La ré-écriture de dernière minute par l'industrie nucléaire française du
programme électoral commun de 2012 du Parti socialiste (PS) et de son
partenaire Europe Ecologie- Les Verts (EELV) démasque la nature frauduleuse
du Parti EELV. En tant que complément politique du PS, parti du patronat, et
serviteur de l'impérialisme français, EELV est hostile aux principes de
sécurité écologique qu'ils prétendent représenter.
Le PS et EELV se préparent pour les élections législatives qui se
tiendront en juin 2012, juste après l'élection présidentielle d'avril-mai.
Le PS a promis à EELV entre 15 et 20 pour cent des 577 sièges que compte
l'Assemblée nationale, dont deux circonscriptions à Paris, l'une pour Cécile
Duflot, secrétaire nationale de EELV et l'autre pour le dignitaire du parti
Philippe Mérieux.
Le programme commun PS-EELV a été adopté par le bureau national du PS
dans l'après-midi du mardi 15 novembre. Mais comme l'écrit Le Monde
du 16 novembre: «L'accord signé dans l'après-midi évoquait 'la
reconversion à emplois constants de la filière de retraitement et de
fabrication du Mox' » Pourtant ce passage du programme voté à 33 voix contre
5 par le bureau national du PS, a été coupé dans la version du texte
distribuée à la presse.
MOX est un combustible nucléaire dérivé de déchets nucléaires recyclés et
utilisé dans de nombreuses centrales nucléaires françaises. Un récent
rapport de l'Autorité environnementale dit que Mox est « très dangereux. »,
ce qui est aussi l'avis de nombreux scientifiques,
Le 17 novembre, Médiapart a confirmé que le texte finalisé et signé par
la dirigeante de EELV, Cécile Duflot, et Martine Aubry, première secrétaire
du PS à 15h30 le 15 novembre a été réécrit lorsqu'il a été présenté à la
presse. Henry Proglio, PDG de EDF (Electricité de France) et Luc Oursel, PDG
de la compagnie d'énergie nucléaire Areva, avaient lourdement pesé sur la
réunion.
Areva, compagnie en grande partie publique, produit 95 pour cent du MOX
mondial, ce qui représente 1,7 milliards d'euros sur ses 9 milliards d'euros
de chiffre d'affaire. Si on cessait d'utiliser le MOX dans les réacteurs
français, sa production ne serait plus rentable.
Un participant a dit à Médiapart: «Nous avons tous reçu des textos en
plein BN, nous demandant de retirer le texte. On n'a pas réussi à se mettre
d'accord, donc on a retiré le paragraphe à la hussarde, après le vote. »
Médiapart cite un autre participant de la réunion du BN: «A la
fin du BN, au moment de voter, Stéphane Le Foll (lieutenant historique de
Hollande - ndlr) a fait irruption dans la salle en disant: "Attendez,
attendez, il faut enlever…" et Aubry l'a coupé en lui disant: "Oui, oui,
c'est bon, on vote'»
Un communiqué PS du 17 novembre a annoncé que les lignes manquantes
avaient été remises dans le texte mais sans pour autant annoncer un
calendrier de retrait progressif du MOX. « Chaque camp s'est donc déclaré
satisfait, » commente Le Monde. Néanmoins, les deux parties
continuent à débattre du contenu de l'accord qu'ils prétendent avoir conclu.
Le week-end dernier, le candidat PS François Hollande a dit qu'il ne
chercherait à appliquer que «les mesures qui me paraissent les plus
essentielles » dans l'accord PS-EELV. Cela signifie que le PS peut laisser
EELV écrire tout ce qu'il veut dans le programme, pour ensuite ignorer toute
mesure que le PS ne souhaite pas appliquer.
Depuis sa fondation en France en 1974, le mouvement des Verts a toujours
fonctionné comme un complément du PS, issu de la classe moyenne, et prônant
une approche individualiste et pro-capitaliste aux problèmes
environnementaux et niant le rôle fondamental des classes sociales en
politique. Il prétend que les problèmes de réchauffement de la planète et de
la pollution provoqués par les rouages destructeurs du système capitaliste
peuvent trouver une solution sans le renversement du capitalisme par la
classe ouvrière.
