Une semaine après la promulgation de la réforme régressive
sur les retraites, imposée en dépit de grèves de masse et de protestations, le
président Nicolas Sarkozy a fait une intervention télévisée pour présenter son
programme pour le reste de son mandat. Les prochaines élections présidentielles
auront lieu en 2012.
Mardi dernier, lors d’une interview, Sarkozy a
clairement montré qu’après avoir infligé une défaite à la classe
ouvrière, il a l’intention de procéder à des attaques draconiennes contre
les programmes sociaux tout en accordant des réductions d’impôts aux
riches et en poursuivant la participation de la France aux guerres
impérialistes.
Selon un sondage Harris,
64 pour cent des téléspectateurs ont jugé les propos de Sarkozy « pas
convaincants ».
En réponse aux questions concernant son impopularité au
sein de l’électorat, Sarkozy a dit qu’il était obligé
d’écouter mais qu’il ne changerait pas de cap. Il a expliqué :
« Je suis obligé d’écouter mes amis, mais sur les grands sujets, je
deviens moins influençable, car je crois qu’il y a des choses que la
France doit faire. »
Il a rendu hommage aux syndicats pour avoir permis la
promulgation de la réduction des retraites. « Les syndicats ont été
responsables, » a-t-il dit en ajoutant, « Nous avons mené cette
réforme sans violence. » Il a dit que c'était remarquable dans un pays où
les rapports sociaux ne sont « jamais très faciles. »
Son affirmation qu’il n’y a pas eu de violence
est fausse. La police a, à plusieurs reprises, recouru à la violence pour
briser des piquets de grève dans les ports et les raffineries. Elle a également
infiltré et attaqué des manifestations d’étudiants partout dans le pays.
Mais il a eu raison de remercier les syndicats pour avoir
contenu et trahi le mouvement de masse contre la réduction des retraites. Sans
la collaboration de la direction syndicale, Sarkozy n’aurait pas pu
imposer ces coupes sociales sans précédent.
L’une de ses annonces clé a été une réduction d’impôt
proposée pour les riches. L’ISF (impôt sur la fortune) va être aboli et
remplacé par un impôt sur les revenus et les plus-values du patrimoine. Ceci
permettra aux riches d’économiser 4,1 milliards d’euros par an.
Sarkozy a affirmé qu’il compenserait cela en réduisant les réductions
d’impôts du soi-disant « bouclier fiscal » mais celles-ci ne
s’élèvent qu’à 679 millions par an.
Le président a dit qu’il projetait d’aligner
en automne les taux d’imposition français sur ceux de l’Allemagne.
« Je ne peux pas accepter des déficits de compétitivité avec notre
principal client et notre principal partenaire, qui est
l’Allemagne, » a-t-il déclaré.
Il a annoncé des projets d’attaques draconiennes
contre les droits sociaux des travailleurs. Celles-ci comprendront la réduction
des allocations chômage, qu’il a cyniquement présentée comme une mesure
pour la relance de l’emploi. Tout en disant n’avoir pas tout essayé
contre le chômage, il a annoncé des négociations avec les syndicats sur une « nouvelle
convention d’assurance chômage. »
Il a suggéré que ceci inclurait la suppression de
l’assurance chômage de longue durée en disant : « Quand il y a
un licenciement économique, la personne qui est licenciée n’y est pour
rien, c’est profondément injuste. Cette personne là, nous la prendrons en
compte, on lui garantira un an de salaire, elle aura un contrat avec Pôle
Emploi et elle sera accompagnée dans un effort de formation. Et elle aura
l’obligation d’accepter un emploi ou une formation. »
Les mesures proposées par Sarkozy contre le chômage des
jeunes sont d’un caractère tout aussi cynique. Par sa démarche de réduire
les emplois dans le secteur public en ne remplaçant qu’un fonctionnaire
sur deux, il pousse des sections de plus en plus vastes de travailleurs vers
les emplois temporaires ou à bas salaire. De telles mesures affectent tout
particulièrement les jeunes arrivant sur le marché du travail.
Le taux de chômage pour les 18-24 ans s’élève à 23
pour cent. Sarkozy a dit avoir l’intention de réduire le chômage des
jeunes en doublant, pour atteindre le million, le nombre de jeunes obligés de
suivre une formation d’alternance professionnelle subventionnée (contrat
de professionnalisation, contrats d’apprentissage). Mais aux dires mêmes
de Sarkozy, un tel jeune n’a que 70 pour cent de chances de trouver un
emploi.
Pour la prise en charge des personnes âgées, il a dit que
des décisions seront prises l’été prochain après discussions au printemps
avec les syndicats et les associations de personnes âgées. Il a suggéré
qu’un paquet final pourrait offrir le choix entre forcer les gens à
recourir à des assurances privées ou à augmenter les impôts sur les salaires
des travailleurs pour couvrir les coûts de la prise en charge.
Sarkozy a indiqué qu’il n'abandonnerait pas sa
promotion du chauvinisme français. Ses mesures contre les immigrants, notamment
les Roms et les Musulmans, ont suscité des comparaisons avec la politique du
régime de Vichy dans la France occupée par les nazis. Il a rejeté les critiques
concernant sa campagne sur l’identité nationale et sa chasse aux
sorcières contre les Roms en disant que celles-ci étaient le résultat d'un
« malentendu. »
Il n’y aura pas de recul en ce qui concerne la
chasse aux immigrants. « Sur le fond je n’y renonce pas, »
a-t-il déclaré. « Si on ne maîtrise pas les flux migratoires on organise
le collapse de notre système d’intégration. »
Sarkozy a réaffirmé son engagement de déployer des troupes
françaises à l’étranger, y compris dans la guerre très impopulaire en
Afghanistan. En invoquant la « guerre contre le terrorisme », il a
dit que toutes les démocraties dans le monde étaient menacées et que la
situation en France était « assez préoccupante. »
« Nous ne changerons pas d’un iota notre
politique [étrangère] » a-t-il dit « au seul motif que nous sommes
menacés. » Il a énuméré un certain nombre de pays où des ressortissants
français seraient retenus en otages, comme le Mali, la Somalie, le Golfe de
Guinée et l’Afghanistan.
Au sujet de la libération d’Aung San Suu Kyi, la
dissidente birmane politiquement alignée sur les Etats-Unis, Sarkozy a dit
qu’il coopérait étroitement avec la Chine. Il a menacé de faire partir de
Birmanie les entreprises françaises si Aung n'était pas mieux traitée.
Sarkozy semble se positionner dans le cas d’un
éventuel changement de régime en Birmanie étant donné que les entreprises
françaises ont investi depuis des années dans la junte militaire birmane.
Se référant au fait que la France assurera la prochaine
présidence du G20, Sarkozy a dit qu’il avait le soutien de la Chine pour
discuter de la question monétaire au printemps prochain. En disant, « On
ne peut plus rester dans cette pagaille monétaire, » il a affirmé
qu’un nouveau système monétaire était indispensable, sans pour autant en
préciser la nature.