wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

  WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

Le résultat des élections sri lankaises prépare des conflits de classe

Par K. Ratnayake
14 avril 2010

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

Le parti au pouvoir, l’UPFA (Alliance pour la liberté des peuples unis), a obtenu une très forte majorité de sièges aux élections législatives qui se sont déroulées jeudi 8 avril. Mais ce qui a choqué les médias et l’establishment politique ce fut une abstention historiquement basse et un déclin du soutien de tous les principaux partis bourgeois, signes d’un mécontentement et d’une aliénation largement répandus dans la population laborieuse.

Le taux de participation est tombé à 52 pour cent, le plus mauvais depuis l’indépendance en 1948 – le précédent taux le plus faible avait été de 64 pour cent. Dans le district de Jaffna, à la pointe nord de l’île où les gens ont souffert de la guerre civile durant un quart de siècle, le taux de participation était encore plus bas -- à peine 23 pour cent -- dénotant un écoeurement vis-à-vis de tous les partis, y compris ceux qui prétendent représenter les intérêts de la minorité tamoule.

Les résultats ont été finalisés dans 20 des 22 districts électoraux. Le décompte a été suspendu à Kandy et à Trincomalee à la suite d’allégations selon lesquelles des nervis de l’UPFA avaient empêché des partisans de l’opposition de voter dans des dizaines de bureaux de vote. Jusque-là, l’UPFA a obtenu 117 sièges sur les 225 que compte le parlement. Son nombre total de sièges est censé augmenter une fois le décompte des deux districts manquants finalisé et les 29 sièges des listes nationales attribués.

Les voix pour l’UPFA s’étaient concentrées dans les districts ruraux, selon le schéma du vote de l’élection présidentielle de janvier. Le gouvernement avait exploité la victoire de l’armée sur les LTTE (Tigres de libération de l’Eelam tamoul) dans le but de fomenter des tentions communautaristes. Mais le principal facteur de la défaite électorale des deux partis d’opposition, l’UNP (United National Party) et le JVP (Janatha Vimukthi Peramuna), avait été leur manque de divergences fondamentales avec le gouvernement ; tous deux avaient soutenu la guerre et le programme économique pro-libéral de celui-ci.

Le président Mahinda Rajapakse s’est immédiatement vanté de ce que « cette victoire remarquable est une approbation de Mahinda Chintana [Vision Mahinda] ». Manifestement, c’était une victoire creuse. Le score de l’UPFA a chuté d’environ un million par rapport à l’élection présidentielle d’il y a à peine deux mois. Son soutien général (mis à part Kandy et Trincomalee) ne représente qu’environ 30 pour cent des votes enregistrés.

Le gouvernement avait fait une campagne intensive pour l’obtention d’une majorité des deux tiers, requise pour amender la constitution et consolider le régime autocratique de Rajapakse. Le ministre des Transports, Dulles Alahapperuma, a dit hier aux médias que l’UPFA s’attendait à manquer la majorité des deux tiers de 10 à 12 sièges. Une fois les résultats finalisés, toutefois, le gouvernement tentera d’inciter les parlementaires de l’opposition à changer de camp.

Le premier point au programme du gouvernement sera le budget qui a été repoussé depuis novembre. Malgré les affirmations de Rajapakse d’avoir apporté la paix et la prospérité, l’économie a été durement touchée par la crise économique mondiale et lourdement grevée de dettes. Le gouvernement avait été obligé l’année dernière de contracter un prêt de 2,6 milliards de dollars auprès du FMI qui exige des mesures d’austérité, telle une réduction de moitié du déficit budgétaire d’ici l’année prochaine.

Les résultats électoraux portent un coup sévère aux partis d’opposition. Durant l’élection présidentielle de janvier, l’UNP et le JVP s’étaient unis autour d’un candidat commun, l’ancien commandant en chef de l’armée, Sarath Fonseka. En soutenant Fonseka, ils avaient espéré surpasser Rajapakse dans leur soutien à l’armée victorieuse. Fonseka avait été le général responsable de la guerre criminelle menée par le gouvernement Rajapakse et qui avait coûté la vie à des milliers de civils tamouls durant les derniers mois de guerre.

Cette alliance électorale a scissionné après l’élection présidentielle, l’UNP et le JVP faisant campagne séparément lors des élections législatives. Le JVP avait formé sa propre Alliance démocratique nationale (DNA) avec Fonseka qui fut arrêté sur la base d’accusations fabriquées ; on l’accusa d’avoir fomenté un coup d’Etat avec des dizaines de ses partisans. Il a été placé en détention militaire pour comparaître devant une cour martiale non pas pour répondre aux accusations de coup d’Etat, mais à celles d’engagement dans une activité politique alors qu’il portait encore l’uniforme et d’implication dans des affaires de corruption.

Si on laisse de côté les districts de Kanda et de Trincomalee, la somme des résultats obtenus par l’UNP et le JVP aux élections de jeudi était de 1,2 millions inférieure au résultat de l’élection présidentielle (3,7 millions de voix). Reconnaissant la défaite, le secrétaire générale de l’UNP, Tissa Attanayake, a dit que le parti ne défierait pas la légitimité des résultats et se réorganiserait « pour attirer les électeurs à l’avenir. »

L’UNP n’a obtenu que 41 sièges jusque-là. Après les élections de 2004, il comptait 81 parlementaires et constituait le groupe parlementaire le plus large. L’UPFA qui avait assuré la présidence avait toutefois constitué une coalition instable en incitant, durant la période qui s’ensuivit, des dizaines de membres de l’UNP ainsi que de petits partenaires de la coalition, à rejoindre le gouvernement.