Le mouvement des Verts est depuis longtemps le refuge d'anciens radicaux,
dont Daniel Cohn- Bendit, le « Danny le Rouge » des révoltes étudiantes de
1968 en France et aujourd'hui politicien bourgeois en vue en Allemagne, est
l'exemple le plus connu.
Mais cette fois, la pose de EELV est allée à l'encontre des intérêts
fondamentaux de l'impérialisme français qui n'a pas attendu pour le rappeler
à l'ordre. Complément de la production d'armes nucléaires de la France,
cette fameuse « force de frappe » tant vantée par l'ancien président Charles
de Gaulle, l'industrie nucléaire stimule aussi l'influence internationale
déclinante de l'impérialisme français. Elle produit 75 pour cent de
l'électricité de la France, fournit des recettes de l'exportation, et
est profondément impliquée dans les opérations de l'impérialisme français
dans des régions, telle l'Afrique occidentale, ayant des dépôts importants
d'uranium et autres minerais clé.
Dans le contexte de la catastrophe nucléaire de Fukushima et la décision
par un certain nombre de pays européens d'annoncer la sortie du nucléaire,
l'industrie est de plus profondément hostile à tout changement de la
politique nucléaire française qui minerait sa position.
C'est à la candidate présidentielle d'EELV et ancienne juge d'instruction
Eva Joly qu'a incombé la tâche d'essayer de sauvegarder les apparences en
faisant montre d'indignation et en annulant sa participation à divers
meetings et événements. Elle a critiqué le PS pour « avoir cédé si
visiblement aux lobbies nucléaires. » ajoutant: «Il pèse désormais sur les
socialistes le soupçon d'être du bois dont on fait les marionnettes. »
En fait, il n'y a guère de place pour la « suspicion » sur ce point: Le
PS est bien connu pour être le parti de la bourgeoisie française et il est
clair qu'il prend ses ordres des grandes entreprises. A cet égard, comme
toujours, EELV a joué le rôle de partenaire junior du PS. C'est Eva Joly et
ses critiques du PS qui tiennent de la marionnette, même si c'est une
marionnette un bref instant vexée par les manières de l'opérateur qui tire
ses ficelles.
Joly n'a pas tardé à clairement laisser entendre qu'elle continuait à
soutenir Hollande et le PS. Interrogée sur RTL pour savoir si elle allait
appeler à voter pour Hollande au deuxième tour de l'élection présidentielle,
elle a d'abord refusé de répondre. Mais le 16 novembre, elle a indiqué
qu'elle appellerait à voter pour Hollande s'il était au second tour: «Je ne
me trompe pas de combat, je veux battre Nicolas Sarkozy. »
Joly a été choisie candidate présidentielle de 2012 de EELV car elle peut
se présenter comme n'étant pas salie par le long bilan d'accords pourris et
de politique droitière des Verts notamment lorsqu'ils étaient dans le
gouvernement de Gauche plurielle du PS (1997-2002) conduit par Lionel
Jospin.
Dans les années 1990, elle avait instruit des scandales politiques
impliquant les intérêts pétroliers de la France et le financement politique,
telle l'affaire Elf. Après un rapprochement peu concluant en 2007 avec
François Bayrou, dirigeant droitier du MoDem (Mouvement démocratique), elle
avait rejoint les Verts. En 2008, elle s'était présentée aux élections
européennes sur la liste de Daniel Cohn-Bendit et avait été élue au
parlement européen.
Avec les scandales politico-financiers à répétition impliquant des
politiciens en vue et qui se règlent devant les tribunaux aujourd'hui, elle
se présente en défenseur d'un gouvernement propre. Ceci est entièrement
faux. Son programme politique en rejoignant les Verts consistait en quelque
sorte à remélanger les cartes de la « gauche » bourgeoise en donnant à EELV
un nouveau visage, celui d'une deuxième agence de « gauche » bourgeoise de
l'impérialisme français.
Les Verts de France et Eva Joly ont soutenu l'intervention néo-coloniale
de l'OTAN en Libye, tout comme leurs homologues allemands. Ils n'ont pas
fait de déclaration pour s'opposer à la présence militaire de la France au
Mali, laquelle a pour but de protéger les opérations d'Areva dans les mines
d'uranium du Mali et du Niger.