Le 1er Mai 2010 se déroule dans un contexte de signes
manifestes de reprise de la lutte de classes. D'un pays à l'autre les
travailleurs sont confrontés à l'augmentation du chômage, à la destruction
profonde des services essentiels tels l'éducation et la santé, à l'érosion des
conditions de travail et à des attaques contre les droits démocratiques
fondamentaux. Ils commencent à riposter.
Avec l'échec flagrant du capitalisme, le message essentiel
de ce 1er Mai, celui de l'unification internationale de la classe ouvrière dans
la lutte pour le socialisme, est devenu une nécessité urgente. La crise
économique mondiale qui a fait éruption en 2008 soulève le spectre des années
1930 : chômage de masse permanent, appauvrissement de larges sections de
la classe ouvrière et poussée vers de nouvelles guerres toujours plus
terribles.
L'agitation économique qui s'est abattue sur Wall Street est
entrée dans une seconde phase plus virulente. Les milliers de millions de
dollars injectés par les gouvernements du monde entier dans les principales
banques et grandes entreprises pour empêcher leur effondrement apparaissent à
présent dans la comptabilité des gouvernements comme des dettes souveraines massives.
La réponse universelle des cercles dirigeants est que les travailleurs doivent
être forcés de payer pour une crise dont ils ne sont nullement responsables.
L'attention se porte en premier sur la Grèce où le
gouvernement Papandreou se prépare à imposer un plan d'austérité de plus, plus
draconien encore, visant à réduire les salaires, les retraites et les services
et à imposer des augmentations d'impôt conséquentes. Mais avec l'Espagne et le
Portugal subissant déjà la pression des marchés financiers, les analystes
économiques se demandent avec nervosité quel sera le prochain pays atteint par
la « contagion » qui se propage. Aucun pays n'est à l'abri : la
Grande-Bretagne, les Etats-Unis et le Japon sont tous assis de façon précaire
sur d'énormes montagnes de dettes. Tandis que superficiellement la Chine semble
faire exception, sa croissance fébrile artificiellement éperonnée par des
dépenses visant à stimuler l'économie a créé d'énormes bulles spéculatives qui
vont inévitablement éclater.
Le montant des sommes qui seront reprises à la classe
ouvrière est souligné par l'étendue de l'effondrement financier lui-même. En
2008-09, la perte de richesse mondiale était estimée à plus de 25 mille
millions de dollars, soit 45 pour cent du BIP mondial. Le soutien direct des
gouvernements pour venir au secours du système financier était de près d'un
quart du PIB mondial. Aux USA et au Royaume-Uni il a représenté près de trois
quarts du PIB. La Grèce sert donc de pays-test pour un programme qui sera
appliqué au monde entier.
Les contradictions fondamentales du capitalisme, entre
production socialisée et propriété privée des moyens de production, et entre
économie mondialisée et système dépassé d'Etats-nations, identifiées pour la
première fois par Karl Marx il y a de cela plus de 150 ans ont fait surface
dans la vie politique et économique. L'internationalisation sans précédent de
la production durant ces 30 dernières années a fait en sorte que la crise prend
aussitôt un caractère mondial.
Les tensions de classes s'accentuent rapidement. Les signes
les plus révélateurs apparaissent au coeur même du capitalisme mondial, les
Etats-Unis, où l'aristocratie financière continue de se repaître d'activités
parasitaires qui ont fait perdre leur emploi à des millions d'Américains, leur
ont fait perdre leur logement et dans bien des cas les ont mis à la rue. La
révélation que le gouvernement Obama est l'instrument politique de cette riche
et cupide élite pose le décor pour des batailles de classes explosives.
Au même moment, la crise économique exacerbe les tensions
entre grandes puissances tandis que chacune cherche à s'en sortir aux dépens de
ses concurrents. La crise grecque est déjà en train de mettre à rude épreuve
les relations au sein de l'Europe, remettant en question la viabilité de l'euro
et de l'ensemble du projet d'unité européenne. Les revendications aux
Etats-Unis pour que soient mis en place d'énormes tarifs douaniers contre la
Chine menacent de déchaîner une guerre commerciale de grande envergure. Partout
la politique venimeuse du nationalisme et du chauvinisme anti-immigrés est
attisée pour diviser la classe ouvrière et détourner l'attention des questions
de classes sous-jacentes.