Les travailleurs n’ont pas voté pour l’UNP pour la simple raison qu’ils ne le considèrent pas comme une alternative au gouvernement Rajapakse. L’UNP est le plus ancien parti de la bourgeoisie sri lankaise et fut responsable du déclenchement de la guerre contre les LTTE en 1983. Il est connu pour sa politique pro-patronale et son bilan d’attaques impitoyables contre les droits démocratiques. L’UNP avait appuyé la reprise de la guerre par Rajapakse et soutenu l’incarcération, après la défaite des LTTE, d’un quart de million de civils tamouls.

Pour le JVP, les résultats électoraux, à peine supérieurs à 5 pour cent, sont dévastateurs. Le nombre des sièges du JVP va passer de 27 à 5 ou à 6 pour le DNA. Les districts de Hambantota et de Matara, dans le Sud de l’île, passaient pour être des bastions du JVP mais le parti a subi une déroute dans la plupart des régions rurales, y compris dans le Sud. Le DNA ne fut en mesure de gagner qu’une poignée de sièges à Colombo, Gampaha et Kalutara. Il pourrait bénéficier d’un siège supplémentaire de la liste nationale.

Le JVP est totalement discrédité parmi les couches de la population qui l’avaient considéré comme une alternative aux deux principaux partis, l’UNP et le parti de Rajapakse, le Sri Lanka Freedom Party (SLFP) qui dirige l’UPFA. Les électeurs avaient commencé à se détourner du JVP à partir de 2004 lorsque le SLPF était entré au gouvernement et avait soutenu sa politique rétrograde. Le JVP avait tenté de récupérer un certain soutien en soutenant Rajapakse lors de l’élection présidentielle de 2005 mais il connut une scission en 2008 sur la question de rejoindre ou non le gouvernement de celui-ci, perdant ainsi 12 parlementaires. Il est à présent largement considéré comme étant juste un autre parti opportuniste de l’establishment politique de Colombo.

Dans le Nord et dans l’Est, la faible participation est un critère de la répulsion et de la colère ressenties à l’égard des partis tamouls, y compris l’Alliance nationale tamoule (TNA) qui avait fait figure de porte-parole des LTTE. Lors de l’élection présidentielle, le TNA avait soutenu Fonseka comme un soi-disant moindre mal par rapport à Rajapakse. Lors de l’élection de jeudi, il a remporté 12 sièges et pourrait en récolter plusieurs autres une fois les résultats de Trincomalee connus, mais il n’a plus l’allégeance d’une grande majorité de l’électorat tamoul.

L’establishment médiatique et politique cherche en général à obscurcir la signification du faible taux de participation partout dans l’île. Dans une explication bizarre, le ministre des Transport, Alahapperuma, a blâmé les partis d’opposition en disant que s’ils avaient « fait une campagne plus agressive dans les provinces, la participation au vote des électeurs aurait été bien plus forte. »

Le secrétaire général de l’UNP, Attanayake, a attribué les résultats électoraux à l’apathie des électeurs disant « la fréquence avec laquelle le gouvernement a organisé des élections et les coûts élevés pour le pays » ont fait que « les gens ont perdu intérêt et adopté une attitude indifférente. » Un article du journal Daily Mirror a exprimé le même ordre d’idées en remarquant que la décision d’organiser des élections présidentielles juste avant les élections législatives « avait entraîné une forte baisse de la participation des gens au vote d’hier. »

En réalité, les résultats révèlent un gouffre énorme entre la masse des travailleurs et l’establishment politique. Les travailleurs, les jeunes et la population pauvre des campagnes ne croient plus les fausses promesses faites par les grands partis et nombre d’entre eux ont exprimé leur aliénation et leur colère en n’allant pas voter. Le résultat de cette élection annonce le déclenchement de luttes de classe qui se produiront lorsque le gouvernement Rajapakse appliquera les mesures exigées par le FMI. Celui-ci demande de faire des coupes plus sévères encore dans le niveau de vie.

Le Parti de l’Egalité socialiste (SEP) a fait campagne dans ces élections pour avertir la classe ouvrière des attaques féroces en préparation et pour la mobiliser indépendamment des partis capitalistes et de leurs différents soutiens dont les syndicats et l’ex-extrême gauche. Nous mettons en garde les travailleurs que l’écoeurement et la colère envers l’élite dirigeante et leurs représentants politique ne suffisent pas. Ce qu’il faut c’est un programme et un parti socialiste pour unifier la classe ouvrière sri lankaise et internationale dans un mouvement politique indépendant contre le système capitaliste défaillant.

Le SEP et ses candidats furent les seuls à lutter pour une alternative socialiste dans ces élections. Le parti a recueilli un score faible mais significatif – 371 voix – dans les quatre districts dans lesquels il s’était présenté. Ces voix représentent les sections les plus conscientes des travailleurs et des jeunes qui devraient à présent sérieusement envisager de rejoindre le SEP. Dans le même temps, nous lançons un vaste appel à la classe ouvrière pour qu’elle réfléchisse sérieusement aux dangers politiques auxquels elle est confrontée, qu’elle commence à étudier notre programme et notre perspective tels qu’ils sont publiés quotidiennement sur le World Socialist Web Site et qu’elle rejoigne et construise ce parti pour les luttes à venir.

(Article original paru le 10 avril 2010)

 

 


Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés