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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Les travailleurs grecs expriment leur rejet des coupes de Papandreou

Par Alex Lantier
20 mai 2010

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Des reporters du WSWS ont interviewé des travailleurs à Perama, ville ouvrière de la banlieue d’Athènes. La ville abrite le terminal portuaire du Pirée ainsi qu’un dispositif de déchargement des conteneurs, un atelier de réparation navale et un terminal ferry pour passagers. Le port du Pirée est le plus grand port commercial de Grèce et du bassin de la Méditerranée orientale, manutentionnant avant l’éclatement de la crise économique 20 millions de tonne de marchandises par an.

  L’entrée du parc à conteneurs

Les travailleurs à Perama étaient très en colère contre le premier ministre George Papandreou qui avait dit avant son élection en octobre dernier vouloir augmenter les dépenses sociales grâce à un investissement de plusieurs milliards d’euros. Immédiatement après son élection, Papandreou a réduit les dépenses conformément aux exigences des banques et de l’Union européenne (UE). Papandreou a contracté des prêts s’élevant à 110 milliards d’euros auprès de l’UE et du Fonds monétaire international (FMI) en échange de promesses d’imposer des coupes massives à la population.

Les travailleurs de Perama se sont aussi prononcés contre les syndicats – dont les dirigeants viennent en partie du PASOK, le parti dirigé par Papandreou, et qui travaillent avec le gouvernement – pour avoir organisé des actions de protestation faibles et sporadiques contre ces coupes. Les travailleurs plus âgés ont souvent comparé la situation économique à celle qui existait sous le régime de la junte militaire soutenue par les Etats-Unis et qui avait régné en Grèce de 1967 à 1974, en remarquant que de nos jours les travailleurs étaient dans une situation plus difficile.

Le WSWS a visité le chantier de réparation navale ainsi que les docks de déchargement des conteneurs, le fonctionnement des deux étant en sous capacité et de graves accidents du travail y sont survenus dernièrement.

Panayotis

Panayotis travaille depuis vingt ans au chantier de réparation navale de Perama. Il a dit, « la plupart des travailleurs ont été licenciés au cours des dix huit derniers mois. Nous ne savons pas si des emplois vont revenir. Nous ne sommes plus que 500 travailleurs ; il y en avait 5.000 avant. Les conditions de travail sont très mauvaises ici : des températures très élevées, beaucoup de fumée. La durée journalière standard est de 8 heures mais avec les heures supplémentaires on travaille 12 heures. Les travailleurs débutent ici avec 1.500 euros par mois. »

Tassos a ajouté, « Nous n'avons aucune idée de ce qui va se passer avec notre retraite. Nous entendons des choses à la télé, et ce n’est pas très clair pour le moment. »

A la question de savoir ce qu’il pensait de Papandreou, Panayotis a dit, « Il nous a trompés avec ses promesses électorales. Il n’a pas fait payer les riches. Il y a eu des plans de sauvetage dans tous les pays ; c’est une crise mondiale. Ce sont les pires conditions. Les travailleurs ont acquis des choses progressivement après [la chute de la junte militaire en] 1974, grâce aux grèves et aux luttes. Qui, après tout, pouvait faire grève sous la junte ? C’est comme ça que [les améliorations des conditions de travail des travailleurs] c’est venu après 1974.

Kiriakos

Dans un café du chantier naval, Kiriakos, un soudeur a dit, « Il y a beaucoup d’accidents du travail, et il y a eu plusieurs accidents mortels. Il y a dix huit mois, huit travailleurs ont perdu la vie. Ils avaient été pris au piège et sont ensuite mort intoxiqués par la fumée. » Kiriakos a poursuivi en disant, « Nous avons fait grève pendant dix jours pour réclamer des mesures de sécurité. Nous nous sommes adressés au ministère, mais tout leur verbiage n’a rien donné. »

Theophilos a ajouté, « Ils n’appliquent jamais de mesures de sécurité ici. On est littéralement redevable à l’employeur. »

Theophilos

Dimitris a dit, « La vie est très difficile. La question n’est pas le salaire mais c’est quand on est au chômage, on ne reçoit pas de salaire. Au cours de ces dix huit derniers mois, il n’y a pas eu de grosses entrées de commandes. Au cours de ces cinq derniers mois nous n’avons travaillé que 20 jours. En réalité, nous sommes sans emploi. »

Theophilos a dit, « Personne n’est assuré, nous ne sommes pas assurés contre le chômage » parce que si les travailleurs manquent de verser ne serait-ce qu’une cotisation de 67 euros à l’assurance chômage, ils perdent leurs allocations chômage.

A la question de savoir ce que pensent les travailleurs du chantier naval de Papandreou, Kiriakos a répondu, « C’est notre deuxième maison, nous le défendrons au prix de notre sang s’ils veulent le fermer. Nous avons besoin d’emplois. Il y a beaucoup de divorces quand les travailleurs perdent leur emploi. La Grèce possède la plus grande flotte marchande du monde et les armateurs voyous ne fournissent pas de travail. » En parlant du plan d’aide du FMI, il a dit, « L’argent du FMI va tout droit à l’élite et les travailleurs sont laissés sur le carreau. »

  L’entrée du chantier de réparation navale

Les travailleurs du chantier naval et les reporters du WSWS ont discuté de la manière dont les banques et les politiciens procédaient pour faire payer les plans d’aide aux travailleurs dans le monde entier. Les travailleurs ont posé des questions quant au rôle joué par les Etats-Unis dans le plan d’aide organisé par le FMI et qu’ils détestent, et pour lequel le gouvernement des Etats-Unis dispose officiellement d’un droit de véto. Certains des travailleurs étaient surpris d’entendre parler des problèmes de chômage et de pauvreté auxquels de nombreux travailleurs américains sont confrontés, car les Américains sont souvent décrits en Grèce comme des riches.

