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  WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

L’exposition universelle de Shanghai: l’extravagance capitaliste et la misère sociale

Par John Chan
15 mai 2010

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L’exposition universelle de Shanghai met une fois de plus en relief les contradictions criantes du capitalisme chinois présidé par le Parti communiste chinois (CCP). L’extravagance fastueuse censée exposer au monde les accomplissements économiques de la Chine est aux antipodes de la pauvreté noire que connaissent des centaines de millions de travailleurs et de l’exploitation brutale dont tout ceci dépend.

Décidé à avoir le plus gros et le meilleur, le CCP a dépensé un montant inégalé de 59 milliards de dollars pour l’exposition universelle de Shanghai, bien plus que pour des événements identiques dans d’autres pays et deux fois la somme dépensée pour les Jeux olympiques de Beijing en 2008. Le budget de l’exposition est plus important que le PIB annuel d’Etats tels l’Equateur et la Bulgarie même si le revenu moyen en Chine est inférieur à celui de ces deux pays.

Shanghai n’a pas lésiné sur les moyens. La cérémonie d’ouverture a débuté par un spectacle de feux d’artifice, avec un éventail de célébrités et une troupe de milliers de danseurs et autres artistes. Dans leur envie irrésistible de succès, les organisateurs ont affirmé avoir réussi à rassembler en un seul endroit la plus grande quantité de projecteurs de tous les temps, le plus grand nombre de lasers multicolores et le plus grand écran LED du monde.

L’aspect le plus cynique de la cérémonie d’inauguration a été le recours à deux orphelins victimes du tremblement de terre qui a eu lieu dernièrement dans le district de Yushu, dans la province de Qinghai, pour démontrer que le régime s’occupait de ceux qui avaient souffert. Les deux enfants, originaires de Qinghai, l’une des provinces les plus pauvres de Chine, où 2.200 personnes sont mortes quand le séisme a réduit à néant les maisons primitives faites de boue et de bois, n'étaient pas à leur place au milieu de l’architecture rutilante, ultra futuriste de l’exposition. Le PIB annuel de Qinghai s’élève à tout juste un quart du budget de l’exposition – une raison évidente pour le manque d’infrastructure et de services médicaux qui ont contribué au désastre.

Pour dégager la voie et permettre l’affichage de la prospérité chinoise lors de l’exposition, les organisateurs ont expulsé de force 18.000 résidents de leurs maisons. Le mythe de la « société harmonieuse » de la Chine a été imposé de force par la police qui a harcelé et détenu les dissidents politiques, dégagé des rues les petits commerçants et emprisonné plus de 6.000 pauvres de la ville lors d’une opération répressive menée contre « le vol, le jeu, la prostitution et la vente de matériel pornographique. »

Les principales grandes entreprises du monde sont les participants enthousiastes à la vitrine promotionnelle de Shanghai – témoignage de l’importance économique mondiale de la Chine, de son énorme réserve de main d’œuvre bon marché et de ses marchés grandissants. Un grand nombre d’entre eux, tels General Motors, y ont construit leurs propres pavillons. Alors que GM a été poussé à la faillite aux Etats-Unis, l’entreprise est en pleine expansion en Chine où elle représente le plus gros constructeur étranger. Volkswagen envisage de doubler sa production en Chine pour atteindre deux millions d’unités d’ici 2012.

Des milliards ont été dépensés pour transformer Shanghai d’ici 2020 en un grand centre financier mondial. Le quartier historique de la ville, connu comme le Bund – portait avant la révolution chinoise de 1949 la réputation de « paradis des aventuriers », a été rénové. Comme symbole de l’optimisme économique, une réplique du taureau en bronze se trouvant à Wall Street (Bronze Bull) a été dévoilée dans le district financier de la ville.

Cette célébration grotesque du capitalisme chinois n’est pas une trahison du programme du CCP et du maoïsme mais constitue son aboutissement logique. Suite à la défaite du mouvement révolutionnaire de 1925-27, Mao Zedong était devenu le dirigeant du parti sur la base de la perspective stalinienne en faillite du « socialisme dans un seul pays » et de la « théorie des deux stades » qui avait eu pour objectif immédiat une Chine capitaliste et relégué le socialisme dans un avenir lointain. Après avoir pris le pouvoir en 1949, Mao et ses successeurs, en dépit de leurs différends d’ordre tactique, partageaient la même perspective de transformer la Chine en une « grande puissance », le rêve chéri de longue date de la bourgeoisie chinoise.

Le premier ministre, Wen Jiabao, a exprimé ce sentiment quand il a déclaré que l’exposition de Shanghai montrerait au monde qu’un « lion dormant » se réveillait après avoir été, il y a 100 ans, une nation faible et opprimée. Le capitalisme chinois repose sur l’exploitation impitoyable des vastes ressources de main-d’œuvre bon marché du pays, et qui furent ouvertes au capital étranger en 1978 lorsque le CCP avait supprimé le radicalisme paysan de Mao pour se rapprocher ouvertement du marché capitaliste. Comme les dirigeants du CCP en sont parfaitement conscients, la richesse extraordinaire de la bourgeoisie émergente repose sur la vaste masse des travailleurs qui sont obligés de subsister avec des salaires égaux ou inférieurs au seuil de pauvreté.

Exprimant les craintes et le mépris de la bureaucratie envers la classe ouvrière, l’ancien maire de Shanghai, Xu Kuangdi a récemment déclaré au magazine Nation que la démocratie était incompatible avec l’énorme inégalité sociale existant en Chine, parce que « les gens pauvres veulent partager la propriété des gens riches. » Si nous avions des élections directes aujourd’hui, a-t-il dit, « les gens diraient, ‘je veux que tout le monde ait un bon emploi.’ Quelqu’un d’autre dira ‘Je veux faire partager la propriété des gens riches aux gens pauvres,’ et il sera élu. »

A Shanghai même, ces tensions de classe sont à fleur de peau. La ville n’est pas seulement un centre commercial mais une importante base industrielle avec une énorme classe ouvrière. Dans les années 1920 et 1930, Shanghai était connu comme un bastion des travailleurs militants et de l’intelligentsia révolutionnaire. En avril 1927, à l’apogée du mouvement révolutionnaire, Chiang Kai-shek et le Kuomintang, avec l’assistance politique de Staline, avaient brutalement réprimé la rébellion de la classe ouvrière dans la ville.

Suite à la révolution de 1949, Shanghai était restée un foyer de troubles politiques. Durant la « Grande Révolution culturelle prolétarienne » des années 1960, nommée ainsi à tort, d’importantes couches de travailleurs s’étaient révoltés contre la bureaucratie du CCP en établissant leur propre commune autonome de Shanghai. Terrifié par le fait que sa querelle avec les adversaires des factions rivales ne monte en flèche, Mao fit appel à l’armée pour réprimer la commune et la classe ouvrière.

Aujourd’hui, Shanghai est une ville d’environ 20 millions d’habitants – dont la plupart sont des travailleurs qui sont concentrés dans les usines et les bureaux les plus modernes de la Chine. La Chine, tout en se vantant d’avoir le plus grand nombre de milliardaires en dollars, après les Etats-Unis -- le salaire mensuel moyen d’un travailleur de Shanghai était l’année dernière d’à peine 522 dollars -- a fait état en 2009 de la plus faible croissance de ces dix dernières années. Dans une tentative d’apaiser avant l’exposition la classe ouvrière de la ville, les autorités de Shanghai ont augmenté le salaire minimum et les allocations chômage, et ont fourni au compte goutte des billets d'entrée gratuits aux résidents de la ville.

L’exposition de Shanghai a été inaugurée le 1er mai –journée de solidarité internationale de la classe ouvrière. Se référant au discours du 1er mai prononcé par le président Hu Jintao, l’organe du CCP, le People’s Daily, a cité Marx et Engels en déclarant que l’« avenir appartient à la classe ouvrière » et que la classe capitaliste était condamnée. Il a salué le travail du prolétariat comme la base des accomplissements économiques de la Chine, à commencer par son énorme industrie sidérurgique et ses vols spatiaux habités, jusqu’au barrage des Trois Gorges et l’organisation de l’exposition universelle.

Le journal a bien sûr omis de citer les passages pertinents du Manifeste Communiste qui expliquent que le prolétariat est le fossoyeur du capitalisme. En dépit du monde de fantaisie étincelante de l’exposition de Shanghai, la classe ouvrière en Chine sera propulsée en pleine crise du capitalisme mondial qui est en train de s’aggraver dans une lutte pour le socialisme authentique et contre l’Etat policier du CCP.

(Article original paru le 7 mai 2010)

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