Les rivalités entre impérialistes attisent la montée du
militarisme et de la guerre. Les efforts des Etats-Unis pour contrer leur
déclin historique par le recours au militarisme ont déjà eu un impact
profondément déstabilisant sur la politique mondiale. Sous l'égide de sa pseudo
« guerre contre le terrorisme » Washington cherche à contrôler les
régions stratégiques clés du Moyen-Orient et de l'Asie centrale. Les Etats-Unis
lancent des menaces à l'encontre de l'Iran alors même qu'ils poursuivent leurs
guerres criminelles en Irak, en Afghanistan et au Pakistan. De nombreuses
poudrières régionales sont potentiellement capables de déclencher une
conflagration internationale catastrophique.
En même temps que les contradictions du capitalisme poussent
le monde vers la dépression et la guerre, elles créent aussi les conditions
objectives pour une solution progressiste. Comme l'a expliqué Marx, dans le
processus même de son développement, le capitalisme crée son propre fossoyeur,
à savoir la classe ouvrière internationale, porteuse d'une nouvelle forme plus
élevée de société, le socialisme. La mondialisation de la production durant ces
trente dernières années a créé un degré sans précédent d'intégration de la
classe ouvrière de toutes les nations. De plus, tandis que l'incorporation dans
les circuits de l'exploitation capitaliste de centaines de millions de
travailleurs chinois et indiens a donné un coup de fouet aux profits à court
terme, elle a énormément consolidé le poids social de la classe ouvrière.
Les travailleurs de tous les pays sont confrontés aux mêmes
ennemis : les grandes entreprises mondialement organisées, les banques et
les institutions financières. Les travailleurs du Portugal et d'Espagne ont
déjà rejoint leurs homologues grecs dans la lutte contre le programme
d'austérité de leur gouvernement. En Inde, des centaines de milliers de travailleurs
sont engagés dans des luttes contre le même programme: la privatisation, les
baisses de salaire et les pertes d'emploi. Des luttes plus réduites, mais non
moins significatives ont émergé dans bien d'autres pays.
Dans tous les cas, les travailleurs sont confrontés aux
mêmes obstacles politiques : les syndicats et les partis socio-démocrates
et staliniens, soutenus par leurs apologistes des divers groupes de l'ex-gauche
et d'anciens gauchistes. Ils cherchent tous à subordonner la classe ouvrière aux
exigences de l'Etat capitaliste dans une situation où les travailleurs ne
peuvent défendre leurs droits les plus fondamentaux que par une lutte pour le
pouvoir politique afin d'abolir le capitalisme et refaçonner la société selon
des lignes socialistes. Ceci les conduit inévitablement à un conflit direct
avec les vieux appareils bureaucratiques et leurs parasites de
« gauche. »
En 1938, dans le programme fondateur de la Quatrième
Internationale, Léon Trotsky avait répondu aux sceptiques qui remettaient en
question les capacités révolutionnaires de la classe ouvrière : « L'orientation
des masses est déterminée, d'une part, par les conditions objectives du
capitalisme pourrissant; d'autre part, par la politique de trahison des
vieilles organisations ouvrières. De ces deux facteurs, le facteur décisif est,
bien entendu, le premier : les lois de l'histoire sont plus puissantes que
les appareils bureaucratiques. »
Plus de 70 ans plus tard, les divers appareils réformistes
et staliniens qui s'étaient refait une jeunesse durant le boom économique qui
suivit la Deuxième Guerre mondiale, soit ont cessé d'exister, soit survivent
dans un état de décrépitude avancé. Mais la route vers le socialisme n'est ni
inéluctable ni automatique. Sans un programme et une direction révolutionnaires
même les luttes sociales les plus explosives manqueront de direction, se
disperseront, permettront à l'ennemi de classe de se regrouper et d'ouvrir la
porte à une politique réactionnaire.
Le 1er Mai 2010, le World Socialist Web Site et le Comité
international de la Quatrième Internationale (CIQI) saluent fraternellement les
travailleurs et les jeunes du monde entier qui luttent pour défendre leur
niveau de vie et leurs droits fondamentaux. Le CIQI est l'unique mouvement
politique au monde qui lutte pour le programme de l'internationalisme
socialiste et qui incarne les principes authentiques du 1er Mai. Nous appelons
les travailleurs et les jeunes qui cherchent une issue aux catastrophes
produites par le capitalisme à rejoindre et construire ce parti international
comme direction révolutionnaire cruciale pour les soulèvements révolutionnaires
à venir.