine avec 1200 à la rue. Pendant 2 ans on est au chômage. On doit essayer de trouver du boulot, oui, on est abandonné. La vraie victoire ce serait de garder nos emplois. On part avec certains avantages comparés à d’autres sites qui ferment. Mais on ne peut pas parler de victoire. Les syndicats pensent toujours à leurs mandats, aux élections, pas aux salariés, au lieu de penser aux rassemblement et manifestation qu’on fait plus fort pour lutter contre la crise économique. »

Emmanuel travaille à NDM construction à Caumont. « On est là pour une victoire, mais pour l’instant on n’a pas eu de victoire. Si tout le monde descend dans la rue, on peut arriver à lutter contre la crise économique. Il faut que les gens soient solidaires un peu plus avec la perspective d’augmentation de salaire et d’embauche. On est là contre la délocalisation. » 

(Article original anglais paru le 24 septembre 2009)


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