Finalement, tout le monde est tombé d'accord pour dire que les travailleurs américains et grecs doivent lutter contre un ennemi commun : les banques et les politiciens qui cherchent à faire payer la crise aux travailleurs. Vassilis, un retraité de 63 ans, a dit : « J’ai été aux Etats-Unis et en Asie avec la marine marchande. Les Etats-Unis, c'était bien à l'époque ; certaines personnes disent du mal des Américains, moi pas. Ils malmènent peut-être les gens outre-mer, mais à l’intérieur du pays, les Américains se traitent avec respect. J’avais envisagé de travailler aux Etats-Unis comme soudeur, mais je n’ai pas réussi à obtenir un permis de travail. »

Il a expliqué, « J’ai commencé à travailler ici sous la junte. On avait besoin d’un passeport spécial pour entrer. Si on était un gauchiste, ils ne vous laissaient pas entrer et donc on était obligé de grimper par-dessus la palissade [pour aller au travail]. Après la chute de la junte, les gens qui ont pris la relève étaient tous des voleurs. Les choses sont pires aujourd’hui que sous la junte. Par rapport à aujourd’hui, les gens vivaient bien à l’époque. »

Les travailleurs ont exprimé leurs craintes quant à l’avenir de leurs enfants car il devient très difficile de payer les traditionnelles leçons privées supplémentaires. Theofilos a dit, « Nos enfants finiront par être analphabètes ; seuls les enfants des politiciens pourront faire des études dorénavant. Moi, j’ai trois enfants. »

Les reporters du WSWS ont parlé à Lefteris, un ouvrier de 53 ans, travaillant pour le service de recyclage de la municipalité de Perama, ayant 16 ans d’expérience. Il a dit, « Nous avons eu des réductions de salaire. La prime de Pâques a été réduite de 250 à 200 euros, la prime de vacances d’été a été réduite de 30 pour cent et la prime de Noël est passée de 1.000 à 500 euros. Mon salaire actuel n’a pas été réduit mais le 13ème et le 14ème mois ont été supprimés. Mon salaire de base brut est de 900 euros mais le loyer est de 400 euros et l’eau, l’électricité, le gaz et la nourriture sont en plus, et leur prix augmente fortement. Par exemple, un paquet de lentilles est passé de 0,50 euros à 0,57 euros et le prix du détergent à vaisselle a augmenté du jour au lendemain de 1,80 euros à 2 euros.

En parlant de l’actuel gouvernement, il a dit: « Papandreou nous a trompés, il avait dit avoir beaucoup d’argent avant les élections. Maintenant les gens ont faim, il y a une grande misère. Je ne sais pas si les gens aux Etats-Unis comprennent. Le tourisme s’effondre, il n’y a aucun nouvel emploi ici. Le taux de chômage est de 25 pour cent à Perama. »

Lefteris a aussi critiqué les syndicats pour être un rouage dans un establishment politique corrompu : « Toute personne qui dirige la GSEE [la Confédération générale du Travail de Grèce] deviendra député, ça fait partie du jeu. [le président de la GSEE, Yiannis] Panagopoulois deviendra un membre du parlement. C’est pas compliqué à comprendre. »

Il a ajouté que la stratégie de la GSEE d’organiser de façon sporadique des grèves générales de 24 heures était inefficace : « Les grèves générales ne rapportent rien du tout. Si on fait grève, il faut le faire indéfiniment. Si on fait grève pendant 5 à 10 jours, on n’obtient rien. Si on a une grève indéfinie, tout le monde devrait faire grève. Si on ne lutte pas, on ne gagne rien. »

Yiannis

En commentant les conséquences de la crise, Yiannis, un conducteur d’engin aux docks partiellement nationalisés de Perama a dit qu’elles comportaient « des réductions de salaire et de prime, probablement de 10 pour cent en général. Une partie du port a été vendue aux Chinois [la compagnie Costco]. Les machines ne bougent pas actuellement ; il y a deux ans le port était en pleine effervescence. »

Il a décrit le gouvernement Papandreou comme étant « des crapules, des voleurs, des escrocs et des menteurs, » en disant qu’il y avait trop peu de grèves contre Papandreou. A la question de savoir pourquoi il n’y avait pas eu davantage de grèves, il a dit, « Les travailleurs n’ont pas beaucoup d’argent, et donc c’est dur de faire grève. Et aussi, les syndicats sont les valets des deux grands partis. »

Les reporters du WSWS ont été invités dans le café des dockers et y ont discuté avec des travailleurs. Ceux-ci ont dit que bien que personne n’ait encore été licencié, ils ont maintenant juste assez de travail pour les occuper un tiers du temps.

Giorgos

Giorgos, le délégué syndical, a parlé d’un accident survenu récemment dans les docks : « Deux travailleurs ont été sérieusement blessés chez Costco. Ils travaillaient sans formation préalable correcte, avec seulement 2 à 3 mois d'expérience à ce poste. La machine utilisée ici n’existe pas dans d’autres ports en Grèce et elle s’est renversée sur eux. L’entreprise privée ne respecte pas les procédures de sécurité et c’en est la conséquence. Elle cherche à réduire les coûts en embauchant des gens sans formation et en implorant le ciel pour qu’il n’y ait pas d’accident. Malheureusement, Dieu a d’autres priorités. »

(Article original paru le 15 mai 2010)

Voir aussi :

Les mesures européennes d’aide à la Grèce inaugurent une offensive contre la classe ouvrière européenne
(17 mai 2010)

L’importance au niveau international de la grève générale grecque
(13 mai 2010)

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